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NE SUIVEZ PAS LE GUIDE : « Genève, berceau de la haute horlogerie » (une promenade officielle !)

Les autorités genevoises adorent vanter « leur » horlogerie – généralement pour s'attribuer des mérites qu'elles n'ont pas. Agir pour l'horlogerie, c'est une autre paire de manches ! Voici un bon exemple de la manière assez nulle dont la Ville vante son horlogerie et son patrimoine horloger : partons en visite guidée...  ▶▶▶ PROMENADE HORLOGÈREÀ la recherche des secrets du patrimoine horloger de Genève... ◉◉◉◉ Excellente idée de promotion, cette visite guidée …


Les autorités genevoises adorent vanter « leur » horlogerie – généralement pour s'attribuer des mérites qu'elles n'ont pas. Agir pour l'horlogerie, c'est une autre paire de manches ! Voici un bon exemple de la manière assez nulle dont la Ville vante son horlogerie et son patrimoine horloger : partons en visite guidée...

 
 PROMENADE HORLOGÈRE
À la recherche des secrets du patrimoine horloger de Genève...
 
◉◉ Excellente idée de promotion, cette visite guidée de « Genève, berceau de la haute horlogerie » ! Du moins en théorie : deux heures de parcours horloger (15 CHF le ticket, uniquement le vendredi après-midi) pour découvrir une ville qui affirme sa fierté de métropole horlogère mondiale, c'est bien la moindre des choses. Sur le site (officiel) de Genève Tourisme, la proposition est alléchante : « L’identité d’une ville racontée au travers d’un art de précision. Véritable itinéraire initiatique, cette visite guidée au cœur de Genève vous plonge dans 500 ans d’histoire de la Haute Horlogerie. Un guide professionnel passionné par sa ville vous livrera les secrets du patrimoine horloger de Genève. Incroyable, en quelques rues, toute l’histoire est là ! D’ailleurs à Genève, il suffit de lever les yeux pour connaître l’heure. De la célèbre Horloge fleurie à des lieux moins connus mais tout aussi emblématiques, vous découvrirez un savoir-faire unique au monde qui a forgé la réputation de la ville. Et bien entendu, ce tour vous fera rêver en passant par la célèbre Rue du Rhône et ses innombrables boutiques des plus grandes marques ». Comment résister ?
 
◉◉◉◉ Rendez-vous, donc, au siège de Genève Tourisme, rue du Mont-Blanc, pour la promenade. Très disert et chaleureux, le guide – un professionnel des visites guidées organisées par la ville – nous entraîne d'abord à la découverte des cabinotiers, du moins des immeubles qui les abritaient. Très vite, on découvre que cette « promenade » est plus le sous-produit des visites guidées historiques qu'un module réellement et pleinement horloger. Pendant deux heures (120 minutes), dans une atmosphère on peut plus convivale et sympathique, mais décidément très peu orientée sur la culture horlogère, on ne va guère consacrer qu'une vingtaine de minutes à vraiment parler de « Genève, berceau de la haute horlogerie », presque toujours par raccroc avec d'autres présentations de sites touristiques du centre ville. Si on parle des cabinotiers, c'est pour apercevoir leurs fenêtres, d'en bas, sans trop comprendre ce qu'on pouvait bien y faire. Si on parle de l'ancienne « fabrique », ce complexe horlo-industriel qui faisait de Genève une immense manufacture atomisée, c'est à propos des multiples « machines » qui l'alimentaient en énergie et pour reparler du Jet d'eau, du pont de la Machine ou du Bâtiment des forces motrices...
 
