TAG HEUER : De l'art de prendre de la hauteur, en s'offrant un coup de jeune pour encaisser quelques stock options générationnelles...
Le 01 / 09 / 2015 à 07:38 Par Le sniper de Business Montres - 1972 mots
Jean-Claude Biver est un pragmatique, pas un conceptuel : il aime les situations carrées et les idées simples. TAG Heuer ayant manifestement loupé son entrée sur le marché chinois au cours de la dernière décennie, il lui fallait trouver une nouvelle clé. C'est fait : il aime G.E.M., qui l'aime et que tout le monde aime en Asie...
▶▶▶ RÉGÉNÉRATION GÉNÉRATIONNELLETAG Heuer …
Jean-Claude Biver est un pragmatique, pas un conceptuel : il aime les situations carrées et les idées simples. TAG Heuer ayant manifestement loupé son entrée sur le marché chinois au cours de la dernière décennie, il lui fallait trouver une nouvelle clé. C'est fait : il aime G.E.M., qui l'aime et que tout le monde aime en Asie...
▶▶▶ RÉGÉNÉRATION GÉNÉRATIONNELLETAG Heuer en quête de bonheursur les hauteurs glacées de l'Europe...◉◉◉◉SI LES EUROPÉENS NE TROUVENT AUCUN CHARME EXCEPTIONNEL à une station suisse comme Interlaken (canton de Berne), il n'en va pas de même des Asiatiques, pour lesquels Interlaken – la petite cité mondiale qui affiche, du fait de cette fréquentation, la plus forte densité de boutiques horlogères du monde – est à peu près l'équivalent romantique de Venise pour les Européens. Il faut avoir vu Interlaken une fois dans sa vie et avoir accompli la montée vers la Jungfrau, sommet mythique qui compte, à 3 500 m d'altitude, la plus haute boutique horlogère du monde [en Suisse, le commerce des montres ne perd jamais le nord]. C'est sur le glacier de la Jungfrau que des milliers de jeunes Chinoises ont écouté la demande en mariage de leur amoureux. C'est en souvenir de cet événement –unique dans une vie, tout comme est unique, pour ces couples, la montée vers le « toit de l'Europe » [on ne parle du pignon, que constitue le mont Blanc] – qu'ils ont acheté un couple de montres commémoratives, dans la boutique familiale de Jürg Kirchhofer, le plus sympathique des détaillants suisses, qui possède accessoirement les trois-quarts de tous les espaces horlogers d'Interlaken et des environs : la plupart des marques présentes à 3 500 m proposent des éditions commémoratives qui prouvent, à elles seules, à quel point la demande est forte...◉◉◉◉CE QUI TOMBE BIEN POUR JEAN-CLAUDE BIVER, qui aimerait bien redonner un coup de jeune à TAG Heuer, dont il pilote personnellement le redécollage depuis la fin 2014, tout en offrant à la marque un nouveau ancrage dans cette Asie chinoise où elle ne réalise qu'à peine 5 % de son activité [il est vrai que les Chinois sont connus pour ne pas apprécier, de façon générale, les montres sportives et les chronographes, catégories qui sont au coeur de l'offre TAG Heuer]. Puisque la marque n'a pas pu profiter de la bulle précédente, autant changer de monture et adopter une posture générationnelle : les amateurs chinois de ces quinze dernières années – ceux qui avaient entre 25 et 40 ans en l'an 2000 – ont vieilli [ils ont maintenant 40 à 55 ans]. Leurs goûts se sont transformés en s'affinant. Difficile de réorienter leurs choix vers des marques alternatives, dans une Chine dont les hoquets économiques inquiètent le monde et dont l'équipe au pouvoir adore pratiquer la chasse au luxe occidental. Priorité donc, à la nouvelle génération et à cette classe moyenne émergente (les nouveaux 25-40 ans) qui ne rêve que d'art de vivre occidental et d'american way of life. Ceux-là n'ont pas d'idées préconçues sur les montres : ils ne veulent surtout porter celles de leurs aînés et ils estiment ringardes les marques statutaires qui ont abusé du néo-classique [deux aiguilles petite seconde et un tourbillon, sinon rien]. Leurs goûts naturels sont plus H&M que Louis Vuitton, leurs marques sont plus fashion qu'ostentatoirement logotypées, leurs jeans sont basiquement griffés, leurs loisirs connectés (ce sont les champions du monde de la consommation numérique), leurs T-shirts « créatifs » et leurs musiques américanomorphes. Cette jeune génération Y – les sino-millenials – n'a évidemment pas les moyens des « montres de corruption » dont leurs aînés se sont gavés, mais elle exige une qualité suisse qui est aujourd'hui le symbole international de la belle montre, sportive au besoin [c'est une nouveauté] puisque les canons du life style globalisé préconisent une cool attitude à l'européenne...