> 

GPHG 2025 #21 (accès libre)
Douze appréciations raisonnées de douze autres montres « métiers d’art » du GPHG

En parallèle avec nos pages « Repérages » habituelles, nous proposons cet été un « repérage » des montres inscrites pour le prochain GPHG, dans l’ordre choisi par le GPHG, mais dans le cadre d’une revue critique, éclairée et commentée. De quoi aider les académiciens à faire leur choix. Voici donc douze montres de douze marques en quête d’un prix au soir de la finale : Louis Vuitton, Minase, Oan Gio, Piaget, Qannati, Ressence, Sarpaneva, Sartory Billard, Taos, Titan, Van Cleef & Arpels et Voutilainen…


En toute transparence, avant d’être critiquées (au meilleur sens du terme) et appréciées, ces nouveautés sont expliquées dans la jamais trop fleurie « langue de boîte » : c’est la langue usuelle de nos « amies les marques » et c’est la langue de bois des « boîtes » d’horlogerie. Dans tous les styles et à tous les prix, venues de Suisse ou d’ailleurs, au masculin comme au féminin, quelles montres les académiciens vont-ils devoir sélectionner ? Certaines de ces montres ont déjà été présentées par Business Montres, mais nous y revenons avec plaisir ! Place à un nouvel épisode de notre panorama du GPHG 2025, avec nos commentaires critiques sur douze montres de douze marques… 

LOUIS VUITTON Tambour Bushido Automata

Avec le calibre primé LV525, Louis Vuitton inaugure une nouvelle étape de son audacieux voyage au pays de la Haute Horlogerie. La Maison fait aujourd’hui escale au Japon pour explorer le riche et puissant univers des samouraïs. Ce spectacle mécanique de 16 secondes capture le code de conduite des samouraï – aussi appelé Bushido - à travers cinq animations, alimentées par le calibre LV 525 à remontage manuel. Par une pression du poussoir, l'automate prend vie, le yokai – créature surnaturelle symbolique – se déplace latéralement pour révéler l’heure sautante inscrite sur l’avant du casque, alors que le katana épuré désigne les minutes rétrogrades. L'expression du samouraï se transforme avec une puissance silencieuse — sa mâchoire s'ouvre pour dévoiler le mot Bushido en kanji rouge vif, encadré par des dents en nacre, et un œil se transforme d'une Fleur de Monogram arrondie en une pointe, comme par magie. La Tambour Bushido Automata repousse les limites de l'art horloger. Cela a été particulièrement le cas dans le domaine de l'émaillage, où, grâce à un mélange de techniques traditionnelles, des possibilités infinies et de nouvelles techniques pionnières ont été explorées et développées. La gravure du cadran, du poussoir et de la couronne de la montre Tambour Bushido Automata a nécessité 140h d’ouvrage, témoignant ainsi d’un travail minutieux et d’une grande expertise artisanale. Les artisans émailleurs de La Fabrique des Arts ont conjugué leur savoir-faire d’excellence à celui des maîtres graveurs pour innover – consacrant au total près de cent vingt heures d’ouvrage. Pour la première fois dans la collection horlogère de Louis Vuitton, la boite Tambour ainsi que la lunette sont entièrement gravés et émaillés. Après le martelage de centaines de points minuscules, une couche d’émail rouge translucide a été appliquée, puis chauffée à haute température. Les marques rondes ont ainsi été comblées d’émail, créant un remarquable effet grainé. Cette opération délicate, compte tenu du risque de cassure permanent, a nécessité 200h d’ouvrage. Imaginative, évocatrice et résolument Louis Vuitton, cette création souligne l’audace et la témérité de la Maison dans la poursuite de l’aventure des Tambour Automates.

