ROCK’N’HORL 2020 (accès libre)
Contrairement aux apparences, cette horloge erratique ne nous indique pas n’importe quelle heure
Vue à la FIAC en 2019 et tout récemment sous la verrière du Grand Palais (Paris) et dans une galerie de Berlin, deux de ces horloges folles sont déjà vendues. À la périphérie créative des mécaniques qui expriment le temps, elles explorent une nouvelle dimension des aléas du monde…
Le créateur de cette Crazy Clock n’est autre que Philippe Parreno, un artiste plasticien français qui a fini par se spécialiser dans les œuvres évolutives qui obéissent à des paramètres aléatoires : comprenez que ses œuvres et ses installations, qui mêlent de nombreuses techniques d’expression artistique et qui sont exposées dans le monde entier, s’imposent comme des espaces polyphoniques perpétuellement mouvants qui jouent avec la perception des spectateurs. Avec Philippe Parreno, ce qu’on voit n’est jamais ce qu’on doit voir, et encore moins ce qu’on croit voir. Pour ceux qui n’auraient pas compris cette ambition créative, la Crazy Clock qu’on a pu voir au Grand Palais est une magistrale démonstration…
Conçue par Philippe Parreno et développée avec l’équipe de notre ami Xavier Dietlin [considéré ici même comme le « vitriniste-le-plus-déjanté-de-sa-génération » : rien n’est encore venu démentir cette définition, et surtout cette horloge folle], cette épatante Crazy Clock n’a plus qu’un lointain rapport avec le temps, hormis quelques analogies fonctionnelles : il y a bien un cadran et des aiguilles, mais elles ne servent à rien – « Le temps est déjà là, à quoi bon se soucier de son passage ? », avoue l’artiste. Ses aiguilles courent aussi après le temps, mais il s’agit du temps qu’il fait [elles obéissent à des capteurs – thermomètre, cellule solaire, hygromètre, anémomètre, etc. – disposés sur le toit du Grand-Palais] plus que du temps qui passe : dès que la météo s’agite, la folie horlogère se déchaîne, selon des algorithmes très précis mais quasiment imprévisibles. On imagine l’effet sidérant sous l’immense verrière du Grand Palais de Paris. Une autre de ces horloges folles est actuellement exposée à Berlin, avec des paramètres interactifs différents.
Les deux compères qui ont élaboré cette Crazy Clock en préparent d’autres qui seraient affolées par leurs propres spectateurs (à partir de leur téléphone mobile ou de leurs humeurs) : chaque visiteur ferait ainsi ce qu’il veut de son temps – il aurait enfin la maîtrise de son propre temps ! Évidemment, il devrait y avoir bientôt une boutique horlogère, véritable temple de la précision mécanique, qu’on nous annonce dotée d’une Crazy Clock encore plus originale. Cette horlogerie déterritorialisée est un œuvre d’art mécanico-philosophique et elle s’intègre avec une exactitude très haute horlogerie dans cette périphérie des objets du temps que ces chronique Rock’n’Horl tentent d’explorer…