> 

GPHG 2025 #11 (accès libre)
Dix commentaires personnels sur dix nouvelles montres du GPHG 2025

En parallèle avec nos pages « Repérages » habituelles, nous proposons cet été un « repérage » des montres inscrites pour le prochain GPHG, dans l’ordre choisi par le GPHG, mais dans le cadre d’une revue critique, éclairée et commentée. De quoi aider les académiciens à faire leur choix. Voici donc dix montres de dix marques en quête de prix : Dunselman Watchmaking, Ei8ht, Gübelin, Laine, Lang & Heyne, Luch.By, Ming, Parmigiani Fleurier, Piaget et Ralph Lauren…


En toute transparence, avant d’être critiquées (au meilleur sens du terme) et appréciées, ces nouveautés sont expliquées dans la jamais trop fleurie « langue de boîte » : c’est la langue usuelle de nos « amies les marques » et c’est la langue de bois des « boîtes » d’horlogerie. Dans tous les styles et à tous les prix, venues de Suisse ou d’ailleurs, au masculin comme au féminin, quelles montres les académiciens vont-ils devoir sélectionner ? Certaines de ces montres ont déjà été présentées par Business Montres, mais nous y revenons avec plaisir ! Place à un nouvel épisode de notre panorama du GPHG 2025, avec nos commentaires critiques sur dix montres de dix marques…

(dessin publié en novembre 2023)

DUNSELMAN WATCHMAKING Black Tulip

La Black Tulip est mon expression personnelle de l’horlogerie. En tant que jeune horlogère indépendante originaire des Pays-Bas, je souhaitais que ma première montre s’exprime dans la discrétion du détail, sans bruit superflu. Conçue et fabriquée en une édition strictement limitée à seulement 10 pièces, cette montre reflète mon attachement au raffinement, à l’émotion et à la modestie. Inspirée de la légende de la tulipe noire, cette montre symbolise la quête de l’inaccessible — la conviction que la véritable beauté ne réside pas dans l’excès, mais dans l’équilibre entre proportion, intention et exécution. La simplicité n’est pas l’absence de complexité, mais son aboutissement le plus raffiné. L’histoire de la tulipe noire reflète notre fascination commune pour une forme rare de perfection, mêlant histoire, économie et botanique. Dans cet esprit, j’ai créé une montre à la fois enracinée dans l’héritage et discrètement transcendante. La Black Tulip se présente dans un boîtier compact et élégant de 38 mm de diamètre (11,9 mm d’épaisseur), aux flancs sculptés, muni d’une lunette concave et d’une gravure entre les cornes mentionnant son origine : « Created in the Kingdom of the Netherlands » Le long de la paroi verticale de la lunette, mon « D » en forme de tulipe est gravé dans des directions alternées, créant un motif sculptural unique. Le cadran, composé de quatre couches distinctes, est conçu pour jouer avec la lumière et la profondeur. Il comporte un motif gravé au laser qui se poursuit sans rupture malgré les différences de hauteur. Ce motif donne au cadran une texture apaisante et discrète au premier regard. Il est si subtil qu’il ne se révèle qu’à très faible distance, ou lorsqu’on en connaît l’existence. La surface blanc-argent est brossée verticalement, tandis que la couche des petites secondes présente un brossage radial fin, créant un contraste délicat. Les marqueurs de minutes concaves reprennent la forme de la lunette, attirant le regard vers le centre et accentuant la fluidité du cadran. Les index horaires en acier sont polis miroir, les repères minutés sont satinés, captant la lumière avec une grande précision. L’aiguille des petites secondes est contrebalancée par une tulipe noire stylisée. Malgré la complexité de sa construction, le cadran reste serein et équilibré — un dialogue entre texture, géométrie et intention.

