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ROCK’N’HORL 2019 (accès libre)
La Patek Philippe très spéciale de l’homme qui a réussi à planter un obélisque égyptien au cœur de New York

Tout le monde a oublié le nom de Elbert Eli Farman, qui était consul général des Etats-Unis au Caire à la fin du XIXe siècle, mais c’est grâce à ce diplomate que les New-Yorkais ont le privilège de pouvoir tourner autour de l’obélisque égyptien que les autorités égyptiennes lui ont offert en 1877 pour être érigé au cœur de Central Park. Il fallait bien à ce « déménageur » une montre qui déménage. Elle ne manque pas d’originalité !


Personne ou presque ne connaissait cette Patek Philippe en forme de… sac à dos à l’ancienne, avec piolet, canne et canotier pour se protéger du soleil. Une vraie rareté, qui sera le lot n° 110 de la vente new-yorkaise de Christie’s, le 12 décembre. Estimée 50 000-100 000 dollars et datée de 1875, la montre de cet aventurier égyptomaniaque mérite le détour : c’est à la fois un hommage à la fantaisie de la manufacture Patek Philippe [qui semble avoir perdu le goût de ce genre de blague horlogère], un témoin de la passion des Occidentaux de la fin du XIXe siècle pour l’Égypte des pharaons et une amusante anecdote de l’histoire de New York – et, par ricochet de l’histoire de Londres et de Paris.


En 1877, le consul général des États-Unis au Caire, Elbert Eli Farman, intrigue auprès des autorités égyptiennes pour se faire offrir un obélisque, jusque-là disposé devant le temple de César à Alexandrie. Avec des arguments probablement sonnants et trébuchants, il convainc les Égyptiens de le laisser s’embarquer à bord d’un navire spécialement aménagé pour le transport de cette « aiguille de Cléopâtre » en granit rose [datée du XVe siècle avant notre ère, du temps de Thoutmôsis III, donc sans le moindre rapport avec Cléopâtre]. Cet obélisque faisait partie d’une paire : le premier obélisque jumeau avait été offert à la France en 1828 par le vice-roi d’Égypte Mehemet Ali, mais la France avait finalement préféré se faire expédier un obélisque du temple de Louxor – celui qui figure place de la Concorde, à Paris. Le second jumeau de cette paire avait été transporté non sans difficultés à Londres, où il est toujours installé au bord de la Tamise, sur Victoria Embarkment.

Il restait donc à Alexandrie cet obélisque dédaigné par les Français. Elbert Eli Farman (ci-dessous) le fait transporter à New York, à bord d’un bateau dont il faut découper la coque pour que l’« aiguille de Cléopatre » puisse y tenir, avant de redécouper la coque pour débarquer l’obélisque à New York, où il sera installé au cœur de Central Park en 1881 (ci-dessous). Saluons donc en Elbert E. Farman un pionnier de l’égyptomanie qui étreint les élites occidentales à la fin du XIXe siècle : ce diplomate était si féru d’aventures archéologiques qu’il avait commandé à la maison genevoise Patek Philippe une montre de poche extraordinaire. Son boîtier d’or et de platine n’est pas très volumineux (environ 25 mm pour 12 mm d’épaisseur), mais sa forme et unique dans les annales de l’horlogerie : on y reconnaît un sac à doc avec ses poches extérieures, sa couverture roulée sur le dessus, avec une canne et un piolet croisé sous le chapeau indispensable même à l’ombre des pyramides. Il manque que le fouet d’Indiana Jones à ce bijou mécanique, dûment répertorié dans les archives de Patek Philippe. C’est probablement une des montres les plus extraordinaires de l’année : il serait étonnant que le musée Patek Philippe la laisse échapper à ses collections, mais la passion des New-Yorkais pour leur (brève) histoire nous annonce un bras de fer qui peut en arriver à tordre le bras de Patek Philippe pour que cette montre reste à New York…


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