ONLY WATCH 2015 #1 : Un premier repérage des forces et des faiblesses de l’opération (première partie : dans les coulisses de la vente)...
Le 29 / 07 / 2015 à 05:59 Par Le sniper de Business Montres - 3251 mots
Rendez-vous biennal très attendu dans le calendrier horloger, Only Watch y tient une place très particulière, tant auprès des marques qu’auprès des amateurs. Un coup de projecteur rapide sur l’histoire de cette initiative charitable et sur les coulisses de cette initiative horlogère, ainsi que sur l’offre 2015.
▶▶▶ à suivre ces jours-ci ou à relire...
• Les 12 marques qui sont totalement à côté …
Rendez-vous biennal très attendu dans le calendrier horloger, Only Watch y tient une place très particulière, tant auprès des marques qu’auprès des amateurs. Un coup de projecteur rapide sur l’histoire de cette initiative charitable et sur les coulisses de cette initiative horlogère, ainsi que sur l’offre 2015.
▶▶▶ à suivre ces jours-ci ou à relire...
• Les 12 marques qui vont faire des étincelles (en euros)…
• Les 12 marques qui peuvent ménager des bonnes (ou des mauvaises) surprises…
▶▶▶ ONLY WATCH 2015Une confrontation entre marques qui est désormais suivie de près dans le monde entier grâce à Internet... ◉◉◉◉ UNE PREMIÈRE ÉVIDENCE : Only Watch n’est pas un concours de beauté entre patrons de marques horlogères, ni une dispersion de montres rares aux enchères. Ce n’est pas non plus un simple rendez-vous protocolaire biennal. C’est, fondamentalement, une opération charitable destinée à récolter des fonds en milieu horloger, grâce à un catalogue de « pièces uniques », au profit la recherche sur les myopathies. Mais ce n’est pas non plus que ça… ◉◉◉◉ LANCÉE EN 2005 à l’initiative de Luc Pettavino et d’Osvaldo Patrizzi (avec le soutien actif de médias comme Business Montres : voir notre premier article du 7 octobre 2005, en page 7 de notre numéro 22), Only Watch avait d’autant mieux trouvé sa place dans le calendrier horloger que la « bulle horlogère » en formation était porteuse, que les marques n’imaginaient plus de frontières à leur créativité [rappelons que Richard Mille avait fait dessiner une pièce unique par Philippe Stark : en haut de la page !] et que l’argent coulait à flots sur la planète Montres. Grâce à son charisme personnel, Osvaldo Patrizzi, qui dirigeait alors Antiquorum, avait su faire d’Only Watch le « championnat du monde des prototypes horlogers » (Business Montres du 2 octobre 2008). On a battu à Only Watch quelques records du monde... ◉◉◉◉ AU-DELÀ DE LA CHARITY, qui justifie tous les efforts bénévolement consentis et toute la générosité des marques, notre attention a toujours été attirée sur Only Watch en raison de son importance dans le calendrier horloger et de sa fonction de baromètre de la créativité – sinon de l’agilité conceptuelle – des marques. Très confidentiel et centré à l’origine sur le microcosme des directions horlogères, l’événement Only Watch déborde aujourd’hui ce cadre étroit : la notoriété a été dopée par les records d’enchères et, dans toute la blogosphère, les amateurs suivent de très et commentent le résultats [ce n’est pas toujours intelligent, ni pertinent, ni bien informé]… ◉◉◉◉ L'ÉVICTION BRUTALE D'OSVALDO PATRIZZI (dépossédé d’Antiquorum en 2007 par des « associés » aussi menteurs que douteux) a passablement changé le profil des éditions suivantes d’Only Watch. Si Osvaldo Patrizzi a pu « sauver les meubles » pour l'édition 2007, sans l'infrastructure d'Antiquorum (voir notre compte-rendu : Business Montres du 22 septembre 2007), les éditions suivantes ont été plus calamiteuses. Non seulement les nouveaux dirigeants d’Antiquorum ne comprenaient rien à la logique interne – charitable et bénévole – de l’opération, mais ils tendaient à en détourner l’énergie pour servir leur promotion personnelle auprès des collectionneurs. Nous nous posions des questions en 2009 (sans trop les formuler pour ne pas gêner l’opération : Business Montres du 28 septembre 2009). Nous avions des doutes de plus en plus sérieux en 2011 (Business Montres du 24 septembre 2011 et Business Montres du 25 septembre 2011). Nous n'avions plus de doute, en 2013, sur le fait qu'on allait droit dans le mur et nous formulions un diagnostic fatal après cette édition 2013 (Business Montres du 28 septembre 2013). ◉◉◉◉ NOS PRÉCONISATIONS APRÈS LES RATÉS DE 2013 étaient fondées sur des arguments logiques. Asphyxiée par