Les aiguilles des heures et des minutes sont fabriquées à la main et finies selon les standards les plus exigeants. Leurs proportions élancées et leurs surfaces arrondies et polies témoignent du geste de l’artisan. Ce ne sont pas seulement des instruments de mesure, mais des marques de présence humaine — pensées, raffinées, intimes. La Black Tulip est animée par le calibre manufacture D202.5, un mouvement mécanique à remontage manuel, développé pendant plus de deux ans en étroite collaboration avec des ingénieurs spécialisés. Doté d’un mécanisme de remise à zéro de la petite seconde, il est composé de 125 composants et mesure 31,8 mm de diamètre pour 7,8 mm d’épaisseur, occupant presque entièrement le boîtier. Au cœur du mouvement se trouvent un spiral libre et un balancier à inertie variable, garants d’une précision durable et d’une grande stabilité. Le mouvement bat à une fréquence de 3 Hz (21 600 alternances par heure) et offre une réserve de marche généreuse de 100 heures. Il comporte 19 rubis afin de réduire les frottements et d’améliorer la durabilité. L’un des éléments les plus poétiques du mécanisme de remise à zéro est la mobile de la petite seconde, fabriquée en grande partie à la main. C’est une complication discrète, mais techniquement exigeante. Je l’ai choisie pour sa signification : la capacité à synchroniser précisément incarne à mes yeux l’essence même du temps. Pour cette première création, je ne voulais pas afficher de grandes complications, mais quelque chose de discret, et profondément significatif. Sa complexité, sa délicatesse, et sa symbolique en font un vrai plaisir — à réaliser, et à porter. Chaque composant du mouvement est fini avec le plus grand soin, selon les codes de la haute horlogerie traditionnelle, mais avec une touche personnelle : Les ponts sont sablés, puis anglés et polis à la main. La platine principale combine perlage et sablage pour une texture riche et subtile. Les roues présentent un cerclage circulaire, des bras polis à la main et des détails gravés au laser. Les roues recevront un cerclage circulaire, un anglage et des bras polis — tous réalisés entièrement à la main — ainsi que des gravures au laser. Les vis sont noircies et polies à la main. Dans la moitié inférieure du calibre, des ponts finement ajourés révèlent le cœur battant du mécanisme. Des gravures en relief positif sur des composants clés viennent compléter ce langage mécanique poétique. Ce calibre raconte une histoire — non seulement celle du temps, mais aussi celle de la patience, de la solitude, et de l’artisanat. C’est le fruit d’un travail lent, réfléchi, où aucune surface n’est négligée et aucune ligne n’est laissée au hasard.

UN COMMENTAIRE ? Elle a tout pour plaire, la montre hollandaise d’Annelinde Dunselman, dont on ferait bien une des plus jolies horlogères de la scène féminine contemporaine. La montre se présente comme sobre et chic, très légèrement sectorisée (mais pas trop) côté cadran gravé laser, dans la bonne taille (boîtier en acier de 38 mm x 11,9 mm étanche à 50 m), avec le bon mouvement « manufacture » (remontage manuel donné pour 100 h de réserve de marche), en série limitée (10 pièces), avec des finitions impeccables et un prix relativement honnête compte tenu des standards du genre (environ 39 500 euros). Manque de chance, en « Time Only », cette « Tulipe noire » a peu de chances d’émerger, alors qu’une revendication féminine aurait eu, avec une telle sobriété botanique, des ouvertures supplémentaires en « Femme » [il est vrai que les académiciens sont majoritairement mâles, de même que les jurés]. Dommage sans doute pour la présélection 2025, mais on reparlera d’Annelinde et de son art de cultiver les tulipes…

EI8HT Resurgence

Ei8ht est une jeune maison horlogère suisse indépendante, établie à La Chaux-de-Fonds. Puisant son inspiration dans l’architecture, le design contemporain, les jeux de lumière et de contrastes, elle revendique une vision audacieuse et expressive de l’horlogerie. Fidèle à une quête rigoureuse de qualité de fabrication et de durabilité, chaque création Ei8ht s’imprègne de la symbolique du chiffre 8 : vecteur d’infini, de perfection et de prospérité. Toutes les montres Ei8ht sont produites en séries strictement limitées, toujours en multiples de 8, et conçues avec des matériaux durables et des techniques industrielles de pointe, incarnant l’esprit novateur de l’horlogerie suisse d’aujourd’hui. Notre premier modèle, Resurgence, incarne pleinement cette philosophie. Présentée dans une édition Raw, elle place le cadran au cœur de son expression, comme une œuvre brute et sculptée. Le cadran de la Resurgence Raw Edition est obtenu par un procédé de gravure et de texturation laser de haute précision. Cette technique de pointe permet une variation des volumes, des inclinaisons, des motifs et des finitions. Tout simplement impossible à réaliser avec les méthodes conventionnelles. Le résultat : une topographie architecturale, rehaussée par une monochromie anthracite intégrale. Le cadran et ses index créent une surface continue, où la lumière révèle à chaque angle les détails complexes du relief. Le boîtier en acier inoxydable de 42 mm de diamètre (épaisseur 11 mm) est équipé de verres saphir antireflets et offre une étanchéité de 5 ATM. Ce niveau de robustesse, associé à un design épuré, en fait une montre conçue pour le quotidien autant que pour l’exception. La montre est animée par le calibre automatique C102, développé par notre partenaire Chronode SA. Il offre une réserve de marche de 60 heures et bat à 28’800 alternances par heure, assurant fiabilité et performance au quotidien.

