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LVMH : Les chiffres horlogers que Bernard Arnault ne vous donnera pas aujourd'hui...

C'est comme si ces chiffres sortaient du cartable de Bernard Arnault. D'ailleurs, peut-être en sortent-ils... En raison de son exclusivité, la lecture privilégiée de ce travail d'analyse et d'intelligence économique sera réservée à nos seuls abonnés Platine. Elle reste cependant accessible à tous les autres lecteurs par paiement à l'unité.    ▶ NON OFFICIEL ET NON AUTORISÉLes comptes horlogers déconsolidés... ◉◉◉◉ Merci, M. Arnault, pour les …


C'est comme si ces chiffres sortaient du cartable de Bernard Arnault. D'ailleurs, peut-être en sortent-ils... En raison de son exclusivité, la lecture privilégiée de ce travail d'analyse et d'intelligence économique sera réservée à nos seuls abonnés Platine. Elle reste cependant accessible à tous les autres lecteurs par paiement à l'unité.

 
 
 
▶ NON OFFICIEL ET NON AUTORISÉ
Les comptes horlogers déconsolidés...
 
◉◉ Merci, M. Arnault, pour les beaux résultats consolidés que vous annoncerez pour 2012. Nul doute que les analystes n'en soient collectivement épatés, même si on les sent un peu enclins, ces derniers temps, à chercher la petite bête dans vos comptes annuels et à s'inquiéter du ralentissement en cours. Une simple question : à quoi servent des comptes consolidés pour des marques horlogères aussi disparates et confrontées à des situations de marché aussi différentes ? Pour faire avancer la discussion, voici les vrais chiffres du pôle horloger, à quelques euros près (décimales pour arrondir). Des résultats à rapprocher de nos estimations Business Montres du 10 janvier dernier, qui portaient sur les neuf premiers mois de l'année et les résultats estimés du dernier trimestre : on vérifiera aisément que nous étions en ligne avec ces résultats définitifs...
 
◉◉ Les chiffres que nous publions ici ne sont plus des estimations : disons qu'ils sont tombés du cartable personnel de Bernard Arnault, que nous remercions vivement à cette occasion. Il va de soi que ces chiffres horlogers déconsolidés ne sont ni officiels, ni autorisés. Ce travail d'analyse et d'intelligence économique ne relevant pas des contenus rédactionnels habituels du Quotidien des Montres, ils ont été réservés à nos meilleurs abonnés (Platine), qui avaient déjà bénéficé de nos estimations précédentes, ainsi que de leur décodage avec nos commentaires. On pourra également rapprocher ces données de nos analyses précédentes sur la profitabilité horlogère du groupe (3 février 2012 : accès libre) et de notre examen détaillé des super-chiffres de 2012 (6 février 2012 : accès libre)...
 
◉◉ Il sera facile à chacun de comparer les chiffres totaux que nous annonçons et ceux qui seront annoncés par Bernard Arnault (en cartouche et ci-dessous : dessin de Mike Eppe)quand il présentera les chiffres du groupe LVMH pour l'année 2012. La marge d'erreur revendiquée par Business Montres ne devrait pas excéder les 1 % à 3 % maximum, compte tenu du dernier coup de polish cosmétique et de l'intégration in extremis de nouveaux résultats, notamment ceux des joint-ventures entre certaines marques et d'autres entreprises soit du groupe (par exemple, Dior), soit extérieures au groupe (par exemple, De Beers)...
 
 
 
 
▶ COMMENTAIRES
La cosmétique « publiée » et la vérité « organique »...
 
◉◉ En apparence, c'est formidable : 45 % de croissance publiée pour le pôle Watches & Jewelry, avec 26 % de croissance des profits (résultat opérationnel), c'est une belle performance sur un marché en crise. L'intégration de Bvlgari dans les comptes LVMH a en apparence produit les effets dopants attendus. Sauf que... la vérité est ailleurs ! En s'en tenant à la croissance organique, seule base de comparaison pertinente, la situation est beaucoup moins brillante : on tombe alors sous les 10 % (tout dépend de la base considérée) – ce qui est beaucoup moins glorieux. On est assez loin de la croissance attendue (annoncée) et pas tout-à-fait en ligne avec les résultats globaux de la profession...
 
◉◉ Les chiffres de pure players horlogers et ceux des marques de joaillerie ont été séparés, puisque c'est désormais la pratique à l'état-major du groupe, avenue Montaigne. On notera que les performances publiées de Bvlgari permettent de faire passer la pilule d'une sous-performance globale et chronique des marques de joaillerie (ce qui serait encore plus vrai si on intégrait Dior dans ce groupe de marques) : le rachat de Bvlgari visait à relancer le dispositif joaillier du groupe, mais c'est loin d'être effectif...
 
