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CHINE : Le gouvernement fait tout pour réorienter à son profit l'essentiel des 120 milliards de dollars dépensés par les touristes chinois à l'étranger...

La nouvelle stratégie macro-économique de la Chine risque de ne pas profiter du tout à l'horlogerie suisse. Au contraire, on peut y lire l'annonce d'une éviction partielle du marché intérieur et d'une offensive annoncée des marques horlogères chinoises sur les marchés extérieurs... ▶▶▶ CONSOMMATION DOMESTIQUEOfficiellement, il s'agit seulement d'« encourager la consommation intérieure ».


La nouvelle stratégie macro-économique de la Chine risque de ne pas profiter du tout à l'horlogerie suisse. Au contraire, on peut y lire l'annonce d'une éviction partielle du marché intérieur et d'une offensive annoncée des marques horlogères chinoises sur les marchés extérieurs...

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▶ CONSOMMATION DOMESTIQUE
Officiellement, il s'agit seulement
d'« encourager la consommation intérieure ».
En réalité, c'est moins simple... et plus vicieux !
 
◉◉ C'ÉTAIT UNE SÉQUENCE ATTENDUE, ET D'AILLEURS ANTICIPÉE depuis longtemps par Business Montres, qui en avait clarifié les premières secousses dès la publication de la nouvelle loi sur le tourisme (révélation Business Montres du 22 août 2013), après en avoir pressenti l'imminence (Business Montres du 21 juin 2013) : « Pour consolider la consommation intérieure et dans la logique du néo-protectionnisme qui oriente la pensée du nouveau pouvoir chinois, les global shoppers chinois seront très vite dissuadés de trop dépenser à l'étranger par des contrôles douaniers plus tâtillons et plus soucieux de faire respecter le style néo-prolétarien », écrivions-nous alors. Nous y sommes : alors que de nouveaux flux de Chinois se précipitent vers l'Europe pour y profiter de l'euro faible (120 % de dépenses supplémentaires en mars, 67 % de croissance pour le premier trimestre 2015) et y faire le plein de montres qui alimentent les marchés parallèles en Chine [normal, une fois la TVA récupérée, elles sont 50 % moins chères à Paris qu'à Beijing], il serait suicidaire pour le gouvernement de ne pas faire profiter de cette manne l'économie chinoise. Puisque les Chinois veulent dépenser leur argent en biens de luxe européens, autant qu'ils le fassent en Chine même...
 
£¨Á½»á¡¤ÈË´ó¿ªÄ»¡¤XHDW£©£¨16£©Àî¿ËÇ¿×÷Õþ¸®¹¤×÷±¨¸æ◉◉ C'EST TOUT LE SENS DE L'INTERVENTION DU PREMIER MINISTRE LI KEQIANG (ci-contre), lors d'une réunion exécutive du Conseil des Affaires d'Etat, qu'il préside : il a décidé de mobiliser le gouvernement pour « promouvoir le marché national des biens de consommation » et demander des « mesures spécifiques pour créer un environnement juste pour les importations et les exportations » (source : Xinhua). Argument officiel : « Promouvoir la demande nationale représente la clé pour assurer une croissance stable et le succès de la restructuration de l'économie de la Chine ». Moyens proposés : « Grâce à l'amélioration des politiques fiscales et d'un environnement concurrentiel juste pour les importations et les exportations, le gouvernement peut augmenter le volume des importations des biens de consommation, qui sont ceux que les consommateurs chinois préfèrent, et promouvoir également les exportations des biens de consommation, qui sont compétitifs sur le marché international ». Attention au mot « juste », qui n'a pas le même sens dans la terminologie sino-communiste que dans son acception française : est réputé « juste » ce qui est bon pour les intérêts du pouvoir en place et ce qui est conforme à la ligne du Parti, pas ce qui relève de l'équité...
 
◉◉ TRADUCTION EN BON FRANÇAIS DE CETTE LANGUE DE BOIS CAPITALO-MARXISTE : le gouvernement chinois a l'intention d'abaisser, dès le début de l'été, les droits de douane et les taxes économiques qui frappent les produits importés, en faisant une sélection de biens de consommation « à encourager » [pas encore de précisions sur le fait d'inclure ou non les montres dans cette liste : le « ceux que les consommateurs chinois préfèrent » est riche de subtilesi interprétations, qui seront autant de chantages économiques]. Le gouvernement espère ainsi à la fois réorienter les dépenses des touristes chinois vers le marché intérieur – si les prix baissent en Chine, l'attrait des marchés touristiques sera moins puissant – et redonner un peu d'oxygène aux réseaux de distribution locaux [c'est un écho à la lettre angoissée des détaillants de Hong Kong dévoilée par Business Montres le 24 avril]. Interprétation du non-dit : le gouvernement chinois entend ici encourager les réseaux commerciaux de ses propres amis [ceux qui ont fait allégeance au Parti communiste et qui siègent dans ses instances élues], et non ceux de leurs concurrents étrangers ! En termes horlogers, cela signifie que les flux commerciaux seront réorientés vers les boutiques de Chow Tai Fook, d'Hengdeli, d'Oriental, de Sincere et leurs collègues, pas vers les boutiques des marques suisses !
 
