MARDI : Comment un armurier de luxe belge a racheté une marque française logée dans une manufacture suisse et pourquoi on peut se faire du souci pour Bucherer Paris...
Le 06 / 01 / 2015 à 03:00 Par Le sniper de Business Montres - 2637 mots
Jolie histoire et clin d'oeil historique ! Chacun sait que les premiers horlogers étaient des armuriers : normal, quand on sait inventer de quoi tuer les gens, on sait tuer le temps ! L'avenir des marques indépendantes est au bout du fusil...
▶▶▶ EN RÉSUMÉ Indiscrétions, analyses, informations, enquêtes, rumeurs & murmures (développements ci-dessous)... ❏❏❏❏ LES …
Jolie histoire et clin d'oeil historique ! Chacun sait que les premiers horlogers étaient des armuriers : normal, quand on sait inventer de quoi tuer les gens, on sait tuer le temps ! L'avenir des marques indépendantes est au bout du fusil...
▶▶▶ EN RÉSUMÉ Indiscrétions, analyses, informations, enquêtes, rumeurs & murmures (développements ci-dessous)... ❏❏❏❏ LES DIX RISQUES MAJEURS DU LUXE EN 2015 ❏❏❏❏ L'HORLOGER FRANÇAIS QUI REVIENT À SES PREMIÈRES AMOURS ARMURIÈRES ❏❏❏❏ LES PORTES DE BUCHERER PARIS VONT-ELLES SE REFERMER EN FIN D'ANNÉE ? ❏❏❏❏ L'ESPRIT GRAPHIQUE DU SABLE QUI VOLE SUR LA DUNE ❏❏❏❏ LA MONTRE DU VISITEUR QUI CROIT AU DESIGN CONTEMPORAIN ❏❏❏❏ LA NOUVELLE ACTIVITY POP DE WITHINGS RABAISSE LA BARRE À 150 EUROS POUR LES SMARTWATCHES ❏❏❏❏
▶▶▶ LES 7 x 7 DU MARDIDes informations notées à la volée, en vrac, en bref et en toute liberté... ◉◉◉◉ WITHINGS ACTIVITY POP : salué ici même sans états d'âme pour son opportuniste salvateur, le concept « e-strap » (bracelet connecté interchangeable) lancé au prochain SIHH par Montblanc (Business Montres du 2 janvier) se trouve déphasé côté prix avant même sa naissance officielle. En proposant à 150 dollars – contre 350 auparavant – une montre-traceur d'activités Swiss Made plutôt dessinée avec élégance, Withings définit un nouveau standard de marché : les prochaines smartwatches « simples » (dotées de fonctions de base) seront priées de s'aligner sur ce prix et avec une proposition plus séduisante pour espérer grignoter quelques parts du gâteau. Entre un simple bracelet et une première montre connectée amusante à porter (ci-dessous et en haut de la page) et proposée à moitié prix, comment arbitreront les amateurs ? ◉◉◉◉ BUCHERER PARIS (non officiel et non autorisé) : si on se souvient que Bucherer New York avait fermé ses portes – faute de clients et de succès – sur la Ve Avenue, à New York, après deux ans et demi de vaines activités, se pourrait-il que Bucherer Paris en vienne à renoncer à son mégastore parisien [l'ancien Old England] ? C'est en tout cas la rumeur qui agite le personnel, boulevard des Capucines : sans espoir de jamais rentabiliser son investissement parisien, le groupe lucernois jetterait l'éponge fin 2015 après deux ans et demi d'activités – comme par hasard. À peu près tous les professionnels compétents initialemnt embauchés pour l'opération ont quitté le navire. On a déjà constaté le départ de quelques marques, égarées là par discipline de groupe (par exemple, Van Cleef & Arpels) : d'autres devraient suivre, même si elles sont partiellement remplacées par de nouvelles maisons éblouies par l'adresse et par les conditions financières inavouables de Bucherer (notamment Breguet et Audemars Piguet : les amitiés suisses y sont pour beaucoup). Parmi les marques toujours présentes, personne ne regrettera vraiment l'aventure et les possibles derniers mois d'ouverture seront un calvaire. Pour le groupe Richemont, propriétaire des murs, retrouver un nouveau locataire ne sera pas trop difficile, mais sans doute pas