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Alexis Gouten : « Chers amis de l’industrie horlogère, réveillez-vous ! »

Si elles constituent une bouée de secours provisoire pour de nombreux détaillants, voire pour les marques qui ne cessent de regarder dans le rétroviseur, les montres vintage ou « pre-owned » sont peut-être aussi des armes invisibles de destruction massive. Alexis Gouten (Gouten Distribution) a quelques idées hérétiques sur cette question…


Business Montres et Joaillerie : Ras-le poignet du vintage et du pre-owned ?  

Alexis Gouten (ci-dessous) : Il faut arrêter de ne plus penser qu’au vintage et au pre-owned ! Ce sont des ennemis de l’horlogerie suisse. Cette obsession détruit notre monde…

Pourquoi ? 

Alexis Gouten : Notre industrie a plus que jamais besoin de nouveauté et d’inventivité, mais surtout de travail pour les sous-traitants, les horlogers, les designers, les créatifs, les équipes de R&D et tous les autres, qui ont le savoir-faire et la motivation. L’avenir de notre industrie horlogère n’est pas dans la vente et la revente à perpétuité des mêmes modèles, encore et encore. En procédant ainsi, nous n’éduquons pas bien les jeunes consommateurs.

C’est pourtant une planche de salut pour de nombreux détaillants ? 

Alexis Gouten : Sans doute ! Nous comprenons les détaillants qui prennent cette voie, mais ils le font parce qu’ils sont désespérés. Ils sont à la recherche d’affaires à tout prix. Ils incarnent malheureusement le passé. Le panache, ce n’est pas de vendre une Nautilus ou une Daytona trois fois le prix, mais d’oser miser sur de nouveaux venus, de prendre du temps à mettre en avant de nouveaux designs, d’expliquer que le choix d’une montre, c’est d’abord pour soi et pas pour conforter le regard des autres.

Alors, quoi ? Alors qui ? 

Alexis Gouten : J’ai beaucoup de respect et d’admiration pour les jeunes marques qui lancent leurs projets en mode crowdfunding. Grâce à eux, c’est un vent d’espoir qui s’élève. Malheureusement, faute de soutien de la part des détaillants, la plupart disparaissent après un premier coup d’éclat. Pas de vitrines dédiées, peu d’articles de presse, car pas de budget pub, pas les moyens de voyager à l’international ; tous ces écueils pèsent. Arrêtons de regarder dans le rétroviseur ! L’horlogerie suisse a nié l’avènement des smartwatches. Elle est sclérosée par de vieilles habitudes et elle se recroqueville sur ce qu’elle connaît et ce qui la rassure.

Un problème de message à transmettre ?

Alexis Gouten : plus grave encore, l’horlogerie suisse ne sait plus se promouvoir, chaque marque tirant la couverture vers elle. Le gâteau ne grandit plus. Pourtant le potentiel est là. Pourquoi la FH n’utiliserait-elle pas les réseaux sociaux pour prêcher la bonne parole et faire découvrir les talents d’aujourd’hui ? Pourquoi un lobby helvétique horloger ne se constituerait-il pas pour contrecarrer les smartwatches et redonner du sens au port d’un bel objet à son poignet ? Je crois aussi à de la belle horlogerie, moins technique ou technologique plus axée sur le design et la désirabilité. Des montres plus abordables, dont on pourrait changer souvent sans grever son budget. Des montres qu’on oserait porter même avec des signatures plus confidentielles. Des montres capables d’exprimer notre époque sans vouloir toujours faire référence au passé. Je garde toujours en tête la phrase d’un ancien propriétaire de marque : « Les marques horlogères se battent entre elles pour savoir laquelle est la plus vieille, alors que je me bats pour que ma marque soit la plus jeune ». L’avenir, c’est la créativité. L’avenir s’écrit en ligne…


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