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Tiens, au fait, ça donnait quoi le Baromontres de juin 2014, il y a tout juste cinq ans ?
Épatant et très instructif, ce retour sur la météo horlogère de l’été 2014 : si les premiers de la classe ont été appelés à un autre destin, les cancres sont toujours au premier rang et les perspectives de l’horlogerie suisse sont toujours aussi chaotiques. À croire que nous n’avons rien compris, ni rien appris de la dernière en date de ces « crises horlogères qui n’existent pas »…
Début juillet 2014, alors qu’on se préparait à une rentrée de vaches maigres, notre Baromontres exclusif décrivait la météo horlogère de l’époque : « Les mois se suivent et les statistiques horlogères se ressemblent... dans leurs effets trompeurs, voire désinformateurs. Alors que les marchés envoient pratiquement tous des signaux d'alarme inquiétants, les statistiques clament le maintien d'une croissance dont on découvre – le diable se cache toujours dans les détails – qu'elle ne repose que sur des croissances bien fragiles, sinon inquiétantes, sur des marchés qui ne pratiquent plus le sell-in qu'à des fins parallélistes. Avec une rentrée qui s'annonce tonitruante pour les marques d'électronique qui se lanceront sur le marché de la smartwatch, gageons que l'horlogerie ne sera pas à la fête... »
Cinq ans plus tard, on aurait du mal à retirer un seul mot à cette analyse de 2014, qui a conservé toute sa pertinence en 2019 – ce qu’on peut considérer comme une circonstance aggravante, puisque rien ne change alors qu’il faudrait tout changer pour éviter l’éternel retour des cycles infernaux de décroissance. En rentrant un peu plus dans le détail, qui trouve-t-on dans l’« avis de grand beau » de l’été 2014 ?
❑ JEAN-CLAUDE BIVER, qui a depuis quitté ses fonctions opérationnelles chez Hublot, mais qui triomphait alors avec le Mondial brésilien de football et qui brassait des vagues avec la Machine d’Anticythère…
❑ CASIO, qui venait de réussir un joli coup marketing en équipant avec ses G-Shock les supergendarmes du GIGN français…
❑ ANTONIO DI BENEDETTO, météore passé fugacement dans le ciel de l’horlogerie et qui venait alors de relancer la marque Waltham (avec l’équipe de White Design pour le style des montres). Disparu depuis corps et biens, ou presque…
❑ PIERRE KOUKJIAN, le fondateur de la marque DeLaCour, qui s’apprêtait à quitter ses associés pour lancer sa propre marque. Ce qu’il n’a pas pu faire, mais cet inlassable s’est brillamment reconverti dans l’art contemporain et sa galerie genevoise mérite le détour…
❑ OSVALDO PATRIZZI, qui venait de ressortir totalement blanchi par les juges genevois de l’instruction lancée contre lui par les « putschistes » qui lui avaient « volé » la maison d’enchères Antiquorum – laquelle a depuis connu beaucoup de déboires avant d’être relancée…
❑ LES CLÉS USB comme nouveaux « collectors » horlogers, à une époque où les marques tentaient encore de démontrer qu’elles étaient créatives dans tous les compartiments du jeu. Dans un demi-siècle, certaines de ces clés vaudront des fortunes…
En continuant notre exploration du Baromontres de juin 2014, qui n’est guère âgé que de cinq ans, que trouve-t-on dans notre « avis de temps variable » de ces premiers jours de l’été 2014 ?
❑ STÉPHANE LINDER, qui nous inspirait quelques doutes alors qu’il tenait les commandes de TAG Heuer, marque désormais supervisée par Jean-Claude Biver. Nous parlions alors de « repositionnement acrobatique », en soulignant que ce genre de reformatage « reste l'exercice le plus périlleux qui soit dans les industries du luxe et plus d'un CEO y a laissé son fauteuil ». La suite a prouvé que nous avions raison de ne pas trop y croire...
❑ MARKETING FOOTBALL, alors que nous avions dénombré 34 marques (il y en avait sans doute plus) qui tentaient de s’incruster dans l’événement du Mondial brésilien, plus des dizaines d’autres qui pratiquaient le marketing d’embuscade avec tel ou tel joueur. « Navrant parce que, d'un strict point de vue marketing, c'est conforter un peu plus solidement la position de leader de la seule marque réellement visible (Hublot). Pathétique parce qu'il n'y a pas plus infidèle et volage qu'un champion de football ». Ite, missa est : rien à redire…
On en arrive à l’« avis de tempête » de cet été 2014, en y retrouvant un de nos plus anciens clients, un habitué des pires séquences du Baromontres, où il a son rond de serviette depuis des années – ce qui ne l’empêche pas de multiplier les meilleures raisons du monde pour s’imposer dans cette zone de turbulences. Il n’y avait pour ce mois de juin qu’un seul candidat, mais de taille…
❑ NICK HAYEK, qui venait de faire preuve d’une singulière « indécence éthique ». Un vrai remake de « J’irai cracher sur ta tombe » lancé à la face de la reine martyre Marie-Antoinette place de la Concorde. Il s’agissait en effet d’une pub pour la Swatch Scuba apposée place de la Concorde, à quelques mètres du lieu du supplice imposé à la reine de France (relation par notre blog de Tribune de Genève Genevois rien venir – 4 juin 2014). « Faute morale de la direction française du Swatch Group, mais aussi laxisme de la direction biennoise du groupe, qui a lancé une campagne de promotion de la Swatch Scuba sur la base d'un mauvais jeu de mot sur la reine martyre Marie-Antoinette, qui “en aurait perdu la tête”. Place de la Concorde, où la publicité géante devait être déployée, c'était une offense si choquante à toutes les innocents guillotinés voici deux siècles par la Révolution française que le ministre français des Affaires culturelles – pourtant peu suspect de sympathies royalistes – a dû interdire à Swatch ce message. Ce n'est guère mieux dans la presse magazine, où le Swatch Group a eu le mauvais goût d'insister ». Une fois encore, rien à redire : on sait que ces gens-là osent tout, c’est même à ça qu’on les reconnaît, aurait pu dire Michel Audiard…