UN COMMENTAIRE ? Une montre spectaculaire, par sa décoration figurative autant que par son prix (735 000 francs suisses) et par la palette de métiers d’art déployés pour parvenir à ce résultat qui estomaque (boîtier en or rose de 46,8 mm x 14,4 mm d’épaisseur, étanche à 30 m et animé par un mouvement manufacture à remontage manuel qui annonce 100 heures de réserve de marche). On peut quand même se demander si les académiciens présélectionneurs seront sensibles à ce volumineux boîtier un tantinet trop voyant et, en cas de présélection, si les jurés chargés de décerner le prix en finale n’opteront pas pour des expressions moins violemment expressive des métiers d’art…

MINASE Edition limitée Mexico

L'édition limitée Mexico allie l'artisanat traditionnel japonais et le riche héritage de la civilisation mexicaine. Les cultures japonaise et mexicaine accordent toutes deux une grande importance à la tradition et à l'artisanat de qualité. Avec l'édition limitée Mexico, Minase affirme son engagement à embrasser la diversité et à favoriser les liens culturels. Cette édition limitée représente une union de cultures qui transcende les frontières géographiques et a été créée pour l'entrée de Minase sur le marché latino-américain. Le modèle utilisé pour cette édition spéciale est 7 Windows. Appelée ainsi en raison des sept verres en sapphir incrustés autour du boîtier, la montre offre une vue impressionnante sur le cadran et le mouvement sous tous les angles. Minase utilise de l'acier inoxydable 316L et termine chaque pièce à la main avec la technique de finition des surfaces sallaz (également connue sous le nom de Zaratsu). Une première couche de laque Urushi est appliquée et chauffée pour empêcher la plaque du cadran de s’oxyder et de rouiller. Cette procédure est répétée deux ou trois fois. L’artisan, Junichi Hakose, commence alors à décorer le cadran, alternant peinture, saupoudrement d'or (makié) et pose de paillettes d'or (hirame), de coquillages ou de minuscules morceaux d’œuf de caille. Le processus prend du temps car la peinture et la laque doivent sécher après chaque étape de la décoration du cadran. Le maître Urushi Hakose est l'un des artistes laqueurs japonais les plus reconnus au niveau international. Il dirige son propre atelier et prend plusieurs apprentis chaque année pour transmettre son savoir. C'est la première fois qu'il travaille sur des cadrans de montres pour Minase. Il se concentre habituellement sur des ustensiles de cuisine, des stylos, et d'autres articles de luxe.

Le cadran s'inspire des armoiries mexicaines, elles-mêmes basées sur le symbole aztèque de Tenochtitlan (aujourd'hui Mexico City). Au lieu d'être assis sur un cactus, l'aigle se tient sur un Seigaiha, un motif symbolique de vagues représentant la chance au Japon.L'artiste a également dessiné un chemin vert, jaune et rouge comme lien unissant le Mexique et le Japon. L'aigle du drapeau mexicain symbolise la force, la résistance et le triomphe du bien sur le mal. Il rappelle l'héritage précolombien du Mexique et sert d'emblème unificateur pour le peuple mexicain, représentant son identité culturelle et ses racines historiques. Sur ce cadran, la tête de l'aigle est constituée de fines feuilles d'or pur. Pour les yeux, Hakose a découpé et collé des coquillages lumineux sur de la laque urushi noire. La Seigaiha rappelle également la gravure sur bois de l'artiste japonais Hokusai « La grande vague au large de Kanagawa ». Cette vague symbolise non seulement la chance, mais aussi le changement au Japon. Hakose a sélectionné de minuscules morceaux d'œuf de caille et les a collés à la surface des vagues. Cela ressemble à une minuscule mosaïque. Il faut plus de 30 heures de travail pour fabriquer un seul cadran. Les pièces en acier des montres Minase sont polies à la main selon la technique de traitement des surfaces Sallaz (également connue sous le nom de Zaratsu). Cette technique consiste à polir l'acier à la main, pièce après pièce, ce qui exige un niveau élevé de compétence et de dextérité. La structure brevetée « Minase Original Rebuilding Equation » permet aux horlogers de Minase d'assembler et de désassembler les parties extérieures de la montre, telles que le boîtier et le bracelet, autant de fois qu'ils en ont besoin pour remettre la montre en état ou la réparer. Cette construction spéciale a été inspirée par les puzzles japonais en 3D. Le mouvement mécanique est enfermé entre une plaque et un boîtier supérieur (qui fait office de cadran) sur lequel est monté l'anneau d'index. L'ensemble de cette boîte intérieure ressemble à une structure flottante vissée aux quatre coins à l'intérieur de chaque boîtier.