◉◉ Quelques précisions sur les chiffres ci-dessus, puisés aux meilleures sources : il peut exister certains décalages dans les décimales, mais sans impact autre qu'anecdotique sur le résultat final. De même, compte tenu de l'enchevêtrement des filiales et de la complexité du montage de certaines joint-ventures, il est possible que quelques résultats commerciaux de marques du sous-groupe joaillerie ne soient pas consolidés dans ces chiffres du pôle horloger-joaillier [dans ce cas, qu'on nous indique clairement dans quelles autres pages du rapport d'activités on doit les prendre en compte !]. Cela ne changerait que marginalement le résultat annuel des marques considérées et celui du pôle...
 
 
◉◉ TAG HEUER reste la « vache à lait » de la division Montres & Joaillerie, surtout par le volume de ses profits (58 % du résultat opérationnel de l'ensemble, alors que le chiffre d'affaires n'en représente que 27 %) : un score superbe pour Jean-Christophe Babin [qui n'est donc pas si loin du milliard de francs annoncé : 929 millions en contre-valeur LVMH – taux de change pratiqué dans le groupe], mais son taux de profitabilité s'est partiellement érodé du fait de coûts d'accès au marché toujours croissants (ouvertures de boutiques et communication). Ses concurrents – essentiellement ceux du Swatch Group, mais aussi Tudor – lui mènent la vie dure : son successeur – pas encore désigné à ce jour, ce qui est un facteur de déstabilisation – risque de s'emparer des commandes à un moment plus critique que ces quasi-200 millions de profits annuels (en euros) pourraient le laisser penser...
 
◉◉ HUBLOT continue sur sa lancée des années précédentes, mais un ton légèrement au-dessous, avec une belle fin d'année 2012 [par rapport à nos précédentes estimations] et des perspectives 2013 nettement plus imprévisibles en termes de croissance. 349 millions de CHF, ça reste tout de même substantiel pour une année de transition entre Jean-Claude Biver et Ricardo Guadalupe. Il reste à espérer que les récentes parties de chaises musicales (commercial et marketing) ne déstabiliseront pas une marque qui s'attarde encore dans une transition difficile entre son style de start-up explosive et son intégration dans le groupe LVMH...
 
◉◉ La bonne surprise des chiffres 2012 reste l'explosion de ZENITH, tant pour le chiffre d'affaires que pour le résultat opérationnel – même si la marque reste nettement sous-profitable au regard des normes LVMH. Question d'investissements industriels lourds, de requalification de l'offre et de remise à niveau du réseau commercial : Jean-Frédéric Dufour est loin d'en avoir fini avec son reformatage de la manufacture Zenith, mais il reste le plus prometteur de la jeune garde LVMH en termes de croissance dans les années à venir...
 
◉◉◉◉ La faiblesse de DIOR semble se confirmer, avec un recul tendanciel du chiffre d'affaires, assorti d'une aggravation non moins tendancielle des pertes. On reste à des niveaux négatifs insignifiants pour un groupe comme LVMH, qui peut consentir à ses marques des facilités pour prendre des parts de marché et pour consolider leur outil productif, mais cette spirale de résultats décevants reste alarmante. La marque est magnifique. Elle est respectée. Elle s'est bien reprise sur le plan joaillier et horloger, mais quelque chose n'embraye pas pour les montres et les bijoux Dior, alors que les collections sont consistantes et le marketing souvent intelligemment déployé de la part d'une direction bien menée. Que faire ?
 
◉◉ BVLGARI apporte une volume d'affaires considérable au pôle, mais avec un impact encore limité sur les profits : manifestement, les procédures LVMH n'ont pas encore été totalement intégrés, ni le ménage terminé en interne. Déstabilisée par le départ chez Louis Vuitton (marque) de Michael Burke, dont Francesco Trapani assurait l'intérim, la marque l'a été une seconde fois par l'annonce de l'arrivée prochaine de Jean-Christophe Babin [ce qui a ralenti les opérations du fait de l'attentisme des équipes], puis par les tracasseries de la justice italienne contre les anciens dirigeants de la marque, avant son intégration dans le groupe LVMH [pas bon pour le moral des troupes, ni pour celui des cadres !]. La marque n'en est pas moins magnifique par le potentiel de son patrimoine et de son levier sur le marché. Même s'ils sont en progrès, les profits restent modestes comparés à la taille de la marque et les perspectives de développement toujours au point mort tant que Jean-Christophe Babin n'aura pas la pleine responsabilité des commandes : avec les six premiers mois de l'année au ralenti, l'année 2013 risque d'être une année blanche, alors que les concurrents affûtent leurs armes sur le marché mondial de la joaillerie, nouveau champ clos des groupes de luxe (Cartier pour Richemont, Harry Winston pour Swatch Group, Boucheron pour Kering, Tiffany & Co pour ses futurs actionnaires, etc.)...
 
