@BASELWORLD 2015 #19 : C'est bizarre, cette passion naturaliste des horlogers, qui laissent grouiller des nuées d'insectes sur leurs cadrans...
Le 28 / 03 / 2015 à 04:26 Par Le sniper de Business Montres - 1874 mots
Le grand écrivain allemand Ernst Jünger parlait de « chasses subtiles » à propos de ses expéditions entomologiques. Jamais à court d'inspiration pour valoriser leurs « métiers d'art », les marques de montres viennent de découvrir le filon invasif des insectes, mais pas toujours avec la subtilité requise...
▶▶▶ AUTOUR DE BASELWORLD 2015 Pourquoi un tel vent d'entomologie se met-il …
Le grand écrivain allemand Ernst Jünger parlait de « chasses subtiles » à propos de ses expéditions entomologiques. Jamais à court d'inspiration pour valoriser leurs « métiers d'art », les marques de montres viennent de découvrir le filon invasif des insectes, mais pas toujours avec la subtilité requise...
▶▶▶ AUTOUR DE BASELWORLD 2015 Pourquoi un tel vent d'entomologie se met-il à déferler sur les montres ?◉◉◉◉DES INSECTES SUR DES MONTRES, CE N'EST PAS NOUVEAU. La place Vendôme a toujours adoré s'offrir un petit frisson naturaliste, avec de charmants insectes de haute joaillerie, bien propres sur eux et parfaitement éduqués (on en trouverait de multiples exemples chez Boucheron, Cartier (ci-contre), Van Cleef & Arpels, Chanel ou Chaumet (ci-dessous). Après une mode coccinelle [thème graphiquement limité], on a vu s'imposer une tendance papillon [thème graphiquement illimité]. Plus une tendance libellule. Avant une explosion entomologique tous azimuts, immédiatement reprise de volée par les artisans d'art de l'horlogerie asiatique, qui commencent à inonder les marchés européens de propositions tous aussi intéressantes que celles des artisans d'art locaux, mais facturées à des prix beaucoup plus accessibles. La plus sublime envolée de papillons restera, cette année, la collection des Butterfly de Graff (ci-dessus ; voir aussi notre très mauvaise vidéo Business Montres Vision à ce sujet, en attendant que Graff nous en propose une meilleure) : une idée simplissime de papillons sertis tournant autour du cadran, au rythme des mouvements du poignet (comme un rotor de remontage automatique) tout en pivotant sur eux-mêmes pendant leur course. Magique et fascinant...◉◉◉◉BASELWORLD 2015 A VU ÉCLORE DES PAPILLONS dans toutes les halles et à tous les étages, sinon à tous les tarifs (ci-contre : Jaquet Droz). Au-delà des seuls insectes, le courant naturaliste est de tout façon très puissant, sinon presque irréversible. Au point de s'auto-détruire lui-même par une surabondance de productions plus ou moins baroques et plus ou moins réussies. Si on ne voulait qu'une preuve de ce qui n'est déjà plus un frémissement, mais l'amorce d'un torrent et l'imminence d'une déferlante, on aura remarqué, à la M.A.D Gallery de Genève [le terrain de jeu arty-trendy-mechy de Maximilian Büsser, celui de MB&F], l'actuelle exposition Mechanical Entomology dont le titre résume tout le programme de « machines » insectoïdes (illustrations ci-dessus, sous le chapeau, et ci-dessous). Comme toujours, Maximilian Büsser détecte, éclaire et amplifie les tendances...◉◉◉◉EN PLUS DE PAPILLONS, DÉSORMAIS BANALISÉS, on explore d'autres génotypes entomologiques, comme les coléoptères. Dior présentait ainsi une des plus extraordinaires collections de pièces uniques dont la décoration était réalisée en élytres de scarabées aux reflets iridescents (ci-dessous, en version verte, mais il existe une bonne douzaine de nuances). Il s'agit – respecter l'éthique – de coléoptères morts, récoltés en Thaïlande, et non de prélèvements sauvages sur le milieu vivant. Ces Dior Grand Bal « Envol » créent un lien inattendu entre l'horlogerie légèrement compliquée avec goût (concept de rotor inversé, côté cadran), la haute couture (les plissés du rotor orné de nacre et de laque), la haute joaillerie (les tsavorites assorties à la couleur dominante, en taille baguette) et la chasse subtile (la marqueterie colorée des élytres de scarabées, qui nous renvoient d'ailleurs à l'Egypte ancienne). Ajoutons-y une relation directe à la nature (pièce unique en 36 mm, tout comme les autres interprétations dans d'autres couleurs).