des problèmes récurrents de trésorerie, Antiquorum n’avait plus la « carrure » pour opérer correctement, ni en termes d’animation auprès des marques, ni en termes d’impression du catalogue, ni en termes d’expositions internationales, ni même en termes de sensibilisation des amateurs et des collectionneurs [un supermarché de quartier n’a pas les connexions nécessaires pour convaincre les clients des épiceries de luxe]. Pour sauver Only Watch, il devenait donc nécessaire d’éjecter Antiquorum de la boucle opérationnelle. C’était d’autant plus urgent que les marques – qui assurent la ressource de la vente – commençaient nettement à se lasser, en redoutant de plus en plus de se comparer entre elles (pas toujours à leur avantage) sous les yeux de la communauté des amateurs. ◉◉◉◉ LUC PETTAVINO, que des problèmes personnels avaient conduit à trop déléguer à Antiquorum la conduite des opérations, a bien compris le danger en confiant Only Watch 2015 à Aurel Bacs (Phillips + Bacs & Russo), avec lequel il avait tenté de coopérer lors de l’édition précédente, mais Christie’s – dont Aurel Bacs était l’animateur pour les montres – avait renoncé in fine à remplacer Antiquorum. Ayant quitté Christie’s, Aurel Bacs retrouvait la possibilité de mener la vente 2015 à sa guise. Le nombre des participants et la qualité de l’offre témoignent de la nouvelle intelligence dans son approche d’Only Watch, ainsi que de la ténacité retrouvée de Luc Pettavino. À eux eux, avec la participation des marques, ils ont sauvé Only Watch, qui n’aurait pas survécu à la médiocrité d’un nouvel épisode Antiquorum. ◉◉◉◉ BIEN SÛR, IL FALLAIT AVOIR DE BONS YEUX (ceux de la passion) pour déceler, au-delà des pauvres paillettes de l’édition 2013 [résultat en trompe-l'oeil, qui a surtout soulagé la trésorerie d'Antiquorum, mais prix moyens en baisse dans une spirale de rendements décroissants] les dangers mortels qui menaçaient Only Watch. Nous avions trop aimé et trop soutenu le travail de Luc Pettavino pour assister sans réagir au naufrage annoncé. D’où nos recommandations, suivies aujourd’hui à 75 % – ce qui est très satisfaisant. Ces suggestions portaient en priorité sur quelques points :◉ Le changement d’opérateur pour la maison d’enchères (l’arrimage à Antiquorum devenait toxique) : c’est fait avec la reprise en main par Aurel Bacs… ◉ Le découplage du Monaco Yacht Show (ancrage historique aujourd’hui obsolète) : c’est fait avec l'organisation de la vente deux mois après le Yacht Show, à Genève., qui reste soutenue par SAS le prince Albert II… l « www » ◉ La délocalisation de la vente hors de Monaco (berceau d'origine d'Only Watch, qui perd toute utilité et devient même contre-performant sans le couplage avec le Yacht Show) : c'est fait au profit de Genève, métropole beaucoup plus stratégique pour les enchères horlogères et ça n'a pas l'air de déranger le prince...◉ La remobilisation des marques et des collectionneurs (de moins en moins motivées après une grosse dizaine d'années) : c'est fait avec une tournée « triomphale » de Luc Pettavino et Aurel Bacs, lequel se charge du tam-tam dans la blogosphère horlogère, où ses connexions sont aussi mutiples et variées qu'efficaces... ◉◉◉◉ UNE DE NOS PRÉCONISATIONS DE L'APRÈS-2013 est cependant restée lettre morte : on ne pourra que le regretter au vu de quelques ratages monumentaux dans la participation des marques en 2015 (voir la suite de cet article). C’est sans doute regrettable et tout le monde le déplorera, mais Only Watch est aujourd’hui un champ clos où s’affrontent des montres masculines. Les montres féminines ne sont jamais parvenues à tirer leur épingle du jeu dans ce choc des géants. C’est pourquoi nous proposions un tournoi biennal pour les hommes, suivi en alternance par un tournoi biennal pour les femmes. Les catalogues annuels –par exemple, les hommes en année impaire ; les femmes en année paire – n’en seraient que plus concentrés, plus homogènes et mieux équilibrés, donc plus séduisants. ◉◉◉◉ UNE AUTRE DE NOS PRÉCONISATIONS NON SUIVIES D'EFFETS portait sur la sensibilisation des marques aux enjeux – réels et virtuels – d’Only Watch. Même si Only Watch n’est pas un concours d’élégance, ni une compétition olympique pour grimper au cocotier de la plus forte enchère, c’est quand même une confrontation entre marques, de plus en plus suivie avec attention par les amateurs. Qu’elles le déplorent ou qu’elles