◉◉◉◉UNE ÉQUATION GLOBALE QUI REDONNE TOUTES SES CHANCES à TAG Heuer : la marque mise sur ces sino-millenials pour se refaire une santé et peut-être même une virginité asiatique. C'est là qu'on reconnaît la patte du maître (Jean-Claude Biver), pour lequel il faut toujours que « 1 + 1 = 3 », dans un cadre opérationnel où il faut être « premier, unique et différent ». Démonstration avec la réponse à la question : « Comment séduire une nouvelle clientèle asiatique ? ». Sachant tout ce que nous venons de dire sur la nouvelle jeunesse chinoise et sur Interlaken, on commence par signer avec la chanteuse G.E.M., 24 ans [pour l'état-civil : Gloria Tang Zhi-Kei, G.EM. signifiant « Get Everybody Moving »]. Auteur-compositeur, chanteuse et actrice, G.E.M. affiche un triomphe sur scène qui va très au-delà de la scène asiatique. Cerise sur le gâteau : son triomphe sur les médias sociaux (à peu près 20 millions d'amis), qu'elle fera sans doute profiter de son initiation au cor des Alpes (ci-dessus). C'est le détonateur de la bombe TAG Heuer (voir ci-dessous pour avoir une idée de l'ambiance : à la minute 00.44, on peut voir, à droite de la Jungfrau, le piton rocheux escarpé sur lequel est logée la boutique Kirchhofer)...◉◉◉◉AUTOUR DE LA BOMBE G.E.M, UNE MASSE CRITIQUE : non pas les fat cats des médias horlogers, gavés, exigeants et blasés, quand ils ne sont pas railleurs ou ratiocinateurs, mais la nouvelle génération des médias de mode chinois, blogueurs, blogueuses et fashionistas, qui n'avaient jamais imaginé qu'une marque puisse les inviter à un concert au pied de la Jungfrau, sur le « toit de l'Europe », avec une des stars absolues de la chanson asiatique. Imaginez ce que serait – pour la génération précédente – un concert de Madonna au pied de l'Himalaya ! Là, coup triple, quadruple ou quintuple avec 150 Chinoi(se)s sur le glacier qui couronne Interlaken : méga-retombées sur les réseaux sociaux chinois ( Wechat, Weibo, Youku, Baidu, etc. : 200 millions de moins de trente ans y surfent tous les jours), dans un lieu exceptionnel et mythique pour l'imaginaire asiatique, précisément sur la cible générationnelle visée par TAG Heuer, avec une montre hyper-accessible (Formula 1 céramique et acier), dans un contexte ultra-suisse – à la limite de la surconnotation, avec un Jean-Claude Biver en armailli haut-vaudois, qui n'avait pas oublié sa sacoche de vacher avec graisse et sel, et un Etivaz d'alpage signé Biver –qui le distribuait religieusement comme des hosties le jour d'une communion solennelle (ci-dessous et en haut de la page). Plus télévangéliste, tu meurs ! Au passage, excellente promotion pour le « système Kirchhofer », première plate-forme européenne (130 employés) pour l'accueil en Suisse des touristes chinois en quête de montres. L'organisation TAG Heuer ayant assuré une prestation impeccable [on y reconnaissait la signature rigoureuse de Valérie Servageon, bras droit de Jean-Claude Biver dans ce genre de circonstances], l'événement Jungfrau restera dans les mémoires : c'était le premier concert jamais organisé sur le « toit de l'Europe » et sans doute pas le dernier, TAG Heuer ayant un portefeuille d'ambassadeurs capables de mobiliser les moon-boots connectées d'une nouvelle génération avide d'expériences hors du commun... ◉◉◉◉DE L'ORFÈVRERIE CÔTÉ TRAVAIL D'IMAGE, et de la virtuosité marketing côté repositionnement d'une marque qui aurait tendance à se reprendre sur ses nouveaux marchés tout en hésitant encore à renouer avec ses succès passés sur ses marchés à maturité. Dans les jours qui viennent, le chrono-tourbillon à moins de quinze mille euros et la future montre connectée Wearable devraient bénéficier des canaux promotionnels ainsi défrichés. Avec l'espoir de recréer une dynamique profitable, comparable à celle d'Hublot ou de Bvlgari, pour ne citer que les sister brands du groupe LVMH. Bémol nécessaire : attentifs à l'air du temps, les sino-blogueurs et les modeuses chinoises ne manqueront pas de noter – en surfant sur les médias occidentaux – qu'on en a beaucoup fait pour eux dans les couches de peinture suisses, sans que ça émeuve grand-monde par ici. Les grosses ficelles du marketing n'étaient jamais imperceptibles [même les chiens assuraient la promo de la marque : ci-dessous]. Le charisme d'un Jean-Claude Biver ainsi armaillisé – sublime moment où il descend de l'hélicoptère en tenue de combat alpestre ! – et l'enthousiasme communicatif de cette G.E.M. qu'on aime suffiront-ils à créer non pas le buzz, mais l'engagement durable ? Au point de changer la perception de la marque chez des centaines de milliers de consommateurs ? C'est une autre question... Dont nous reparlerons immanquablement...D'AUTRES SÉQUENCES RÉCENTESDE L'ACTUALITÉ DES MONTRES ET DES MARQUES...
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