ENCHÈRES AUTOMNE 2012 #16 : On va passer aux choses sérieuses (l'offre Christie's au peigne fin)
Le 11 / 11 / 2012 à 22:13 Par Le sniper de Business Montres - 2814 mots
Si les enchérisseurs chinois sont repartis ou sont aux abonnés absents, les Européens et les Américains n'ont pas déserté les salles de vente genevoises...
Ils ont rendez-vous aujourd'hui chez Christie's pour une journée qui s'annonce mémorable. La fièvre monte au premier étage du quai des Bergues...
▶◀ CHRISTIES DANS LES NUAGESUne journée qui s'annonce fertile en records du monde...□□□ Côté Christie's, on a minimisé les risques et maximisé les atouts. En matière de …
Si les enchérisseurs chinois sont repartis ou sont aux abonnés absents, les Européens et les Américains n'ont pas déserté les salles de vente genevoises...
Ils ont rendez-vous aujourd'hui chez Christie's pour une journée qui s'annonce mémorable. La fièvre monte au premier étage du quai des Bergues...
▶◀ CHRISTIES DANS LES NUAGESUne journée qui s'annonce fertile en records du monde...□□□ Côté Christie's, on a minimisé les risques et maximisé les atouts. En matière de risques, on en a pris le moins possible, avec un catalogue court, bien ramassé en 318 lots, parmi lesquels on devrait compter les invendus sur les doigts des deux mains. Un catalogue conçu comme un chef-d'oeuvre hollywoodien, qui alterne les séquences fortes (les lots phares qui assurent le buzz international) et les phases de retour au calme, avec des lots plus accessibles qui pour ne créer aucune frustration. Les notices techniques ont été revues avec soin (ce qui n'empêche quelques bêtises de s'y glisser), certaines introductions [les plus stratégiques] étant même déléguées à une autorité comme Arnaud Tellier, l'ex-conservateur du Patek Philippe Museum. Les estimations ont été pesées au trébuchet, avec des prix d'appel qui font rêver et qui permettront de créer l'événement. L'ordre de passage a largement été décidé en fonction d'une scénographie aussi captivante que possible (sur place) et des décalages horaires sino-américains, ce qui explique la présence de lots-phares dès 10 heures du matin [pas trop tard pour l'Asie, pas top tôt pour l'Amérique !]. Les réseaux de la maison ont été mobilisés, sur une base internationale. On sait que Aurel Bacs – qui n'a pas ménagé sa peine depuis la rentrée de la fin août, a soigné sa voix grâce à une potion magique. Bref, la machine Christie's se lance sur une route soigneusement déminée, presque un boulevard au moment où le concurrent Sotheby's se cherche un destin dans la montre de collection... □□□ Pour les atouts, alors que se dessine ce qui pourrait ressembler à une nouvelle crise mondiale, on a misé sur des montres "sûres", des pièces qui font parler, des lots de "père de famille", capables de séduire les amateurs européens ou américains, sans trop miser sur des amateurs chinois qu'on savait versatiles [et on a bien fait : la vente Antiquorum de dimanche a permis de vérifier que les enchérisseurs chinois de ces dernières années étaient aux abonnés absents]. Le grands équilibres de ce catalogue sont très parlants : 91 Patek Philippe (29 %), 56 Rolex (18 %) et le reste atomisé en grandes marques qui n'alignent même pas une dizaine de montres (Breguet, Cartier, Audemars Piguet ou Vacheron Constantin). Pas trop de montres de poche non plus, pour éviter les "tunnels" peu mobilisateurs qui dispersent l'attention de la salle et des enchérisseurs en ligne : en revanche, on a soigné la sélection de ces montres, avec une exceptionnelle proposition de montres émaillées dont la qualité mérite les vitrines de grandes collections privées [même les amateurs de montres-bracelets pourraient succomber à leur charme] ou semi-publiques, comme le musée Patek Philippe. Bref, là encore, un travail d'orfèvre ajusté au millimètre et un catalogue dans lequel on se promène avec beaucoup de plaisir, qu'on soit on non décidé à entrer dans la danse pour les enchères... - Lot n° 218 : Patek Philippe Heures Universelles
