INDÉPENDANTS : La manufacture Cabestan s'invente un nouveau destin
Le 12 / 04 / 2013 à 13:36 Par Le sniper de Business Montres - 1778 mots
Un climat économique international de plus en plus tendu ne cesse de rebattre les cartes sur le marché des montres...
Alors que les grandes marques et les groupes se font toujours plus dominants, les indépendants de la nouvelle horlogerie doivent se repositionner en recadrant leur offre...
▶ CABESTAN, ACTE IIIDes nouveaux actionnaires pour Cabestan... ◉◉◉◉◉ Travaillés dès le début 2004 par l'équipe de Jean-François Ruchonnet, qui était alors le gourou des …
Un climat économique international de plus en plus tendu ne cesse de rebattre les cartes sur le marché des montres...
Alors que les grandes marques et les groupes se font toujours plus dominants, les indépendants de la nouvelle horlogerie doivent se repositionner en recadrant leur offre...
▶ CABESTAN, ACTE IIIDes nouveaux actionnaires pour Cabestan... ◉◉◉◉◉ Travaillés dès le début 2004 par l'équipe de Jean-François Ruchonnet, qui était alors le gourou des images de synthèse dans le village horloger, les premiers dessins du concept Cabestan ont commencé à circuler à l'automne 2004, en emportant l'enthousiasme inconditionnel de tous ceux qui les découvraient (dont Business Montres, qui faisait également ses premiers pas dans les médias horlogers). Le tsunami de la « nouvelle génération » et de ses concept watches toutes plus disruptives les unes que les autres n'avait pas encore affolé les boussoles d'une horlogerie pas encore entrée dans les années 2000. Ces idées de tourbillon à rouages verticaux, de fusée-chaîne, d'affichage par rouleaux et de remontage par winch n'avaient pas encore été recopiées par tout le monde. D'où le succès initial de la montre, restée virtuelle bien après sa révélation par Business Montres en octobre 2005 (c'était dans notre numéro 22, en page 8). ◉◉◉◉◉ Profitons-en pour rappeler le rôle-moteur de Vianney Halter dans la mise au point de cette mécanique innovante – qui avait été proposé par Jean-François Ruchonnet à des marques comme Cartier, Breguet, TAG Heuer, Hublot ou Panerai, qui avaient toutes refusé de prendre ce risque, même pour leurs collections plus ou moins nautiques. Une seule marque se laissera tenter par une collection capsule en co-branding avec Cabestan : toujours aussi rebelle, Yvan Arpa commandera une Titanic-DNA by Cabestan, rouillée à souhait, avec une étonnante décoration tubulaire (seuls trois ou quatre pièces seront mises sur le marché : ci-dessus). Pour se faire une idée de l'ambiance créative de ces années 2000, on relira avec amusement notre article du 20 avril 2008 dans Worldtempus : « Les horlogers ont-ils fumé la moquette ? »... ◉◉◉◉◉ Depuis cette révélation par Business Montres, complétée en janvier 2006 par la présentation des premières images publiques de la montre (en page 2 de notre n° 29), les lecteurs les plus anciens ont suivi les multiples épisodes de la saga Cabestan. L'arrivée sur le marché en 2007 (Business Montres du 24 juin 2007 : intéressant portrait de Jean-François Ruchonnet), le rachat de Cabestan par un nouvel actionnaire, Timothy Bovard (révélation Business Montres du 3 septembre 2009), le culot de Jean-François Ruchonnet (ci-dessus, à droite, avec Timothy Bovard) pour se faire attribuer le contrat avec Ferrari, au nez et à la barbe d'un Nicolas Hayek furieux d'être ainsi doublé dans la dernière ligne droite (révélation Business Montres du 5 mai 2010), l'excellent travail de déverminage et de mise au point définitive du mouvement par un maître-horloger de génie, Eric Coudray, récemment exfiltré de Jaeger-LeCoultre (informations du 14 mars 2010), la visite du prince Albert de Monaco dans la vallée de Joux, spécialement pour voir la manufacture Cabestan (révélation Business Montres du 24 mai 2010). Et ainsi de suite, jusqu'à ce que les effets conjugués de la crise entament cette