◉◉◉◉ON PEUT SE DEMANDER CE QUE CACHENT cette soudaine passion naturaliste et cet engouement entomophile. Sans doute une panne créative pour ce qui concerne les motifs décoratifs traditionnels de l'horlogerie : la nature est ici un immense réservoir de formes, de couleurs et d'idées. Sans doute aussi une inclination à préférer les rythmes de notre environnement naturel – parfaitement symbolisés par les insectes, dont la liberté apparente et la vie éphémère fascinent – au temps brutal des machines et des technologies. Les insectes rassurent en même temps qu'ils re-poétisent la vie, libellules, papillons et scarabées pour le côté bisounours, araignées pour le côté obscur de la Force. Cette multiplication des cadrans entomologiques est néanmoins dangereuse, tellement l'artisanat d'art européen est faible face aux centaines d'artistes asiatiques capables de les concurrencer. Jamais on n'avait vu à Bâle autant de montres « métiers d'art » asiatiques que cette année. Business Montres (13 mars) avait repéré bien avant Bâle ZhangDao, dont les prix laissent pantois (cadran ci-contre), mais il faudra aussi compter avec Koncise (Beijing : ci-dessous) et quelques autres, toujours à des prix et avec une virtuosité technique (émail grand feu, gravure, peinture miniature sur céramique, mosaïque de pierre, bas-relief tridimensionnel) qui ridiculisent les prétentions des marques suisses qui ont eu le tort de vouloir rivaliser avec les artisans chinois sur ce terrain. ◉◉◉◉QUI N'A PAS SA PANOPLIE D'INSECTES ? Il en existe à présent sur les cadrans de toutes les gammes, des marques de mode accessibles (Zadig & Voltaire) aux pièces uniques émaillées Patek Philippe, en passant par la haute couture (Chanel) et même les trublions indépendants comme Artya (Yvan Arpa est un poète naturaliste), qui n'hésite pas à créer des mosaïques d'ailes de papillon sur ses cadrans, tous « pièces uniques » comme il se doit (ci-dessous). L'insecte a ainsi conquis ses lettres de noblesse horlogère : il en existe plusieurs millions d'espèces sur cette planète, avec un registre chromatique et formel d'une inépuisable variété. Ce n'est donc qu'un début...◉◉◉◉MAINTENANT, SI VOUS VOULEZ RIGOLER UN PEU, et bien qu'on ait encore quelques jours à patienter avant le Premier Avril, un concept hilarant – mais radical – d'horlogerie entomologique. C'est celui de la montre-fourmi (Ant Watch) proposée par Analog Watch Co(Pennsylvanie). Vous n'en aurez que pour 59 petits dollars, mais vous découvrirez grâce à cette montre comment les formicidés figurent parmi les formes biologiques les plus résistantes de cette planète [on leur prête même la capacité de survivre à une explosion nucléaire et à une exposition aux radiations dans l'espace]. Avec la Ant Watch (ci-contre), les fourmis sont dans la montre, à l'intérieur, vivantes : il suffit de les ravitailler en nutriments et en eau (explications vidéo ci-dessous). La marque peut vous en fournir un lot de cinq tous les quadrimestres, pendant un an. Plus naturaliste, tu meurs, même si ce n'est pas très respectueux de la morale eco-friendly ! Date de livraison de ce premier concept de fourmi-poisson : début avril – évidemment !D'AUTRES SÉQUENCES RÉCENTESDE L'ACTUALITÉ DES MONTRES ET DES MARQUES...
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