MARDI : Quelques questions qu'on peut se poser sur l'actualité des montres, la stratégie des marques et l'avenir de l'horlogerie...
Le 09 / 06 / 2015 à 06:39 Par Le sniper de Business Montres - 2919 mots
Autant ne pas se tromper de nom quand on crée sa marque de montres : certains mots peuvent vous bloquer définitivement l'accès à certains marchés. De même, autant ne pas hésiter se servir de l'aura internationale des montres suisses pour vendre des maillots de bain... italiens ! Tous les goûts sont dans la nature...
▶▶▶ EN RÉSUMÉ (le tout développé après le résumé ci-dessous)Indiscrétions, …
Autant ne pas se tromper de nom quand on crée sa marque de montres : certains mots peuvent vous bloquer définitivement l'accès à certains marchés. De même, autant ne pas hésiter se servir de l'aura internationale des montres suisses pour vendre des maillots de bain... italiens ! Tous les goûts sont dans la nature...
▶▶▶ EN RÉSUMÉ (le tout développé après le résumé ci-dessous)Indiscrétions, analyses, informations, enquêtes, rumeurs & murmures... ❏❏❏❏ POLO OU MAILLOT ? ❏❏❏❏ GARÇON OU FILLE ?❏❏❏❏ AUTOUR OU AU CENTRE ? ❏❏❏❏ POMMÉ OU PAUMÉ ? ❏❏❏❏ FONDATION OU FONDEMENT ? ❏❏❏❏ JEFF OU JOHANN ? ❏❏❏❏ NÉO OU RÉTRO ? ❏❏❏❏ SANS PARLER DE TOUTES LES AUTRES INFOS... ❏❏❏❏ ▶▶▶ LES 7 x 7 DU MARDISept vraies questions sur l'actualité immédiate des montres et de l'horlogerie(réponses non immédiates)... ◉◉◉◉ LE REMONTAGE PÉRIPHÉRIQUE SERA-T-IL LA PROCHAINE MODE MÉCANIQUE ? C'est tout de même bizarre : nous n'avons pas repéré moins de cinq propositions de mouvements automatiques à remontage périphérique [la masse tourne librement sur la tranche extérieure du mouvement, sans liaison avec l'axe central du mouvement, ce qui dégage visuellement le coeur du calibre]. Coïncidence ou co-inspiration consanguine dans les vallées ? Sans doute un peu des deux, avec l'injection d'une bonne dose de ce fameux « air du temps » qui pollinise de façon convergente les créations mécaniques des uns et des autres. Dans ces cinq mouvements, du meilleur et du moins bon, du très compliqué (tourbillon qu'on peut basculer en double axe) ou du simple, mais une certitude : alors que la Suisse horlogère est infestée de mouvements qui n'ont rien de Swiss Made quoiqu'ils soient clonés sur les productions ETA [sinon, nous jure-t-on, mais nous n'osons y croire, produits dans ces usines ETA qui alimentent la Suisse en composants horlogers légaux], ces calibres automatiques à masse périphérique sont encore un excellent rempart pour affirmer sans risquer de soupçon la suissitude d'une nouvelle proposition. On va donc voir et revoir de ces périphériques dans les collections de ces prochaines saisons... ◉◉◉◉ QU'EST-CE QUE NOUS CACHENT LES GROUPES DE LUXE EN MATIÈRE DE E-COMMERCE ? Après des années de tergiversation, les groupes de luxe enracinés dans l'horlogerie ont enfin compris qu'il se passait quelque chose du côté du e-commerce : pour des groupes qui déniaient tout avenir à Internet [sinon comme vitrine] et au commerce électronique [en nous jurant qu'ils misaient sur le wholesale, tout en étendant au-delà du raisonnable leur réseau retail], c'est déjà un progrès. E-commerce, pourquoi faire quand on s'appelle Richemont – groupe dont la culture dominante est centrée autour du commerce [60 % de ses revenus proviennent de ses réseaux de points de vente] ? Pour reprendre la main face aux grands vendeurs en ligne (notamment, Amazon) qui ont déjà trusté les meilleures places sur ce marché : amazon ne cache pas ses ambitions de première boutique mondiale, de l'entrée de gamme aux sommets du luxe. Johann Rupert (Richemont) a compris le danger. Il sait que c'est la puissance [et non plus le prestige] qui pilote ce marché : c'est la grosseur du tuyau qui fait la différence, pas le lustre des marques exposées. Plus l'outil de vente est universel et généraliste, plus il capte les achats des consommateurs. C'est donc très