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MARDI : Alors, comme ça, tout va bien, les indicateurs sont au vert, les actions des groupes sont à la hausse et les statistiques horlogères baignent dans l'huile ?

Avec un peu de Prozac et n'écoutant que le robinet d'eau tiède du mainstream horloger, on peut considérer que tout va encore à peu près bien. Pour le reste, il n'est pas interdit de prendre des risques : regardez ce qui se passe du côté de Lip... ▶▶▶ EN RÉSUMÉ (le tout développé après le résumé ci-dessous)Indiscrétions, analyses, informations, 


Avec un peu de Prozac et n'écoutant que le robinet d'eau tiède du mainstream horloger, on peut considérer que tout va encore à peu près bien. Pour le reste, il n'est pas interdit de prendre des risques : regardez ce qui se passe du côté de Lip...

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EN RÉSUMÉ
(le tout développé après le résumé ci-dessous)
Indiscrétions, analyses, informations, enquêtes, rumeurs & murmures...
 
❏❏❏❏ LA TENTATION DU LIFE STYLE (ci-dessus : une campagne pour la Linde Werdelin SpidoLite)...
❏❏❏❏ PHILIPPE MISE SUR LA RÉTRO-NOSTALGIE DES SEVENTIES...
❏❏❏❏ QUI VEUT RISQUER SES ÉCONOMIES AU CASINO BOURSIER ? 
❏❏❏❏ QUATRE MOIS DES RECORDS POUR JEAN-CLAUDE...
❏❏❏❏ JEAN-FRANÇOIS S'OFFRE UN FRISSON EN PROTOTYPE... 
❏❏❏❏ FRANÇOIS-PAUL, ANTOINE, VIANNEY SOUS LE MARTEAU CHINOIS... 
❏❏❏❏ TOUT COMME FELIX, ANDREAS, JEAN-MARC ET JEAN-FRANÇOIS...  
❏❏❏❏ MORTEN ET LINDE SE PIQUENT DE DANDYSME INDUSTRIEL... 
❏❏❏❏ SANS PARLER DE TOUTES LES AUTRES INFOS... 
❏❏❏❏ LE MANS, C'EST DANS TROIS SEMAINES (ci-dessous : une LMP2 Franck Muller)...
 
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▶ LES 7 x 7 DU MARDI
Quelques informations horlogères
un peu dissonantes dans le concert
de propos lénifiants qui nous enfument...
 
◉◉ EST-CE QUE TOUT VA BIEN ? À en croire l'envolée boursière des cours de l'action Swatch Group ou de l'action Richemont (toutes deux à nouveau orientées à la hausse, l'horlogerie ne s'est jamais aussi bien portée. L'action LVMH est nettement au-dessus de ce qu'elle était il y a six mois. Même Kering se ressaisit. Mieux : les actions des réseaux horlogers chinois – ceux-là même qui se plaignent de ce qui leur arrive à Hong Kong – s'apprécient à la Bourse de Hong Kong : Sincere a pratiquement doublé depuis l'année dernière ! Il est vrai que toutes les Bourses du monde entier surperforment : le cours des actions a doublé en cinq ans à Wall Street. Il a doublé en deux ans à Tokyo. Les bourses européennes suivent le mouvement depuis que la Banque centrale européenne a décidé d'injecter des liquidités dans la machine. Ces mouvements haussiers sont malgré tout largement déconnectés de la réalité économique, comm on peut le vérifier avec les indices de croissance : créer de la monnaie n'est pas créer des richesses – et tous les économistes s'accodent à penser que ça finit même par créer de la pauvreté. Donc, prudence : les emballements de l'économie-casino sont des transactions électroniques virtuelles, pas des ventes réelles de montres au client final. Demandez aux fournisseurs de l'industrie horlogère s'ils ressentent la moindre amélioration dans leurs carnets de commande !
 
