VENDREDI (accès libre) : Le Sniper baigne dans les concepts pré-Baselworld
Qui a dit que le rétro-classique avait tué les concepts ? Sans doute un journaliste qui ne connaît pas son sujet... Baselworld 2013, c'est le retour des idées horlogères un peu-beaucoup-à la folie délirantes [rayez les mentions inutiles]. Heures-minutes petite seconde, rhabillez-vous ! CETTE SEMAINE, LE SNIPER A... ❏❏❏ additionné...deux dessins qui pourraient n'en …
Qui a dit que le rétro-classique avait tué les concepts ? Sans doute un journaliste qui ne connaît pas son sujet...
Baselworld 2013, c'est le retour des idées horlogères un peu-beaucoup-à la folie délirantes [rayez les mentions inutiles]. Heures-minutes petite seconde, rhabillez-vous !
CETTE SEMAINE, LE SNIPER A... 
❏❏❏ additionné...deux dessins qui pourraient n'en former qu'un... Les lecteurs se souviennent de nos interrogations sur un concept alti-barométrique qui semblait vouloir mettre la pression sur Baselworld 2013 (Business Montres du 13 mars). Si on y ajoute un second dessin, déniché par des voies détournées (cartouche en haut de page), on obtient la confirmation qu'il s'agit bien d'une montre (présence de l'aiguille) et d'un concept de montre apparemment météorologique (image sous le chapeau de la page), qui peut afficher les évolutions de la météo (pictogrammes et hectopascals) tout en tenant compte de l'altitude. Pas d'explication pour la présence des graduations au centre du cadran... ❏❏❏ découvert...un des secrets les mieux gardés de Baselworld... Lieu d'atterrissage de l'ovni (ci-dessous) : Hall 1. Marque : non communicable. Nature : incommunicable, mais apparemment compliquée, avec une combinaison d'affichages numériques par rouleaux [heures ? minutes ? secondes ? date ? réserve de marche ?] et de ce qui semble être des barillets empilés. Jacob & Co Quenttin bis, Corum Di-Bridge [Di pour Digital] ou nouvelle Bell & Ross expérimentalo-instrumentale ? 
❏❏❏ tenté...de comprendre ce qui pouvait se cacher derrière cette complexité mécanique... S'il est parfaitement exécuté, le mouvement ci-dessous trahit cependant un style contemporain qui n'est pas que mécanique : les états de surface n'ont rien de néo-classique, tout comme ce qui semble être un sélecteur de fonction tricolore, ou une réserve de marche. Même si la montre était Made in France, ce serait à la limite du too much – mais qui sait travailler ainsi dans l'hexagone ? Localisation provisoire de ce calibre à Baselworld : cherchez du côté du Palace [non, ce n'est pas le nouveau style de Laurent Ferrier !]... 
❏❏❏ écouté...sonner de délicates mélodies dans les nouvelles montres présentées à Bâle... Mais c'est encore mieux quand on a l'image et le son. L'image pour la complication mécanique : 75 rubis, ça vous pose un mouvement ! Le son pour l'harmonie musicale : on peut préférer l'art campanile – celui des cathédrales – au Strangers in the night tintinabulant d'Ulysse Nardin, mais il serait stupide de les opposer ou de les hiérarchiser. Dans les deux cas, l'horlogerie contemporaine se permet de renouer avec les grandes heures de sa culture mécanique... ❏❏❏ étudié...la redéfinition de la quadrature du cercle pour jouer du rond et du carré dans une croix... Les minutes sont bien rondes, les heures sont bien carrés, mais le boîtier semble bien cruciforme : bizarre, mais on jugera à l'arrivée. Est-on seulement sûr qu'il s'agit d'une montre mécanique ? 
❏❏❏ senti...s'installer un grand appétit pour les affichages digitaux et les chiffres... Après trois siècles de dictature des aiguilles, les heures et les minutes jouent les nombres, au besoin sur des courroies perpendiculaires comme la Devon Thread 2 (ci-dessous) ou parallèles, comme la Dual Tow de Christophe Claret. 
❏❏❏ repéré...une nouvelle brèche dans le banissement de l'électronique en haute horlogerie... On sait que Urwerk prépare un nouveau concept de montre mécanique associée à un astucieux dispositif électronique de contrôle de la précision (révélation Business Montres du 7 mars dernier). D'autres marques ont opté pour le tout-électronique programmable, mais pour des produits qui restent néanmoins hautement horlogers : la clé USB sert à la fois à recharger la batterie de la montre [on élimine ainsi le lancinant problème de l'autonomie], mais aussi à programmer les différentes fonctions personnalisées d'affichage des villes (fuseaux horaires repérés par GPS embarqué) et toutes sortes de services complémentaires (révélation Business Montres du 9 mars)... 
