REPÉRAGES #129-2025 (accès libre)
Sept remarques incisives sur sept montres de femmes en lice pour le GPHG 2025
En alternance, avec nos pages « Repérages » habituelles, nous proposons un « repérage » des montres inscrites pour le prochain GPHG, dans l’ordre choisi par le GPHG, mais dans le cadre d’une revue critique, éclairée et commentée. Voici donc sept montres de sept marques : Antoine Preziuso Genève, Arcanaut, Bvlgari, Chopard, Damiani, Dior et Reservoir…

En toute transparence, avant d’être critiquées (au meilleur sens du terme) et appréciées, ces nouveautés sont expliquées dans la jamais trop fleurie « langue de boîte » : c’est la langue usuelle de nos « amies les marques » et c’est la langue de bois des « boîtes » d’horlogerie. Dans tous les styles et à tous les prix, venues de Suisse ou d’ailleurs, au masculin comme au féminin, quelles montres les académiciens du GPHG vont-ils devoir sélectionner ? Quand on aime, on ne compte pas ; donc, une nouvelle pièce par jour de la semaine [certaines ont d’ailleurs déjà été présentées par Business Montres] ! Voici donc le 129e épisode de notre panorama des nouveautés de l’année 2025, avec nos commentaires critiques sur sept montres de sept marques…
(dessin publié en novembre 2021)
RESERVOIR Olive Oyl
Reservoir Watch présente fièrement son dernier bijou horloger inspiré des bandes dessinées iconiques : la Reservoir Olive Oyl. Ce garde-temps exquis marie ingénieusement l'art et la précision de l'horlogerie suisse avec un cadran en aventurine évoquant un ciel étoilé. Au coeur de ce décor céleste, la célèbre Olive Oyl apparaît aux côtés de son adorable bébé, Swee'Pea, insufflant une touche de nostalgie ludique à ce design sophistiqué. Plus qu'une montre, c'est une invitation à voyager dans un monde où l'élégance et le charme classique se rencontrent sous les étoiles du savoir-faire et de la tradition.
UN COMMENTAIRE ? Cette dernière proposition de la catégorie « Complication femme » est manifestement une erreur de casting – à moins qu’il ne s’agisse d’une perfide et odieuse subversion masculiniste de cette catégorie féministe ! Dans tous les cas, cette montre amusante et créative n’est pas à sa place, ce qui simplifiera la tâche des académiciens quand ils voudront procéder à la présélection de cette catégorie. C’était la pièce la mois chère de ces « complications » : il faut compter dans les 7 900 francs suisses [un prix qui est très exagéré] pour ce boîtier en acier de 39 mm x 11,5 mm d’épaisseur, étanche à 50 m, dotée d’un cadran en aventurine, sertie de 0,6 carat de diamants et animée par un mouvement automatique à heures sautantes, minutes rétrogrades et réserve de marche figurative (56 heures). Dommage, Olive Oyl méritait mieux…
ANTOINE PREZIUSO GENÈVE TTR3 Trillion Radiant
L’alliance parfaite entre l’Art du Bijou et la Maîtrise du Temps. Il y a dix ans naissait un prodige de la mécanique horlogère : le Tourbillon of Tourbillon à résonance. Un concept révolutionnaire, fruit de dix années de recherches et de 3 brevets, forgé dans le silence des ateliers d’Antoine Preziuso, là où l’âme du temps prend vie. Aujourd’hui, pour célébrer cette décennie d’avant-garde, Antoine Preziuso Genève dévoile une Pièce Unique, une œuvre qui fusionne l’éclat suprême de la haute joaillerie et la magie de la haute horlogerie. Chaque millimètre de cette création est un hymne à la lumière. Le boîtier et le bracelet, entièrement sertis de diamants baguette et de diamants Trillion, captent et réfractent la lumière avec une intensité presque irréelle. Le choix du diamant Trillion n’est pas simplement esthétique : il est rare, audacieux et hautement symbolique. Sa forme triangulaire, exigeante à tailler, évoque la triade sacrée du temps – passé, présent, futur – mais aussi les trois tourbillons du mouvement en parfaite résonance visuelle et philosophique. Peu utilisé en haute joaillerie en raison de sa complexité, le Trillion est ici élevé au rang de signature artistique. Il signe la pièce avec une modernité tranchante, presque céleste.
