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SANS FILTRE #21 (accès libre)
Les dix plus énormes stupidités horlogères proférées pendant le confinement (première partie)

On a confiné les humains, mais malheureusement pas les crétins ! Le coronavirus a libéré la parole, plutôt pour le pire que pour le meilleur, notamment sur les réseaux sociaux de l’horlogerie où les uns et les autres ont pu se lancer dans un étourdissant concours de médiocrités auto-satisfaites. Il faudra se souvenir de quelques-unes de ces perles notées à la volée dans la première partie de ce mausolée fraîchement déconfiné…


❏ L’ÉGAREMENT STRATÉGIQUE : « C’est une crisette horlogère »

Même pas mal ! Il ne s’est rien passé ou si peu ! Les ravis de la crèche vous jurent que l’horlogerie ne perdra en 2020 que 10 % ou au pire 15 % de son chiffre d’affaires : comme ils n’avaient pas vu venir le moindre danger, pas plus qu’ils n’avaient compris les crises précédentes, on peut leur faire confiance ! Des experts plus réalistes tablent sur 20 %. Sachant que la précédente crise – celle des subprimes, en 2008-2009, qui était bien moins grave que la chronapocalypse – avait fait perdre 25 % de son activité à l’horlogerie, comment pourrait-on éviter cette année une franche récession alors que la chronapocalypse est bien plus sévère, structurelle et même existentielle ? Tout s’est trouvé durablement stoppé, les usines, les flux logistiques et les boutiques, sur tous les marchés. Bien pire qu’en 2008 ! On sera donc au-delà des 25 %... Le retour à la « normale » est pour le moins problématique : il serait plus réaliste d’anticiper un effondrement au-delà des 30 %, voire des 40 %, peut-être même pas loin des 50 % si le dernier trimestre n'opère pas des miracles. Dès le mois de janvier, Business Montres avait pronostiqué une régression à ce qu’avait été l’activité horlogère en 1940, première année de la Seconde Guerre mondiale – huit décennies dans la vue…

❏ LA COQUILLE TYPOGRAPHIQUE : « il faut miser sur un rebond rapide »

« V », « U » ou « L » ? Les adeptes du rebond en « V » sont les mêmes qui refusaient d’envisager, hier matin [c’est-à-dire en janvier, en février ou en mars !], la moindre « crise horlogère » et qui estimait qu’il n’y avait pas encore la moindre raison de s’alarmer. Ces menteurs croient dur comme fer – croix de bois, croix de fer : comme ils mentent, c’est nous qu’ils envoient en enfer ! – à une reprise aussi vertigineuse que la chute de la chronapocalypse que nous venons de vivre. Sauf que d’autres tablent sur un rebond en « U », avec un lent rétablissement après déconfinement. C’est curieux, mais les horlogers sont les seuls à croire qu’ils peuvent échapper à la désolation, alors que tous les économistes, au vu d’une planète dévastée par la crise sanitaire, anticipent une récession économique digne de celle des années 1930 – ce qui se traduirait par une non-reprise en « L ». On ne voit pas comment l’économie chinoise pourrait se relancer au milieu des ruines des économies développées et rallumer un moteur capable de faire repartir les économies développées. Désinformations et fake news sur la « reprise » chinoise se multiplient, sur fond d’affrontements géopolitiques qui dépassent largement les petits enjeux d’un redémarrage de l’économie des montres en Suisse. On n’a plus les bons chiffres, et encore moins les bonnes lettres…

❏ LA PENSÉE MAGIQUE : « Le revenge shopping rattrapera tout »

La « ruée vers l’heure » promise par les benêts du fond de la classe a de quoi faire rêver, mais on se demande bien pourquoi les consommateurs chinois – qui ont d’autres préoccupations en tête – se rueraient précisément sur des montres suisses que l’effondrement du yuan rend chaque jour plus coûteuses ! Sur le seul marché d’importance mondiale qui n’est pas confiné [la Chine], le hard luxury horloger n’est en rien concerné par la réactivation du commerce de nécessité et il sera probablement parmi les derniers à retrouver son tonus. Ce revenge shopping, c’est le miroir aux alouettes capable d’éblouir ceux qui y croient et qui se contentent des informations de troisième main propagées par des blogueuses en cheville avec les caciques locaux du Parti communiste chinois [lequel a tellement à se faire pardonner et tellement de choses à masquer qu’il interdit tout visiteur étranger dans ses villes]. Tout au plus a-t-on compilé sur une première semaine de réouverture des boutiques les commandes en ligne et les SAV d’un trimestre d’inactivité forcée : la seule coordination locale des mêmes éléments de langage par les mêmes réseaux sociaux est cousue de fil blanc. Plutôt que d’évoquer ce revenge spending, on ferait mieux de parler de scavenge spending (un tropisme charognard, au sens de scavenge pour « faire les poubelles »)…

❏ L’ENFUMAGE STATISTIQUE : « Un très bon début d’année »

Quelle belle courbe ! Ou, plutôt, quelle magnifique absence de courbe ! Une vaguelette tout au plus, exactement comme la « grippette » promise en début de crise sanitaire. Rien à faire : en pleine chronapocalypse, les statistiques horlogères font la planche, presque à l’horizontale (schéma officiel de la fameuse moyenne mobile ci-dessous : on ne va quand même pas s’inquiéter pour cette vaguelette). Des courbes bien abritées sous le parapluie de Jean-Daniel Pasche, le président de la FH suisse, qui nous annonçait à la mi-février un « très bon début d’année » avant d’opter à la mi-mars pour le « début d’une baisse marquée » et annoncer, à la mi-avril, une « forte baisse avant une détérioration marquée » – mais ce n’était que « probable », pas certain. Avec des capitaines de pédalo comme ce Sleeping Pasche, ce sont les autres qui rament : comprenez les centaines d’entrepreneurs de la branche horlogère qui ne savent pas comme ils passeront l’été comme les milliers, voire les dizaines de milliers d’employés qui travaillent dans et pour l’horlogerie à travers le monde...

❏❏❏❏ À SUIVRE

Les dix plus énormes stupidités horlogères proférées pendant le confinement (deuxième partie)


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