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GENEVA WATCH DAYS #05 (accès libre)
Les dix enseignements à retenir de cette édition 2020 des Geneva Watch Days

C’était très bien, c’était très dense, c’était très efficace, mais il faut maintenant tirer les premières leçons de l’expérience GWD pour préparer la suite. Parce qu’il y aura forcément une suite : on ne change pas une équipe qui gagne !


On peut d’ores et déjà tirer quelques premières conclusions de ces Geneva Watch Days 2020, qui ont sauvé l’honneur de l’horlogerie suisse en proposant le seul salon horloger de toute l’année 2020 (annoncé comme tel par Business Montres le 24 août) : « Tout est perdu, fors l’honneur » (François Ier), c’est déjà beaucoup ! Voyons quels pourraient être les dix leçons principales à retenir de cette édition de rentrée après un premier semestre chahuté…

❑❑❑❑ 1 – C’ÉTAIT LA BONNE IDÉE, le bon format à la bonne date et au bon endroit : merci à Jean-Christophe Babin (Bvlgari) d’avoir osé, à MM. Kern (Breitling), Pruniaux (Kering), Büsser (MB&F) et aux indépendants qui ont suivi d’avoir osé l’imaginer tout cela, d’avoir tenu bon avec des nuages aussi noirs à l’horizon et d’être allés jusqu’au bout de leur concept. Merci aux autorités de Genève (Pierre Maudet) d’avoir soutenu cette initiative. Merci à la cinquantaine de détaillants présents sur place [les affaires n’ont pas été mauvaises du tout] et à la petite centaine de journalistes en maraude à Genève d’avoir animé ces GWD 2020. Enfin, merci à toute la communauté horlogère internationale, physiquement disséminée sur tous les marchés mais digitalement rassemblée grâce aux nouvelles technologies, d’être restée mobilisée pendant ces quatre jours…

❑❑❑❑ 2 – C’EST UNE IDÉE À SUIVRE et chaque marque participante – organisateurs compris – songe déjà à une formule de Watch Days de ce format qu’on pourrait décliner à Dubaï comme à Miami, à Tokyo ou à Paris. La formule est déposée, on peut la franchiser aisément et en faire le drapeau fédérateur des salons horlogers de nouvelle génération, sinon le off créatif et parallèle, clairement labélisé, des grands salons traditionnels.

❑❑❑❑ 3 – LE PHYSIQUE ET LE DIGITAL ne sont absolument pas incompatibles. Avec son studio nomade (la Zoom room ci-dessus), Bvlgari a prouvé qu’une batterie de caméras haute définition, de bons éclairages et une gestion intelligente des rendez-vous permettaient de présenter les montres digitalement et dignement, avec souvent plus d’efficacité que dans le salon de vente d’un salon. Les GWD, c’était l’activité visible à Genève même, mais aussi la mobilisation intensive de l’horlogerie à travers le monde : une tenaille aux mâchoires très efficaces, surtout pour le budget consenti. Comme quoi l’idée d’un salon « 3 x 1 » (unité de lieu, de temps et d’action) peut également se comprendre et s’apprécier à distance : présentiel et distanciel sont désormais de mise dans les manifestations horlogères. À un détail : le distanciel ne s’entend que quand les personnes mobilisées sont loin, sur leur marché d’origine : ça devient ridicule et impossible quand les détaillants sont dans le salon d’à côté…

❑❑❑❑ 4 – UNE INITIATIVE IMBATTABLE du côté de son rapport qualité-prix : on était, selon les cas, au dixième, au vingtième, au trentième, voire au centième des budgets sacrifiés pour Baselworld ou le SIHH, mais avec un retour sur investissement explosif, non seulement en tenant compte de la chronapocalypse 2020, mais même sur la base de l’activité habituelle. On peut donner une image de luxe décontracté sans débauche statutaire, ni étalage ostentatoire. On a beaucoup travaillé dans les salles de vente comme pendant les conférences en ligne – la magie Zoom, c’est aussi de pouvoir délivrer le même message au même moment à toutes les forces de vente qui n’étaient pas sur place. Donc, même les indicateurs économiques sont au vert pour les marques participantes ! Et quel fabuleux coup de poing médiatique pour les marques embarquées dans l’opération : par les temps de pandémie qui s’annoncent à nouveau, c’est très précieux…

