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NOS COUPS DE CŒUR DE L’ÉTÉ #04 (accès libre)
La montre qui fait parler de montres ceux qui n’y connaissent rien : United Silver d’Ice Steel (Ice-Watch)

Dans beaucoup de domaines, l’été pousse aux variations sentimentales, à une certaine inconstance et aux intermittences du cœur. Comme on dispose d’un peu plus de temps libre, on se prend à faire quelques infidélités à nos compagnes de poignet : on se prend à essayer de nouvelles montres, à tenter de nouvelles carpo-aventures. Quatrième et dernière carte postale : quelques jours en compagnie d’une montre qui pousse les Béotiens à la conversation horlogère…


Le signal qui déclenche le réflexe de Pavlov, c’est le code couleurs bleu-rouge sur la lunette. Même les moins initiés des non-initiés savent plus ou moins que c’est à traduire par « Pepsi » et que c’est synonyme de rareté, de liste d’attente [estimation courante : entre deux et dix ans] et de fabuleuses spéculations pour ceux qui le privilège d’en avoir une. Pourtant, sur la lunette tournante, le bleu de la « Pepsi » Ice-Watch (Ice Steel United Silver, 149 euros) n’est pas exactement le bleu de la vraie « Pepsi » (celle qui porte une couronne). Le rouge de cette lunette n’est pas non plus le rouge réglementaire de la « Pepsi » officielle. Les chiffres du cadran ne sont pas ceux de la « Pepsi » originale : on se demande d’ailleurs pourquoi le 6 et le 9 ne sont pas dans la même police que le 12. Pourtant, pourtant…

À quoi bon aligner les différences puisque les Béotiens ne retiennent que les ressemblances ? Cette montre – qu’elle soit signée par Ice-Watch ou par une autre manufacture horlogère – est surtout un encouragement à la parole pour ces « experts » de bistrot, qui avouent tous de vastes lectures (les notules horlogères de GQ, le supplément Montres de L’Express, les informations locales de L’Est républicain, la chronique montres de CNews, etc.), et qu’il ne faut pas pousser longtemps pour qu’ils étalent leur science. Les avis sont tranchés et la « Pepsi » d’Ice-Watch ne laisse personne indifférent : pour les uns, c’est « génial » de rendre accessible une telle montre ; pour les autres, c’est un « scandale » dans les beaux-arts de la contrefaçon ; pour certains, c’est exactement « comme une vraie » ; pour quelques-uns, c’est un sacré pied-de-nez aux spéculateurs. Dans tous les cas ou presque, cette montre est un catalyseur de fantasmes, d’illusions, de légendes et de fake news

On peut alors se demander pourquoi cette « Pepsi » délie à ce point des langues qui n’ont pourtant pas grand-chose à raconter sur les montres. C’est que, fondamentalement, c’est une montre… facile à comprendre : un boîtier en acier satiné qui a l’air sportif et une bracelet en acier dont les maillons confirment cette impression de vocation active, accentuée par le protège-couronne qui semble indiquer que la montre résiste à tout ; une lunette crantée bleu-rouge immédiatement reconnaissable et donc aisément mémorisable ; un surnom en cinq lettres – « Pepsi » – basé sur un code couleur planétairement reconnu… Dès lors, inutile d’aller plus loin dans des discussions que cette montre initie dès qu’elle est reconnue au poignet : on ne va pas argumenter sur l’absence d’aiguille « vingt-quatre heures » qui en ferait une vraie GMT, ni sur une étanchéité à 100 m qui n’en fait pas une vraie « plongeuse ». Autre atout de cette montre « magique » : sa valeur supposée, qu’elle soit simplement « perçue » (pour les Béotiens, qui ne font pas la différence avec une vraie) ou « doublée » pour les faux initiés qui en sont presque à rajouter un zéro à son prix catalogue. Comme pour les jeux Olympiques, la « Pepsi » sert surtout à… participer !

Après, c’est une affaire personnelle de savoir si on se sent mieux ou moins bien avec une montre me-too qui n’abusera que les couillons – en cas de doute, on peut toujours choisir d’autres propositions de la collection Steel, dont certaines modèles sont plus originaux et plus amusants. Reste cette évidence : cette Ice Steel United Silver est, pour son prix, très confortable au poignet, parfaitement lisible dans la pénombre et suffisamment étanche pour qu’on puisse se baigner et nager sans souci. Les deux maillons terminaux (liaison boîtier-bracelet) sont mieux ajustés que ceux des vénérables Rolex vintage d’il y a tout juste vingt ans. Sa présence au poignet fait causer, là où l’apparition d’une vraie « Pepsi » [idem pour une Patek Philippe ou une Richard Mille] aurait tendance à créer un effet – réprobateur ou admirateur – de sidération : il est toujours bon de voir qu’on peut encore parler de montres, même si c’est pour raconter beaucoup de bêtises et il est encore meilleur de voir que des montres mécaniques traditionnelles aimantent les conversations plus que les montres connectées qu’on voit fleurir un peu partout. Ne dites pas à M. Tout-le-monde qu’une « Pepsi » d’Ice-Watch est un contacteur social : il croit encore qu’elle sert à donner l’heure…

LES COUPS DE CŒUR DE L’ÉTÉ

Résumé des épisodes précédents (en accès libre), avec les liens pour les découvrir…

❑❑❑❑ #03 :  une montre qui n’a à peu près rien pour elle, sinon la passion qui l’a fait naître : Vileton (Business Montres du 20 août)

❑❑❑❑ #02 :  une soucoupe volante qui se pose sur le poignet : Ikepod Duopod Gold Dots (Business Montres du 13 août)

❑❑❑❑ #01 :  une « plongeuse » méconnue qui a pourtant tout pour plaire : Scafograph 300 d’Eberhard & Co. (Business Montres du 1er août)


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