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LE MARDI, C’EST PERMIS (accès libre)
La preuve qu’on peut fabriquer des respirateurs médicaux dans des ateliers horlogers !

C’est plus une question de volonté et de créativité mécanique que de faisabilité technique : qu’attend donc l’industrie horlogère pour faire un effort et apporter sa contribution industrielle massive à l’effort de guerre contre le coronavirus ?


LE MOT « GÉNÉROSITÉ » 

SEMBLE GÊNER LES MOUTONS 

DE PANURGE  DES BERGERIES

HORLOGÈRES (éditorial)

Que n’avons-nous pas proféré comme « énormité » en évoquant la possibilité, pour les manufactures horlogères, de reconvertir provisoirement certains de leurs ateliers en lignes de production de matériels médicaux destinés aux autorités sanitaires (« Droit de Ré-Pons » : Business Montres du 30 mars) ! Qu’il a semblé scandaleux à certains ravis de la crèche d’évoquer la simple possibilité – considérée par eux comme une impossibilité technique, voire comme un… sacrilège – d’utiliser le parc machines et les robots d’usinage horlogers pour réaliser en urgence des composants d’équipements médicaux (voir notre « Précision du jour » un peu plus bas). Sauf que c’est, selon différents témoignages, ce qui commence à s’organiser dans certains ateliers horlogers. Il n’était que temps ! Nous osons même aller plus loin : à quoi bon laisser inutilisées les actuelles « salles blanches » de nombreuses manufactures, alors que leur atmosphère contrôlée et leur « étanchéité » offrent des possibilités de réutilisation médicale provisoire ?

Heureusement que la générosité des entreprises horlogères semble s’être éveillée ! Notre ami Thierry Gasquet (Passion Horlogère) faisait hier le point sur cet élan de solidarité dans International Watch Review (où il cite d’ailleurs Business Montres) : il rappelle ainsi les initiatives de reconversion prises par les grands groupes de luxe (LVMH, qui a dégainé le premier, Kering, Chanel, Hermès et même Richemont), mais ces élans de générosité contrastent avec l’aridité du paysage horloger dans ce domaine. Avec, cependant, quelques oasis de solidarité :

• La manufacture SIS (qui travaille des bracelets pour l’horlogerie suisse et qui opère plus généralement dans la maroquinerie de luxe en France) vient ainsi d’offrir aux autorités sanitaires comtoises son stock de masques, de lunettes, de charlottes et des matériels potentiellement réutilisables dans l’univers médical [combien de ces matériels, aujourd’hui inutilement stockés dans les manufactures horlogères, pourraient être plus utilement affectés à des missions sanitaires ?]

• Pierre Salanitro, le leader suisse du sertissage horloger, a pris bien soin, avant de fermer sa manufacture genevoise, de commander 100 000 masques chirurgicaux pour les offrir aux hôpitaux de Genève et d’offrir à tout son personnel d’autres masques et ce qu’il avait pu trouver de liquides désinfectants, en ajoutant à cette attention la désinfection massive de tous ses locaux, ascenseurs, monte-charges, portes, etc., histoire de protéger son personnel et tous ceux qui avaient affaire dans l’entreprise (coursiers, livreurs, facteurs, etc.)…

• Thierry Gasquez (Passion horlogère) avait de son côté pris l’initiative d’une « cagnotte horlogère » (Leetchi) pour un « soutien concret aux soignants mobilisés. Même si les résultats sont à ce jour un peu décevants, la générosité de l’initiative suffit à la justifier…

• Bvlgari a fait réaliser d’élégants petits flacons de gel hydroalcoolique, dans l’esprit des produits d’accueil de ses hôtels, pour les offrir aux hôpitaux italiens. Igienizzante : en italien, le mot est magnifique (ci-dessus)…

• Les « petites marques » avaient répondu présent bien avant notre éditorial, de la jeune pousse Augarde (initiative Aug-StayHome  (plus bas) : prix réduit à 99 euros et réversion d’une partie des ventes à des associations de soignants) au pourcentage reversé par Ikepod sur le montant de sa campagne Megapod, en passant par Baltic et quelques autres. On en oublie certainement et on espère même qu’on en oublie beaucoup – mais nous reviendrons régulièrement sur cette générosité des horlogers…

