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JEUDI : La présidence de TAG Heuer serait-elle le match de trop pour Jean-Claude Biver ?

On a frôlé la bronca anti-Biver et le carton rouge : jamais les médias se s'étaient montrés aussi sceptiques sur une initiative du patron des montres LVMH. Néanmoins, il a pris un carton jaune pour rupture du prêt-à-penser sur les smartwatches et pour tacle un peu sévère sur Stéphane Linder. Il ne fait pas bon déranger le consensus mainstream de ceux qui ronronnent en rond...    ▶▶▶ EN RÉSUMÉIndiscrétions, …


On a frôlé la bronca anti-Biver et le carton rouge : jamais les médias se s'étaient montrés aussi sceptiques sur une initiative du patron des montres LVMH. Néanmoins, il a pris un carton jaune pour rupture du prêt-à-penser sur les smartwatches et pour tacle un peu sévère sur Stéphane Linder. Il ne fait pas bon déranger le consensus mainstream de ceux qui ronronnent en rond...

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  EN RÉSUMÉ
Indiscrétions, analyses, informations, enquêtes,
rumeurs & murmures (développements ci-dessous)...
 
❏❏❏❏ HYT : les hydromécaniciens sont-ils des nécromanciens (ci-dessus : la future Skull, avec son fluide rouge pour couronner une tête de mort in indiquant les heures) ? ❏❏❏❏ VALSE DES ÉTIQUETTES : l'effondrement du rouble a bon dos... ❏❏❏❏ TAG HEUER : le dernier tango à (faire des) paris... ❏❏❏❏ TAG HEUER (1) : le défi le plus casse-gueule de toute la vie d'un grand professionnel... ❏❏❏❏ TAG HEUER (2) : une occasion inespérée de reprendre la main face au Swatch Group... ❏❏❏❏ TAG HEUER (3) : qui sont les champions du nouveau Biver bashing❏❏❏❏ JEAN-CLAUDE BIVER : je t'aime, moi non plus... ❏❏❏❏ BIVERIX : le successeur d'Abraracourcix sur le pavois, au coeur du village gaulois helvète qui résiste à l'occupant romain américain face au tsunami des montres connectées... ❏❏❏❏ STATISTIQUES : les grands poètes lyriques de la FH ont fait très fort pour s'en tirer avec 4,4 % de chute... ❏❏❏❏ JOYEUX NOËL : dans notre série « Les plus belles vitrines des fêtes de fin d'année », les casseurs avaient un faible pour les montres des Ambassadeurs, à Genève (ci-dessous)...
 
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▶ LES 7 X 7 DU MARDI
De infos notées à la volée, en vrac,
en bref et toujours en toute indépendance... 
 
◉◉ STATISTIQUES HORLOGÈRES : les lecteurs de Business Montres savent bien à quel point le commentaire mensuel de la FH (Fédération horlogère suisse) à propos des statistiques horlogères d'exportation est un très réjouissant grand moment de poésie, qui mériterait un prix littéraire. C'est toujours le manège enchanté pour expliquer que tout va pour le mieux, même quand ce n'est pas exactement le cas. Ce mois-ci, nous avons droit à une géniale « baisse pour un des plus gros mois de l'année » ! Quand l'horlogerie chute de 4,4 % en un mois (novembre), qui est traditionnellement un des plus dynamiques de l'année, c'est la faute du « nombre de jours ouvrables » [salaud de calendrier] et, quand même, d'un « environnement moins favorable » [depuis combien de temps ne l'est-il plus ?]. Quand on chute de plus de 7 % (montres à moins de 3 000 CHF prix export), « le recul est assez homogène ». La Corée du Sud, qui portait tous les espoirs de l'Asie [Business Montres vous expliquait l'autre jour comme le pays concentrait à présent tous les flux de globe shoppers chinois], qui était le dernier moteur de la croissance en Asie et qui affichait 19 % de croissance depuis le début de l'année dernière, chute ce mois-ci de 1,7 % : elle « reprend son souffle », nous glisse le virtuose de la FH. Rien, en revanche, sur les 46,8 % de baisse du marché chinois depuis 2012. Un bon dessin valant tout de même mieux qu'un grand poète, on jettera un oeil sur l'état réel de la situation par gamme de prix (source : FH). Mais, à part ça, Madame la Marquise, tout va très bien, tout va très bien !
 
