BAROMONTRES JANVIER 2014 : Les tendances météo de l'horlogerie pour le premier mois d'une année de tous les dangers
Le 04 / 02 / 2014 à 07:20 Par Le sniper de Business Montres - 4741 mots
Les hommes, les marques et les faits de janvier 2014, scannés en direct par les barorécepteurs du Quotidien des Montres. Un classement en dix coups de projecteur sur les évolutions capricieuses de la météo horlogère pour décembre 2013, dernière étape avant une année de tous les dangers...
◀▶ BAROMONTRES JANVIER 2014Un début d'année sans bousculade dans les salons... ▶▶▶ L'année 2013 ne sera pas glorieuse (sauf pour une poignée de marques) en termes de performances industrielles, mais 2014 – l'année de tous les dangers – …
Les hommes, les marques et les faits de janvier 2014, scannés en direct par les barorécepteurs du Quotidien des Montres. Un classement en dix coups de projecteur sur les évolutions capricieuses de la météo horlogère pour décembre 2013, dernière étape avant une année de tous les dangers...
◀▶ BAROMONTRES JANVIER 2014Un début d'année sans bousculade dans les salons... ▶▶▶ L'année 2013 ne sera pas glorieuse (sauf pour une poignée de marques) en termes de performances industrielles, mais 2014 – l'année de tous les dangers – s'annonce sans le moindre enthousiasme, ni la moindre visibilité pour ce qui serait une éventuelle reprise (sauf pour une poignée de marques, comme toujours). Tout juste en croissance pour la valeur de ses exportations [dépendantes de quelques milliers de pièces ultra-coûteuses), l'horlogerie suisse a encore perdu des volumes et des parts de marché, alors que se tarit la source miraculeuse de ses profits chinois et alors que se profile le danger d'une double offensive (un raid chinois sur l'entrée de gamme et la moyenne gamme européenne, doublé d'une attaque générale sur le front des smartwatches) et alors qu'un retournement du marché se prépare sur le front des parités monétaires [le facteur prix est devenu critique : qui aura le courage de le dire et de les baisser le premier ?]. Peu importe, puisque « Tout va très bien, Madame la marquise »... La preuve : un tableau d'honneur de huit avis de grand beau, contre un seul avis de tempête et une seule notation variable (ci-dessus : Philippe Dufour en train de régler un spiral pour son projet Naissance d'une montre ; ci-dessous : la nouvelle approche de Piaget pour des cadrans brodés)... DANS LES GRANDES LÉGENDES DU TEMPS••• RAYMOND WEIL (Raymond Weil)▶▶▶ Un grand monsieur nous a quittés, un de ceux qui laissent leur nom à une marque et qui entrent ainsi dans l'histoire de l'horlogerie (annonce Business Montres du 27 janvier). Témoin d'un temps où l'industrie horlogère vivait paisiblement sur quelques marchés traditionnels et à ses propres rythmes biologiques, Raymond Weil sera resté pratiquement jusqu'au bout dans la cabine de pilotage de sa marque et il en aura vécu les meilleurs – et les moins bons – moments, dans les tourmentes de cette fausse « révolution du quartz » dont il avait parfaitement bien analysé la dimension plus commerciale que technologique [comme en témoignent ses prem:ières collections, très typées horlogerie suisse, mais proposées à des prix accessibles], au point de s'imposer sur de nombreux marchés au nez et à la barbe des grandes marques. Aujourd'hui, l'horlogerie manque de visionnaires à la Raymond Weil... GRAND BEAU(par ordre alphabétique et sans idée de classement)1] YVAN ARPA (Artya)▶▶▶ S'il était dans le show business, Yvan Arpa aurait inventé la... « quenelle » ! Il possède manifestement l'art de faire grincer des dents par des idées folles dont le potentiel commercial n'a encore été subodoré par personne. Ses récentes montres Son of a Gun (équipées de vraies cartouches) en témoignent, tout comme ses séries de montres « anti-vampires » à balles d'argent – parfois serties – et à gravures subliminales de sa Blood & Bullets (détection Business Montres du 17 janvier). Il peut même se permettre de procéder, à sa manière, à un grand retour au classique, grâce à un boîtier néo-classique qui peut lui conquérir de nouvelles parts de marché – dans sa niche très particulière des montres qui en donnent beaucoup plus que l'affichage des heures... 2] JEAN-CLAUDE BIVER (LVMH)▶▶▶ Habitué des situations privilégiées dans notre Baromontres mensuel, Jean-Claude Biver (président de la maison Hublot) ne l'a sans doute pas été en vain, puisque Bernard Arnault a fini par obtenir qu'il prenne désormais en charge le pôle Montres du groupe LVMH (révélation Business Montres du 20 janvier dernier), soit un milliard et demi d'euros de chiffre d'affaires (cumul TAG Heuer, Zenith, Hublot, les autres marques du groupe étant regroupées dans un pôle joaillier derrière Bvlgari) pour à peu près 250 millions d'euros et un potentiel de croissance non négligeable. En 2008, Business Montres voyait déjà en Jean-Claude Biver le « pape de la nouvelle horlogerie ». Le parcours s'est confirmé : Bibi King a désormais les mains libres pour repositionner TAG Heuer face à Omega [une marque du'il a lui même pilotée dans les années 1990] et pérenniser la dynamique de Hublot comme une référence sur le marché d'un nouveau grand public amateur de nouveaux codes... 