Parce qu’il serait vraiment navrant de ne pas voir toute l’horlogerie se remettre au travail, non pour produire des montres [que personne n’a actuellement le cœur d’acheter, nulle part dans le monde], mais pour contribuer à l’effort de guerre des Européens et des Américains pour échapper aux griffes de cette pandémie. Ce ne sont pas les moyens qui manquent, mais la volonté de servir : si nous sommes restés sur notre faim avec le message contradictoire envoyé par le Swatch Group (« Restez chez vous, mais venez quand même travailler chez nous » : encore un enfumage de Nick Hayek – Business Montres du 24 mars), nous n’en sommes pas moins consternés par l’absence totale de message de la direction du groupe Richemont, qui a certes mis ses usines textiles au service de la production de masques en Italie, mais qui persiste à ne pas placer sa logistique industrielle au service de la lutte contre le coronavirus. Comme l’avons déjà écrit, il y a des factures morales qui seront difficiles à solder après la crise… On vous laisse réfléchir là-dessus… 

❑❑❑❑ À NOS AMIS LECTEURS

Alors que l’horlogerie est au point mort avec ses manufactures et ses ateliers fermés ou très ralentis, nous profitons de cette chronapocalypse pour proposer un supplément de pages en accès libre. C’est notre contribution à l’« effort de guerre » de toute la communauté horlogère, pour la soutenir dans les difficultés qu’elle affronte et qui ne font que commencer.

Nos lecteurs, anciens et surtout nouveaux , pourront ainsi mieux profiter des loisirs que leur offre le confinement. À vous, en retour, de nous soutenir par un geste simple et très efficace : vous abonner (moins de 70 centimes par jour) pour bénéficier tranquillement de toutes nos informations, de toutes nos chroniques et de toutes nos analyses.

Nous comptons sur vous comme vous pouvez compter sur nous  pour ne pas vous abandonner dans cette crise aux conséquences incalculables…

LES BONNES, MOINS BONNES

ET AUTRES NOUVELLES DU JOUR,

EN VRAC, EN BREF ET EN TOUTE LIBERTÉ

❑❑❑❑ LA BANDE-SON DU JOUR : un peu de douceur et de romantisme dans la brutalité confinée où nous sommes plongés, en nous obligeant à ne plus nous parler que par téléphone. Une référence de communication à distance s’impose : I Just Called To Say I Love You, de Stevie Wonder (1984). Une des plus belles chansons de tous les temps, reconnue comme telle dans des dizaines de pays. Des paroles de saison pour notre pauvre condition de confinés printaniers : « No April rain / No flowers bloom / No wedding Saturday within the month of June / But what it is, is something true / Made up of these three words that I must say to you ». Rappelons que Business Montres a décidé de créer une play-list optimiste et nostalgique pour aider tout le monde à se déconfiner mentalement…

❑❑❑❑ LA PRÉCISION DU JOUR : dans l’esprit de l’éditorial ci-dessus, elle est dédiée à tous les crétins de service qui considèrent qu’il n’est pas possible de reconvertir rapidement les ateliers de production horlogère en ateliers de fabrication de respirateurs artificiels [une fois de plus, quand on leur montrait la Lune, les imbéciles ont regardé le doigt]. Cette précision nous vient du Figaro : « Des chercheurs, des médecins et des ingénieurs l'équipe Mercedes de Formule 1 ont développé en moins d'une semaine une assistance respiratoire permettant de soulager les poumons des malades du nouveau coronavirus en évitant de les placer sous respirateurs. Le principe de cet appareil, connu sous l'acronyme CPAP (ventilation en pression positive continue), a été largement utilisé dans des hôpitaux en Italie et en Chine pour aider des malades du Covid-19 atteints de graves infections pulmonaires à respirer quand les masques à oxygène ne suffisent pas, a indiqué dans un communiqué l'University College London (UCL). Des ingénieurs de l'UCL ont travaillé sans relâche depuis le 18 mars avec des médecins de l'University College London Hospital (UCLH) et l'équipe Mercedes pour adapter et améliorer un CPAP, ce qu'ils ont réalisé en moins d'une centaine d'heures de travail. (…) Une centaine d'appareils va être livrée à l'UCLH pour des essais cliniques avant un déploiement rapide dans les hôpitaux du pays, qui s'attendant à une vague d'arrivée de malades du Covid-19. Des rapports provenant d'Italie indiquent qu'environ la moitié des patients bénéficiant d'un CPAP ont évité des appareils plus invasifs. Les CPAP consistent à diffuser un mélange air-oxygène dans la bouche et le nez à un rythme continu, en maintenant les voies respiratoires ouvertes et en augmentant la quantité d'oxygène entrant dans les poumons. Les respirateurs invasifs, eux, nécessitent une forte sédation du patient ainsi qu'une connexion à un tube placé dans la trachée du patient. » Les équipes horlogères et les mécaniciens de la montre seraient-ils incapables de réaliser ce que les motoristes de la F1 ont pu réaliser en quelques jours ?