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◉◉ EST-CE QUE TOUT VA MAL ? Sans doute pas ! Avenue Montaigne, les économistes de l'état-major du groupe LVMH n'en reviennent pas : la compilation des chiffres d'affaires réalisés par les marques horlogères depuis le début de l'année laisse penser à un année record. Janvier, février, mars, avril : ce sont les quatre meilleurs mois commerciaux jamais réalisés par Hublot – on en serait déjà 15 % de croissance – ou même par TAG Heuer [difficile à croire, mais apparemment vrai]. Bvlgari plane également sur la supposée « crise » [celle dont parlent les distributeurs de Hong Kong] avec un taux de croissance à deux chiffres. Il semblerait que ni Rolex [qui n'a pourtant pas fait des étincelles en 2014, avec des ventes orientées à la baisse selon nos estimations], ni Audemars Piguet ne soient à plaindre pour cette première partie de l'année. Moralité : la situation est particulièrement VICA (volatile, incertaine, complexe, ambigüe) : c'est l'acronyme-clé pour essayer de comprendre ce qui se passe sur les marchés, avec des renversements de tendance ultra-rapides et des reconfigurations imprévisibles. Les marques vont voir s'ouvrir un boulevard sur certains marchés et pour certains modèles, quand elles sont pratiquement naufragées sur d'autres marchés et pour d'autres modèles.
 
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◉◉ EST-CE QUE TOUT ESPOIR EST CONDAMNÉ ? (1) En mode VICA, il n'y a qu'une seule interdiction formelle : ne rien faire. C'est pourtant la posture de nombreuses directions de marque, qui adoptent un profil de plus en plus bas, sans plus prendre le moindre risque, pour ne pas se mettre en faute. en revanche, il n'est pas interdit d'avoir de bonnes idées et de tenter des « coups ». C'est ce que vient de faire le groupe familial français SMB, de Châtillon-le-Duc, dans le Doubs. SMB, c'est l'ombrelle horlogère de marques comme GO (Girl Only), Hector H, Tekday ou Certus, ainsi que des licences comme celles des montres All Blacks. Dirigé par Philippe Bérard, le groupe a été fondé en 1976 : il emploie à peu près 120 personnes, pour un chiffre d'affaires un peu supérieur à 30 millions d'euros. Son idée a été de relancer la marque Lip, le plus grand nom historique de l'horlogerie française, assassiné vers la fin des années 1970 par les illusions gauchistes de syndicalistes intransigeants (ci-dessous) autant que par les illusions soviéto-technocratiques du gouvernement de gauche au pouvoir après 1981 [personne n'a oublié le fatal Meccano horloger tenté à l'époque pour sauver l'horlogerie française – à comparer à la reconstruction de l'horlogerie suisse réussie, au même moment par un entrepreneur privé comme Nicolas Hayek]. Bref, plus de Lip et la marque avait fini par se retrouver entre le mains d'un sympathique opérateur du Gers, Jean-Claude Sensemat (MGH), qui n'y connaissait rien – tout en étant persuadé de tout comprendre – et qui a parachevé la mise à mort de la marque par l'exploitation charognarde de son image et de son héritage. On a donc vu des Lip offertes comme des gadgets avec des abonnements, des collections de piètre qualité sous-traitées en Asie et une distribution aberrante. Jusqu'à ce que MGH jette l'éponge et se cherche un vrai partenaire horloger pour faire des vraies montres avec un vrai projet de marque pour Lip. C'est là que l'entrepreneur Philippe Bérard a décidé de prendre le risque de faire renaître Lip à une vie horlogère digne de son nom et de son passé. Mission presque impossible après les aberrations précédentes, mais l'obstination est une valeur identitaire comtoise (on se souvient du fameux « Comtois, rends-toi ! Nenni, ma foi : jamais Comtois ne se rendra ! »)...
 