◉◉ On se demande parfois si CHAUMET n'est pas la Belle au bois somnolant du groupe LVMH, à défaut d'être la Belle au bois dormant de la place Vendôme, adresse magique partout dans le monde, sauf pour les marques LVMH : au fil des années, les profits de Chaumet se sont érodés, jusqu'à repasser depuis maintenant deux ans dans les chiffres rouges, alors que le chiffre d'affaires est en augmentation. Et personne n'a fait état des investissements majeurs et impérieux qui justifieraient les pertes constatées cette année. Comme pour Dior, que faire ? Les collections sont bien composées et la direction s'est réveillée, mais le marketing patine en cherchant à la marque de nouvelles raisons de rêver d'un nouveau destin – qu'elle mérite. Est-ce vraiment si épuisant d'être soi-même, tout simplement ?
 
◉◉ On peut passer pudiquement sur DE BEERS et FRED, marques qui font, certes, du chiffre d'affaires mais en plombant chroniquement les comptes de la division Watches & Jewellery par leurs pertes. Bernard Arnault n'a pas la main heureuse avec ses joailliers : il n'aura jamais sa statue au sommet d'une colonne Vendôme qui ne lui veut pas du bien ! On remarquera que les chiffres rouges consolidés de Dior, Chaumet, De Beers et Fred annihilent les profits de la marque Hublot : à force, les analystes vont finir par le remarquer et par se demander quelles sont les probabilités pour un retour éventuel de ces marques à la profitabilité. Comme le chiffre d'affaires de Fred et De Beers ne pèse pas réellement dans les comptes du groupe, auquel leur existence n'apporte pas plus que leur existence s'impose au marché, ne serait-il pas temps de passer la main à des opérateurs plus chanceux, en recentrant les ressources du groupe (et l'énergie du pôle horloger) sur des marques potentiellement plus explosives ?
 
◉◉ Revendre, même pour un euro symbolique, des références aussi démonétisées que Fred ou De Beers permettrait au groupe, sinon de relancer Dior et Chaumet, mais aussi de racheter quelques marques qui manquent à son portefeuille horloger-joaillier, à la fois dans la très haute horlogerie et dans le vivier des nouveaux créateurs indépendants, mais en regardant aussi du côté de ces grandes joailleries familiales qui ne demandent qu'à exploser si on leur donne les moyens d'intervenir sur le marché mondial (Buccellati, qui vient de céder une partie de son capital à un fonds italien, ou Pomellato, marque dont rêve le Swatch Group). Y a-t-il un stratège horloger dans l'avion ? Parfois, on aimerait en être sûr...
 
◉◉ Au final, les perspectives 2013 sont assez contrastées, et probablement décevantes : sur le plan commercial, les trois premiers mois de l'année n'ont pas été à la hauteur des promesses attendues pour les marques LVMH d'horlogerie-joaillerie, souvent à la traîne par rapport aux budgets faits dans l'euphorie de 2012. Les ennuis fiscaux personnels de Francesco Trapani en Italie n'ont pas amélioré la situation. TAG Heuer semblait s'essouffler (en moyenne - 10 % par rapport à 2012), ce qui n'était pas le cas de Hublot (+ 15 %) ou de Zenith (+ 10 %), mais Bvlgari reculait de 5 % et Chaumet de 20 %. Compte tenu des effets de volume, pour les seuls mois de janvier et février, le pôle horloger reculait de 5 % par rapport à 2012 (199 millions en janvier, 189 millions d'euros en février). Même évolution décroissante pour mars. C'est une tendance inquiétante, les ventes du groupe étant déjà en repli (avec une croissance toute même positive entre 6 % et 9 %) , mais surtout par rapport aux concurrents horlogers qui caracolent encore sur la lancée de 2012...
 
◉◉ Précision supplémentaire pour la route : ces chiffres ne peuvent de toute façon donner qu'une image inexacte et imparfaite du poids réel de LVMH sur le marché horloger : ils ne tiennent compte ni des résultats de l'horlogerie-joaillerie Louis Vuitton [comptez une petite centaine de millions d'euros], ni des résultats horlogers des licences plus ou moins gérées [avec plus ou moins de transparence] par le groupe et ses vecteurs annexes (groupe Taramax, groupe TWC, voire du côté des investissements en Asie).  
 
 
 
 
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