Ensemble, ces pierres forment une mosaïque vivante, sublimée par un sertissage invisible d’une virtuosité exceptionnelle. Les diamants semblent suspendus dans l’air, comme si la lumière elle-même avait été sculptée. Chaque reflet, chaque scintillement devient une note dans une symphonie de lumière. La montre ne se contente pas de briller — elle rayonne. Au cœur de cet éclat minéral, palpite une mécanique hors du temps : le Tourbillon of Tourbillons, triple tourbillon à résonance, primé deux fois primé au GPHG 2015, chef-d’œuvre technique qui joue avec la gravité et la physique pour offrir une régularité sans précédent. Il fait valser trois tourbillons sur un disque tournant, reliés par un triple différentiel et séparés par deux diamants Trillion d’un pur blanc, Top Wesselton G+, et d’un rubis Trillion « rouge sang de pigeon ».
UN COMMENTAIRE ? De toute évidence, c’est la montre la plus joaillière de la catégorie « Joaillerie » (onze montres inscrites), mais c’est aussi une des créations mécaniques les plus exceptionnelles de toutes les montres inscrites pour ce GPHG 2025. Sur la balance : 874 pierres, pesant 89 carats ! Ce boîtier en or de 47 mm x 14 mm d’épaisseur, étanche à 30 m et animé par un mouvement à remontage manuel réglé par un tourbillon, est affiché à 10 millions de francs suisses, ce qui fait de cette pièce unique la montre la plus coûteuse de l’année au GPHG ! Les jurés se laisseront-ils éblouir par cette extravagance, au point d’en faire une Aiguille d’or, ce qui libèrerait la place pour attribuer ce prix « Joaillerie » à une montre plus... raisonnable ?
ARCANAUT Experimental Arc II Garnet Goblin
L'Arcanaut ARC II - Garnet Goblin a été produite en collaboration avec le détaillant Chronoshop.cz, basé à Prague, et la mine historique de grenat Granát Turnov. Il s'agit d'une combinaison de design danois et de culture tchèque. Chaque cadran comprend des centaines de petits grenats (0,8 mm), disposés en grappe, fusionnés par un liant transparent, puis polis jusqu'à obtenir un disque plat, surmonté d'un combiné et d'un anneau de chapitre plaqués en or 9ct. Ce disque de grenat est ensuite recouvert d'un verre saphir de 03 mm d'épaisseur traité avec un antireflet rouge et collé à une platine plaquée or pour faire ressortir le feu du grenat chaque fois qu'il est exposé à la lumière.
UN COMMENTAIRE ? La technique joaillière choisie par cette maison danoise (Copenhague) est intéressante et son effet saisissant. C’est la montre la moins chère de la sélection « Joaillerie » (4 500 francs suisses), mais il n’est pas facile d’être un poids super-plume dans une compétition de super-poids lourd (voir, ci-dessus, les 10 millions de la montre Preziuso). Le boîtier en acier de cette série limitée de 66 pièces est de taille raisonnable : 40,5 mm x 49 mm x 12,1 mm d’épaisseur, le tout étanche à 100 m, serti de 20 carats de grenats et animé par un mouvement automatique avec 42 h de réserve de marche. S’Il fallait démontrer l’inanité de l’actuel règlement intérieur du GPHG, la coexistence de cette montre et de ses concurrentes dans une seule et même catégorie « Joaillerie » en serait le meilleur exemple…
BVLGARI Serpenti Aeterna
Serpenti ose sa métamorphose la plus audacieuse : Aeterna. Moderne. Avant-gardiste. Le reptile légendaire de Bvlgari, stylisé à l’extrême, se condense jusqu’à sa quintessence. Une géométrie pure, puissante. L’étreinte précieuse d’un jonc inédit. Le début d’une nouvelle ère. Un manifeste de style et de modernité, puisé dans l’héritage de Bvlgari et de Serpenti et transformé par une esthétique futuriste. L’essence absolue et épurée de Serpenti, symbole de renaissance éternelle. L’introduction d’un jonc dans la collection Serpenti, conçue pour s’harmoniser à l’infini avec les bijoux Bvlgari. Un chef-d’œuvre joaillier intemporel de fluidité, d’élégance et de perfection. L’année 2025, placée sous le signe du serpent dans le calendrier chinois, marque pour Serpenti une mue majeure. Avec Aeterna, Bvlgari fait renaître le reptile dans des atours exquis de haute joaillerie, propices à une sublime créativité. L’icône réinventée capte le riche héritage qui la précède et le déploie dans le futur, affranchie des modes et du temps. Le serpent devient un langage en lui-même : fluide et libéré du superflu. Montre Serpenti Aeterna High-Jewelry en or blanc sertie de diamants taille brillant et d'émeraudes de forme ronde. Bracelet tourbillon (taille 155 mm) et boîtier sertis de 428 diamants (4,93 ct), 263 émeraudes de tailles différentes (4,35 ct) et une émeraude centrale (0,45 ct). Cadran serti de 107 diamants (0,25 ct), aiguilles vertes.