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◉◉ EST-CE QUE TOUT ESPOIR EST CONDAMNÉ ? (2) Première décision de SMB : ramener Lip près de Besançon, son berceau historique. C'est symboliquement très puissant, quarante ans après le conflit qui a marqué les mentalités locales. Deuxième bonne idée : accepter le réel. Pour Philippe Bérard, « c'est sans doute le bon moment pour relancer Lip. Les nouvelles générations adorent le design des années 1970, qui est au coeur de l'identité Lip. Lip, c'est le vintage au goût du jour (ci-dessous : la Lip Mach 2000 de Roger Tallon). La consistance historique de la marque est restée intacte : le général De Gaulle, Churchill, le Concorde, le TGV. La nostalgie de ces années d'avant les crises est intacte :Lip, c'est l'image d'une certaine grandeur nationale française. Ajoutons-y la notoriété spontanée de la marque, restée très puissante alors que Lip n'est virtuellement plus sur le marché : la marque reste citée en tête de liste chez les plus de cinquante ans et dans les cinq premières pour l'ensemble de la population. Il aurait été dommage de ne rien tenter pour capitaliser sur cette notoriété ». Troisième initiative intelligente : limiter les risques. Entrepreneur familial prudent, Philippe Bérard n'a pour l'instant signé qu'un accord de licence avec MGH, qui conserve la propriété de la marque, avec une option d'achat au terme des dix ans du contrat : dix ans, cela sera suffisant pour tester le marché. Quatrième et dernier atout de SMB pour relancer Lip : la volonté de bien réancrer la marque dans le paysage horloger, avec des produits de qualité dans un réseau HBJO de qualité (une cinquantaine de détaillants ont été sélectionnés). Les nouvelles collections – assemblées en France chez SMB, avec des composants d'habillage aussi bien français et européens qu'asiatiques – privilégient les Lip historiques et les modèles au design marquant, dans une gamme de prix variant de 200 à 500 euros. Les mouvements devraient être franco-suisses (modules Isa, à Villers-le-Lac). Vis-à-vis de ce réseau HBJO, qui devrait petit à petit intégrer des chaînes françaises de distribution, l'urgence est de nettoyer les stocks de Lip « sino-gersoises » que personne ne regrettera. Entamée pendant Baselworld, la nouvelle internationalisation de Lip suivra, appuyée par de nouvelles campagnes de communication (dont la présence à Bâle était le stade précurseur). 
 
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◉◉ EST-CE QUE TOUT ESPOIR EST CONDAMNÉ ? (3) Il n'est donc pas forcément stupide de relancer Lip. De toute façon, c'était ça [la solution comtoise horlogère] ou l'enterrement définitif ! Reste maintenant à régater habilement entre plusieurs dangers qui se conjuguent. Avec les montres connectées, il sera de moins en moins facile de convaincre les jeunes générations – celles pour qui le nom de Lip n'évoque quasiment rien – de porter une montre qui ne fait que donner l'heure : l'habileté « culturelle » des éléments de langage sur le design, la nostalgie vintage ou le Made in France est ici déterminante [on espère que la direction de SMB s'intéresse aux nouveaux courants sociétaux]. Le positionnement prix est tout aussi crucial : ça passe encore à 200 euros, mais ça casse à 500 euros, sauf si on cible une population plus âgée, par nature moins génératrice de volumes et moins sensible à un discours vintage rétro-nostalgique. Au lieu de ne cadrer que le réseau HBJO traditionnel [en voie de forte rétraction, et ce sera pire dans les années à venir], la distribution devrait privilégier d'autres canaux, plus générationnels, encore peu investis par les concurrents suisses, américains ou bientôt asiatiques. Bref, ce n'est pas gagné d'avance et il est plus que temps d'avoir des bonnes idées pour cette grand cause nationale qu'est la résurrection de la seule marque française d'horlogerie vraiment connue dans le monde. Lip, c'est magique, pour sûr, mais ce n'est pas du gâteau...
 
