COUP DE GUEULE (accès libre)
Ras-le-clic des sites de téléchargements !
Tout ceci relève sans doute de la petite cuisine journalistico-médiatique (mais nous sommes un média professionnel) et c'est peut-être un coup de gueule très ciblé sur les directions de la communication, mais, par pitié, rendez-nous les bonnes vieilles clés USB plutôt que de nous faire perdre des heures sur vos sites presse…
Avant-hier [je vous parle d’un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître], c’était un flot d’ektas et de photos argentiques, mais on laissait les services photo se débrouiller avec. Quand la numérisation a commencé à envahir nos vies professionnelles, on est passé au CD-Rom, solution intéressante à ceci près que la plupart des ordinateurs contemporains ont perdu leur lecteur de CD, donc on oublie. Arrive ensuite le temps des clés USB, souvent créatives [il existe d’excellentes collections de ces clés horlogères, figuratives ou allégoriques], mais beaucoup d’ordinateurs ont perdu leur classique port USB au profit de solutions technologiquement plus avancées, mais une connexion USB reste toujours possible…
C’est alors que les services de communication ont inventé le « site presse » où télécharger le matériel indispensable pour que les médias fassent à peu près leur boulot le plus élémentaire : récupérer les dossiers de presse, les communiqués et les images – ne serait-ce que pour procéder aux copiés-collés qui sont aujourd’hui le plus clair de l’activité éditoriale [à quelques paraphrases près]. Voici donc le temps des press rooms et des press lounges, solutions paresseuses qui transfèrent sur les rédacteurs la tâche de télécharger l’ensemble des visuels et des communiqués proposés. Évolution la plus récente et la plus perverse : le simple code-barres d’accès, procédure bien sympathique pour télécharger un dossier sur un smartphone [il suffira de copier-coller les hashtags « officiels » pour faire le beau sur Instagram], mais dispositif totalement chronophage puisqu’il faudra ensuite renvoyer le matériel téléchargé sur son propre ordinateur, qui n’est pas forcément outillé pour lire un code-barres…
C’est là que ça se gâte, surtout quand les visuels en question sont de plus en plus « lourds » [certaines images dépassent les 100 ou les 150 Mo] et que l’architecture logicielle des sites presse n’a pas forcément été optimisée pour accélérer les opérations. En fonction de la puissance du réseau disponible, le simple téléchargement d’un simple dossier de presse peut prendre des dizaines de minutes (exemple précis ci-dessous). Ceci dans l'hypothèse où le service de presse ne s'est pas trompé de mot de passe ou qu'on n'a pas perdu le sien. Ceci dans des conditions optimales de bureau, mais c’est rarement le cas sur un salon de type Baselworld [où le débit wifi est un désastre, à peine inférieur à celui des hôtels locaux] ou SIHH. Ce sera encore pire quand on sera de retour à l’hôtel – alors qu’il est si évident que ce n'est pas pratique et qu’il serait encore plus simple de placer tout le matériel indispensable sur une clé USB, arme magique pour travailler dans un train, dans un avion ou même dans un bistrot…
Exemple concret pour illustrer ce ras-le-clic des sites de téléchargement qui sont la mauvaise solution faussement post-moderne au problème de la circulation des dossiers de presse. Le seul récent dossier de presse de la magnifique collection des Lady Arpels Zodiac Lumineux lancée en début d’année par Van Cleef & Arpels (ci-dessous) ne comprend pas moins d’une grosse soixantaine de fichiers de belle taille, communiqués multi-langues et vidéo comprise. Fichiers qu’il faut télécharger un par un (!) pour tout voir et revoir, ce qui réclame au minimum une bonne trentaine de minutes avec un débit wifi correct. Bien plus et peut-être le double dans le pire des cas ! Pourquoi infliger un tel pensum aux partenaires médias des marques ? S’il s’agit d’une triviale économie de bouts de chandelle, alors que le coût d’une clé basique ne dépasse quelques centimes, la plupart des journalistes seraient disposés à payer pour des clés USB, qui restent, rappelons-le, de très intelligents vecteurs autonomes de communication pour porter la créativité des marques !
Donc, s’il vous plaît, à la veille des salons du début de l’année prochaine, songez à nous simplifier la vie : mesdames et messieurs les responsables de la communication, cessez de penser à ce qui vous simplifie la vie [un clic sur un site pour ouvrir vos dossiers au monde entier] et tentez de vous mettre à la place des vrais utilisateurs de vos sites, confrontés au devoir de télécharger des milliers de dossiers de presse, à peu près à la même heure que des milliers de professionnels. Précision ultime : ce coup de gueule, d’innombrables journalistes, rédacteurs, blogueurs et autres créateurs de contenus horlogers pourraient le faire à notre place, mais ils ont sans doute peur de fâcher les CEO dispensateurs de substantielles mannes publicitaires. Cessez de penser que tout le monde dispose, en permanence, d’un écran géant et d’un réseau optimisé pour télécharger votre matériel : n’oubliez pas que les professionnels des médias sont aujourd’hui des nomades et des saltimbanques toujours en tournée. Rendez-nous donc les bonnes vieilles clés USB [laissez-nous au moins le choix d’en récupérer une] qui nous simplifiaient la vie ! Activez-vous un peu plus les neurones pour rendre ces clés plus représentatives de votre créativité. Rendez-vous dans quelques semaines…