dans l'horlosphère internationale. Quel fantastique gâchis, tant de la part des promoteurs initiaux de l'opération (le groupe Richemont, qui rêvait d'un bras de fer ave les Galeries Lafayette toutes proches) que de la part de l'opérateur désigné par Richemont (le groupe Bucherer, dont l'arrogance face aux « Parisiens » n'augurait rien de bon). Fermeture ou pas, le reflux des touristes chinois amateurs de haute horlogerie suisse hautement tarifée condamne l'initiative : les lecteurs de Business Montres, qui avaient eu la primeur des révélations essentielles sur cette affaire, savent à quel point tout le monde a négligé les signaux d'alarme que nous avions actionné... et que nous actionnons toujours concernant l'option des groupes de luxe pour une distribution sous contrôle (retail) à la place du réseau classique des détaillants multimarques indépendants. Quel gâchis que ce caravansérail qui prétendait, à tort, s'imposer à Paris comme la plus grande boutique de montres à travers le monde ! ◉◉◉◉ BUCHERER PARIS (2) : sans vouloir tirer sur une ambulance, une simple remarque. Au cours de ces deux dernières années, Paris est resté la ville la plus attrayante pour les grandes marques internationales (étude récente de CBRE), avec une cinquantaine de nouvelles enseignes en 2013, ce qui place la capitale française en tête de toutes les métropoles internationales. L'initiative de Bucherer n'était donc pas isolée. La localisation au coeur du quartier de l'Opéra n'était pas erronée. Comment expliquer son échec, sinon par l'indigence de la communication autour de cette proposition et par l'absence de pertinence dans l'approche marketing du dossier ? Puisque tout le monde se donne ainsi rendez-vous à Paris, on peut avoir des doutes sur celui qui manque ainsi son coup, par inexpérience du terrain parisien autant que par arrogance... ◉◉◉◉ JULIEN COUDRAY : les actionnaires initiaux de la marque Julien Coudray et de la manufacture locloise IMH (Fabien Lamarche) jettent l'éponge. Ils ont cédé leurs parts à Joris Ide, l'actionnaire familial de l'armurerie Lebeau-Courally, laquelle réalise de somptueux fusils de chasse – en concurrence directe avec Purdey et Holland & Holland – et qui a déjà lancé une collection de montres Swiss Made à son nom. Jolie coïncidence historique : la marque Julien Coudray rend hommage à l'orologeur de François Ier, Julien Coudray, qui a signé les premières « montres portables » historiquement attestées en France (1518). C'était une paire de dagues dont la poignée était décorée d'une « montre » (un cadeau royal non retrouvé à ce jour et dont il n'existe aucun trace visuelle autre qu'une commande officielle pour le souverain). La marque renoue ainsi avec ses racines armurières. Qu'une manufacture belge d'armes de luxe s'offre ainsi un atelier complet en Suisse, ainsi qu'une marque aux racines françaises, n'est pas banal : ce sont quarante emplois sauvés, un précieux savoir-faire qui restera concentré au Locle et une marque indépendante et prometteuse qui aura la tête hors de l'eau. Lebeau-Courally a d'ailleurs prouvé ses ambitions dans la montre suisse en exposant à Baselworld une collection de montres des plus honnêtes. Pas sûr que les anciens actionnaires de Julien Coudray et d'IMH [des proches du groupe d'investissement français EPI] aient fait une bonne affaire, mais il faut souffrir pour apprendre le métier d'horloger en Suisse... ◉◉◉◉ VISITOR : intéressante initiative d'un jeune designer américain, qui a eu envie de se lancer sur le marché de la montre, avec des idées très précises de ce qu'il voulait faire. Sa campagne sur Kickstarter a recueilli 99 000 