UN COMMENTAIRE ? Le prix est forcément dans les « huit » (8 888 francs suisses, mais ce ne joue pas avec les autres monnaies), et il n’est pas donné pour une heures-minutes-secondes d’une marque inconnue, même si la Resurgence est mécanisées par Chronode (boîtier de 42 mm x 49 mm x 11 mm d’épaisseur, étanche à 50 m, avec un cadran gravé au laser) et même si la série est limitée à 8 exemplaires. Ce ne sera pas facile de dépasser la première haie (la présélection en « Time Only », mais sait-on jamais si les académiciens ont envie d’ouvrir la porte de cette catégorie à des « petites marques » en devenir…

GÜBELIN Ipsomatic 170e anniversaire (édition limitée)

La montre Gübelin Ipsomatic est conçue par le célèbre architecte Santiago Calatrava, en signe d’amitié entre les deux familles (Gübelin et Calatrava). Son œuvre artistique, connue pour ses formes fluides, s’exprime clairement dans la silhouette emblématique du boîtier de la montre, à la fois unique, élégante et classique. Cette édition limitée en platine, produite à seulement 170 exemplaires, allie forme et fonction.Animée par le calibre historique Felsa 1560, l’Ipsomatic rend hommage à la tradition horlogère de la Maison Gübelin, fondée en 1854 en tant qu’horlogers. Ressusciter ce mouvement, disparu depuis des décennies mais redécouvert comme une pierre précieuse rare et unique, permet de célébrer l’histoire tout en valorisant les ressources existantes. Inspiré des modèles Ipsomatic des années 1950 et 1960, son rotor, basé sur le Bidynator de Felsa, est décoré en hommage à une montre jubilé Gübelin Ipsomatic de 1954 (pour le centenaire), elle aussi équipée d’un Felsa Bidynator. La collection Ipsomatic fut autrefois l’une des plus renommées de la Maison Gübelin et renaît aujourd’hui dans une nouvelle interprétation. Des détails emblématiques, comme le rubis sur la boucle et le sablier sur la couronne, affirment l’identité authentique de la montre Gübelin Ipsomatic. Un dessin de deux taureaux signé Santiago Calatrava orne le fond du boîtier. Précurseur en matière de traçabilité, cette montre est la première au monde à intégrer une preuve d’authenticité, combinant le traceur individuel de Gübelin, infalsifiable, avec la blockchain Provenance Proof pour un nouveau standard de vérification. Ce traceur invisible, de taille nanométrique, est fusionné dans le matériau et peut être identifié des générations plus tard.

UN COMMENTAIRE ? Il y a effectivement quelque chose de rétro dans cette Ipsomatic, peut-être les gibbosités du boîtier au niveau des cornes. Il faut compter dans les 34 900 francs suisses pour ce « retour vers le passé » de la maison Gübelin (boîtier en platine de 39 Mm x 12,6 mm d’épaisseur, étanche à 30 m et animé par un mouvement automatique lui aussi très rétro (43 heures de réserve de marche), dont on a miraculeusement retrouvé deux cents exemplaires. Tout ce storytelling – facturé 34 900 euros pour une série limitée de 170 pièces : est-ce bien raisonnable ? – est émouvant, mais Santiago Calatrava ne sauvera sans doute pas cette Ipsomatic aux cornes charnues d’une élimination lors de la présélection…

LAINE P37

La Laine P37 présente un design épuré inspiré de l'esthétique vintage et témoigne d'une profonde appréciation pour l'art du guillochage à la main. Ponts, vis, cadrans et aiguilles sont fabriqués en interne, avec un poli noir exceptionnel, rarement vu dans cette gamme de prix. Plus petite montre de notre collection, la P37 est un excellent choix pour ceux qui privilégient un mouvement à remontage manuel associé à des finitions haut de gamme dans un format compact. Les aiguilles de style vintage sont taillées dans des plaques d'acier, puis limées à la main pour obtenir un profil arrondi et polies miroir. Les chiffres sont en or blanc, et le cadran affiche une fascinante teinte bleu-violet qui change de couleur selon l'angle de la lumière. Le cadran et le mouvement présentent des motifs guillochés à la main, tous réalisés en interne.

