VIEUX PAPIERS (accès libre)
Ce bon Monsieur Reiser avait déjà tout compris !
Zoom arrière, à cinquante ans de distance : aux premières heures de l’« affaire Lip », le dessinateur Jean-Marc Reiser nous révélait dans l’hebdomadaire satirique « Charlie Hebdo » quelques vérités cinglantes sur l’industrie horlogère d’alors. Une pictochronique visionnaire…
Si Business Montres a inventé et diffusé le nom de « pictochronique » pour des contenus d’actualité qui utilisent et détournent des images, le concept en est évidemment beaucoup plus ancien : on peut même le faire remonter aux pictogrammes de l’Antiquité, sinon à ceux des grottes ornées de la préhistoire. Un des plus fameux dessinateurs de presse de la fin du XXe siècle, « Reiser » (Jean-Marc Reiser, 1941-1983 »), bien trop tôt arraché à notre admiration, avait déjà tout compris au début des années 1970 : ses pictochroniques dans Charlie Hebdo, le média satirique qui avait succédé à Hara-Kiri (« le journal bête et méchant ») interdit en 1970, témoigne d’un maniement magistral de ces commentaires dessinés de l’actualité [précision annexe : nous l’avions personnellement croisé dans une autre vie, à l’époque de Métal Hurlant]. On peut toujours rendre hommage à sa mémoire au cimetière Montparnasse de Paris, où sa tombe en forme d’aile d’avion fait toujours sensation…
En relisant quelques vieux papiers à l’occasion de la récente disparition de Charles Piaget, la figure centrale de la révolte des employés de la manufacture Lip (Besançon) contre leurs actionnaires suisses, nous avons retrouvé la trace de cette pictochronique de Reiser sur les montres à quartz : nous sommes au début des années 1970, vers 1973-1974, à une époque où les Français commencent à entendre parler des « montres à quartz », en partie grâce à cette « affaire Lip » qui avait glorieusement torpillé les chances d’une riposte de l’horlogerie française au défi des montres à quartz asiatique. Coïncidence : cette planche à l’encre de Chine – une double page de « Charlie » – fait partie de la vente de bandes dessinées orchestrée par la maison Artcurial, samedi prochain (lot n° 421, estimé 2 000-3 000 euros : contrairement à ce que prétend le catalogue et pour de simples questions de date, il est douteux que cette planche ait été publiée dans Hara-Kiri).
Reiser et les montres : ça méritait le détour pour amuser les lecteurs de Business Montres ! Ce sera sans doute une révélation pour les amateurs de montres. Un demi-siècle plus tard, cette planche (41 cm x 32 cm) nous révèle un pan mal connu de l’histoire horlogère : elle aurait mérité de figurer dans une vente aux enchères genevoise – avec ou sans « garantie tierce » à la Christie’s ! Nous vous la livrons en pièces détachées pour mieux profiter de l’ensemble : vous allez voir que notre ami Reiser était d’une impressionnante perspicacité – c’est sans doute une des meilleures pictochroniques jamais consacrées aux montres à quartz…
COORDINATION ÉDITORIALE : EYQUEM PONS