❏❏❏ commencé...à sentir vraiment vaciller le tabou du quartz associé à des concepts mécaniques... BRM nous propose ainsi la première montre à revendiquer un concept hybride : comprenez une montre à quartz qui serait automatique – ou l'inverse ! Ce n'est pas fondamentalement nouveau [Ventura avait déjà imaginé un dispositif identique], mais il est intéressant de constater que cette foi dans une technologie hybride vient d'une marque très liée à l'industrie de la compétition automobile, elle aussi en pleine mutation du côté des moteurs hybrides. Le principe est simple : une mini-alternateur est alimenté par l'énergie d'une masse de rotor automatique, ce qui permet d'alimenter un mouvement à quartz. Technologie automatique pour le remontage (six mois d'autonomie en pleine charge). Technologie électronique pour la précision. Le style reste très BRM, avec un boîtier V6 en 44 mm, les fameuses aiguilles, les chiffres "compétition" sur le cadran et les cornes comme la couronne personnalisées (environ 2 450 euros). C'est bien parti pour une nouvelle séquence de porosité entre le mécanique et l'électronique : il y en aura quelques autres à Baselworld... 
❏❏❏ noté...quelques in-10-crétions à la volée, en vrac, en bref et en toute liberté... 
►►► DUTY FREE PARADISE : les autorités chinoises commencent à mieux faire connaître leurs projets concernant les aménagements d'une véritable ville commerciale à Sanya, dans la province de Hainan (Business Montres du 11 mars). Cible commerciale : les millions de touriste qui vont jusqu'ici dépenser leurs yuans à Hong Kong, en Corée du Sud ou au Japon. Il faut savoir que, chaque année, 33 millions de touristes visitent les paysages tropicaux de Hainan, qui compte déjà deux zones commerciales hors taxes, où ces touristes laissent environ 200 millions de dollars. Le nouveau projet concerne un mall de plus de 100 000 mètres carrés, avec des "douzaines de boutiques de luxe" qui devraient créer – avec les hôtels qui vont autour, le parc d'attractions de rigueur et le golf indispensable pour les messieurs qui n'aiment pas le shopping – un véritable "paradis du shopping hors taxes" (source : Moodie Report). Il y aura sans doute même des casinos. Dubai + Disneyland + Las Vegas : un rêve ! ►►► CARTIER : comme on pouvait s'en douter, la blague de potache tourne au vinaigre pour les contrefacteurs parodiques du logo Cartier (détournement très vulgaire signalé dès le 11 mars sur la page Facebook de Business Montres). La réaction de Cartier était inévitable : Cartier attaque ! Ce qui est étonnant, c'est que les autres marques concernées par cette parodie organisée par la Parsons The New School for Design graphic (Balenciaga, Givenchy, Jil Sander, Kenzo, Hermès, Céline, Commes des Garçons, Gucci)... ►►► BOUCHERON : ce ne sera sans doute pas un concept fulgurant et disruptif, mais la maison de joaillerie annonce un retour en force dans le champ horloger, avec une montre masculine d'une élégance qu'on pourrait qualifier de totale (on devrait rester dans un style montre de poche repensé pour le poignet), mais aussi une montre plus compliquée, qui ne sonnera que les "heures heureuses" (à découvrir au premier étage du nouveau Hall 1 de Baselworld : promenade Business Montres du 12 mars)... 
