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PROFIL BAS (accès libre) : Mais où sont passés les CEO horlogers (avez-vous remarqué comme ils ont disparu de la circulation) ?

Jusqu'à ce début d'année, ils paradaient dans les médias, festivalant ici, inaugurant là, jamais avares d'interviews, collectionneurs de covers, toujours prêts à jouer des coudes pour une photo. Depuis quelques semaines, extinction des feux, cure de silence, sevrage médiatique et fin de la récréation... ▶▶▶ SOUS-EXPOSITIONSOS, managers en péril : qui a bien pu leur imposer


Jusqu'à ce début d'année, ils paradaient dans les médias, festivalant ici, inaugurant là, jamais avares d'interviews, collectionneurs de covers, toujours prêts à jouer des coudes pour une photo. Depuis quelques semaines, extinction des feux, cure de silence, sevrage médiatique et fin de la récréation...

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▶ SOUS-EXPOSITION
SOS, managers en péril :
qui a bien pu leur imposer
un tel régime minceur médiatique ?
 
◉◉ OUI, APRÈS TOUT, C'EST VRAI, ÇA : on ne voyait plus qu'eux dans les premières semaines de l'année. Couvertures des magazines, déclarations péremptoire sur le beau temps qui a relégué la pluie loin du paysage horloger, interviews en double page [nous parlons de la seule photo du CEO, pas du texte], rubans coupés par rafales, tapis rouges dans tous les spots chics de la planète, dîners mondains, soirées black tie et robes longues, comédiennes suspendues à chaque bras, lounges de luxe dans les aéroports. Une vraie vie de star en représentation, une génération plus loin et très au-delà du « Je m'voyais déjà » d' Aznavour – parce qu'ils y « étaient » déjà...
 
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◉◉ ET PUIS, BRUTALEMENT, LES CEO ONT DISPARU. Les uns après le SIHH, qui n'avait pas été brillant, mais qui ne justifiait pas une telle pénitence. Les autres après Baselworld, guère plus glorieux sur le plan commercial : à croire qu'ils ne sont pas revenus de la classique trêve post-bâloise. Les exceptions se comptent sur les doigts d'une main : il faut être aussi sévèrement burné gonflé que Ricardo Guadalupe (Hublot) pour s'offrir une séquence de bling-bling sublime comme celle de Las Vegas, avec Floyd « Money » Mayweather (Business Montres du 3 mai) et sa montre de footballeur boxeur plus vraie que nature. À part le patron de Hublot, personne ou presque on the spot : on économise la parole, on épargne son exposition, on crée la pénurie – recettes éternelles du luxe, mais quel contraste avec l'ère d'abondance – certains diront d'arrogance – qui précédait...
 
Les-retards-paiement-privent-PME-milliards-euros-F◉◉ ABONNÉS ABSENTS CÔTÉ SWATCH GROUP, mais c'est usuel dans le sillage de Nick Hayek qui ne tolère guère que la liberté de parole de Walter von Kaenel (Longines). Motus et bouche cousue chez Richemont, où les notes de frais ont été rognées de 30 % pour les CEO [la brigade de répression du laxisme est à pied-d'oeuvre], les voyages en avion étant limités à la business class : il se dit même, et ça se vérifie dans les faits, que toute déclaration publique ou médiatique doit être expressément autorisée par l'actionnaire en personne. Silence radio pour LVMH, à part, bien sûr, Jean-Claude Biver et Ricardo Guadalupe, qui suffisent à faire le show. Tout ceci nous rappelle les trois singes de la sagesse chinoise [ne rien dire, ne rien voir, ne rien entendre : ci-dessus et ci-dessous]...
 
◉◉ MÊME SITUATION CHEZ LES CONCURRENTS ! Hyper-profil bas des patrons de marque du groupe Kering : qui a entendu le son de la voix d'Albert Bensoussan dans les médias, ou une parole publique marquante d'Antonio Calce, depuis le début de l'année ? Karl-Friedrich Scheufele (Chopard) est plus avare de paroles que jamais. On a connu Richard Mille plus disert. Thierry Stern (Patek Philippe) joue tellement en sourdine qu'on ne l'entend plus. Même les habituels ténors de la nouvelle génération – Maximilian Büsser, Vincent Perriard et les autres – ont des pudeurs de violette pour s'afficher sur ces papiers imprimés dont ils faisaient leur miel. Discrétion ou déprime ?
 