UN COMMENTAIRE ? Torsti Laine [encore un Finlandais de la haute horlogerie !] est sans doute un des artisans de la montre les plus honnêtes de sa génération. La preuve : sa P37 superbement guillochée et teintée de bleu, armée de ses chiffres Breguet joliment contrastées, n’est facturée que 10 700 francs suisses, alors qu’elle en coûterait le double chez ses voisins d’atelier (boîtier de 37 mm x 8 mm d’épaisseur, étanche à 50 m et animé par un mouvement à remontage manuel calé sur 42 heures de réserve de marche). On peut cependant se demander si une telle montre – même si elle n’est pas particulièrement « genrée », n’aurait pas eu plus de chances de s’imposer en présélection dans la catégorie « Femme » : on verifie aussi avec cette P37 néo-classique qu’il manque une sous-catégorie « Challenge » pour les montres entre 10 000 francs suisses et 15 000 francs suisses. Quoi qu’il en soit, en l’état, la P37 est tout-à-fait digne de la présélection, et même au-delà…

LANG & HEYNE Friedrich III Manufaktur Edition

L'édition Friedrich III Manufaktur représente la cohérence technique façonnée par la clarté artisanale. Elle allie les traditions classiques de l'horlogerie saxonne à un engagement sans compromis en faveur de la qualité, incarné par un garde-temps limité à cinq exemplaires dans le monde. Des gravures telles que « FIII - ME » et « One of 5 » soulignent cette exclusivité délibérément choisie. Le concept de l'édition Friedrich III Manufaktur repose sur le principe de l'évolution des constructions historiques, tant au niveau de la fonction que de la forme. Le couvercle à charnière du fond, inspiré du principe de la Savonnette des montres de poche historiques, est tourné dans un matériau solide et maintenu en place par un ressort de fermeture spécialement conçu à cet effet. L'ouverture du fond est un geste délibéré - révélant le mouvement finement fini à travers un fond supplémentaire en verre saphir.L'extérieur du couvercle peut être personnalisé sur demande - avec des initiales, des symboles ou des gravures significatives. Au cœur de la montre bat le calibre VI - un mouvement classique à remontage manuel entièrement développé à Dresde, d'un diamètre de 33,5 mm, d'une hauteur de 4,9 mm et d'une fréquence de 18 000 semi-oscillations par heure. La réserve de marche est de 55 heures. L'architecture du mouvement s'inspire de l'école saxonne, mais renonce délibérément à la traditionnelle platine trois-quarts. A la place, des ponts indépendants permettent de voir le train d'engrenages finement décoré avec des roues en or rose massif. Toutes les pièces de la carrure sont rhodiées. Les rubis sont en saphir incolore. Les angles intérieurs biseautés avec précision sur les contours des ponts sont anglés à la main - un détail sophistiqué qui illustre à la fois la maîtrise technique et la précision esthétique. Les vis violettes trempées à chaud sont entièrement réalisées à la main sur la plaque de bleuissement - sans additifs chimiques ni fours à régulation électronique. En raison des différences de masse de surface et de géométrie, les vis absorbent différemment la chaleur, ce qui se traduit par de subtiles nuances de couleur. Après le processus de trempe, les vis sont triées à la main en fonction de leur couleur. Les légères variations de ton sont délibérément conservées et soulignent le caractère individuel de chaque pièce.

Plus de 90 % des composants du mouvement sont produits en interne. Chaque pièce est anglée individuellement à la main - une expression tangible du soin apporté à la mécanique. La sélection et la combinaison des matériaux utilisés ne répondent pas à des préférences esthétiques, mais à des principes fonctionnels clairs. Les roues du train d'engrenages sont en or rose massif, non galvanisé. Cette décision permet notamment d'éviter le risque d'abrasion causé par les revêtements, en particulier au niveau des dents de l'engrenage. Comparé au laiton conventionnel, l'or rose offre une plus grande dureté, une meilleure stabilité à long terme et une absence d'oxydation. Le barillet du ressort moteur est également fabriqué selon ce principe : le barillet et le couvercle sont en Ecobrass, un laiton haute performance sans plomb qui ne nécessite pas de dorure supplémentaire. Le renoncement délibéré au revêtement galvanique permet d'éviter les résidus potentiels dans le mouvement et de minimiser les taux de rejet lors de la fabrication - une norme rarement respectée dans la recherche d'une fiabilité à long terme. L'échappement est réalisé en AMAflex, un matériau amagnétique et résistant à l'usure qui, grâce à ses propriétés mécaniques, est nettement supérieur aux composants en or utilisés par le passé. Le cadran en deux parties est réalisé en émail noir sur or blanc selon la technique du champlevé. Les chiffres romains sont imprimés par tampographie à l'aide d'une laque à deux composants spécialement conçue pour adhérer de manière fiable aux surfaces émaillées. Le résultat est une surface très précise et visuellement profonde. Le cadran est complété par des aiguilles Louis XV en acier, gravées à la main. Le boîtier en acier inoxydable mesure 39,2 mm de diamètre et 11,65 mm de hauteur (couvercle à charnière compris). Il allie des proportions classiques à une fonctionnalité technique. Le fond de boîtier vitré est protégé par un solide couvercle à charnière. Une couronne oignon avec cabochon en onyx et un bracelet en cuir de reptile avec boucle ardillon complètent l'expérience tactile. La gravure optionnelle sur l'extérieur du couvercle confère à chaque montre une touche personnelle et durable.