dynamique et créent une situation tendue qui appelait un passage de témoin entre investisseurs. ◉◉◉◉◉ Récemment, au salon GTE qui se tenait pendant la Wonder Week de janvier 2013, Eric Coudray nous avait prouvé qu'il n'avait pas perdu en nous présentant une Cabestan« Génération 2 bien lunée », sur quasiment la même base mécanique (ci-dessus), mais avec une superbe phases de lune (révélation Business Montres du 28 janvier 2013). Sur le stand de Cabestan, les initiés avaient pu faire connaissance d'un certain Lionel Betoux, ancien de chez Rolex (comme chef de projet), fondateur avec son associé Emmanuel Schopfer du cabinet Involve, spécialiste de l'engineering et de l'optimisation des process industriels. Timothy Bovard, qui n'avait cessé de remettre de l'ordre dans l'entreprise, en développant l'outil manufacture (achat d'une machine cinq axes) et en restructurant l'équipe autour d'Eric Coudray et sans jamais cesser d'aller prospecter sur le terrain, avait différentes bonnes raisons de passer de longues heures avec Lionel Bétoux au GTE. Dont celle de lui proposer une mission de réorganisation, qui s'est étendue à un partenariat qui vient de se conclure par une reprise totale de l'entreprise, capital compris. Lionel Betoux, Emmanuel Schopfer et Involve sont désormais les propriétaires de Cabestan, mais ils ont tenu à intégrer Eric Coudray dans leur tour de table : l'ancien électron libre de la manufacture Jaeger-LeCoultre en actionnaire, à peine moins hirsute et non-conformistement vêtu qu'avant (ci-dessous), ses copains risquent de le plus le reconnaître ! ◉◉◉◉◉ Objectif de cette nouvelle équipe de management : continuer ! Evidemment en se donnant les moyens de ses ambitions, en allant plus loin et en frappant plus fort, notamment sur le plan de la logistique de production (rationalisation et achats de nouvelles machines). Le rachat ayant été finalisé trop tard, la marque ne sera pas à Baselworld, sinon de façon informelle, pour y rencontrer ses détaillants et leur présenter les évolutions en préparation (nouveaux modèles et nouveau design, sur des bases industrielles totalement différentes, donc à des prix plus en phase avec les capacités du marché). Il s'agit notamment de pouvoir agréger au concept Cabestan des complications autre que les phases de lune, en disposant d'une gamme cohérente de montres et de calibres, du mouvement automatique au tourbillon – le tout dans le respect de la lettre et de l'« esprit manufacture ». Une nouvelle directrice marketing-communication a été recrutée, ainsi qu'un responsable commercial. Cabestan est de retour, avec des pointures aux commandes et beaucoup de réalisme dans l'approche de marchés devenus périlleux pour les marques indépendantes... ◉◉◉◉◉ Les principaux écueils de cette relance ne sont un secret pour personne : d'abord, les prix, actuellement totalement hors marché si on s'en tient à la valeur catalogue. Ensuite, la communication, inexistante sur les canaux traditionnels ou sur les réseaux sociaux, ce qui n'a pas aidé la marque à consolider son image pionnière, alors que les maisons concurrentes des différentes niches de la création indépendante assuraient leur survie et rivalisant d'adresse dans le branding et le marketing. Enfin, l'usure du concept initial (tourbillon vertical), aujourd'hui presque banalisé, de huit à dix marques pratiquant actuellement le style fusée-chaîne [ce qui fait beaucoup pour marquer sa différence] et au moins autant l'affichage des heures par rouleaux. Ajoutons à ces trois facteurs critiques propres à Cabestan un macro-facteur tout aussi fatal et dramatique : la déliquescence de la distribution indépendante, étranglée par les grandes marques et par les groupes, donc de moins en moins disposée à « mouiller sa chemise » pour des créateurs encore émergents et sans soutien promotionnel. D'AUTRES SÉQUENCES RÉCENTES DE L'ACTUALITÉDES MARQUES, DES MONTRES ET DE CEUX QUI LES FONT...