LE ZAPPING DU MERCREDI (accès libre)
Est-il bien nécessaire de relancer la production de montres dont personne ne se soucie ?
Un zapping du mercredi très zappant et même un peu zappé pour cause de Baselcrash envahissant. Voici tout de même quelques bonnes, moins bonnes et autres actualités du milieu de la semaine.
L’HORLOGERIE REPREND
PROGRESSIVEMENT LE CHEMIN
DE SES MANUFACTURES (éditorial)
C’est bien reparti pour la réouverture progressive des manufactures horlogères, avec une priorité pour les ateliers de production, réaménagés à la hâte pour garantir un minimum de sécurité sanitaire (semi-équipes alternées, horaires aménagés pour les frontaliers, distanciation sociale, individualisation des postes de travail, masques, gel hydroalcoolique en abondance, désinfection régulière des locaux, etc.). Mesures élémentaires qui n’empêchent pas l’angoisse des employés de se manifester, d’où un taux d’absentéisme exceptionnel, le plus souvent pour cause d’arrêt maladie. Le prix à payer est une chute spectaculaire de la productivité, les ateliers tournant le plus souvent au ralenti, entre 30 % et 50 % du niveau habituel…
Certes, il est préférable de remettre au travail les équipes horlogères : les portes de Rolex s’ouvriront à nouveau lundi prochain, de même que celle de Patek Philippe et des grandes marques de référence genevoises. Reste une question lancinante : relancer les chaînes de production de montres, c’est très bien, mais à quels marchés sont destinées les montres ainsi produites ? Sur le continent européen comme en Europe, en Russie ou au Proche-Orient, les boutiques sont fermées : ce n’est donc pas là que ces montres seront utiles. Sur la plupart des marchés asiatiques, les boutiques viennent de rouvrir leurs portes [certains marchés viennent de les refermer], mais, après deux mois et demi de confinement et de fermeture, les stocks de pièces invendues sont à leur plus haut niveau et les ventes perdues pour l’annulation des festivités du Nouvel An chinois ne se rattraperont pas de sitôt. Tout au plus traite-t-on dans ces boutiques fraîchement rouvertes les livraisons de montres commandées avant le confinement ou les retours de SAV, plus quelques achats sporadiques. La quasi-totalité des amateurs de la planète n’ont pas besoin de montres neuves, hormis quelques modèles de quelques marques sur liste d’attente [ce ne sont pas les pièces dont on va pousser la production, au contraire !]. Les achats horlogers semblent au contraire se focaliser sur les pièces de collection et les montres vintage, marché sans rapport avec la reprise de la production en Suisse.
Rien qui justifie l’impérieuse nécessité de reprendre à tout-va la production de montres dont le besoin n’est pas urgent, alors cette production peut parfois mettre en danger la santé de milliers ou même de dizaines de milliers d'employés fraîchement déconfinés. Est-ce bien raisonnable ? La santé financière a ses raisons que la santé sanitaire ne connaît pas ! Le personnel avoue avoir la désagréable impression de n’être que de la « chair à canon » envoyée au casse-pipe pour protéger les dividendes des actionnaires. Ce sentiment d’inutilité actuelle de toute production est poignant. Les conséquences sociales de cette reprise anticipée pourraient saper la confiance des équipes envers leurs managers. Les risques de fronde ne cessent d’augmenter. On vous laisse réfléchir là-dessus…
❑❑❑❑ LA BANDE-SON DU JOUR : allons-y pour le classique des classiques, de rigueur en temps de confinement toujours plus insupportable. Ce sera I want to break free, de Queen (1984), dans la version officielle à près de 400 000 millions de vues. Les paroles aident à se déconfiner mentalement : « But I have to be sure / When I walk out that door / Oh how I want to be free, baby / Oh how I want to be free / Oh how I want to break free ». Rappelons que Business Montres a décidé de créer une play-list optimiste et nostalgique pour aider tout le monde à se déconfiner mentalement…
❑❑❑❑ LES CHAISES MUSICALES DU JOUR : Bertrand Savary, qui n’aura fait qu’un passage éclair chez Jacob & Co [marque qui affiche le fort taux de sièges éjectables de toute l’horlogerie suisse], débarque cette fois chez Arnold & Son, pour y prendre la direction générale (affaires commerciales comprises) en parallèle à la direction d'Angelus. Notons au passage que Arnold & Son et Angelus, qui dépendent de La Joux-Perret (groupe Citizen), a aussi un nouveau CEO, Jean-Claude Eggen, débarqué l’année dernière de la direction générale élargie du Swatch Group (ETA et Swatch).