UN COMMENTAIRE ? La maison Minase étoffe ses références culturelles en passant du Japon au Mexique : pourquoi pas, l’essentiel étant d’adapter les techniques décoratives japonaises à un motif aztèque, au besoin en le fusionnant avec une symbolique japonaise (il faut compter dans les 16 000 francs suisses pour ce duel herpéto-aquilin : boîtier de 37 mm x 47 mm x 13 mm d’épaisseur, étanche à 50 m et animé par un mouvement automatique calé sur 50 heures de réserve de marche). Un excellent travail en tous points digne de la catégorie « Métiers d’art », mais le plateau est cette année très relevé puisqu’il faudra éliminer trois montres sur quatre de celles qui sont inscrites – et il n’est pas certain que Minase ait assez d’atouts pour accéder à la finale…

OAN.GIO Ginkgo Prestige

Gingko Prestige est la pièce emblématique de notre collection inaugurale, incarnant pleinement nos valeurs. Son cadran arbore unmotif de feuille de gingko finement gravé à la main — un hommage à l’élégance et à la résilience de la nature. Chaque cadran nécessite près de trois heures de travail ininterrompu, réalisé avec une précision extrême par un maître artisan, à l’aide d’outils traditionnels d’orfèvre. La gravure à la main est la plus ancienne forme d’ornementation du métal, exigeant un savoir-faire exceptionnel et des années de pratique. À chaque trait de burin, l’artisan retire de minuscules fragments de matière, révélant un motif qui semble émerger du métal lui-même. Cette technique ancestrale confère au cadran une chaleur et une profondeur inimitables, impossibles à reproduire par des machines. Nous avons choisi la feuille de gingko non seulement pour la beauté de sa silhouette, mais aussi pour la richesse de sa symbolique à travers les cultures. Au Japon comme en Chine, elle représente la résilience et la longévité — un arbre millénaire, témoin de l’histoire, ayant survécu aux extinctions. En Occident, elle incarne l’espoir et le renouveau. Ce symbole universel était une évidence pour porter notre toute première création. Au cœur du modèle Gingko Prestige bat un mouvement suisse ETA Unitas 6498-2 entièrement retravaillé par nos partenaires de précision à Glashütte — berceau historique de l’horlogerie allemande. Le pont ¾, la platine et le pont de balancier, tous personnalisés, sont minutieusement anglés, polis et dessinés avec des courbes inspirées des montres de poche d’époque. Des finitions telles que le perlage doré, les côtes de Genève, les vis polies miroir et le système de cliquet raffiné transforment ce calibre en une œuvre mécanique d’exception — admirée aussi bien côté cadran que côté fond. La Gingko Prestige de Oan.Gio n’est pas seulement une montre, c’est un hommage vivant à l’héritage, au geste humain, et à la beauté intemporelle.

UN COMMENTAIRE ? Un travail de gravure remarquablement stylisée et une symbolique puissante dans les cultures asiatiques, mais, pour la présélection, la montre souffrira sans doute de son absence de notoriété et de son prix public, très intéressant pour un amateur mais un peu dénué de signification dans une catégorie « Métiers d’art » qui préfère les poids lourds (il faut compter 4 000 francs suisses pour ce boîtier en acier de 40 mm x 10,7 mm, étanche à 50 m et mécanisé par un excellent mouvement suisse retravaillé pour 56 heures de réserve de marche). Dommage…

PIAGET Altiplano Skeleton High Jewellery Métiers d'Art

« Une montre est avant tout une pièce de joaillerie ». Par ces quelques mots, Yves G. Piaget encapsulait alors toute l’histoire et le paradoxe de la Maison Piaget, née en 1874 dans le village suisse de la Côte-aux-Fées. D’abord horlogers, spécialistes de l’extra-plat, les artisans de la Maison libèrent au début des années 60 l’esthétique en parant ces garde-temps affinés et battant au rythme de l’iconique mouvement 9P de cadrans en pierres ornementales aux couleurs vibrantes. Véritable spécimen rare, la montre Altiplano High Jewellery pare son iconique mouvement squeletté serti de diamants et de saphirs d’une seconde facette en émail Grand Feu cloisonné. Une création limitée à huit exemplaires, qui porte la double signature des Ateliers de l’Extraordinaire de la Maison Piaget et de l’artiste émailleuse Anita Porchet.

