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HORLOGERIGOLADE (accès libre)
Huit indices infaillibles pour vérifier qu’un patron horloger est effectivement un nase

Vous avez confiance dans votre marque, vous aimez les montres qu’elle produit et vous estimez que vous formez avec vos collègues une excellente équipe pour porter haut sur les marchés le drapeau de votre maison. Le problème, c’est que vous avez des doutes sur votre manager. Est-il vraiment aussi mauvais que tout le monde le pense dans la maison ? Suivez les indices qu’il sème sur sa route…


Sans la moindre « langue de boîte » (cette délicieuse parole corporate), une approche critique des réalités managériales permet de définir un certain nombre de profils toxiques qui peuvent expliquer pourquoi l’industrie horlogère est à ce point plantée par des « barreurs de beau temps » désemparés dans les vents mauvais d’une crise qui a brutalement mis à nu leur incompétence. Huit profils se dessinent, mais on aurait pu en sélectionner une bonne douzaine d’autres. La ressource la plus rare sur le marché des montres, c’est la qualité des hommes qui pilotent les marques. Comment reconnaître les vrais nuls qui nous gouvernent ?

❑❑❑❑ IL PASSE SA JOURNÉE ENFERMÉ DANS SON BUREAU, avec des consultants qui ne parlent qu’anglais alors qu’ils sont tous français. Il les paye très cher pour se voir refiler des « recettes miracles » déjà publiées il y a deux ou trois ans par la Harvard Business Review. Apparemment, on se refile le contact de votre patron entre anciens d’HEC : une telle « vache à lait », ça se ménage. En attendant, les conseils de ses consultants ne ménagent les équipes de la maison, soumises au vent de folie de « chaises musicales » en cascade...

❑❑❑❑ IL VIT, IL MANGE ET IL DORT MÊME (DIT-ON) AVEC SON TABLEUR EXCEL, parce qu’il adore tout savoir du moindre centime dépensé par la marque, par crainte d’une surfacturation des achats de papier hygiénique ou d’une possible trace de corruption dans la commande des gommes et des crayons. Il ne se promène qu’avec ses états comptables à la main et il a toujours l'air de douter de la véracité des chiffres dont il ne dispose pas. Il se croit bon alors qu’il n’est que très mauvais : il n’aimerait rien tant que de voir tous les cadres avec les mêmes tableaux Excel à la main ! Il soupçonne très vite d’incompétence ceux qui osent pondérer les données brutes par leur expérience du terrain. Aujourd’hui dans la montre, mais hier dans la cosmétique et demain dans le boulon de douze ou dans le pneumatique, il ne comprend rien à l’identité de sa marque, ni à la culture horlogère, mais ses actionnaires semblent se satisfaire de la passion pour les Big Data de ce calamiteux destructeur de valeur – ils considèrent même ce petit boutiquier comme un « haut potentiel »…

❑❑❑❑ SON MEILLEUR COPAIN EST JEAN-DANIEL PASCHE, le président de la FH, avec lequel il déjeune régulièrement pour comprendre les évolutions du marché. Ce qui peut expliquer à quel point la stratégie de la marque est totalement déconnante, que les ventes sont en berne sur tous les marchés et que la direction n’a pas cessé de faire les mauvais choix aux mauvais moments. C’est ce qui explique que vous fréquentiez aussi assidûment les chasseurs de têtes…

❑❑❑❑ IL ACHÈTE TRÈS CHER LES COUVERTURES DES MÉDIAS PERROQUETS qui le couronnent de lauriers d’autant plus suspects qu’ils sont financés par le budget communication de la marque. Ce n’est pas très important, puisque ces magazines ont perdu tous leurs lecteurs, mais, vu de Paris, de Zurich, de New York ou de Shanghai, ça peut impressionner les actionnaires et quelques blogueurs exotiques. N’ajoutez pas à son chagrin en lui faisant remarquer à quel point c’est nul : ses copains CEO se moquent de lui [ils connaissent déjà la combine et le prix d’achat de la page] et sa femme a trouvé qu’il faisait vieux…

❑❑❑❑ IL EST NUL, IL EN A CONSCIENCE, MAIS IL S’EN TIRE en ne faisant plus que la « politique » au sein du conseil d’administration du groupe, en jouant au golf – « par hasard », est-on prié de croire – dans le même club que les actionnaires, en les croisant (toujours par hasard) à Megève ou à Dubaï et en louant des figurants pour faire la queue devant ses boutiques quand les grands pontes du groupe font escale à Hong Kong. Ses résultats ne sont pas mirobolants, mais son activité diplomatique vibrionnante donne au moins le sentiment qu’il se « bouge » – même si ce sont les meilleurs éléments de son équipe qui se « bougent » en faisant jouer la mobilité interne. Les déstockeurs de montres invendues font des fortunes avec lui, mais il a recruté à prix d’or de géniaux cosméticiens de la finance pour masquer la médiocrité de ses résultats. Le soir, dans sa chambre d’hôtel à l’autre bout du monde, il a honte de son imposture, mais il sait se remonter le moral avec un réconfort poudré dans le septum nasal…

❑❑❑❑ IL A FAIT INSTALLER UN LOGICIEL DE FLICAGE pour repérer ceux de son équipe qui appellent Business Montres ou qui envoient des mails à la rédaction. Heureusement, tout le monde le sait dans la maison et vous utilisez le portable de votre fille pour donner quelques informations « sensibles » à Business Montres, en utilisant une boîte anonyme @gmail pour correspondre avec la seule médiafacture horlogère 100 % indépendante de toute publicité des marques…

❑❑❑❑ IL NE SUPPORTE PAS LA MOINDRE CONTRADICTION et il « liquide » sans états d’âme tous ceux qui émettent le moindre doute sur la pertinence de ses choix stratégiques ou de ses opérations commerciales.  Ce « loup solitaire » a trop souffert, dans le passé, de n’être qu’un rebelle pour tolérer la moindre décision indépendante de ses collaborateurs. Indéniable gros bosseur, son tout-à-l’égo managérial est celui d’un chef de commando toujours sur le qui-vive, pas d’un chef d’équipe soucieux de faire avancer d’une même pas toutes les personnalités de son management. Il en devient très vite fatigant, usant et démobilisant. Hystérique face à la contradiction, c’est dans les situations de crise et de tensions qu’il se révèle totalement toxique…

❑❑❑❑ IL SE PREND POUR LE SAUVEUR, SINON POUR LE MESSIE qui va ressusciter la manufacture, redynamiser son management, reconquérir les marchés et redorer son blason. Infatigable, il s’agite de sept heures du matin à vingt-et-une heures, toujours disponible pour aider ses cadres et pour leur éviter ces erreurs qui les auraient pourtant aidé à progresser. En fait, après quelques semaines de coexistence avec ce « messie », on comprend vite que son altruisme apparent et sa disponibilité affichée ne sont que des moyens d’affirmer son pouvoir et de contrôler son influence. Courage, fuyons tant de sollicitation !

Inutile de préciser que toute ressemblance entre ces portraits robots et tel ou tel autre « patron » de marque ne serait qu’une coïncidence fortuite : inutile de convoquer vos avocats si, par quelque funeste hasard, vous vous seriez reconnu(e) dans ces nano-fables horlogères – on est ici dans la satire moliéresque et dans l’esprit de M. de La Fontaine, pas dans la description clinique des mauvaises habitudes du management horloger. Maintenant, si vos employés vous ont reconnu, sans doute à la faveur d’un malentendu, c’est peut-être parce que vous prêtez parfois le flan à la critique : le cas échéant et en cas d’aggravation des symptômes, n’hésitez pas consulter !


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