CORUM
L’esprit « lab » qui sait y mettre les formes
Corum a revu et corrigé une de ses formes fétiches, le tonneau, en lui insufflant un traitement mécanique qui ne manque pas de personnalité…
Le pari était risqué : faire du Corum sans bégayer et respecter des codes de la marque tout en les transgressant. C’est l’esprit « Heritage Corum Lab » modèle 01 – le tout formant un oxymore redoutable puisque les marques horlogères associent généralement leur « héritage » à leurs traditions et leur « lab » à leurs innovations. Le tout est de s’entendre : il faut pour cela piocher dans ce que la tradition porte de plus « contemporain » et recycler ce que l’innovation a de plus « classique ». C’est donc parti pour une dérivation génétique de ce bon vieux tonneau qu’on retrouve de loin en loin dans les collections Corum, qui n’ont jamais lésiné sur les angles arrondis des Golden Bridge plus ou moins modernisés : l’horlogerie est un éternel retour plus implacable que celui de Nietzsche. Retour aux sources qu’on double d’un mouvement mécanique à ciel ouvert, ce qui permet au passage de découvrir un micro-rotor, très à l’aise sur le cadran où ses finitions en colimaçon hypnotisent le regard. Si le prix n’est pas très câlin (comptez 13 800 francs suisses), la proposition semble honnête : elle passionnera dans un premier temps les amateurs chinois qui ne la trouveront que dans la nouvelle boutique chinoise de Corum, à Beijing…
Bien entendu, les myopes vont crier à la « richardmillisation » de Corum, voire à la « franckmullerisation » de la marque, les grands chiffres qui accompagnent le cadran squeletté pouvant laisser penser à une certaine influence. Sauf que les boîtiers tonneau corumisaient franchement avant d’être sanctuarisés par Richard Mille et Franck Muller. Sauf qu’on n’a jamais vu de couronne déportée à six heures sur les boîtiers de ces marques, alors que c’est une tradition Corum. Sauf que l’exhibitionnisme mécanique n’a rien d’une world premiere…
Quand une marque comme Corum est sur la corde raide, du fait de l’irrationalité de ses actionnaires chinois autant que de l’impéritie des équipes managériales qui ont précédé celle de Jérôme Biard, elle n’a de toute façon pas à faire de manières pour saisir toutes ses chances là où elles se trouvent. Pourquoi ce style de tonneau hyper-mécanique s’il peut ouvrir une issue de secours pour la marque ? Pourquoi pas cette Heritage Corum Lab 01 pour tenter une incursion sur un terrain de jeu pas encore trop encombré, avec des codes qui parlent aux amateurs [on imagine que le rouge ne déplaira pas aux clients chinois de Corum] ? Paris vaut bien une messe et la survie d’une marque vaut bien une manip de laboratoire…