□□□ Parmi les lots les plus intéressants, dont Business Montres a déjà présenté la plupart de ceux qui feront l'événement, quelques coups de projecteur, dans l'ordre d'apparition à l'écran... □ Après un tour de chauffe sur les quinze premiers lots, on commencera à tester la réactivité du marché avec trois Rolex Day-Date (lots n° 15 à 17), ces fameuses "Stella" qui semblent appeler à devenir la prochaine "bombe" sur le marché des enchères (Business Montres du 11 novembre). □ Suivent une série de Rolex, intéressantes à différents titres pour leur fraîcheur, une rareté qui n'est pas forcément synonyme de prix élevé (comme le fonds saphir du lot n° 21) ou une cote d'amour auprès des collectionneurs (comme le lot n° 22, un de ces chronographe pré-Daytona qui plaisent tant aux nouveaux collectionneurs). La séquence des Patek Philippe "accessibles" n'est qu'une mise en bouche avant le premier lot un peu consistant, la réf. 3450 du lot n° 33, un beau calendrier perpétuel de 1984, qui sera le premier lot à six chiffres (une montre quasi-neuve, presque pas portée, estimée à 140 000-220 000 CHF), qui sera immédiatement suivi de la première réf. 2499 de la dispersion, le lot n° 34, qui devrait se négocier autour des 250 000 CHF. □ On s'attaque ensuite aux "montres chinoises", déjà largement dévoilées et expliquées par Business Montres (voir nos liens en bas de page), dont ce lot n° 40 "attribué à Fragonard" (Business Montres du 27 septembre), dont chacun sait à présent qu'il ne doit rien à Fragonard, mais plutôt, selon nous, à une artiste comme Angelica Kauffmann, dont les oeuvres étaient souvent reprises par les émailleurs de l'époque (exemple ci-dessus). Comment le marché de ces montres peut-il réagir sans les enchérisseurs chinois ? D'une part, pour des pièces d'une telle qualité, placées aussi stratégiquement à une heure où Hong Kong, Taipeh et Shanghai sont toujours en état de veille, il n'est pas absurde de penser que les grands donneurs d'ordres asiatiques seront au rendez-vous : ils savent que ces pièces – inconnues et fresh to the market – ne repasseront pas en salle de sitôt. D'autre part, la qualité exceptionnelle de ces lots va toucher la sensibilité des amateurs européens, plus nombreux que d'habitude à se disputer ces lots émaillés et figuratifs... □ On aura donc dépassé le million sous le marteau au tournant de la quarantaine de lots, alors qu'il ne sera pas 11 heures du matin. Retour au calme (relatif) avec la dispersion d'une collection de montres récentes appartenant à un amateur d'art italien (lots n° 43 à 58), un homme de goût dont une première partie de la collection était déjà passée chez Christie's au printemps. Le retour des lots "à six chiffres" s'opère dès le n° 61 (Patek Philippe réf. 5970), un chronographe qui nous introduit dans une séquence très originale de l'histoire chronographique "à encre" (introduction d'Arnaud Tellier aux lots n° 62 à 67), dont on ne comprend pas que la pièce-phare, le lot n° 87, un chronographe encreur de Rieussec, qu'on peut considérer comme le "prototype" de ses créations suivantes, ne soit pas mieux mise en avant et placée avant les autres chronographes "encreurs" de cette séquence, qui risquent de pâtir de l'attente du Rieussec (ci-dessous)... □ On regrettera que la notice de l'équation du temps sectorielle de Breguet (lot n° 71, en haut de page) soit aussi fautive et ne concerne, précisément, que les équations "marchantes", même si cette montre ne porte qu'une signature assez douteuse de Breguet. Suivent quelques lots de transition (même un chronographe Rolex réf. 6238, lot n° 83, peut servir de "transition" chez Christie's), dont une montre de poche "Heures unvierselles" Agassiz (lot n° 84, dont on rappellera que la même est partie dimanche chez Antiquorum, pour 16 000 CHF), avant d'entamer un beau parcours Patek Philippe : joli lot n° 87 (montre de poche émaillée au décor de Suzanne Rohr, moins "puissante" qu'une proposition précédente vendue récemment à New York) et, surtout, record à prévoir avec la Patek Philippe "Observatoire JB Champion" – lot n° 88 dont Business Montres a parié qu'elle pouvait battre la "Miss Clapton" dont tout le monde parle (Business Montres du 5 octobre). On parle là de plusieurs millions de dollars – mais ce n'est pas une raison pour manquer l'introduction d'Arnaud Tellier... □ On reprendra son souffle avec