❑❑❑❑ 5 – LES PETITS ONT BESOIN DES GROS et les indépendants des marques intégrées, et vice versa.  CQFD : la clé de la réussite, c’est la diversité et la richesse biologiques d’un concept communautaire [quel que soit son format] dès lors qu’il intègre toutes les familles de l’horlogerie. S’il n’y a aucune comparaison possible entre Bvlgari et Bernhard Lederer, les deux sont indispensables à la survie et à la prospérité de l’écosystème horloger. Les créateurs indépendants et les « petites marques » sont le seul et le poivre de tout festin horloger. Ceux qui ne le comprennent pas devraient relire d’urgence la fable « Le lion et le rat » de l’excellent M. de La Fontaine…

❑❑❑❑ 6 – QUAND C’EST COOL ET RELAX, on peut vraiment s’amuser sans trop dépenser. Rien de plus convivial que la tente qui servait de restaurant [c’était le seul vrai loupé des GWD] et surtout de terrasse nocturne, conviviale et relationnelle en diable. Du coup, les marques pouvaient se laisser aller à des jeux de mots (le « Time is Moinet » sur les T-shirts de Louis Moinet : ci-dessus) ou la nouvelle collection horlogère jamais imaginée auparavant (les gels hydroalcooliques personnalisés par les marques : ci-dessous).

❑❑❑❑ 7 – ON PEUT SE PASSER D’INVITER aussi bien les médias que les détaillants : c’est même le fait de les inviter qui crée des tensions et des confrontations entre les « officiels » et les « parasites » [les marques qui ont payé le prix fort pour inviter leurs ouailles ont de bonnes raisons de s’énerver quand celles-ci vont baguenauder chez ceux qui n’ont rien payé]. Pendant les GWD, personne ne se souciait de savoir qui était on et qui était off : on avait éliminé les facteurs conflictuels entre les marques, qui ne craignaient pas de se côtoyer dès lors qu’elles n’avaient plus à se confronter ! Si on n’invite personne, seuls les plus motivés – centralement ou localement – font acte de présence, les autres participant grâce aux animations digitales mises en place. Georges Kern (Breitling) a prouvé, en présentant sa nouvelle endurance Pro, qu’on pouvait être à la fois très pertinent et très percutant, avec des participants physiques comme sur les réseaux sociaux. Bref, l’invitation… c’est ringard et ça relève d’une approche obsolète du luxe et d’une conception erronée de ce que doit être une horlogerie digne de ce nom !

❑❑❑❑ 8 – LES ABSENTS ONT TOUJOURS TORT et on ne compte plus les marques – petites et grandes – qui se mordent les doigts de n’avoir pas cru au concept des GWD ou de n’avoir pas pu ou pas voulu s’inviter à cette fête de la famille horlogère retrouvée. Des parts de marché commerciales ou médiatiques ont été prises à moindres frais. Dans l’habituel dispendieux tohu-bohu bâlois, l’Aluminium de Bvlgari n’aurait pas « cartonné » à ce point. Certains présentations sporadiques de cet été auraient sans doute gagné à profiter des GWD. Une telle occasion unitaire ne se représentera plus avant 2021...

❑❑❑❑ 9 – POURVU QUE CE SUCCÈS DES GWD donne des idées – et des bonnes – aux futurs organisateurs des salons de Genève, de Lausanne et de Bâle, ne serait-ce que pour les convaincre des différents points évoqués ci-dessus ! Pourvu qu’ils mettent en place un protocole « 3 x 1 » capable de fédérer tout le monde au sein d’un même événement sous un même toit à la même date : une convention vient d’être signée entre le « groupe Rolex » et le groupe Richemont, mais il semblerait qu’elle n’aille malheureusement pas dans ce sens – qui relève pourtant du bon sens !

❑❑❑❑ 10 – TOUT CECI NE RESTE CEPENDANT POSSIBLE qu’avec des contraintes sanitaires modérées – ce qui était le cas pour cette première édition genevoise, avec des dispositions prophylactiques à peu près respectées par tout le monde. Il faut cependant qu’il y ait une masse critique de présence physique minimale pour enclencher une réaction en chaîne digitale de belle ampleur : toute mesure supplémentaire de confinement et tout durcissement sanitaire de la règle du jeu remettrait en cause cette énergie physique initiale, et donc l’allumage de l’explosif numérique.


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