UN COMMENTAIRE ? Il est d’usage de faire une génuflexion à l’évocation du nom d’Anita Porchet quand elle signe une montre « Métiers d’art » – et on a raison de la faire quand la montre réunit autant de qualités artistiques (il faut compter dans les 324 000 francs suisses – un prix qui fera tousser dans les chaumières – pour ce boîtier en or de 40 mm x 6,9 mm d’épaisseur, étanche à 30 m et muni d’un mouvement automatique squeletté). Autant dire que la place en présélection est quasiment acquise d’avance, avec une sérieuse option pour le podium en finale pour cet harmonieux mariage de la haute joaillerie et de la haute émaillerie…

QANNATI Quantum 1 Nautical Edition

Qannati Quantum 1 Édition Nautical (Chef-d’œuvre Unique) est une ode audacieuse aux merveilles cachées de l’océan, révélée par un savoir-faire exceptionnel et une précision technique. Réalisée comme un chef-d’œuvre unique en son genre pour l’un de nos collectionneurs les plus estimés, cette pièce exclusive incarne la rareté et la connexion personnelle. Son boîtier de 43 mm en acier inoxydable plaqué or allie avec audace lignes contemporaines et élégance intemporelle. Au cœur de cette création bat le mouvement automatique Sellita SW100, garant d’une fiabilité et d’une précision à toute épreuve. Réhaussé d’un bracelet en cuir de crocodile bleu Tiffany, l’ensemble évoque les nuances apaisantes des mers tropicales. Au-dessus du cadran, une micro-sculpture en trois dimensions — taillée à la main dans la cire puis émaillée au Qannati Lab à Bahreïn — dépeint un tableau sous-marin. Des branches de corail finement ciselées soutiennent de véritables perles naturelles de Bahreïn, tandis que de vibrants éclats de tourmaline Paraíba du Brésil scintillent comme des reflets de lumière sous-marine. Cette scène miniature, logée dans une cavité au-dessus de l’affichage horaire, invite le regard à plonger dans un univers où l’art et l’horlogerie fusionnent. Chaque détail du Quantum 1 Édition Nautical porte l’empreinte d’une intention créative : du choix des matériaux précieux aux techniques artisanales qui animent ce paysage marin. En tant que pièce unique réalisée spécialement pour un collectionneur, elle incarne l’esprit d’exploration, la tradition horlogère bahreïnienne et l’émotion de posséder un trésor singulier niché sous les vagues. Ce garde-temps ne se contente pas d’indiquer l’heure ; il raconte une histoire profondément personnelle d’art, de nature et d’exclusivité.

UN COMMENTAIRE ? Une montre au goût étrange venu d’ailleurs (directement de Bahreïn), très contemporaine dans l’expression de son motif décoratif et très traditionnelle à la fois (il faut compter dans les 6 500 francs suisses pour ce boîtier en acier de 43 mm x 12 mm d’épaisseur, étanche à dix mètres – ce n’est pas une plaisanterie : interdiction de se laver les mains ! – et animée par un mouvement automatique suisse doté de 38 heures de réserve de marche). Les chances d’accéder à la présélection sont minimales, même avec la meilleure volonté présélective des académiciens, qui vont devoir éliminer trois montres sur quatre inscrites en vue de la finale… 

RESSENCE Type 8 Indigo

La Type 8 Indigo raconte l’histoire du temps en bleu vibrant, révélant la beauté délicate de l’indigo naturel à travers l’application minutieuse de fil de soie. À l'image des cernes d'un arbre marquant le passage des années, le design du cadran évoque le fil du temps dans une composition visuelle captivante. Dans un souci d'authenticité, Ressence a choisi le fil de soie comme support idéal pour exprimer la véritable essence de l’indigo naturel dans la création de la Type 8 Indigo. Ressence s’est associée à Buaisou, une entreprise située à Kamiita-cho, dans la préfecture de Tokushima, berceau de la teinture indigo. Buaisou cultive ses propres plants d’indigo et gère chaque étape du processus de teinture sur place, garantissant ainsi une qualité exceptionnelle et un profond respect de la tradition. Considéré comme la plus ancienne teinture connue de l’humanité, l’indigo a traversé les cultures et les époques, utilisé dès le VIe siècle au Japon où il fut introduit par le commerce de la soie depuis l’Inde ou par les anciennes civilisations de Chine. Il est devenu une tradition séculaire japonaise, reconnu pour sa teinte profonde et chaleureuse, surnommée « bleu du Japon ». La plante Indigofera, annuelle de la famille des Fabacées, est autant prisée pour sa couleur et que ses propriétés médicinales. Ses feuilles, récoltées puis fermentées pendant des mois, produisent le « Sukumo », un pigment naturel au cœur de l’art et du textile oriental. La tâche délicate de poser et de fixer le fil de soie sur les composants en titane a été réalisée avec expertise par un atelier de renom basé à Genève. Chaque cadran a nécessité deux jours de travail minutieux, confié à une artisane qualifiée. Le fil est appliqué en spirale depuis le bord extérieur vers l'intérieur, suivant les contours de la cavité. Des matériaux de fixation spécifiques sont utilisés pour préserver l'aspect naturel du fil de soie et empêcher la colle de pénétrer dans les fibres, altérant ainsi la couleur.