►►► MB&F : pourquoi l'exposition consacrée à Miki Eleta par la MAD Gallery de Genève était-elle importante ? Elle a d'ailleurs été prolongée bien après la Wonder Week. La flamboyante Eleonor Picciotto, pilier de la communication dans l'équipe de Maximilian Büsser, nous explique ses raisons de mettre en avant un horloger aussi non-conformiste (excellentes images pour les amateurs de délires méchaniciens : ci-contre, la pendule La Lune)... ►►► BVLGARI (1) : étonnante et brutale réaction des autorités fiscales italiennes contre le groupe Bvlgari et ses anciens dirigeants (Paolo et Nicola Bulgari, actionnaires familiaux historiques, ainsi que Maurizio Valentini, toujours aux commandes, et Francesco Trapani, patron du pôle horloger du groupe LVMH depuis le rachat de Bvlgari par le groupe de luxe, qui avaient dirigé la marque pendant trois décennies). La police financière italienne a saisi et mis sous séquestre (à titre conservatoire) des biens à hauteur de 46 millions d'euros (comptes bancaires, actions, biens immobiliers) : elle reproche à l'ancienne équipe dirigeantes des transferts de bénéfices frauduleux vers des filiales étrangères. C'est ce qu'on appelle de l'optimisation fiscale : une pratique collective dans les groupes européens, qui relève souvent plus de l'auto-défense que de la volonté de frauder. Francesco Trapani nie évidemment tout et rappelle que ces filiales à l'étranger avaient une existence commerciale stratégique pour son groupe : comme toujours, sur le fond, "Bvlgari se déclare totalement confiant dans l'issue de la procédure"... ►►► BVLGARI (2) : là où on s'étonne, c'est quand le communiqué officiel de Bvlgari laisse percer des soupçons de manipulation... "Bvlgari tient à faire observer que certains médias ont été informés de la mesure de séquestre avant même que celle-ci n'ait été notifiée aux personnes concernées. Il s'agit là d'une violation caractérisée des règles et principes qui garantissent les droits des citoyens. Bvlgari saisira les autorités compétentes de ce grave manquement, témoin d'une recherche de déstabilisation médiatique". Sur le plan de la communication de crise, s'il n'est pas très adroit d'afficher de tels soupçons de déstabilisation médiatique [l'accusation est grave, et formelle] dans un communiqué officiel, on ne peut que se demander à qui le crime profiterait. La manipulation n'est sans doute pas niable. Deux pistes possible. D'abord, les concurrents italiens de Bvlgari, qui n'ont jamais admis que la marque soit passée entre des mains étrangères et qu'elle soit désormais le cheval de Troie du groupe LVMH en terre italienne. Ensuite, les concurrents européens, notamment français, de Bvlgari : ces démêlés fiscaux ne sont jamais bons pour l'image d'une marque et ils mobilisent l'énergie d'une équipe au point d'en parasiter les initiatives stratégiques. C'est toujours ça de pris ! Enfin, on ne peut pas non plus exclure du champ de la réflexion une manipulation encore plus tordue, liée au groupe LVMH : comme par hasard, on se rapprochait de l'échéance à laquelle les anciens dirigeants de Bvlgari pouvaient exercer leurs droits de revente des actions LVMH échangées contre des actions Bvlgari lors du rachat de la marque... 
►►► BOMBERG : apparemment, il y a encore des marques qui n'ont pas compris qu'on n'existait pas à Bâle en dehors de Baselworld ! Surtout cette année, où tout le monde va devoir retrouver ses marques entre les nouveaux espaces du salon... Business Montres signalait récemment (5 février) l'arrivée sur le marché de la marque Bomberg, référence # 18/Génération 2013, maison plus ou moins méso-américaine (Mexique), avec un style suisse sans Swiss Made, quoique la marque affiche son identité suisse (site en .ch) et un siège à Neuchâtel. Pas simple... Pendant Baselworld, Bomberg présentera ses "nouvelles règles" – viriles, tendance macho (ci-contre) – à Bâle, mais pas dans les halles, pas très loin non plus, mais du mauvais côté, au nord du Hall 1, là où personne n'a le temps de passer... ►►► PRIVÉES D'HEURES : eh oui ! l'horlogerie peut aimer les "montres qui ne donnent pas l'heure". Une compilation amusante d'Olivier Muller pour L'Argus des montres, qui nous rappelle que cette maladie peut aussi bien toucher des marques hyper-traditionnalistes comme Haldimann [ce qui tendrait à prouver que Beat Haldimann est beaucoup moins traditionnaliste qu'il n'en a l'air] que des électrons libres comme RJ-Romain Jerome ou des néo-manufactures comme Greubel Forsey. Il y aurait eu bien d'autres exemples à citer [souvenons du concept bivérien d'"invisible visibilité"], mais toutes ces montres sans heures ne sont, après tout, qu'un retour à une ancienne tradition : celle des objets du temps qui n'affichaient pas l'heure avec des aiguilles (ou des chiffres, ou des mots), mais qui marquaient néanmoins le temps qui passe... ►►► ULTRA-CHIC : nouvelles tendances pour le marché du luxe en Chine, l'ultra-luxe et le mass chic vont obliger les marques à réviser leurs stratégies marketing (source : Marketing Mag). le changement de paradigme est total par rapport à ce qui prévalait dans les années 2000, avec une double dynamique de décalage vers les extrêmes : l'hyper-opulence vers le haut et le luxe accessible vers le bas (la cible reste l'immense classe moyenne en cours de cristallisation en Asie)... ►►► CHAUMET : une Class One de joueur d'échecs, diamants blanc-diamants noirs, pipèce unique cernée de diamants baguette sur or gris et caoutchouc blanc. Un peu étrange, notamment dans l'alignement presque irrégulier des pierres du pavage (cadran), mais finalement ce décalage donne de la personnalité... 