lucidement et très logiquement que Johan Rupert propose à présent à Bernard Arnault (LVMH) et à François-Henri Pinault (Kering) de s'associer à lui pour créer un grand site de référence capable de faire pièce à Amazon (89 milliards de dollars de recettes 2014 en montres et bijoux, contre 1,3 milliards pour Yoox-Net-a-porter, la plateforme de Richemont). L'intention est louable : d'une part, il est évident que l'avenir est au multi-canal, avec une prédominance inéluctable du commerce en ligne ; d'autre part, Amazon (la création de Jeff Bezos) pèsera bientôt trop lourd pour ne pas transformer son oligopole en quasi-monopole. L'avenir du e-commerce n'est écrit nulle part : Google (avec son bouton « Google Buy ») n'a pas dit son dernier mot, Apple (« Apple Buy ») a des ambitions qui vont bien au-delà des produits Apple (notamment la musique) et de nouveaux acteurs peuvent apparaître – pourquoi pas une joint-venture des géants du luxe. Il faut juste ne pas oublier que cette banalisation du e-commerce reste piloté par le... consommateur ! C'est le choix de chaque consommateur qui oriente les flux selon les canaux disponibles, avec des capacités d'expériences différentes. C'est la conviction de chaque consommateur qui emporte la décision d'achat finale. Pas les bricolages d'état-major... ◉◉◉◉ QU'EST-CE QUI PEUT DOPER À CE POINT UNE DÉMOGRAPHIE HORLOGÈRE AUSSI GALOPANTE ? Question complémentaire : qu'est-ce qui peut bien pousser un jeune créateur horloger à se lancer aujourd'hui sur un marché en pleine mutation, où même les marques les mieux installées ont du mal à comprendre les évolutions et les reclassements en cours ? Disons un joyeux mix d'esprit d'aventure, de passion chevillée à l'âme, de détermination à imposer une autre expression horlogère face à toutes celles qui existent déjà [on se sent toujours plus original que l'un ou l'autre de ses futurs concurrents] et de rêve de profits le plus souvent chimériques. Le projet de relance des montres Triton en est un bon exemple : le marché des montres de plongée à connotations historiques est sursaturé, mais la renaissance de Triton (ci-dessus, le modèle vintage qui a inspiré la nouvelle « Subphotique » : on vérifiera que la couronne est passée de 6 h à 12 sur le prototype publié hier par Business Montres). Autre projet sympathique : celui de Charlie Watch, jeune marque lancée l'année dernière par des « Pieds-Nickelés » (Business Montres du 5 avril 2014) qui ne connaissaient rien à l'horlogerie, mais qui étaient des vrais entrepreneurs. Ils en sont maintenant à la montre automatique (ci-dessous), toujours dans ce style néo-traditionnel (austéro-scandinave) qui semble être le summum du luxe pour les nouvelles générations. Ce n'est pas qu'ils aient créé un best-seller, ni connu un prodigieux succès international : ils ont simplement appris le métier et décidé d'élargir leur communauté d'amateurs et d'amis. N'est-ce pas mignon – et il ne vous en coûtera que 6 ou 7 billets de 50 euros, en 40 mm ? Savez-vous qu'il se crée en moyenne deux marques de ce type par semaine [quand ce n'est pas du néo-traditionnel, c'est de la montre de plongée !] ? Sans parler des projets de lancement de nouvelles smartwatches sur les sites de financement collaboratif... ◉◉◉◉ BOY.FRIEND : MÂLE OU FEMELLE ? Toujours pas de réponse officielle de Chanel, qui joue délicieusement avec cette ambiguïté, la plupart des commentateurs intelligents [pas les perroquets, les autres, comme François-Xavier Overstake dans Equation du temps] ayant brutalement commencé à regarder Chanel avec d'autres yeux. Nous maintenons donc notre pronostic d'une virilité très perversement camouflée derrière l'ambivalence de la Boy.Friend [notez la transformation du tiret typographique en point, ce qui introduit une césure entre le Boy et le Friend à la place de la liaison du tiret] : ce sera donc la première Chanel que les hommes auront envie de piquer aux femmes ! Et ce sera peut-être la première montre Chanel réellement masculine – un retour vers l'homme qui ne serait que justice après un siècle d'emprunts par les femmes Chanel de tant d'éléments du vestiaire masculin. Tout va désormais se jouer sur la manière dont la montre sera présentée au marché, en septembre prochain : si le dossier de presse est pour l'instant très fashion féminine, avec nos gracieuses consoeurs qui minaudent en Polaroïd (voir notre article du 2 juin et les deux animations vidéo ci-dessus), il n'est pas évident que la campagne de lancement de cet automne ne soit pas un tantinet plus virile (dans le goût ci-dessous). ◉◉◉◉ LE MARCHÉ SUISSE EST-IL DANGEREUX POUR APPLE ? Toujours pas d'informations côté Singapour sur les réactions possibles à la tentative d'Apple de passer en force pour introduire l'Apple Watch sur le marché suisse – où son exploitation commerciale contrevient actuellement aux lois sur la propriété intellectuelle (dernier article : Business Montres du 4 juin). Et toujours pas d'explications côté Apple pour cette décision de ne pas attendre que les juges de Genève aient dit le droit dans une possible déchéance des prétentions singapouriennes à cette propriété intellectuelle sur la marque « Apple » et le logo à la pomme. À quoi peut-on s'attendre : une Suisse pommée ou une Pomme paumée ? D'abord, à une possible décision de la justice genevoise avant le 26 juin [on peut toujours rêver, mais si c'était une des échéances annoncées aux avocats de deux parties] : soit cette décision est favorable à William Leong et Apple se met à la faute en exploitant son Apple Watch en Suisse ; soit elle ne l'est pas et Apple a eu raison d'anticiper : soit un des deux parties décide de s'en remettre au tribunal fédéral de Berne, ce qui n'annule pas de facto les droits de propriété singapouriens pour l'activité horlogère d'Apple en Suisse. Il y a donc deux chances sur trois pour que William Leong réagisse en termes de droit pour empêcher toute arrivée de l'Apple Watch en Suisse – ce qui nous promet exploits d'huissier, flots de papier timbré et effets de manche sur fond de prétoires... ◉◉◉◉ LES MONTRES RESTENT-ELLE UN BON PRÉTEXTE POUR CRÉER UN STYLE NON HORLOGER ? À partir du moment où le groupe Franck Muller se transforme (pour une part) en chantier naval pour yachts de luxe (les futurs daycruisers Franck Muller, 16 à 18 m), il n'y a pas de raison pour que d'autres marques n'utilisent pas des marqueurs horlogers pour lancer de nouvelles lignes de produits. Prenons Speedometer, cette marque italienne lancée sur le créneau de la nouvelle bijouterie masculine, avec des bracelets inspirés par des lunettes des Oyster Professional de Rolex (révélation Business Montres du 5 décembre 2013). Depuis, la marque a fait son chemin, en créant de vêtements inspirés par ses bracelets : vous avez ainsi droit aux polos (col façon lunette graduée : ci-dessous) et, cet été, aux maillots de bain oystérisés (ci-dessus : pas encore sur le site de la marque, mais vérifié !)... ◉◉◉◉ PEUT-ON PRENDRE N'IMPORTE QUEL NOM POUR SA MARQUE HORLOGÈRE ? Les amateurs du monde entier rigolent d'Altanus (précision : « Genève »), marque italo-suisse et même Swiss Made au nom pas forcément bien compris. Avec la nouvelle marque Ophion, les plaisanteries vont fuser en terre gauloise francophone– du moins chez les amateurs de langue verte. La marque Ophion semble espagnole, avec un atelier de fabrication en Allemagne, mais sans autre prétention suisse que le mouvement Technotime TT718. Les montres paraissent honnêtement réalisées [elles vont au phion des choses ?], mais on peut craindre qu'elles ne soient à jamais interdites de marché francophone avec un nom pareil : ne jamais se tromper de fondement lors de la fondation d'une marque ! C'est quand même épatant que personne n'ait osé en parler à la marque... D'AUTRES SÉQUENCES RÉCENTESDE L'ACTUALITÉ DES MONTRES ET DES MARQUES...