3] NICOLAS BOS (Van Cleef & Arpels)▶▶▶ Parvenu aux commandes d'une maison dont il était le directeur artistique, Nicolas Bos a gardé une sensibilité produits qui lui fait réussir, une nouvelle fois (après une longue suite d'années), sa collection 2014, axée autour d'une astronomie mécaniquement « poétique » et de montres travaillées avec une débauche démonstrative de « métiers d'art » capables d'en magnifier la décoration (images ci-dessus et ci-dessous). Le bon goût Van Cleef & Arpels, dont il possède la grammaire affective sur le bout des doigts, assure le liant symbolique entre la haute horlogerie et la haute joaillerie, disciplines menées en parallèle avec le même entrain créatif. Sans rien sacrifier de son âme aux sirènes chinoises, Van Cleef & Arpels s'impose une fois encore comme le parangon d'une place Vendôme pas toujours bien réveillée... 4] CHRISTOPHE CLARET (Christophe Claret)▶▶▶ Le magicien du Soleil d'or (son adresse au Locle) parvient chaque année à nous épater avec ses concepts mécaniques voués aux beaux-arts du casino : après le Black jack, la roulette et même les bandits manchots (pour Girard-Perregaux), il a imaginé cette année une montre Poker capable de créer près de 100 000 levées de cartes pour trois joueurs qui disposent des combinaisons de 52 cartes. Doublée d'une roulette fonctionnelle, sa montre Poker est un festival d'imagination mécanique et d'ingéniosité horlogère, qui honore le concept d'une « Manufacture Christophe Claret » désormais capable de séduire les collectionneurs asiatiques de « jouets de garçon » créatifs et démonstratifs. Il y a près de quatre siècles que les hauts dignitaires chinois s'amusent avec les mécaniques horlogères suisses : les nouveaux mandarins de l'opulence asiatique perpétuent cette tradition, et Christophe Claret s'impose comme un de leurs nouveaux prophètes... 5] THIERRY FRITSCH (Chaumet)▶▶▶ Faut-il regretter la discrétion de violette d'un Thierry Fritsch, président de Chaumet, qui est pourtant un homme de poids ? Pendant la Wonder Week de Genève, il fallait l'instinct du chasseur pour pister son exposition au Kempinski, mais quel plaisir de découvrir une collection pleine de bonnes surprises esthétiques, exécutées en faisant appel à tous les « métiers d'art » de la décoration horlogère, selon des thèmes qui embrassent la haute horlogerie autant que la haute joaillerie ! Tutoyer ainsi les sommets de la création ne détourne pas Chaumet de s'intéresser aussi à ses futures clientes, tentées par une collection Liens repositionnée à des niveaux de prix plus accessibles (et plus « jeunes ») sans rien perdre de son identité et de son grand style « Place Vendôme ». Chaumet, qui avait semblé récemment négliger sa dimension horlogère, a visiblement l'intention d'en découdre avec les autres grands joailliers sur le terrain de la décoration superlative et créative. On ne peut que s'en féliciter... 6] JEAN-PIERRE LUTGEN (Ice-Watch)▶▶▶ Autant 2013 avait pu sembler une année difficile pour Ice-Watch, autant l'arrivée de 2014 a débloqué simultanément plusieurs « noeuds » de crise. L'accord amiable – et confidentiel – passé avec le Swatch Group (Business Montres du 28 janvier) dégage l'horizon de toute barricade judiciaire, tout en faisant triompher le droit de vivre de la marque en même temps que sa légitimité pour enregistrer cette marque sur des grands marchés comme la Chine, où l'opposition du Swatch Group empêchait toute opération, mais encourageait les faussaires. La marque triomphe également face aux menaces d'un méga-contrôle fiscal dont elle ressort blanchie comme neige. L'administration belge a enfin accepté de délivrer à Jean-Pierre Lutgen le droit de se construire un immense siège social, à Bastogne, pour y mettre en place son état-major européen, voire, demain, des lignes de montage relocalisées depuis la Chine. La distribution sur les marchés matures a commencé à être repensée, rationalisée et reprise en main. L'entrée de gamme horlogère va désormais vibrer au rythme d'une marque qui aura réussi, en quelques années, à bousculer Swatch et à trouver sa légitimité dans la couleur, le silicone et les objets dérivés, le tout à des prix qui permettent l'achat d'impulsion. Une vraie illustration du concept révolutionnaire et hyper-stratégique de « créativité accessible »... 