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◉◉ EST-CE QUE LE FUTUR A DE L'AVENIR ? En tout cas, le passé semble en avoir. On va pouvoir le vérifier dans quelques jours. Business Montres a déjà raconté comment le Swatch Group avait réussi sa reprise en mains – en douceur et sans cahots majeurs, ni crises de nerf – de la maison Harry Winston, dont l'expertise joaillière et les bonnes pratiques sur ce marché ont sensiblement influencé les autres marques du groupe. Finalement, Nayla Hayek a bien réussi la greffe qu'elle entreprenait, d'autant que le fossé était immense entre les procédures rigoureuses d'un groupe coté et la culture encore artisanale d'une manufacture horlogère genevoise qui circulait encore en roue libre par rapport au siège new-yorkais. Nous avons cependant relevé quelques troubles concernant la survie – toujours incertaine – de la collection Opus, emblématique à l'époque de la construction d'une image de marque horlogère, mais problématique dans un environnement de marché en pleine mutation : la crise a partiellement démobilisé les jeunes créateurs indépendants et le Swatch Group ne peut plus se permettre des livraisons retardées [dix ans pour l'Opus III, toujours rien pour l'Opus VIII, etc. !] de montres plus souvent visibles au SAV que dans les vitrines. Peu avant Bâle, nous avions ainsi parlé de l'« affaire Ballouard » (Business Montres du 16 mars), typique de cette nouvelle incompatibilité entre une horlogerie artisanale suisse [aussi géniale, créative et brouillonne qu'elle soit] et une horlogerie responsable montée sur un pied international. C'est ce qui condamne pour l'instant le projet Opus 14, toujours au congélateur pour une durée indéterminée, au grand dam de son équipe de création. Tout ça pour expliquer que les Opus illustrent parfaitement les élans refondateurs de l'horlogerie des années 2010 – et, en même temps, leur échec : une importante collection de sept de ces Opus sera dispersée par Christie's Hong Kong dans quelques jours. Quelques-unes sont en platine ou serties. Il s'agit des Opus n°1 (François-Paul Journe), n°2 (Antoine Preziuso), n°3 (Vianney Halter : ci-dessus), n°5 (Felix Baumgartner : ci-dessous), n°7 (Andreas Strehler), n°9 (Jean-Marc Wiederrecht) et n°10 (Jean-François Mojon). C'est la plus importante collection d'Opus jamais présentée aux enchères : de quoi tester l'appétit du marché pour ces montres disruptives qui avaient fait beaucoup de bruit lors de leur lancement, sous la direction de Maximilian Büsser jusqu'à l'Opus n° 5) et de ses successeurs. Les estimations moyennes varient entre 100 000 et 200 000 dollars selon les modèles [le résultat final sera un bon indice de la confiance du marché pour ces créateurs]...
 
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◉◉ EST-CE QUE ÇA VAUT LA PEINE DE COURIR ? Chez Franck Muller, on ne se pose plus la question depuis l'arrivée à Genthod du prototype LMP2 aux couleurs de la marque qui prendra le départ des Vingt-Quatre Heures du Mans, dans trois semaines (ci-dessous, avec Jean-François Ruchonnet au volant et Nicholas Rudaz, le directeur général de la marque à gauche – voir également en haut de la page). Business Montres (6 mai) vous avait déjà signalé le podium de SARD Morand (l'équipe suisse partenaire de Franck Muller) sur le circuit de Spa-Francorchamps. C'est parti pour le circuit de la Sarthe, avec un autre podium à la clé : c'est pour ça qu'il faut toujours courir, même si c'est encore mieux de tenir...
 
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◉◉ EST-CE QUE ÇA PEUT CHANGER ? La preuve avec Linde Werdelin et ses nouvelles images life style de sa SpidoLite en or (en haut de la page) ou en titane. Bien sûr, nous nous avait déjà fait le coup de l'ambiance industrielle et de la clé anglaise (Richard Mille, notamment. Ce qui est intéressant ici, c'est le contexte d'élégance, sinon de dandysme avancé, dans lequel l'arrière-plan de machines-outils est chargé de porter le message technique de la marque. On passe ainsi d'une identité fondée sur le design et l'architecture mécanicienne à une vision de la marque plus orientée vers la mode et l'art de vivre. Ce qui est amusant, c'est que les marques se réveillent et prennent en charge leur communication life style, alors qu'elles déléguaient implicitement ce genre de travail à des opérateurs incontrôlés sur des médias sociaux comme Instagram...
 
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