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◉◉ PERRELET : changement de CEO, avec l'arrivée aux commandes de notre ami Tristan Boyer de Bouillane, vétéran des grandes batailles de l'horlogerie (ex-Charriol, ex-Gérand Genta, ex-Breitling), en Europe comme en Asie. Un patron, c'est bien, mais pour quelle stratégie ? Depuis plusieurs années, Perrelet (groupe Festina) peine à s'inventer un avenir et, surtout, une place de référence sur le marché : une Turbine, c'est bien, mais ça ne peut s'imposer comme suffisant pour donner de la consistance à une marque... 
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◉◉ INFLATION : personne ne peut plus nier la dépression économique mondiale, et encore moins celle des industries du luxe (à une poignée d'exceptions près). Réponse stupéfiante des marques en panne de clients : augmenter les prix ! Exactement comme pendant les années de « bulle » et de vaches grasses. Ce qui ne va évidemment pas contribuer à pousser les amateurs à se bousculer dans les boutiques. Même en Russie, où il s'agit de compenser l'effondrement du rouble, c'est dangereux : 50 % d'augmentation des prix chez Cartier, rue Petrovska, à Moscou, est-ce bien raisonnable ? Prudemment, le Swatch Group reste dans l'expectative. Partout ailleurs dans le monde, c'est un peu suicidaire : + 40 % pour certaines montres Greubel-Forsey, était-ce indispensable ? 8 % chez Rolex, est-ce vraiment malin ? Et ainsi de suite. Ce n'est sans doute pas en reculant un peu plus le seuil d'accès aux marques qu'on rétablira la confiance avec les clients...
 
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◉◉ TAG HEUER (1) : le moins qu'on puisse dire, c'est que Jean-Claude Biver n'a pas convaincu grand monde avec sa conférence de presse de « partage ». Prévenu du contenu des annonces par Business Montres (16 décembre), qui avait dévoilé la composition de la nouvelle « garde rapprochée » de Jean-Claude Biver [tout en confirmant nos analyses de lundi dernier, notamment sur le nouveau rôle de Guy Sémon : ci-contre, à gauche], les médias n'en avaient pas moins été circonscrits par le « lobby anti-Biver » qui s'est formé à l'occasion des changements à la direction de TAG Heuer. Lobby ? Le mot n'est pas trop fort, entre les solidarités naturelles de la Watch Valley, les bivérophobes rabiques et les Machiavel qui oeuvrent en coulisses – sans parler des classiques ahuris journalistiques qui nous rejouent en permanence « la voix de son maître », mais à contretemps et sans comprendre que celui qui ironisait hier sur les smartwatches en est à présent un des plus farouches pionniers pour le Swiss Made. Ceci sans tenir compte des habituelles pythies qui « savaient tout » avant les autres, mais qui se gardaient bien d'en informer leurs lecteurs...
 
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◉◉ TAG HEUER (2) : donc, scepticisme, incompréhension, mauvaise formulation du message et – c'est le moins qu'on puisse dire – manque de conviction, tant de la part de la nouvelle « garde rapprochée » que du service de communication de TAG Heuer, un peu aux abonnés absents dans cet épisode [on serait déstabilisé à moins]. On avait connu Jean-Claude Biver bien meilleur sur des dossiers plus délicats, même si sa nouvelle mission chez TAG Heuer relève de la prise de risques maximum : le repositionnement d'urgence de TAG Heuer, à plus forte raison en phase de décroissance du marché, est autrement plus casse-gueule que la relance de Hublot, le recalage de Zenith en fournisseur officiel de mouvements au groupe LVMH ou, auparavant, la création de Blancpain ou la  révolution marketing chez Omega. C'est peut-être même, à près de 67 ans, le plus grand défi qu'il se soit imposé : ça passe ou ça casse ! Si ça passe, Jean-Claude Biver aura eu plus d'importance que quiconque dans le dernier demi-siècle de l'horlogerie suisse [à égalité, sinon un ton au-dessus de Nicolas Hayek]. Si ça casse, on effacera tout et il glissera vers les oubliettes de l'histoire : plus personne ne pourra, ni ne voudra le connaître. C'est dire à quel point il veillera sur le dossier TAG Heuer avec un soin tout particulier et avec une mobilisation de tous les instants, sans tolérer la moindre fantaisie à ses équipes. L'enjeu est trop important pour se permettre le moindre écart de la ligne stratégique fixée...
 