UN COMMENTAIRE ? Superbe idée graphique et artisanale que ce fil de soie indigo sur un cadran horloger [une remarquable réalisation genevoise] ! Il faut compter dans les 25 000 francs suisses pour ce boîtier en titane de 42 mm x 11 mm d’épaisseur, dont le décompte du temps est assuré pendant les 36 heures de réserve de marche par un mouvement automatique. Reste à savoir si cette belle idée est assez forte pour s’imposer aux académiciens présélecteurs face aux vingt-quatre autres montres en compétition : si la virtuosité sérigraphique est au rendez-vous, elle n’est cependant peut-être pas assez spectaculaire pour émerger…

SARPANEVA Moomin 80

Depuis quatre-vingts ans, les Moomins touchent les cœurs avec leurs histoires empreintes de merveille, de nature et d’aventure. Aujourd’hui, Sarpaneva rend hommage à cet univers emblématique avec une montre qui unit art et horlogerie — une pièce où les paysages imaginaires de Tove Jansson rencontrent le savoir-faire magistral de l’horlogerie finlandaise. Imaginez contempler le ciel nocturne, où des étoiles filantes tracent leur sillage lumineux dans l’obscurité. Imaginez maintenant cette même magie céleste à votre poignet. Cette montre extraordinaire transforme la lecture du temps en une expérience — où l’art et la mécanique fusionnent dans une danse envoûtante. Au cœur de ce chef-d'œuvre se trouve une ouverture en acier ajourée en forme d’étoile filante, gracieusement positionnée entre 11 et 13 heures, d’une manière éthérée qui rappelle le passage de la comète dans Une comète au pays des Moomins. Tel un astre guide, elle révèle l’heure à l’aide d’un disque rotatif qui glisse le long de la périphérie du cadran, créant un spectacle cosmique en perpétuel mouvement. De fines étoiles indiquent l’heure avec élégance, assurant une lecture fluide. Des éléments suisses Super-Luminova diffusent une douce lueur, faisant vivre le ciel nocturne et permettant à la montre de murmurer son histoire même dans l’obscurité. Cette montre n’est pas qu’un instrument de mesure du temps — c’est une histoire écrite dans les étoiles, un hommage à l’innovation, une invitation à vivre le temps autrement… Bien plus qu’une montre, c’est une porte ouverte sur un monde de nostalgie, d’aventure et de douce rêverie.

UN COMMENTAIRE ? Les « hippopotrolls » nordiques (les Moomins) sont touchants, mais toucheront-ils le cœur des académiciens chargés de la présélection ? Rien n’est moins sûr, alors que Sarpaneva a tenté de mettre tous les atouts du côté de sa montre, proposée à 16 000 francs suisses (boîtier de 42 mm x 11,2 mm d’épaisseur, étanche à 100 m et animé par un mouvement automatique avec 42 heures de réserve de marche). L’idée de l’heure en passage de la comète, si elle n’est pas nouvelle, est cependant remarquablement interprétée, mais la troupe de Moomins manque un peu de substance féérique…

SARTORY BILLARD « Path of Purpose »

