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« FLY-BEC » : L’aiguille-faucon rétrograde de la nouvelle Urwerk 210

Ce qu'il y a de sympathique avec les magiciens de la nouvelle horlogerie, c'est qu'ils parviennent toujours à repousser les frontières de leur créativité. On aurait pu croire le concept Urwerk définitivement calé. Pas du tout : la nouvelle Urwerk 210 s'offre le luxe d'un retour à l'aiguille classique, sauf que cette "fly-bec" n'est pas classique du tout...   ••• Les lecteurs de Business Montres avaient compris que quelque chose de fort se préparait pour cette semaine : …


Ce qu'il y a de sympathique avec les magiciens de la nouvelle horlogerie, c'est qu'ils parviennent toujours à repousser les frontières de leur créativité. On aurait pu croire le concept Urwerk définitivement calé. Pas du tout : la nouvelle Urwerk 210 s'offre le luxe d'un retour à l'aiguille classique, sauf que cette "fly-bec" n'est pas classique du tout...

 

••• Les lecteurs de Business Montres avaient compris que quelque chose de fort se préparait pour cette semaine : l'annonce d'un indicateur d'efficacité dynamique (capacité énergétique pour recharger le barillet : Business Montres du 9 septembre) et d'un sélecteur de remontage personnalisé, ainsi que l'indice du Faucon maltais (Business Montres du 11 septembre), ont aiguisé les curiosités. La bonne surprise de la semaine est signée Felix Baumgartner et Martin Frei, les duettistes d'Urwerk, qui parviennent à repousser leurs limites créatives dans une nouvelle Urwerk 210, plus fluide (en dépit de lignes plus tendues) et plus portable que les précédentes séries.

••• Pourquoi le Faucon maltais ? À cause de l'aiguille des heures, qui remplace l'habituel "pointeau" qui indique l'heure sur le segment semi-circulaire qui affiche les minutes. Sa forme évoque celle d'un bec de faucon, et donc le film avec Bogart. Au-delà de l'esthétique, c'est dans la fonction rétrograde – d'où le "fly-bec" ! – que cette aiguille géante et tridimensionnelle fait son effet : alors que le tripode satellitaire des heures fait sa ronde au centre de la montre, affichant les "cubes" qui portent le chiffre des heures au fur et à mesure de leur avance, l'aiguille en bec de rapace accompagne l'heure de la première à la dernière minute de chaque heure, pour rétrograder en fin de course et revenir à son point de départ initial. La montre y gagne une nouvelle lisibilité instantanée : c'est la contribution personnelle de Felix Baumgartner et de Martin Frei à la mode néo-classique. Une aiguille, sinon rien ! ••• Parce que, comme on peut s'en douter, le reste n'a rien de vraiment traditionnel dans ce mouvement automatique. À commencer par l'indicateur d'efficacité dynamique, en haut à gauche du "cadran" [qui n'en est pas un] : ce n'est pas une réserve de marche, qui est logée en haut à droite du même "cadran". C'est plutôt une sorte d'affichage instantané (à deux heures près) de la dynamique du porteur de la montre : s'il a beaucoup bougé, l'aiguille passe dans le vert et indique que le barillet a bien été rechargé par une enviable dépense énergétique personnelle ; s'il n'a pas assez bougé, l'aiguille est passée dans le rouge – ce qui ne signifie pas que la réserve de marche est à sec, mais que le porteur devrait se remuer un peu pour en optimiser le chargement (ci-dessous). Rien à voir non plus avec le "capteur de couple" ou le "dynamomètre" chers à d'autres marques : là, c'est la manifestation la plus personnelle qui soit de la symbiose entre une montre et celui qui la porte...

••• Pour ce qui est du remontage de cette montre décidément dynamocentrée, une surprise au dos de la montre : un mécanisme de remontage personnalisé, qui permet de moduler le rendement de ce rechargement en fonction de l'activité du porteur. Prenons le cas d'un joggeur : l'intensité de ses mouvement garantissant un remontage rapide et très dynamique de la montre, on peut donc ralentir le rythme de ce remontage en tournant la molette sur le "Reduced" placé sur le fond. Dans le cas d'un pauvre journaliste qui ne bouge que ses doigts sur un clavier ou qui se contente de manipuler un souris pendant des heures, il sera nécessaire de placer le mouvement en mode "Full" pour en optimiser le remontage au moindre déplacement de la montre. Placée sur le "Stop", la molette de commande du rechargement personnalisé déconnecté le remontage automatique. Principe de fonctionnement de cette molette (ci-dessous) : la pneumatique. La position de la molette agit sur une turbine (montée sur rubis) dont les pales fonctionnent comme un "compresseur d’air", qui crée une résistance interne par friction d’air – ce qui est suffisant pour ralentir la masse du remontage automatique... ••• Ce remontage physio-ergonomique confirme la vocation particulièrement personnelle de cette montre, dont on dira qu'elle est en train d'apprendre l'homme à un mouvement horloger : l'esprit des machinateurs asservit donc la mécanique d'une montre au lieu d'en faire subir les contraintes à son porteur. C'est probablement la première fois qu'une montre témoigne aussi intimement – par sa modularité technique autant que par son affichage de la dépense énergétique – de sa relation avec celui qui la passe à son poignet. D'autres marques (De Bethune, Richard Mille) avaient approché ce problème, sans trouver cette solution d'optimisation énergétique individuelle. Gérer son énergie par le biais d'un objet du temps mécanique : un petit pas pour la montre, un pas de géant pour les rapports entre l'humain et l'horlogerie contemporaine...

••• Ces considérations thermodynamiques ne doivent pas oublier que cette Urwerk 210 est aussi (surtout ?) un des plus beaux symboles de ce que la nouvelle génération peut produire d'intéressant comme nouveau concept. Certes, ce type d'affichage satellitaire de l'heure plonge ses racines chez les mécaniciens du XVIIIe siècle, mais l'expression de son identité est on ne peut plus XXIe siècle, par le jeu de ses lignes, le rtyhme de ses décrochages et de ses cannelures, son décoration techno-industrielle librement assumée, son concept de remontage automatique régulé pneumatiquement, ses heures cubiques satellisées, sa nouvelle aiguille rétrograde carénée et montée avec un ressort spiral qui en assure le retour en fin de course (une double came coaxiale en forme d'étoile gère son parcours : en haut de page), ses matériaux innovants (titane, acier, Arcap, aluminium) et ses finitions irréprochables. ••• Seuls les vrais créateurs ont cette capacité à rêver plus loin, avec l'énergie de maintenir cette tension permanente vers des émotions plus fortes. Loin de se renier, Félix Baumgartner et Martin Frei persistent et signent. Cette urwerk 210 est sans doute la plus horlogère de leurs créations, mais c'est aussi la plus aboutie dans le respect de leur concept...

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