UNE SÉQUENCE ÉMOTION (offerte par le Sniper du vendredi) 
❏❏❏ Le sniper a constaté...qu'il y avait des sacrées différences dans les dialogues de Pulp Fiction... On parle ici des différences entre la version originale du film de Quentin Tarantino (1994) et la version française, notamment dans la fameuse scène de la montre en or, quand le capitaine Koons (Christopher Walken) s'adresse à Butch Coolidge enfant, dans un rêve fait par Butch Coolide adulte (Bruce Willis). Le scénario américain parle d'une montre réalisée par la "première entreprise qui a fabriqué des montres-bracelets" (This watch I got here was first purchased by your great-granddaddy. It was bought during the First World War. It was your great-granddaddy's war watch, made by the first company to ever make wrist watches) – ce qui est une ânerie historique pour une montre dont la marque doit être Elgin ou Waltham.❏❏❏❏ Les dialogues français sont plus lyriques, mais ils évitent l'ânerie historique : "Et oui j’ai connu ton père... et toi aussi, je te connais bien, mon garçon. Tu sais, ton père m’a beaucoup parlé de toi au camp, pendant ces 5 ans ou on est restés côte à côte prisonniers à Hanoï, et on a vécu l’enfer tous les deux. Toi au moins... tout ça devrait t’être épargné... enfin on peut l’espérer. Dans une situation comme celle qu’on a dû vivre pendant 5 ans lui et moi... on se crée certaines responsabilités l’un envers l’autre. Si ce n’était pas moi qui... [il se retourne vers la mère de Butch] qui m’en était tiré, c’est le Major Coolidge qui parlerait à mon fils maintenant, à Jim. Mais le destin en a décidé autrement, c’est moi qui te parle aujourd’hui... à toi, Butch. J’ai quelque chose pour toi... [il s’assoit et sort une montre] une montre en or. Tu vois, cette montre appartenait à ton arrière grand-père qui l’avait acheté avant la guerre de 14, dans un magasin à quelques pas de chez lui à Knoxville dans le Tennessee. Pour lui, cette montre-bracelet représentait un pas en avant historique, à l’époque tout le monde portait les montres Gousset, des oignons. Peu après, sa montre au poignet, le caporal Coolidge quitta son Tenessee natal pour les tranchées. Sur tous les fronts de France, de Verdun jusqu’à la forêt noire, cette montre en or fût son plus fidèle compagnon. À la fin de la guerre, il rentra chez lui retrouver ton arrière grand-mère. Il ouvrit son coffre, il déposa sa montre et elle y resta quelques années. Jusqu’au jour ou la deuxième guerre mondiale éclata, qu’il fallut encore une fois ce battre contre les Allemands, et que ton grand-père Dane Coolidge fut mobilisé envoyé au front à son tour. Et ton arrière grand-père offrit la montre à son fils Dane sur un quai de gare, ce fut son dernier cadeau. Dane eut moins de chance que son père, comme tant de Marines, il fut tué. Il tomba héroïquement à la bataille de Wake Island. Tous ces hommes prévoyaient leur destin... lui aussi. Il n’avait plus aucune illusion, personne n’avait la moindre chance d’en sortir vivant, alors ton pauvre grand-père, sachant que l’assaut final allait être donné, alla trouver à l’aéroport un nommé O’Flaherty. Et bien qu’il ne l’eut jamais vu de sa vie, il lui dit « j’ai un fils, c’est un nouveau né. Et je n’ai vu ce fils qu’en photo. Je voudrais... si tu as la chance de rentrer un jour en Amérique que cette montre-bracelet soir remise à mon gosse ». Trois jours plus tard, ton grand-père fut tué. O’Flaherty qui lui avait donné sa parole porta la montre à ta grand-mère, pour qu’elle la donne à ton père quand il serait grand, la voici... [il la montre à Butch pendant un petit temps] Coolidge, l’avait sur lui le jour ou il s’est fait descendre, en volant, sur Hanoï. Ton père fut capturé et envoyé dans un camp de prisonniers. Si les Niaks voyaient sa montre, elle lui serait confisqué ! Il le savait ! Et pour lui, il était clair que cette montre... te revenait de droit, et pour rien au monde il ne voulait que les Niaks mettent leur pattes sur ton héritage, le patrimoine de son fils, alors il décida de la cacher. Comme il n’y avait pas d’autre cachette, il se l’est mise dans l’cul. Fallait avoir du courage pour le faire... se la mettre dans l’cul. Un jour, juste avant que la dysenterie le tue, il me donna la montre, j’ai alors caché ce vieux bout de métal dans mon anus deux années durant. Et... après 7 ans d’absence, je pu retrouver ma famille. Et aujourd’hui... cette montre, je suis venu te la donner"...
D'AUTRES SÉQUENCES RÉCENTESDE L'ACTUALITÉ DES MONTRES...