Chemin de Vie : un hommage à la carrière et au savoir-faire. Cette montre ne se contente pas d’indiquer l’heure — elle raconte une trajectoire. Celle de la direction que l’on choisit, de l’ambition que l’on nourrit, de l’identité que l’on forge. En son cœur, un motif hautement symbolique : un caractère chinois stylisé signifiant « carrière ». Il évoque la progression, l’engagement et la quête de sens. Plus qu’un ornement, il rend hommage à celles et ceux qui tracent leur propre voie, avec persévérance, talent et vision. Le cadran est découpé dans une véritable plaque de silicium, matériau fondamental de la technologie contemporaine. À l’image d’un parcours professionnel, cette surface commence comme une page blanche — façonnée ensuite par la précision, l’innovation et l’intention. Sur cette base se déploie une miniature peinte à la main, réalisée par un maître suisse de cet art délicat. Chaque trait de pinceau exige du temps, de la patience et une parfaite maîtrise — à l’image du chemin qu’il célèbre. Cette pièce unique réunit la science des matériaux d’aujourd’hui et l’artisanat classique. Son cadran capte et reflète la lumière d’une manière singulière, faisant de cette montre bien plus qu’un objet : un talisman. Un symbole de transmission et de progrès. Une fusion poétique entre héritage et élan vers l’avenir.

UN COMMENTAIRE ? Le narratif sino-philosophique de cette montre est sympathique, mais il sera sans doute insuffisant pour émouvoir les académiciens au moment de faire leur choix pour la présélection en éliminant trois montres sur quatre de cette série (il faut compter dans les 9 000 francs suisses pour cette pièce unique dans son boîtier en acier de 40 mm x 11 mm d’épaisseur, étanche à 30 m en proposant les 68 heures de réserve de marche de son mouvement automatique). Si la montre a de la tenue, et même si elle témoigne d’une certaine harmonie cosmique, on l’imagine mal en finale face aux mastodontes qui se disputeront le prix…

TAOS Sequins

Vision pure des talents du prestigieux « Atelier Olivier Vaucher » à Genève combinée à l’intuition de l’horloger passionné Olivier Gaud, Taos voit le jour en 2024 en inaugurant un nouveau concept horloger : Des montres d’atelier, toutes uniques, combinant plusieurs Métiers d’Art d’exception, donnant naissance à d’extraordinaires cadrans fabriqués à Genève, animés par un calibre mécanique richement décoré. Chaque montre est une pièce unique. Chacun des cadrans est une œuvre d’art, fruit d’années d’expérience, de patience, de créativité cumulées par les plus de 40 artisans de l’Atelier Olivier Vaucher. Taos Sequins s’inspire de l’art des sequins, symboles de luxe et de savoir-faire depuis le Moyen Âge. Le cadran, gravé à la main et orné d’émail translucide, recrée l’éclat des parures scintillantes de la haute couture, avec des dégradés subtils de couleurs. Chaque sequin devient un fragment de lumière, capturant les reflets et la profondeur, offrant une pièce unique qui allie tradition, art et innovation dans une harmonie parfaite. La carrure est entièrement gravée à la main pour créer une continuité avec cadran. Le calibre automatique à double-barillet montés en parallèle VOP318, développé exclusivement par Télôs (La Chaux-de-Fonds, Suisse) pour Taos, est entièrement gravé à la main par les graveurs de l'Atelier Olivier Vaucher. Son décor nécéssitant plus d'une centaine d'heures de gravure est cette année inspiré par les drapés, lui conférant une élégance sculpturale à chaque pont.

UN COMMENTAIRE ? L’intégrité de la démarche artistico-artisanale de Taos est indéniable, et elle mériterait d’être récompensée par un prix « Métiers d’art », même si cette Sequins est une pièce unique, même si elle est facturée 162 000 francs suisses et même si l’affrontement avec des concurrents plus brutaux risque de ne pas tourner à son avantage (boîtier en or de 38 mm x 10 mm, étanche à 30 m et doté d’un mouvement automatique avec 72 heures de réserve de marche). Une vraie montre d’atelier pour laquelle on croise les doigts en vue de la finale, sauf si les académiciens se croisent les bras au moment d’opérer leur présélection…