CEO-Geluck-Businessmontres◉◉ CAS ENCORE PLUS ÉTRANGE : alors que Rolex est la seule grande marque à s'offrir le luxe d'avoir simultanément deux CEO dotés d'à peu près les mêmes prérogatives [le nouveau et l'ancien], ni l'un ni l'autre ne concèdent le moindre espace aux médias dans leur emploi du temps – et ce n'est pas faute de demandes réitérées [dont la nôtre, rituellement reportée]. Même la traditionnelle interview de printemps, habituellement accordée par le porteur de la couronne à un grand média anglo-saxon, semble avoir été caviardée. Et pourtant, qu'est-ce que nos amis  « Jean-Fred » et « Gian-Ri » voyagent ! Que de miles au compteur pour ne rien nous en dire ! De la part de la Fondation Wilsdorf, ce n'est plus « je ne veux voir qu'une seule tête » – c'est « je ne veux plus voir la moindre tête »...
 
◉◉ EXPLICATIONS POSSIBLES DE CE MUTISME qui confine maintenant à l'autisme : d'abord, les consignes venues du Grand Quartier Général. Moins on en dit, moins on s'expose à dire des bêtises et à faire trembler les actionnaires, qui n'ont pas besoin de connaître les mauvaises nouvelles qui sont prévisibles. Le seul sifflotement autorisé reste « Tout va très bien, Madame la Marquise » – pas vraiment le plus martial des hymnes, ni le plus langoureux des slows. Les CEO ont visiblement été priés de la fermer, même ceux des grandes maisons, même les anciens qui bougonnent dans leur coin. Difficile d'aboyer quand on est muselé ! Peut-être que les résultats prévisionnels du premier semestre – ou, pire, de l'année – n'incitent personne à lancer les habituels cocoricos ! Un sevrage médiatique en forme de désapprobation et de désaveu : en période de chaises musicales, autant ne pas se faire remarquer. Le clou qui dépasse appelle toujours le marteau...
 
CEO-Tintin-Businessmontres◉◉ AUTRE EXPLICATION RÉALISTE : que dire d'intelligent [si, si, ça leur arrive parfois !] quand la situation est aussi imprévisible et illisible ? Nous vivons dans un « VUCA World » : VUCA, acronyme de Volatility, Uncertainly, Complexity, Ambiguity (VICA en francais pour Volatilité des marchés, Incertitude, Complexité de l'action à mener, Ambiguité des informations). Comment émettre des messages consistants qui ne soient pas démentis par les faits quelques mois plus tard ? La longue mémoire d'Internet est ici incapacitante. C'est encore plus difficile de parler quand on sait que les échéances prévues – celles qui ont été expliquées aux actionnaires – ne seront pas tenues et qu'on a l'oeil rivé sur le niveau des stocks (sell-in et sell-out), l'érosion du taux de profitabilité, la déprime de la marge brute par SKU : ce ne sont les informations qui remontent du terrain – à Hong Kong, en Chine, en Russie, en Europe, voire déjà aux Etats-Unis – qui peuvent remonter le terrain. Des infos à vous couper le sifflet [mieux vaut en rire avec Tintin et Philippulus le prophète : ci-contre]...
 
◉◉ BREF, EN UN MOT COMME EN CENT, plus le moindre CEO sur le devant de la scène. De nombreux lecteurs l'ont déjà remarqué. D'autres vont le réaliser en lisant cet article. Le problème est que, après en avoir trop fait, on n'en fait plus assez, alors que c'est maintenant – en plein offensive de l'Apple Watch – qu'il faudrait avoir des avis tranchants, des idées affûtées, des analyses percutantes et des aphorismes définitifs, ceux qui font le buzz par leur pénétration. « C'est curieux, chez les marins, ce besoin de faire des phrases », nous disait Michel Audiard dans Les Tontons flingueurs (cliquez ici pour revoir la scène) : maintenant, nous sommes sûrs que les CEO de l'horlogerie n'ont pas le pied marin...
 
Singes
 
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