l’instrumentalisent, Only Watch s’est institué en vecteur de communication pour les marques qui ont l’intelligence d’en comprendre la portée. Une participation à Only Watch ne se limite pas à la proposition d’une montre : elle se travaille longuement avant la composition du catalogue [par le choix stratégique de la montre qui va affronter le feu des enchères], pendant les expositions [par la mobilisation de son fan-club de collectionneurs] comme pendant la vente, puis après la dispersion [quand il s’agit de se féliciter de son excellent résultat]. ◉◉◉◉ NOUS PARLONS VOLONTAIREMENT DU TRAVAIL DES MARQUES « pendant la vente », parce qu’il ne faut pas se cacher derrière son petit doigt : à l’exception de quelques marques inconscientes [dont nous avions parlé dans nos éditions précédentes sur l’événement, notamment le cas pathétique de Girard-Perregaux ou de Christophe Claret], toutes les enchères d’Only Watch sont, sinon « manipulées », du moins téléguidées par les marques. Dans les cas les plus vertueux, la marque agite les fils de sa toile d’araignée chez les collectionneurs et laisse faire près cette alerte, en faisant savoir qu’elle regarde tout ça de près. C’est la tactique de Thierry Stern pour Patek Philippe : il a pérennisé la tradition des montres « charitables » qui sont des modèles de série, mais édités en pièce unique dans un métal différent. Ses collectionneurs se les arrachent : lors de la dernière vente, il en avait réuni un certain nombre à Monaco pour les voir se déchirer sous ses yeux pour la pièce unique 2013. Mécanique imparable : sous le regard de Thierry Stern, pourvoyeur habituel de raretés hautement valorisables, pas un de ces collectionneurs « officiels » [le club des « amis de la marque », taillables et corvéables à merci] n’a voulu perdre la face et les enchères sont vite devenues stratosphériques – autour des quatre millions de dollars. C’était le résultat escompté… ◉◉◉◉ TOUTES LES MARQUES NE SONT PAS AUSSI... DÉSIRABLES et n’ont pas une telle attractivité que Patek Philippe. Donc, elles parent au plus pressé. Pour les premières éditions d’Only Watch, les CEO des marques se retrouvaient dans la salle pour enchérir eux-mêmes sur leurs propres montres : c’était parfaitement grotesque et immédiatement repéré, donc répété – notamment par Business Montres ! Ensuite, ils ont fait ça par téléphone. Aujourd’hui, la procédure est rodée. Dans le cas des montres les moins collectionnables [euphémisme de courtoisie], un ordre d’achat passif a été discrètement laissé à l’auctioneer, avec une commission pour adjuger le lot de la marque à la marque, à un prix minimum fixé à l’avance. Un système qui prémunit chaque maison contre les mauvaises surprises, même si elle nuit ) la sincérité des enchères : certaines petites marques mettent ensuite deux ans à payer cette adjudication ! C’est une assurance-vie pour ne pas être ridicule aux yeux des amateurs, qui ont d’ailleurs compris qu’on pouvait faire d’excellentes affaires à Only Watch... ◉◉◉◉ LE VRAI SUCCÈS, À ONLY WATCH, c’est de faire mieux que prévu. C’est-à-dire mieux que la valeur catalogue de l’édition courante de la montre [c’est bien la moindre des choses pour une pièce unique, mais ça n'a pas toujours été le cas du temps d'Antiquorum !] pour parvenir, si possible, à faire mieux que les copains de la même classe que la marque. Top du top pour une poignée de marques : battre se propres records aux enchères charitables, en crevant les plafonds symboliques (les 100 000 euros, le million de dollars, etc). Quelques ingrédients sont indispensables pour réussir sa recette : une pièce vraiment unique [pas le premier numéro d’une série limitée], qui ne se limite pas à changer la couleur du cadran de la production courante ; une décoration particulière [l’ancrage monégasque initial favorisait le damier rouge et blanc], pourvu qu’elle soit originale par rapport aux pièces commerciales ; un écrin spécial, réalisé pour l’occasion par un bon faiseur ; un concept original [un prototype audacieux ou du jamais encore tenté]. Après, il faut compter avec le facteur chance et avec le travail des équipes de la marque, notamment sur les théâtres d'opérations exotiques... ◉◉◉◉ PASSONS MAINTENANT EN REVUE les montres alignées comme à la parade pour cette édition 2015, des plus humbles aux plus gradées(à suivre)... D'AUTRES SÉQUENCES RÉCENTESDE L'ACTUALITÉ DES MONTRES ET DES MARQUES...