❑❑❑❑ LA RÉFLEXION DU JOUR : la piste a été envisagée par la direction du groupe Richemont, mais le moins qu’on puisse dire est qu’elle n’a pas suscité l’enthousiasme. Elle consistait, pour les directeurs des marques et pour le conseil d’administration, à une sorte de sacrifice collectif : tous les CEO auraient spontanément renoncé à leurs (fastueux) salaires de mars, voire d’avril, par solidarité avec leurs équipes en chômage partiel chichement indemnisé. Il n’est pas exclu que l’idée aboutisse et qu’elle fasse réfléchir les directions des autres marques au sein de groupes…

❑❑❑❑ LA QUESTION (NAÏVE) DU JOUR : serait-il possible qu’une marque du groupe Richemont n’ait pas facturé une seule montre au mois de mars, et laquelle ? L’information a fait le tour des bureaux à l’état-major de Bellevue – le pire est que la réponse n’a étonné personne…

❑❑❑❑ LE COUP DE GUEULE DU JOUR : ne sont-ils légèrement indécents, tous ces CEO horlogers qui profitent du confinement pour poster avec frénésie, sur Instagram [où ils peuvent se flatter de dizaines et même de centaines de milliers d’abonnés], les images de confinement en pantoufles et en T-shirt, quand ils ne persistent pas à nous bassiner avec leurs montres déjà démodées tellement elles sont démentiellement tarifées ? Un peu de décence commune, s’il vous plaît…

❑❑❑❑ LA BONNE IDÉE DU JOUR : elle nous vient de Montres-de-luxe – « Pourquoi pas une Scrabble horloger pendant le confinement ? ». Pourquoi pas, en effet, histoire de jouer avec le nom des marques, des modèles, des composants, des techniques, de l’histoire de la montre et de tout ce qui peut évoquer l’univers de la mesure du temps, des origines à nos jours. Le X de Rolex vaut cher, de même le Y et K de Hysek ou le U, le W et K de Urwerk.

❑❑❑❑ LE PODCAST DU JOUR : c’est le long entretien accordé par Jean-Claude Biver à Forumamontres. Une bonne heure de temps pour parler en toute liberté, sans langue de bois insupportable, du temps, de l’horlogerie, des montres et de la chronapocalypse (ci-dessous).

❑❑❑❑ LE JEU-TEST DU JOUR : les bonnes réponses à précédent quiz de confinement (Business Montres du 29 mars) étaient : nato-B, quartz-F, étanchéité-I. Voici maintenant trois nouvelles questions tirées d’un de nos précédents « Tour des montres en 80 tests » – les bonnes réponses demain !

La marque  de la première montre portée par le premier aviateur officiellement reconnu était… A) Cartier. B) Vacheron Constantin. C) Breitling…

 La Sea-Dweller de Rolex, lancée en 1971, innovait en proposant… D) Le premier profondimètre à aiguille. E) Le premier verre saphir. F) La première valve à hélium…  

La première smartwatch nautique de l’histoire des montres était la TAG Heuer… G) Aquaracer. H) Seafarer Calibre X. I) AC Carrera Oracle…

❑❑❑❑ LA CITATION DU JOUR : « J’aime mieux une armée de moutons commandée par un lion qu’une armée de lions commandée par un âne » (maréchal Ferdinand Foch). Il est malheureusement à craindre que l’horlogerie ait choisi la seconde option…

❑❑❑❑ LE DESSIN DU JOUR : « Dans les manufactures désertées, on s’entraînait activement aux changements managériaux d’après la crise sanitaire » (séquence « Sérieux, s’abstenir » : Business Montres du 28 mars). Sachant que les responsables de l’effondrement ne sauraient être – en toute logique comme en tout justice – les acteurs de la reconstruction, il va bien falloir nettoyer les écuries d’Augias et tout passer au Kärcher pour rebâtir l’horlogerie sur des bases plus saines. Non ?


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