UN COMMENTAIRE ? Tout le bla-bla habituel sur les traditions, l’artisanat horloger, l’héritage et la substance mécanique commence à dater un peu, et ce n’est sans doute pas avec un couvercle à clapet que cette « savonnette » de poignet va séduire les larges masses académiciennes en vue de la présélection en « Time Only ». D’autant qu’il faut compter dans les 50 000 francs suisses pour cette trois-aiguilles logée dans un boîtier en acier (!) de 39,2 mm x 11,6 mm d’épaisseur, étanche à 30 m et doté d’un mouvement à remontage manuel qui peut tenir une réserve de marche 55 heures (série limitée de cinq pièces). Deux aiguilles baroques ne refondent pas une tradition ! Tout ceci crée un narratif à vrai dire aussi peu original que l’esthétique de la montre, qui va avoir du mal à passer la tête et les épaules en présélection : les farouches sectateurs du « style saxon » ne s’y retrouveront pas, et les autres passeront leur chemin…

LUCH.BY Mova : Vladimir Karatkevitch

À l'occasion de la Journée de la langue maternelle, la marque « Luch » a préparé une collection limitée de montres « Mova », dédiée à l'un des écrivains les plus marquants pas seulement de son époque, mais aussi de toute la littérature biélorusse, c’est Vladimir Karatkevitch. La marque « Luch » a vendu cette collection en moins d'une journée ! Seulement 95 exemplaires ont été produits et distribués pas seulement en Biélorussie, mais aussi à l'étranger. La montre incarne l'image de l'écrivain lui-même. Chaque détail reflète le caractère de cette personnalité exceptionnelle : l'acier inoxydable comme la force de son caractère. Placage or mat comme sa noblesse. Verre saphir comme transparence de ses pensées. Mécanisme « Luch-2209 » comme son regard pénétrant. Un bracelet classique à boucle papillon complète l’image : il est strict, sobre, mais inspiré par des idées. Le Luch-2209 de Minskiy Chasovoy Zavod est l'un des mécanismes les plus fins qui ont été produits par l'industrie soviétique. Pour réduire la hauteur et la taille du boîtier, la roue centrale a été retirée et remplacée par deux roues compactes. On a aussi ajouté un balancier sans vis et un régulateur de déclenchement. La plaque et les ponts sont protégés de la corrosion par dorure. Malgré son apparente fragilité, ce mécanisme a prouvé sa fiabilité et sa durabilité au fil des ans. Le cadran est orné d'une citation de Vladimir Karatkevitch : « La langue, la belle littérature, la poésie et la musique sont les moyens de communication entre les pensées des gens les plus nobles. » Ces lignes vous rappelleront l'essentiel et vous inspireront à aller plus loin…

UN COMMENTAIRE ? Sous réserves d’informations supplémentaires, c’est la première montre biélorusse à concourir pour le GPHG : on ne peut qu’en féliciter. C’est sans doute aussi une des montres les plus coûteuses des 300 et plus qui ont pris la peine de s’inscrire cette année : il n’en coûte que 408 francs suisses pour ce boîtier en acier de 37,4 mm x 9,9 mm, pas forcément très étanche, qu’on croirait directement sorti d’une manufacture soviétique de la haute époque [le rustique mouvement à remontage manuel est effectivement soviétique et donné pour 40 heures de réserve de marche). Autant dire que cette malheureuse « Mova » en série limitée (25 pièces) n’a que très peu de chances de briller en présélection dans la catégorie « Time Only ». On se consolera en songeant qu’elle aurait eu encore moins de chances en « Challenge », face à 47 montres concurrentes : d’où la nécessité urgente de créer de nouvelles sous-catégories autour de « Challenge »…