les lots suivants (fin de la dispersion de la collection italienne, riche de quelques pépites relativement "accessibles), puis avec différentes séquences en montres de poche, en montres modernes et en bonnes références Rolex, dont plusieurs pourraient flirter avec les six chiffres. De quoi patienter jusqu'au lot n° 147, un délice d'amateur (une très élégante Patek Philippe réf. 2526 à cadran noir, estimée 80 000-120 000 CHF) qui devrait être disputé entre Italiens (ci-dessous), de même que les Patek Philippe suivantes, superbes, rares et chères, mais un peu éclipsées par le lot n° 151, autre pièce-phare de la matinée – autrement dit "Miss Clapton", une réf. 2499/100 en platine de la collection d'Eric Clapton, dont on attend aussi quelques millions sous le marteau et, si ne ce n'est déjà fait avec le lot n° 88, la chute du record du monde pour une montre-bracelet aux enchères, détenu depuis dix ans par Osvaldo Patrizzi... □ À la fin de la session de la matinée et à la moitié du catalogue, Christie's aura donc vraisemblablement dépassé les 10-12 millions de francs suisses, voire dépassé le total de ce que devraient réaliser ses deux concurrents à Genève. On reprendra en début d'après-midi donc selon le même scénario que le matin, avec une mise en bouches par une série de Day-Date "Stella" (lots n° 162 à 165 ; on y reviendra avec les lots n° 264 et 265, d'excellente facture), d'autres belles Rolex (dont une Prince en acier : lot n° 167, et une GMT d'anthologie : lot n° 168, malheureusement un peu trop patinée) et des Patek Philippe très intéressantes, qui nous amènent au lot n° 185, une Patek Philippe émaillée (décor tahitien : ci-dessous) tout-à-fait exceptionnelle, qui devrait logiquement atteindre les six chiffres., tout comme ses petites soeurs suivantes. On en sera au million avec le lot n° 188 (chronographe réf. 1579 en platine)... □ Il sera temps de refaire une promenade dans l'histoire avec la fin de la série des montres chinoises, dont on peu parier que la plus disputée sera le lot n° 194, une William Ilberry à décor émaillé signé Dupont, qui est sans doute la plus belle montre émaillée de cette session, sinon des sessions de ces dernières années (estimation : 70 000-100 00 CHF, qui devrait être largement dépassée). La délicatesse du trait de cet émailleur, et la distinction rarissime de ses couleurs (ci-dessous) font de cette montre un joyau qui peut tenter des musées, mais aussi des collectionneurs de montres-bracelets qui ne peuvent s'empêcher d'en subir la fascination. La ferveur de la salle sera à son comble, aux Bergues comme en ligne... □ On redescendra sur terre avec quelques pièces "de transition", comme le lot n° 217 (très belle Patek Philippe "curvex", qui devrait atteindre les 150 000 CHF tellement elle est séduisante), mais la montre "millionnaire" suivante est le lot n° 218, une "Heures Universelles" Patek Philippe réf. 1415 HU, émaillée et tarifiée entre 700 000 et 1,2 million de CHF – mignonne et très recherchée (image en milieu de page, ci-dessus), elle ne fait malheureusement que 31 mm de diamètre, ce qui est très menu ! □ Une des plus belles montres suivantes (difficile de trier avec la qualité de la sélection Christie's, qui doit être la plus belle de ces dernières années) sera à trouver au lot n° 279, un tourbillon Patek Philippe de qualité observatoire : architecture mécanique parfaite et esthétique irréprochable pour cette montre de poche, datée de 1951 et estimée 200 000-300 000 CHF. C'est exactement ce que les collectionneurs adorent... □ Il ne restera plus ensuite qu'à se laisser porter vers la fin de la dispersion, qui n'est autre qu'une remarquable Omega émaillée à décor Neptune (lot n° 318, estimé 60 000-100 000 CHF). Avec un clin d'oeil involontaire au lot n° 313 : au premier plan de cette collection des premiers catalogues d'Antiquorum (n° 1 d'octobre 1974 à octobre 1986), on aperçoit... la montre d'Ilbery ci-dessus ! Comme quoi l'horlogerie est un perpétuel recommencement : on espère qu'Osvaldo Patrizzi appréciera cet hommage (involontaire ?) d'Aurel Bacs à son prédécesseur...
D'AUTRES SÉQUENCES ENCHÈRES AUTOMNE 2012 (sans oublier les infos du Quotidien des Montres)...