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◉◉ TAG HEUER (3) : crédible, la focalisation sur les smartwatches imposée après tant d'atermoiements des responsables de l'industrie des montres ? Évidemment, et ce n'est pas Business Montres – qui tire la sonnette d'alarme depuis deux ans – qui regrettera cette prise de conscience tardive. La future « T-Watch » peut-elle sauver TAG Heuer, marque un peu déboussolée coincée dans les mâchoires du Swatch Group quelque part entre Omega, Longines et Tissot ? C'est au moins une tentative de réponse volontariste à cet enfermement et à cette tentative de strangulation, à laquelle TAG Heuer n'avait pu répondre que par une montée en gamme pas forcément plus convaincante à moyen terme. C'est aussi un refus d'insulter l'avenir : si l'industrie suisse a tous les moyens de produire des smartwatches (disons le hardware), il ne lui manque que des logiciels et des puces (c'est-à-dire le software). C'est pour ça que Guy Sémon a beaucoup voyagé aux Etats-Unis, pour aller chercher l'intelligence qui manque aux montres suisses : c'est peut-être du côté d'Intel que la « T-Watch » a trouvé ses neurones. Ce choix de Jean-Claude Biver redonne à TAG Heuer une bouffée d'oxygène et un nouveau espace stratégique : Nick Hayek, qui s'est fait plusieurs fois éconduire par des Américains sur le terrain du high-tech [voir ses initiatives précédentes, notamment avec Microsoft], en a développé une phobie incapacitante qui l'empêche aujourd'hui non seulement de faire confiance à des partenaires américains dans ce domaine, mais aussi de prendre des initiatives cohérentes sur ce marché. À ce jour, il manque toujours au sein du Swatch Group le laboratoire ou les équipes capables de concevoir des smartwatches qui soient vraiment intelligentes et innovantes. Donc, avec le soutien total de Jean-Claude Biver, Guy Sémon a carte blanche pour imaginer de nouvelles solutions et des applications qui concilient tradition horlogère et connexions d'avant-garde. Si la première « bataille du poignet » [la carpo-révolution évoquée par Business Montres, qui est le « tsunami » annoncé par Guy Sémon] est déjà perdue face aux géants Apple et Samsung, l'irréductible village gaulois helvète peut hisser sur ses boucliers le chef Biverix, aujourd'hui seul capable de résister aux occupants romains américains !
 
◉◉ JEAN-CLAUDE BIVER : alors, le match de trop ? En évitant de se laisser contaminer par le grand cirque du nouveau Biver bashing – les médias sont toujours prompts à brûler ce qu'ils adoraient – et sans perdre de vue les urgences stratégiques du moment, il faut admettre que Jean-Claude Biver est le seul grand patron suisse à pouvoir sauver les meubles face aux smartwatches – qui sont, répétons-le ici, et sans paraphraser Guy Sémon qui a repris notre sentiment du danger – un véritable risque de tsunami pour l'industrie suisse des montres. Niveau de danger de ce tsunami : magnitude 9 sur l'échelle de Richter. Nick Hayek ayant calé face à cette menace, qui à part lui avait le charisme et l'autorité suffisante pour réagir ? Si c'est le match de trop et si Jean-Claude Biver échoue, c'est toute l'industrie qui fera naufrage. Donc, au lieu de parier sur la défaite du nouveau CEO de TAG Heuer et sur la faillite de son équipe, on ferait mieux de faire confiance à sa vista et à sa bonne étoile d'« homme providentiel ». Certes, le repositionnement de TAG Heuer a été mené à la hache, sinon à l'arrache, sans tendresse, ni patience pour un personnel un peu traumatisé par un virage à 180° opéré dans l'urgence – mais il y avait le feu dans la maison : chiffre d'affaires en légère baisse et résultat opérationnel en chute libre [ce qui ne se fait pas chez LVMH]. Certes, Jean-Claude Biver n'a plus 20 ans, il n'a pas vraiment l'expérience des marchés de volume à prix accessible et une relance de marque est toujours extrêmement délicate dans une économie en décroissance globale, face à des concurrents impitoyables — mais Jean-Claude Biver avait-il le choix face au Swatch Group et avec l'épée de Damoclès des smartwatches au-dessus de sa nuque ? Certes, le risque d'échouer n'est pas négligeable – mais 40 ans d'expérience peuvent faire la différence, d'autant que le patron des montres LVMH est un des seuls à savoir non pas une expérience directe des vraies crises, mais à avoir été l'élève et le fils spirituel des grands survivants des crises précédentes (on pense ici à Nicolas Hayek)...
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