MING Project 21

En 2023, la marque Ming a organisé un dîner mémorable à Singapour avec nos collectionneurs où le fondateur, Ming Thein (MT), s’est vu proposer un défi : à quoi ressemblerait une montre conçue et pensée entièrement pour lui-même, dans les limites du réalisable, mais sans contraintes ? Est-ce qu’un défi de la sorte pourrait être relevé ? Et ferait-il une édition pour les collectionneurs présents au dîner ? À première vue, c’était une question étrange car le premier filtre chez Ming est que nous devons aimer tout ce que nous créons. Cependant, il y a des considérations commerciales qui doivent être prises en compte – par exemple, il serait impossible d’avoir un mouvement sur mesure, extra-plat et fini à la main dans une pièce d’entrée de gamme. MT ajoute également : « Une partie importante du processus de conception est l’expérimentation : même si cela s’avère peu pratique ou impossible, il est important de repousser les limites et de se poser la question “et si ?”. Le “cool” même s’il paraît impossible n’en reste pas moins “cool”. Il y a des designs qui sont cool mais qui n’ont peut-être pas de sens du point de vue commercial – ils sont généralement trop particuliers ou originaux – mais personnellement ils me plaisent beaucoup ». Alors, comment a-t-il répondu au défi posé lors de ce dîner ? « Sachant que je devrai inévitablement m’adapter aux lois de la physique et de la fabrication, j’ai décidé de viser les étoiles et de voir où nous atterririons », dit MT. Comme cela signifiait un nombre potentiellement inconnu de changements, nous n’avions aucun moyen de présenter une conception définitive avant de demander l’engagement de nos collectionneurs, et pourtant, pour que le projet puisse aller de l’avant, il nous fallait un certain engagement pour couvrir les aspects économiques fondamentaux. Ainsi, dix âmes courageuses nous ont fait confiance et se sont engagées dans un « omakase » horloger : une montre avec un prix plafond, une date de livraison estimée et un mouvement complètement nouveau pour nous, mais aucun autre détail ne leur a été fourni.

Le Frederic Piguet 21, un mouvement important du point de vue horloger, fait partie des mouvements que MT aurait depuis longtemps voulu utiliser afin de créer une montre. Un petit mouvement n’a de sens que dans une montre taillée proportionnellement – et bien que MT ait toujours préconisé la portabilité et la taille visuelle plutôt que la taille physique, quelque chose d’encore plus petit que nos 38 mm habituels constituerait de facto une pièce de niche. « Je me suis fixé à 35mm – au seuil de la modernité, avec une touche vintage claire. Je voulais qu’elle fasse plus large au poignet, une grande ouverture, ce qui est le cas grâce à une lunette étroite et des index et éléments de cadran poussés jusqu’à l’extrémité extérieure. Il fallait qu’elle soit fine, pour être en parfait harmonie avec le mouvement. Et il fallait bien entendu la construire selon les normes modernes – étanchéité à 50 m et bonne rigidité en torsion », ajoute MT. Nous sommes fiers que la réflexion ait été guidée dans les moindres détails. Selon MT, « [Project 21] ne serait pas une Ming si nous n’en demandions pas plus : les petits boîtiers ont tendance à être légers, ou encore pires perçus comme ultralégers au point de créer une dissonance cognitive – nous avons également tendance à les pressentir comme fragiles. J’ai donc conçu un boîtier qui serait aussi lourd que possible : massif tout autour du mouvement avec une lunette ne faisant qu’un avec la carrure. Ceci pour une rigidité perçue encore plus élevée. Je voulais qu’il soit fabriqué en tantale, matériaux dense et exotique, avec trois finitions contrastées : un poli miroir sur le rehaut, un brossé circulaire fin sur la partie concave de la lunette, qui s’étire jusqu’au sommet des cornes, puis un sablage sur les flancs de la carrure qui s’écoule continuellement vers le bas. » Il poursuit : « Il n’y a qu’une seule ligne dure dans le corps du boîtier proprement dit : le bord entre les surfaces supérieure et latérale. Chaque autre profil est courbé dans au moins une direction, parfois deux. Et le fond n’est même pas circulaire, mais il a une protubérance trapézoïdale arrondie pour permettre un dégagement autour du tube de couronne. » Le design combiné avec les tolérances requises des boîtiers ainsi que le choix du tantale a représenté un cauchemar d’usinage, uniquement possible en multiaxes et exigeant certains des meilleurs talents actuels de fabrication et d’usinage. Cette impossibilité perceptible de production de la boîte a été l’une des nombreuses raisons pour lesquelles nous n’avons jamais sérieusement envisagé de produire le Project 21 plus tôt. Le côté cadran est tout aussi spécial : bien qu’extra-plat, le Project 21 possède deux cadrans : le premier comporte un motif multicouche de virures contraintes dans une couche de borosilicate fusionnée, qui a été produit par notre partenaire Femtoprint. Il est suspendu au-dessus d’une plaque de laiton qui ne fait que 400 microns d’épaisseur et qui est revêtue d’un traitement CVD, mais qui parvient à intégrer un fraisage qui fait écho au motif du cadran du dessus. Les indices sont gravés dans la glace saphir de la boîte, et les aiguilles squelettées ont des flancs polis et angulaires. En raison de la finesse de ce modèle et du l’intention thématique il n’y a pas de matériau lumineux, faisant du Project 21 une des très rares montres que nous avons produites et qui ne luit pas dans la nuit.