◉◉ AUTRE ANNONCE OBLIQUE DU GOUVERNEMENT : l'encouragement à la mise en place rapide de zones franches commerciales (0 % de taxes), déjà expérimentées avec succès, qu'on peut imaginer couplées avec des zones touristiques aux frontières contrôlées de la Chine. C'est tout le sens du projet « Route de la soie », auquel le gouvernement tient beaucoup, qu'il ne cesse de développer et pour lequel il dépense beaucoup d'énergie (source : Xinhua). C'est aussi la mise en parc d'attraction touristico-marchands sur les côtés sud du pays. Autant de milliards de yuans qui n'iront pas se déverser dans les économies occidentales, coréennes ou japonaises. Bien évidemment, la Chine étant un pays communiste, on peut imaginer que des procédures dissuasives aux frontières (taxation des biens rapportés par les touristes) et des campagnes d'encouragement néo-patriotiques pour promouvoir les achats en Chine seront déployées : malheur aux récalcitrants qui n'auront pas compris à temps la nouvelle donne...
 
120625_xi_jinping◉◉ LE DERNIER VOLET N'EST PAS MOINS INQUIÉTANT POUR LES HORLOGERS SUISSES : Li Keqiang nous promet de « promouvoir également les exportations des biens de consommation, qui sont compétitifs sur le marché international ». Comprenez qu'il va assurer la promotion des produits « China Made » partout où ils ont une chance commerciale d'exister. C'est parfaitement phase avec les objectifs de Xi Jinping (ci-contre). Autant dire que la grande offensive des montres chinoises – techniquement aussi abouties que les montres européennes, mais moitié moins chères – sera encouragée et soutenue : la Chine ne va pas manquer de faire jouer la fameuse réciprocité du non moins fameux accord de libre-échange signé avec des pays comme la Suisse. Business Montres (6 juillet 2013) avait souligné l'inanité d'un tel accord, mais aussi ses dangers. Encore une fois, nous y sommes ! C'est la Chine qui tient le couteau par le manche : non seulement, elle peut manipuler la demande intérieure de montres suisses [que faire si les consommateurs chinois ne les « préfèrent » pas ?], mais elle peut exiger une ouverture équivalente du marché suisse – et donc européen – à ses montres. La Suisse comme cheval de Troie ? Business Montres (28 mais 2013) prévoyait déjà : « On doit se féliciter que la Chine normalise ses relations commerciales avec la Suisse, mais attention aux clauses de sauvegarde dès que la Chine estimerait ses propres industries locales menacées : aujourd'hui, cela ne concerne pas les montres, mais la montée en puissance de l'horlogerie chinoise peut à tout instant changer la donne ». On sait maintenant que cette montée en puissance sur les marchés extérieurs sera encouragée, orchestrée et soutenue par le gouvernement.
 
◉◉ ALORS, UNE BONNE NOUVELLE POUR LE LUXE HORLOGER, cette nouvelle stratégie chinoise pour la consommation intérieure ? Sans doute pour une partie de l'horlogerie suisse de volume – celle qui vise des prix publics situés au-dessous de 1 500 dollars – mais beaucoup moins pour l'horlogerie de prestige, frappée d'ostracisme par la promotion de l'austérité néo-prolétarienne qu'organise le gouvernement. Certes, les réseaux proches du gouvernement passeront commande de montres suisses, mais dans des quantités qu'on peut imaginer contingentés et soumises aux objectifs macro-économiques d'une politique de soutien industriel aux entreprises locales. Les possibles effets bénéfiques sont d'autant moins sûrs que bon nombre des montres de ce segment de marché seront remplacées, au poignet des Chinois, par ces Apple Watch dont ils semblent si friands et qui leur seront indispensables au quotidien [n'oublions pas que les Chinois sont le plus numériquement le plus connecté de cette planète et qu'ils sont suréquipés en iPhone Apple]. De plus, il faudra réviser les plans marketing perturbés par la réduction des flux touristiques en Europe et aux Etats-Unis. Donc, pour conclure, on discerne dans cette politique économique beaucoup plus de dangers pour les montres suisses que d'avantages réels : ce sera sans doute plus bénéfique pour d'autres produits de luxe, comme les sacs à main, les parfums ou la cosmétique [pour lesquels l'industrie chinoise n'a pas encore le niveau requis et l'attractivité], mais certainement pas pour l'horlogerie, très exposée à une concurrence qu'elle a elle-même organisé et encouragé – n'oublions que les marques chinoises travaillent sur des machines suisses, avec des procédures suisses et des ingénieurs suisses, pour produire des montres « à la suisse »...
 
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