TITAN Jalsa

Voici Jalsa, une création en édition limitée signée Nebula par Titan, conçue pour célébrer les 225 ans du mythique Hawa Mahal de Jaipur. Seuls dix exemplaires existent au monde – et chacun est absolument unique. Au cœur de Jalsa se trouve une peinture miniature, réalisée à la main sur marbre par le maître indien de la miniature, le Padma Shri Shakir Ali. Chaque cadran demande près d’un mois de travail minutieux, à l’aide de pigments naturels extraits de pierres précieuses, minéraux et végétaux broyés. Peinte avec un pinceau à un seul poil d’écureuil, l’œuvre révèle une finesse inouïe : la courbe délicate de la trompe d’un éléphant, l’expression sereine d’une figure royale – des détails presque invisibles à l’œil nu, mais habités d’histoire et d’âme. Jalsa est animé par le mouvement volant tourbillon développé en interne par Titan (7TH2), composé de 144 composants et de 14 rubis. Le fond transparent en saphir dévoile cette mécanique en mouvement, où l’ingéniosité technique rencontre la grâce ornementale. Ses ponts s’inspirent de l’architecture des palais du Rajasthan et sont sertis d’agate rouge naturelle, pierre précieuse intimement liée à l’héritage royal de Jaipur. Plus qu’un ornement, l’agate insuffle chaleur, opulence et poésie à ce garde-temps d’exception.

Le boîtier squelette en or rose 18 carats reprend les motifs ajourés – ou jalis – emblématiques des palais indiens. En son centre, une agate rouge irradie d’une richesse feutrée. Élément de design audacieux, la loupe en saphir placée au-dessus de l’aiguille des minutes rehausse la lisibilité tout en conférant une dimension sculpturale, attirant le regard vers le cœur du cadran. L’ensemble est accompagné d’un bracelet en cuir véritable, alliant confort et élégance intemporelle. Plus qu’une montre, Jalsa est un hommage sincère à l’artisanat indien, à la miniature et à l’histoire précieuse du travail des gemmes. Ici, le geste devient sculpture, le temps devient tradition, et chaque détail est empreint de révérence. Avec seulement dix pièces au monde, Jalsa incarne le meilleur de Nebula – là où l’âme de l’Inde rencontre l’art de la haute horlogerie.

UN COMMENTAIRE ? Même sans la loupe qui la met en valeur, la maestria de cette peinture miniature laisse pantois d’admiration, d’autant que ce tourbillon n’est facturé « que » 38 000 francs suisses (boîtier en or rose de 43,5 mm x 14,5 mm d’épaisseur, étanche à 50 m et mécanisé par un mouvement « manufacture » à remontage manuel qui dispose de 36 heures de réserve de marche). C’est bien une des montres les plus naturellement appelées à figurer dans la présélection, sinon sur le podium de la finale : à une heure où l’horlogerie suisse place tous ses derniers espoirs dans un marché indien confondu avec la « prochaine Chine » [ce qui relève de l’erreur de perspective, mais c’est un autre débat], il serait bienséant et encourageant qu’une telle montre soit récompensée…

VAN CLEEF & ARPELS Perlée Extraordinaire Fruits Enchantés Framboise

La montre Perlée Extraordinaire Fruits Enchantés Framboise évoque un tableau féerique conférant au temps la saveur gourmande d’un après-midi d’été. Au coeur d’un écrin de perles d’or, de généreux fruits semblent attendre d’être cueillis. Le volume rebondi et le brillant des baies est rendu possible grâce à la technique de l’émail façonné, un savoir-faire breveté imaginé par Van Cleef & Arpels en 2023 pour ses créations horlogères. Deux fées en or blanc sculpté s’invitent gracieusement dans ces tableaux. Joueuses, ces figures emblématiques de la Maison s’amusent du temps qui passe, leurs ailes serties de diamants faisant écho aux gemmes illuminant la tranche du boîtier.

UN COMMENTAIRE ? Une montre à… croquer, pleine de (bon) goût, de parfums, de couleurs et de fantaisie (il faut compter dans les 51 000 francs suisses – ce qui reste « raisonnable » pour du Van Cleef & Arpels ! – pour ce mignon petit boîtier en or rose de 30 mm x 9,4 mm d’épaisseur, étanche à 30 m et doté d’un mouvement électronique). Cette « Perlée extraordinaire » est évidemment une des montres les plus attendues dans la présélection, sinon sur le podium de la finale – ce qui ne ferait jamais qu’un prix supplémentaire pour la maison Van Cleef & Arpels, qui en a déjà reçu en moyenne trois tous les cinq ans (d’ailleurs pas toujours en « Métiers d’art »)…