UN COMMENTAIRE ? Ming est une des marques les plus intéressantes de la nouvelle horlogerie indépendante et créative, celle des années 2010 : à Kuala Lumpur, on comprend apparemment les attentes des nouveaux amateurs qu’en Suisse ou en Europe ! Particulièrement bien pensée, cette montre a tout pour plaire (exceptionnel boîtier en tantale de 35 mm x 6,9 mm d’épaisseur, étanche à 50 m, avec des états de surface d’une matité parfaite et un mouvement à remontage manuel doté de 38 heures de réserve de marche). Seul cactus dans ce bouquet : un prix qui gratte (environ 29 500 francs suisses), mais la catégorie « Time Only » du GPHG n’est pas un concours de beauté commercial : on a donc toutes les chances de retrouver Ming en présélection, avec une option très ferme sur une finale qui s’annonce très disputée entre « grandes » et « petites » marques…

PARMIGIANI FLEURIER Tonda PFMicro-rotor Platinum

Tonda PF Micro-Rotor, dès son lancement en 2021, s’est imposée comme l’une des icônes horlogères contemporaines. Chez Parmigiani Fleurier, chaque création est une ode à l’élégance intemporelle et à l’artisanat d’exception. Avec la Tonda PF Micro-Rotor Platinum Stone Blue, une édition ultra-exclusive limitée à seulement 25 exemplaires, le choix du platine s’impose comme une évidence. Ce métal noble et précieux symbolise à lui seul la quintessence du raffinement discret, hommage à la recherche d’une distinction feutrée, loin des artifices flamboyants. Matériau exceptionnel, le platine séduit par ses nuances harmonieuses et s’aligne parfaitement avec une philosophie de distinction personnelle. Sa densité confère une présence unique, associant légèreté apparente et poids noble. Ce matériau résistant incarne la pérennité, à l’image des créations Parmigiani Fleurier. Coeur de la Tonda PF Micro-Rotor Platinum Stone Blue, le calibre PF703, mouvement ultrafin est équipé d’un micro-rotor en platine, décoré de l’emblématique guilloché Grain d’Orge. Niché dans l’épaisseur du mouvement, il garantit une finesse exceptionnelle de seulement 7,8 mm, tout en offrant une autonomie de 48 heures.

UN COMMENTAIRE ? C’est clairement une des plus belles montres de ce concours 2025, même si la montre est desservie par un prix anti-commercial au possible (comptez dans les 85 000 francs suisses pour ce boîtier de 40 mm x 7,8 mm d’épaisseur, étanche à 100 m et animé par un mouvement automatique « manufacture » prévu pour 48 heures de réserve de marche). Esthétiquement, on peut s’extasier : zéro défaut. Mécaniquement, on peut apprécier : zéro souci. Le tout est maintenant de savoir si les académiciens comprendront le message aussi subtil que subliminal que cette Tonda envoie aux vrais amateurs de vraies belles montres : il serait indigne qu’elle ne soit pas retenu pour la présélection de « Time Only » et une place sur le podium final ne serait pas imméritée, tout comme une « Aiguille d’or ». Irait-on vers une « année Parmigiani » ?

PIAGET Andy Warhol Watch Clou de Paris Edition

Grâce à un nouveau partenariat sous licence avec l’Andy Warhol Foundation for the Visual Arts, Piaget a rebaptisé officiellement ce garde-temps du nom du célèbre artiste. La montre Andy Warhol Clou de Paris est ainsi la première à célébrer cette union palpitante dans une nouvelle interprétation contemporaine. Évoquant les godrons signatures d’origine, le boîtier coussin de cette montre a présenté un véritable défi : le motif clou de Paris a dû être réalisé à la main avec minutie sur une surface incurvée plutôt que plane, tout en reproduisant la superposition subtile, le jeu de lumière merveilleux et la créativité envoûtante de ces détails. Un cadran en météorite bleue unique en son genre vient compléter cette finition. Avec sa couleur intense et ses reflets exceptionnels, il rappelle le goût de Piaget pour les pierres ornementales, la Maison réservant ce matériau caractéristique à ses créations les plus incroyables. En l’occurrence, la météorite bleue ajoute une touche de rareté et de distinction à la nouvelle montre Andy Warhol. Enfin, un dernier élément vintage met en valeur le caractère singulier de ce garde-temps : des aiguilles dauphines et d’élégants index.