7] BRUNO GRANDE (Jeanrichard)▶▶▶ On pouvait ne pas y croire tellement le pari était risqué pour une marque chahutée par les multiples épisodes de son histoire récente, mais Bruno Grande – son directeur général – a su prendre patience et reconstituer, pièce par pièce, un socle de légitimité qui redonne toutes ses chances à la marque Jeanrichard : attesté par un mouvement exclusif tout ce qu'il y a de plus authentique, l'esprit « manufacture » est décliné à des prix décents pour la qualité perçue du produit et pour son design. C'est un atout sur les marchés, avec, en prime, un marketing qui sait faire la part belle aux « hommes ordinaires face à des situations extraordinaires » – ce qui peut concerner les ambassadeurs aussi bien que les équipes sportives (le football avec Arsenal, le rugby avec le Racing parisien) ou les épreuves légendaires (la fameuse Patrouille des glaciers ou la joute Oxford-Cambridge). Petit à petit, Jeanrichard revient sur le devant de la scène, avec l'aide d'un groupe Kering qui semble croire au destin de cette maison : ne quittez pas Bruno Grande des yeux, il n'a pas fini de... grandir ! 8] RICHARD WATKINS (historien)▶▶▶ L'histoire horlogère est un explosif hautement instable à forte capacité de fragmentation : gare aux artificiers maladroits ! Stigmatisées ici même à plusieurs reprises, la médiocrité de certaines pages de Jean-Claude Sabrier concernant la généalogie des montres automatiques, de même que l'inertie documentaire et le conformisme d'un Dominique Fléchon sur ces mêmes questions, ont poussé l'historien australien Richard Watkins à réagir, en vrai historien, avec un tour d'horizon pour l'instant définitif et incontestable sur les origines des premiers montres automatiques (analyse en accès libre : Business Montres du 17 janvier). S'il rend à Sarton ce qui revenait à Perrelet [avancée historique qui ne surprendra pas les lecteurs de Business Montres, mais seulement ceux qui ont eu le tort de croire sur paroles les historiens précédents], Richard Watkins ne parvient cependant pas à retrouver la trace des mystérieux auteurs de la première vraie montre automatique. La suite au prochain épisode ? VARIABLE9] SIHH (Salon international de la haute horlogerie)▶▶▶ Si le rendez-vous genevois de janvier a trouvé sa légitimité en début d'année (période commercialement plus logique que le rendez-vous bâlois du printemps), son concept accuse cependant son quart de siècle. Vingt-cinq années au cours desquelles l'horlogerie suisse aura changé de visage et de clients sans que change fondamentalement le rituel de la grand-messe genevoise, qui n'en a pas moins éprouvé le désir de se dupliquer en Asie (avec une formule moins professionnelle et plus ouverte aux collectionneurs) et d'évoluer vers un grand événements de relations publiques (10 % de journalistes dans les 14 000 visiteurs revendiqués pour 2014). Pour son premier quart de siècle, le SIHH – qui n'entend rien changer, et surtout pas son périmètre de marques – ne devrait pas faire évoluer son concept, désormais très coûteux pour des marques bien filialisées et de plus en plus autonomes pour leur distribution, qui n'y réalisent plus, comme auparavant, l'essentiel de leur activité marchande annuelle ? AVIS DE TEMPÊTE10] Métiers d'art (Wonder Week)▶▶▶ De la surexploitation des « métiers d'art » de la décoration horlogère peut naître la surextermination de l'intérêt qu'ils provoquaient et de la différence qu'ils induisaient entre les marques : quand tout le monde pratique ces « métiers d'art », ou les pratiquera dans les années à venir, pour des montres de plus en plus banales qui seront de moins en moins valorisées par cet argument non horloger, que faudra-t-il inventer ? On est en train de tuer une poule aux oeufs d'or qui a permis aux marques d'augmenter les prix et de séduire les collectionneurs émergents en abusant de l'excessive « rareté » en Suisse de ces artisans d'art (images ci-dessus et ci-dessous : Vacheron Constantin). Sauf que – ça commence à se savoir – on trouve en Russie ou en Chine des centaines, sinon des milliers de ces artisans d'art et des dizaines de praticiens de « métiers d'art » qui ont quasiment disparus en Europe. À ce petit jeu du « plus artistique que moi, tu meurs », on ouvre un boulevard aux marques non suisses qui auront le courage de défier les « artistes » de la Suisse romande – à des prix plus décents – et on risque surtout de trivialiser ce recours à l'hyper-décoration comme valeur ajoutée trop visible pour être honnête... ••• RAPPEL (année 2013-2014) ••• ••• Le précédent Baromontres décembre 2013 de Business Montres (7 janvier 2014) :LÉGENDES DU TEMPS • Dominique Tadion • GRAND BEAU • Alexandre David • BFMTV • Philippe Leopold-Metzger • Jean-Marc Pontroué • Karl-Friedrich Scheufele • VARIABLE • Antonio Calce • Hanhart • AVIS DE TEMPÊTE • Année du cheval • ••• Le précédent Baromontres novembre 2013 de Business Montres (30 novembre 2013) :GRAND BEAU • Aurel Bacs • Chanel • Gouten & Guten • Grand Prix d'Horlogerie de Genève • Osvaldo Patrizzi •VARIABLE • Louis Vuitton • Touristes chinois •AVIS DE TEMPÊTE • Cuir humain • Nick Hayek • Stop Piracy • ••• Le précédent Baromontres octobre 2013 de Business Montres (12 novembre 2013) :GRAND BEAU • Bruno Belamich • L. 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