UN COMMENTAIRE ? Inépuisable Serpenti, dont Bvlgari a fait son emblème dans la joaillerie créative contemporaine ! L’esthétique est unique et puissamment identitaire : il faut compter dans les 225 000 francs suisses pour ce chef-d’œuvre joaillier de 14 mm x 25 mm x 8 mm d’épaisseur, intensément serti (presque 10 carats), pas spécialement étanche bien entendu [mais qui prend sa douche avec une telle montre ?] et animé par un mouvement électronique. Une montre qu’on imagine bien dans la présélection, mais pas forcément finaliste de cette catégorie dont les jurés auront beaucoup de mal à départager les concurrents pour élire la montre gagnante…
CHOPARD Swan Lake
La participation de Chopard à l’édition 2025 du Grand Prix d’Horlogerie de Genève (GPHG), dans la catégorie Montre Joaillière, prend son envol sous la forme d’une montre secrète en forme de cygne majestueux. Entièrement réalisée à la main, cette création exceptionnelle incarne la maîtrise de la Maison en Haute Joaillerie, alliant grâce sculpturale et savoir-faire horloger de précision. Un nouvel animal extraordinaire rejoint le bestiaire de Chopard : façonné en or blanc et jaune éthique 18 carats, serti de diamants blancs et noirs ainsi que de spessartites, le corps du cygne repose sur une base en titane évoquant l’écume de mer, délicatement ornée de diamants et de saphirs. Sa silhouette est sculptée avec l’élégance sereine d’un cygne glissant sur une eau calme. Le cygne est fixé au poignet par un bracelet en satin orné de plumes blanches, complété par une boucle ardillon en forme de plume, réalisée en or blanc éthique 18 carats. Pièce unique, cette montre est le fruit de plus de 1500 heures de recherche, de conception et de travail artisanal. Du fermoir en plumes au déploiement mécanique des ailes, chaque détail reflète la vision de Caroline Scheufele, co-présidente et directrice artistique de Chopard, ainsi que la collaboration étroite entre artisans, designers et maîtres horlogers.
Au cœur de cette montre secrète se cache un véritable chef-d’œuvre d’artisanat : un cadran dissimulé, révélé uniquement lorsque la tête du cygne est doucement tournée vers une position centrale. Ce mouvement déclenche un mécanisme interne qui active l’ouverture des ailes, chacune composée de trois sections articulées qui se déploient avec élégance et fluidité. Sous cette chorégraphie se dévoile un minuscule cadran en nacre, orné d’un motif de plume gravé. Un mouvement mécanique à remontage manuel, le Chopard 10.01-C, bat en son cœur, offrant une réserve de marche de 45 heures et une fréquence de 21 600 alternances par heure – une prouesse remarquable compte tenu de sa taille compacte, équivalente à deux pièces de 5 centimes empilées. À l’image de cette pièce unique et de celles qui l’ont précédée, la montre Swan Lake incarne l’engagement durable de Chopard à fusionner imagination et savoir-faire mécanique, tout en célébrant la beauté poétique du monde naturel à travers le prisme de la Haute Joaillerie.
UN COMMENTAIRE ? Encore une « montre à secret » : depuis quelques années, c’est le grand retour dans la joaillerie féminine – on espère seulement que ce n’est pas pour empiler les carats en vue d’additions plus salées ! Cette pièce unique – est-ce plus chic de parler de « série limitée à un exemplaire » ? – est proposée à 730 000 francs suisses (boîtier n or blanc, or jaune et titane de 20,5 mm x 8,7 mm d’épaisseur, pas étanche évidemment, serti de 35 carats de diamants, avec un cadran en nacre, un bracelet en plumes et un mouvement à remontage manuel prévu pour 45 heures de réserve de marche). La concurrence sera rude pour émerger en finale, même si la présélection semble acquise…
DAMIANI Colline in fiore Secret Watch
La montre Colline in Fiore (Collines en Fleur) est un chef-d'œuvre de Haute Joaillerie qui évoque l’enchantement de la nature en pleine floraison, faisant partie de la collection Ode all’Italia High Jewelry de la maison Damiani. Inspirée par les paysages toscans en fleurs au printemps, cette création d’exception est réalisée en or blanc, jaune et rose, et retranscrit la magie d’une colline fleurie, animée par l’éclat de pierres précieuses étincelantes. Des saphirs aux nuances délicates de rose et de jaune doré – taillés dans une diversité de formes – composent un jardin de fleurs raffinées, dont les couleurs dansent avec grâce le long du bracelet. Des marguerites stylisées en or blanc scintillent de diamants incolores taille brillant, tandis que leurs cœurs rayonnent de saphirs roses ronds, dans une parfaite harmonie de lumière, de couleur et de forme. Au centre, une marguerite plus imposante renferme un trésor caché: d’un simple geste, ses pétales s’ouvrent pour révéler un cadran secret, entièrement pavé de diamants taille brillant et protégé par un verre saphir antireflet. Au cœur de cette montre bat un mouvement suisse de haute qualité, alliant la précision de la tradition horlogère à la magie de la Haute Joaillerie. La montre Colline in Fiore est une expression poétique du savoir-faire, de la nature et de la joie — une création lumineuse et éternelle d’or et de lumière, qui capture la beauté fugace d’un pré baigné de soleil.