UN COMMENTAIRE ? Voici probablement la montre la plus originale de cette série des « Time Only », sinon de tout le concours d’élégance qu’est le GPHG. Piaget propose cette pièce à 57 000 francs suisses (boîtier en or de 45 mm x 43 mm x 8 mm d’épaisseur, étanche à 30 m et doté d’un mouvement automatique). L’esthétique est très forte, peut-être un peu trop pour des académiciens qui voient plutôt la présélection s’opérer autour de classiques montres rondes, mais il serait dommage que cette Piaget ne soit pas présélectionnée, même s’il est vrai que Piaget collectionne les récompenses au GPHG (pas loin d’une quinzaine de prix en un quart de siècle)…

RALPH LAUREN RL Western Cushion (cadran turquoise)

Ralph Lauren présente le dernier ajout à la Collection American Western : une montre coussin saisissante avec un cadran en pierre turquoise naturelle. Perpétuant la tradition d'allier le savoir-faire suisse à l'iconique style Ralph Lauren, cette nouvelle création s'inspire de la profonde admiration de M. Lauren pour l'Ouest américain. La nouvelle RL Western Cushion avec son cadran en turquoise incarne l'esprit authentique et le caractère distinctif des ceintures rodéo et concho vintage qui ont longtemps influencé les créations de M. Lauren. Ces éléments sont apparus pour la première fois dans les années 80, lors de son défilé Femme inspiré de Santa Fe. Ils continuent de faire partie intégrante de ses collections aujourd'hui. Pour ce modèle, M. Lauren réimagine les motifs traditionnels des ceintures western dans une silhouette coussin sophistiquée, fabriquée en argent 925 vieilli que complète un bracelet en cuir vachetta brun patiné. Ralph Lauren a collaboré avec des maîtres artisans du monde entier pour garantir la plus haute qualité et authenticité de chaque composant de la montre. Les bracelets en cuir sont méticuleusement travaillés à la main au Texas et patinés en Italie, tandis que les boîtiers et les boucles en métal sont gravés à la main et vieillis à New York. Le cadran en pierre turquoise, avec ses inclusions uniques, affiche les signatures de la marque Ralph Lauren que sont la combinaison de chiffres romains et arabes et d’aiguilles style Breguet. Les variations dans la gravure et la patine font de chaque montre une pièce unique. Le boîtier coussin, 42mm par 10,6mm, est animé par un mouvement mécanique fabriqué par Piaget exclusivement pour Ralph Lauren. Le calibre automatique RL514, reconnu pour sa précision et sa fiabilité, comporte 26 rubis et offre une réserve de marche de 40 heures. Ce modèle rejoint les rangs prestigieux de la Collection American Western Watch, qui comprend également des modèles en or 18 carats et de forme ronde.

UN COMMENTAIRE ? C’est décemment la seule montre-bracelet qu’aurait pu souhaiter John Wayne et c’est celle que tous les cow-boys auraient rêvé de porter, avec leur étui à cartouchière et leurs conchos, à la grande époque du Wild West (il faut compter dans les 26 000 francs suisses – la nostalgie est hors de prix ! – pour ce boîtier « coussin » en argent de 42 mm x 42 mm x 10,6 mm d’épaisseur, étanche à 50 m et animé par un mouvement automatique fourni pour 40 heures de réserve de marche). Maintenant, s’agit-il vraiment d’une « Time Only » ? Formellement oui, mais la catégorie s’ordonne autour de propositions plus sobres : deux aiguilles « western » ne font pas une identité particulièrement présélectionnable, surtout dans une catégorie qui verra deux montres inscrites sur trois éliminées en vue de la finale. Elle était pourtant belle, cette dame de l’Ouest parée d’argent et de turquoise…

COORDINATION ÉDITORIALE : JACQUES PONS



Partagez cet article :

Restez informé !

Inscrivez-vous gratuitement à notre newsletter et recevez nos dernières infos directement dans votre boite de réception ! Nous n'utiliserons pas vos données personnelles à des fins commerciales et vous pourrez vous désabonner n'importe quand d'un simple clic.

Newsletter