dollars sur les 85 000 souhaités, ce qui va lui permettre de lancer sa montre Duneshore, qu'il nous affirme (voir notre vidéo sur Business Montres Vision) inspirée par les mouvements du sable sur les dunes. On remarquera son sens du dessin, avec des lignes habilement tirées qui reprennent le meilleur du style vintage pour l'actualiser dans un goût contemporain. Bien sûr, les mouvements sont asiatiques (Miyota), l'assemblage chinois (Hong Kong) et l'initiative américaine, mais ce jeune homme a tout pour finir par apprendre ce qu'est une belle montre – suisse, évidemment ! Il a déjà compris une chose : le positionnement prix (aux alentours de 500 dollars, sa Duneshore est plutôt attrayante : ci-dessous et en haut de la page). Il aurait cependant pu trouver un nom de marque moins banalisé que Visitor Watch Co... ◉◉◉◉ DIX RISQUES POUR LES INDUSTRIES DU LUXE : toujours pertinent, même quand on n'est pas d'accord avec ses conclusions, l'analyse du luxe Luca Solca (Exane BNP Paribas) publie une note d'orientation sur les dix risques qui menacent, selon lui, les produits de luxe. Rien à redire sur certaines de ces menaces, comme le fait que le luxe est une activité cyclique [nous pourrions ainsi vivre la fin d'un de ces cycles, d'où la décroissance en cours], sur la dépendance excessive du luxe par rapport au seul marché chinois [nous ne partageons pas ses doutes sur le risque d'un supplément de socialisme en Chine : la promotion d'une nouvelle austérité prolétarienne est un fait, pas un risque, et cette nouvelle morale correspond selon nous à un cycle idéologique d'une grosse dizaine d'années] – et on pourrait en dire autant sur la dépendance du marché russe pour les produits très coûteux, notamment les montres, sur les risques monétaires internationaux [le pire reste à venir avec la mort annoncée du dieu-dollar] , la trivialisation/banalisation du luxe [Gucci et Louis Vuitton en Chine ?] ou sur l'impact des facteurs géopolitiques, en particulier le terrorisme, sur le commerce des biens de luxe. Une nouvelle donnée dans cette équation sur les risques du luxe est apportée par Luca Solca : elle concerne le lien entre inégalités de revenus et consommation de biens ostentatoires. Plus les inégalités augmentent, plus la croissance du luxe accèlère – et inversement (tableau ci-dessous). C'est assez logique : pour que les riches consomment, il faut les taxer moins ! D'où la question stratégique qui se pose : dans quelle phase politico-économique sommes-nous à présent ? Les consommateurs ont-ils ou non le sentiment d'être plus riches ou plus taxés ? On a des doutes avec l'état du moral des Européens de la zone euro, mais aussi avec l'éclatement de certaines bulles à travers le monde (notamment l'immobilier en Chine). La note d'Exane est à étudier de près, mais on aurait cependant aimé en savoir plus à propos de l'influence sur les marques des fusions-acquisitions pratiquées par les grands groupes : on a quand même l'impression que ces rachats ont détruit plus de valeur qu'elles n'ont pu en créer. Verrons-nous l'amorce d'une déconsolidation en 2015 ? ◉◉◉◉ ANNIVERSAIRES HORLOGERS : comme tous les ans, Business Montres (4 janvier) liste les principaux anniversaires à ne pas oublier cette année. C'était le thème de notre dernière chronique horlogère sur BFM (ci-dessous : la chronique commence à la minute 07:30). Notre liste n'est pas exhaustive : ily manque notamment les innovations techniques et les révolutions mécaniques, comme les 340 ans de l'application du spiral aux montres portables par Christian Huygens... D'AUTRES SÉQUENCES RÉCENTESDE L'ACTUALITÉ DES MONTRES ET DES MARQUES...