◉◉◉◉ On ne peut pas demander à un guide non spécialisé une trop grande précision historique, mais les approximations sur les rapports entre Calvin, les guerres de Religion ou la Révocation de l'Edit de Nantes et la naissance de l'horlogerie genevoise se multiplient. L'horlogerie existait en France et en Allemagne bien avant que les réfugiés huguenots ne l'introduisent à Genève, de même que l'école française d'émaillerie est antérieure d'un siècle à son évocation genevoise ! Passons. Un station devant les vitrines extrérieures du musée Vacheron Constantin ne nous permet pas de comprendre à quoi peuvent bien servir les outils présentés, de même qu'une station devant la tour de l'Horloge voisine ignore totalement le cadran solaire apposé sur sa façade (la méridienne de la place Philippe Berthellier) : une question au sujet des inscriptions gravées dans la pierre autour de cette méridienne en forme de 8 restera sans réponse (ci-dessous). On notera d'ailleurs que, pendant deux heures, on ne verra pas le moindre cadran solaire genevois, alors que la ville en compte plusieurs dizaines (exemples proches du circuit de la promenade : en cartouche, en haut de la page ou en bas de la page) !
 
 
◉◉ Encore une fois, ce n'est pas un problème de guide, mais de concept de visite : l'Office du tourisme genevois survend cette promenade en la traitant par-dessus la jambe, comme l'horlogerie l'est trop souvent dans ses rapports avec la ville ou le canton. Tant sur le plan historique que topographique, il y aurait tant à raconter sur la Genève horlogère que la frustration s'installe très vite. Comment et pourquoi Genève a pu devenir une référence mondiale de l'horlogerie ne sera pas expliqué au cours de la visite, qui se contentera d'effleurer le sujet place du Molard, dans les anciennes halles. Rue du Rhône, une allusion au tourbillon devant les vitrines Breguet [qui n'est pas vraiment un grand Genevois] et une allusion au sertissage devant les vitrines Piaget [avec une interrogation sur le prix des montres], c'est assez navrant. Manque de chance, les guillocheurs de la boutique Breguet – visibles dans les vitrines extérieures – ne sont pas à l'oeuvre à l'heure de la visite !
 
◉◉◉ On passera sur les approximations concernant les « rouages à ressort » (?) ou le fond saphir rebaptisé « lunette ». Seul point positif du parcours : la (re)découverte de l'horloge animée du passage voisin, récemment restaurée. Et, bien entendu, les précisions historiques qui concernent l'évolution de la ville, et non son destin horloger. Ensuite, il est temps de gagner l'horloge fleurie, point final de la visite : n'importe quel visiteur de la ville en aurait trouvé le chemin et l'explication sur son propre guide touristique (image en haut de la page). Le secret des cabinotiers et des cadrans solaires genevois restera bien caché...
 
◉◉ Deux heures pour un bilan explicatif aussi mince, c'est d'autant plus long que la valeur ajoutée horlogère doit tenir sur deux feuilles A4 au maximum. On pourrait également dire que c'est un peu court comme « itinéraire initiatique »... Manifestement, on a créé ce module horloger à la va-vite, avec une documentation approximative et en bricolant, sinon en improvisant un circuit à partir des parcours historiques généraux, nettement plus consistants. Du grand « ni fait, ni à faire », aux limites de l'arnaque pour les gogos qui ont payé 15 CHF une prestation aussi incertaine [la photo ci-dessous, affichée sur le site, est particulièrment trompeuse et mensongère, puisqu'on n'en verra rien]. N'importe quel groupe de touristes chinois en verrait plus de la Genève horlogère avec son guide, sans pour autant descendre de son autocar...
 
 
◉◉ Une telle visite guidée est surtout très révélatrice du manque de considération réelle que la ville porte à son horlogerie comme à son histoire horlogère : nous n'aurons pas la cruauté de rappeler que Genève n'a toujours pas de musée horloger et qu'on n'y trouve pas une seule rue, pas même ruelle ni le plus modeste passage qui rende hommage à un de ses horlogers, à son passé horloger ou à une seule de ses marques historiques [le pont Hans-Wilsdorf est une initiative privée financée sur fonds privés !]. Bien mieux qu'une promenade guidée dans « Genève, berceau de la haute horlogerie », c'est un aveu d'incommunicabilité entre la ville et l'activité qui porte le mieux son image internationale. On rêvait de surprendre les secrets d'un mariage d'amour : on comprend mieux les coulisses d'un désamour qui tourne au divorce pour incompatibilité d'humeur ! Dommage...
 
 
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