UN COMMENTAIRE ? Cette pièce unique est une jolie montre à secret, mais assez faiblement créative, en dépit de ses 30,7 carats (boîtier en or de 22 mm, pas étanche du tout mais équipé d’un mouvement électronique) et de son prix (84 800 euros). Il manque à cette Colline in Fiore quelque chose de plus épicé [même la vidéo ci-dessous ,ne crée pas de magie], une touche d'impertinence qui soit capable de réveiller une proposition assez conformiste : c’est bien, mais nettement moins puissant que les propositions voisines, ce qui ne poussera sans doute pas les académiciens à pousser cette montre à secret dans la présélection…
DIOR D de Dior Buisson couture
En 2023, Victoire de Castellane dévoilait la majestueuse collection de Haute Joaillerie « Les Jardins de la Couture », marquant le début d'une nouvelle histoire célébrant la nature avec des guirlandes florissantes de "buissons couture" sertis évoquant l'art des motifs floraux brodés avec une grande complexité sur les pièces de Haute Couture de Monsieur Dior. Immédiatement acclamée par les amatrices de Haute Joaillerie, cette collection exceptionnelle a été explorée à nouveau par Victoire de Castellane, Directrice Artistique de Dior Joaillerie, en 2025 donnant ainsi naissance à une montre joaillière La D de Dior Buisson Couture, véritable œuvre d’art. Cette nouvelle création est une ode à la beauté, à la sensualité, à l'émotion et à la douceur, faisant écho à la fois à l'univers de Victoire de Castellane et à celui de Monsieur Dior, fervent amoureux des jardins et des fleurs, dont la Rose. Cette nouvelle la D de Dior reflète un savoir-faire méticuleux, avec une sélection rigoureuse de pierres d’exception choisies pour leur teinte et leur forme afin de reproduire un jardin luxuriant et délicat. Chaque gemme agit comme un pétale précieux, savamment placé sur le cadran, la lunette, la couronne et le fond du boîtier. La réalisation de ce « Buisson Couture » est une véritable prouesse technique. En effet, les Ateliers Horlogers de Dior ont réussi à recréer un effet de volume et de densité grâce aux sertis rapprochés entre les différentes pierres et en faisant disparaitre l’or du cadran.
La D de Dior Buisson Couture est un bouquet de fleurs luxuriant, fait de diamants, de saphirs roses de différentes teintes et de délicates tsavorites de taille brillant, poire, ovale ou and marquise selon les besoins esthétiques afin de reproduire parfaitement l’effet naturel et foisonnant d’un jardin merveilleux. Chaque buisson se distingue par ses couleurs harmonieuses, allant du vert délicat au rose doux et vif, rehaussées par l'éclat des diamants blancs et la douceur de l'or rose. Prouesse de beauté autant que prouesse d'art, cette création époustouflante célèbre le monde du sertissage dans ses moindres détails. Décentrée, l'indication de l'heure à 3 heures disparaît presque avec ses aiguilles en or délicatement serties à la main de diamants. Un détail supplémentaire de raffinement complété par le sertissage sur la couronne, du fond du boîtier et la boucle pour une œuvre d'art nécessitant 480 heures de travail et plus de 150 heures de sertissage manuel pour les 1088 pierres précieuses de son cadran uniquement.
UN COMMENTAIRE ? Avec ses aiguilles noyées dans les « cailloux », le versant horloger de cette D de Dior (pièce unique) perd sans doute ce que gagne le versant joaillier, qui affiche 13,7 carats au compteur pour ce boîtier en or rose de 38 mm x 9 mm d’épaisseur, étanche à 30 m, animée par un mouvement électronique et proposé par Dior à 420 000 francs suisses. La montre offrant un vraie spectacle sur écran, les académiciens du GPHG seront donc tentés de l’intégrer dans leur présélection, mais ne serait-il pas temps de réserver le prix « Joaillerie » à des montres qui ne seraient pas des « pièces uniques » ? C’est une revendication déjà ancienne de Business Montres, qui réclame par ailleurs la scission de cette catégorie en deux ou trois sections organisées par gamme de prix, dont une sous-catégorie « Pièces uniques », pour éviter d’avoir une montre à 10 millions face à une montre à 4 500 francs suisses…
COORDINATION ÉDITORIALE : JACQUES PONS