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IN MEMORIAM (accès libre)
Philippe Charriol nous a quittés

Nos pensées vont aujourd’hui à la famille de Philippe Charriol, tragiquement accidenté, avant-hier, sur ce circuit du Castellet (France) qu’il affectionnait tant. Nous leur adressons nos sincères condoléances. Vétéran des grandes batailles du luxe, industrie à laquelle il avait voué sa vie, Philippe Charriol avait 77 ans.


Nous perdons avec Philippe Charriol un de nos plus fidèles lecteurs, qui était resté au fil des années toujours aussi attentif et critique. Philippe Charriol a été victime, avant-hier 26 février, d’un très grave accident sur le circuit automobile du Castellet (France), très précisément dans la ligne droite du Mistral : excellent pilote et grand amateur de courses automobiles, il pilotait une Corvette à plus de 300 km/h quand l'accident est arrivé. Il a succombé à ses blessures dans la soirée. Nous exprimons nos plus sincères condoléances à sa famille, et notamment à sa fille, Coralie, qui s'occupe du marché américain et de la direction artistique de la marque pour les bijoux, ainsi qu'à sa femme, Marie-Olga (ci-dessous), qui a repris les relations publiques de la maison.

Le parcours de Philippe Charriol est emblématique des mutations du luxe, et notamment du luxe horloger à la fin du XXe siècle et au début du XXIe siècle. Commercial de classe international formé à l’école Cartier, Philippe Charriol avait lancé sa propre marque, sous son nom [ce qui était on ne peut plus audacieux à l’époque] en 1983 pour en faire une griffe de luxe internationale, dans l’univers de la montre, du bijou, mais aussi du parfum et de la maroquinerie. Sa vista était exceptionnelle, de même que son intelligence des marchés. Dès l’aube des années 1990, alors que le luxe européen commence à peine à se dépoussiérer, il ouvre ses premières boutiques en Asie (Hong Kong, Singapour, puis la Chine dès 1996) et au Proche-Orient. Certaines de ses collections deviennent iconiques, notamment les pièces qui font des câbles d’or ou d’acier des matériaux de luxe. Passionné d’art contemporain, Philippe Charriol avait créé sa propre fondation. On lui connaissait aussi une passion pour les vins aussi bien que pour les sports (polo, course automobile, golf) – bref, pour tous les compartiments de l’art de vivre ! On trouvait dans les 340 boutiques Charriol (285 boutiques en Chine, pour 3 800 points de vente dans le monde) des montres aussi bien que des lunettes, des bagages, des bijoux, des parfums, des stylos, des ceintures et des sacs à main...

Si la marque Charriol, qui fêtera cette année ses trente-six ans, a perdu un peu de son lustre en Europe, elle reste d’une puissance insoupçonnée en Asie du Sud-Est et au Proche-Orient : Philippe Charriol avait compris avant tout le monde – y compris avant ses amis de Cartier et du groupe Richemont – l’extraordinaire potentiel des marchés grand-chinois et des « dragons » du Pacifique. Il était un des derniers grands féodaux de cet univers du luxe traditionnel, pas peu fier d’avoir vendu près deux millions de montres dans sa vie et, surtout, d’avoir apporté sur des nouveaux marchés comme l’Indonésie ou les Philippines une nouvelle vision de l’art de vivre « à l’européenne ». Philippe Charriol incarnait une approche du luxe qui restait presque « familiale », de taille humaine, avec un attachement certain pour les relations entre les personnes, assez loin des rapports purement commerciaux qu’imposent aujourd’hui les multinationales turbo-capitalistes du néo-luxe financiarisé. Avec sa disparition, c’est le chapitre d’un ancien monde qui tend à se refermer : pas sûr que ce soit pour le meilleur ! Il nous restera de lui le souvenir d'un homme qui avait su mettre sa carrière au bout de ses idées et ses ambitions au service d'une vision des beaux-arts de l'excellence européenne : profitons de cette disparition pour méditer sur l'idée du luxe que nous allons léguer aux générations à venir...



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