❑❑❑❑ LE BLOG DU JOUR : un important travail d’analyse à propos des conséquences de l’actuelle chronapocalypse. C’est à ne pas manquer sur A Collected Man (Londres), qui s’interroge sur les vainqueurs de la sortie de crise chez les grandes marques (Rolex, Patek Philippe essentiellement) et chez les indépendants (FJ Journe, Rexhep Rexhepi, Greubel Forsey, etc.), mais aussi sur la « bulle du vintage » qui est en train de se regonfler sur le marché des enchères et des marchands spécialisés, notamment en ligne. Même en dépit de la gravité d’une crise économique sans précédent, la résilience de l’horlogerie ne semble mise en doute par personne. L’histoire dira si l’optimisme de ce mois d’avril était une bravade ou la leçon à tirer des crises précédentes…
❑❑❑❑ LA COUVERTURE DU JOUR : lui, c’est Kanye West, en couverture du dernier numéro de GQ, daté de mai (ci-dessous). À son poignet, une Ikepod Hemipode en or jaune, qu’on retrouve portée par lui dans diverses pages intérieures du magazine (ci-dessus). Cette montre Swiss Made était une des premières concept watches des années 1990 et elle passe aujourd’hui – la preuve ! – pour une des icônes du design horloger de la fin du XXe siècle…
❑❑❑❑ UN GESTE UTILE ? Avez-vous pensé à « liker » ou à signaler à votre communauté notre vidéo sur la fausse reprise et le « rebond » purement théorique de l’horlogerie suisse ? Pensez aussi à vous abonner et à faire s’abonner vos proches ! 0 % publicité, 100 % liberté : il revient à nos lecteurs de nous soutenir en favorisant la diffusion de nos interventions, qu’elles soient éditoriales (comme cette page du Quotidien des montres) ou audiovisuelles comme la vidéo ci-dessous…
❑❑❑❑ LE JEU-TEST DU JOUR : les bonnes réponses à précédent quiz de confinement (Business Montres du 14 avril) étaient : Franck Muller-B ; Cervantès et Shakespeare-E ; Blancpain-H. Voici maintenant trois nouvelles questions tirées d’un de nos précédents « Tour des montres en 80 tests ». Rendez-vous dans notre prochain numéro (jeudi) pour les bonnes réponses d’aujourd’hui !
❑ La maison Cartier a reçu pour la première fois le Poinçon de Genève… A) en 1990 pour la Pasha répétition minutes ? B) en 2008 pour le tourbillon Ballon bleu ? C) en 2010 pour la Rotonde Astrotourbillon ?
❑ le maître-horloger britannique George Daniels a créé au cours de sa vie… D) 25 montres mécaniques ? E) 250 montres mécaniques ? F) 2 500 montres mécaniques ?
❑ Une « roue à colonnes » est une roue dentée qui sert à… G) actionner le départ, l’arrêt et la remise à zéro d’un chronographe ? H) caler le fonctionnement séquentiel d’une aiguille des secondes ? I) remplacer le poussoir de remise à zéro sur les chronographes monopoussoir ?
❑❑❑❑ LA CITATION DU JOUR : « La peur a détruit plus de choses en ce monde que la joie n’en a créées » (Paul Morand). Une phrase utile pour comprendre qu’il n’y a qu’un seul remède à la peur : le courage…
❑❑❑❑ QUEL DESSIN DU JOUR ? « Je t’avais bien dit que nous assistions à un rebond horloger » – d »’après Jacques Faizant (séquence « Sérieux, s’abstenir » : Business Montres du 15 avril). C’est gentil et sans prétention, mais assez moqueur et révélateur du niveau de niaiserie atteint par les adeptes de l’inévitable « rebond » des ventes horlogères dès la sortie du confinement…