VOUTILAINEN 28GML Souyou

La Voutilainen 28 GML Souyou est un véritable chef-d’œuvre qui allie l’extraordinaire art de la laque japonaise de M. Tatsuo Kitamura à l’engagement de l’atelier Voutilainen en faveur de la longévité, la précision et la tradition horlogère classique. Cette montre offre un équilibre parfait entre excellence esthétique et mécanique, mêlant influences orientales et occidentales. Le cadran envoûtant s’inspire de la devise « Souyou » — un terme inventé qui reflète le contraste saisissant entre le bleu-vert, l’or et le rouge: « Sou » évoque des nuances profondes et limpides de bleu-vert représentant la mer, tandis que « You » avec ses nuances dorées et rouges au centre, fait référence à une forme organique naturelle symbolisant l’énergie solaire. Réalisé selon la technique traditionnelle de laque Urushi, ce cadran demande plus de mille heures de travail minutieux. Cette création exceptionnelle intègre des matériaux naturels tels que l’« Urushi » (sève d’arbre), le « Kinpun » (diverses poudres d’or), le « Kirigane » (feuilles d'or découpées) et le « Kirigai » (fragments de coquilles de turban vert géant (Turbo marmoratus) et d’ormeau de Nouvelle-Zélande). Idéale pour les grands voyageurs, cette pièce unique affiche les heures, les minutes, ainsi qu’un second fuseau horaire central via un disque qui effectue une rotation complète sur 24 heures, indiquant l’heure du domicile. Subtilement intégrée dans le motif doré sur fond rouge, l’indication du second fuseau horaire est lisible au premier coup d’œil. L’aiguille centrale des heures peut quant à elle être réglée facilement à l’heure locale de la destination par une simple pression sur la couronne.

Le mécanisme a été conçu, construit, fabriqué, fini et assemblé dans l’atelier Voutilainen avec la plus grande précision, attention et passion. En termes technique, le calibre 28GML est équipé d'un balancier très large manufacturé en interne, assurant une régulation parfaite dans des tolérances strictes. De plus, un système rare et unique de spiral a été utilisé. La partie extérieure du spiral utilise une courbe Phillips typique, tandis que la courbe intérieure utilise la courbe Grossmann, moins connue, augmentant ainsi encore plus la précision. Le mouvement est particulièrement remarquable en raison de ses deux roues d'échappement, qui fournissent une impulsion directe au balancier à travers le plateau d’impulsion et sa levée. Cette construction innovante améliore l'efficacité en nécessitant moins d'énergie que l'échappement à ancre suisse et permet d'obtenir des bénéfices notables pour un usage quotidien, en termes de longévité, de stabilité et de réserve de marche plus longue. Le fond de la boîte offre une vue captivante sur les subtilités du calibre 28GML, méticuleusement fini selon les plus hauts standards par les artisans experts de l’atelier Voutilainen. Les surfaces des pignons et des roues sont complètement plates et polies avec des tolérances exceptionnellement uniformes. La platine et les ponts, fabriqués en maillechort, sont décorés à la main pour atteindre les plus hauts niveaux de finition de surface. Les vis et toutes les pièces en acier sont également finies et polies à la main. Pour compléter l’esthétique, la montre de 39 mm en platine est dotée d’un élégant bracelet cousu main.

UN COMMENTAIRE ? Dernière montre de la séquence « Métiers d’art », cette « Souyou » est un des plus extraordinaires témoignages des qualités qu’on attend des montres de cette catégorie d’excellence, dont Voutilainen reste un dangereux récidiviste (déjà quatre prix « Métiers d’art » en poche, soit un tous les deux ou trois ans). Il faut compter dans les 290 000 francs suisses pour ce chef-d’œuvre nippo-helvétique des beaux-arts de la décoration (boîtier de 39 mm x 11,2 mm d’épaisseur, étanche à 30 m et animé par un mouvement à remontage manuel disposant de 65 heures de réserve de marche). Qu’est-ce qui pourrait empêcher Voutilainen de l’emporter ? Peut-être la volonté des académiciens présélecteurs de varier les plaisirs en laissant leur chance à d’autres maisons ou, en finale, la prise de conscience des jurés face au terrible danger d’un entre-soi qui favorise toujours les mêmes marques et l’inflation des prix moyens…

COORDINATION ÉDITORIALE : JACQUES PONS



Partagez cet article :

Restez informé !

Inscrivez-vous gratuitement à notre newsletter et recevez nos dernières infos directement dans votre boite de réception ! Nous n'utiliserons pas vos données personnelles à des fins commerciales et vous pourrez vous désabonner n'importe quand d'un simple clic.

Newsletter