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SANS FILTRE #02 (accès libre)
« La bonne information horlogère a un coût, ce qui attire les coucous »

Des pages pour parler encore plus cash et pour se dire les vérités qui fâchent, entre quatre z’yeux – parce que ça ne sortira pas d’ici et parce qu’il faut bien se dire les choses comme elles sont. La punchline du jour : « Les coucous de l’info sont trop coûteux » – les écornifleurs méritaient bien une bonne mornifle !


Dans la vie réelle, on parle énormément des « fake news », en racontant énormément de bêtises (sur Macron, sur Mélenchon, sur Trump, sur le Brexit, sur Poutine, sur la Syrie et sur tout le reste qui ne relève pas du mainstream), mais on devrait s’interroger davantage à ce sujet pour ce qui concerne l’actualité des montres : on pourrait ainsi parler des « fake news », mais aussi des « fake médias » qui se font passer pour ce qu’ils ne sont pas. Comme on n’imagine pas que ces « fake médias » puissent avouer qu’ils vivent des « fake news » qui leur permettent de vendre leurs « fake audiences » aux marques, Business Montres va donc mettre les pieds dans le plat – ce qui est bien la moindre des choses quand on a bientôt quinze ans de combats obstinés pour l’information horlogère, en mode « zéro bullshit », 100 % liberté et 0 % publicité…

Côté « fake news », on retiendra quelques exemples flagrants comme les désinformations systématiques de l’établissement sur la « crise-horlogère-qui-n’existe-pas » alors qu’il suffit de regarder pendant une demi-seconde la courbe des exportations de montres suisses (ci-dessus) pour comprendre qu’il s’est forcément passé quelque chose de grave entre 2014 et 2017 pour ramener ces exportations à leur niveau de 2011. Un champion pour remettre une pièce de monnaie dans la machine à enfumer les médias : Nick Hayek, qui répète régulièrement qu’il représente à lui seul, avec ses marques [félicitons-les], la quasi-totalité de l’entrée de gamme suisse et qui prétend qu’il est en croissance sur ce segment dont il serait le seul opérateur, alors que cette gamme de prix s’effondre de 20 % et plus dans les statistiques officielles (ci-dessous) – on nous prend pour des jambons ! Toujours du côté des « fake news », rappelons le déni de réalité des responsables horlogers à propos des montres connectées – alors qu'Apple est aujourd'hui le leader mondial des producteurs de montres ! Souvenons-nous aussi que le péché mignon des marques reste l’emphase auto-glorificatrice auto-légitimée : récemment, nous épinglions encore Péquignet, dont les dirigeants répètent absurdement qu’ils disposent du « seul mouvement manufacture français » (Business Montres du 22 février), alors que ce mouvement est globalement produit en Suisse et que la manufacture BRM dispose, en France, de trois mouvements mécaniques produits en région parisienne !

C’est pourtant à propos des « fake médias » – et des « fake journalistes » – qu’il faut s’inquiéter le plus en matière d’information horlogère. L’information horlogère a un coût élevé : c’est une évidence. Un site comme Worldtempus en est un excellent exemple : il faut une bonne douzaine de personnes pour se poser en « Swiss Watch Authority », c’est coûteux et ça oblige l’éditeur à trouver des financements [on dit poliment « partenariats »] auprès des marques pour leur revendre l’audience potentielle. C’est une vision marchande de l’information, qui n’est pas dénuée de légitimité à défaut d’être tissée de pur fil déontologique. C’est le coût de cette information qui a poussé la plupart des portails horlogers de référence (Hodinkee, A Blog To Watch, Monochrome, etc.) à multiplier les contenus parrainés plus ou moins explicites [hier, on parlait de « publi-rédactionnels » et c’était marqué en haut de la page] et les pages de e-commerce : cette marchandisation éditoriale des grands sites a sa logique [celle de l’actuelle consolidation et d’une course à l’armement qui ne laissera en lice que quelques acteurs majeurs] et, après tout, sa justification face à des marques qui ont toujours le réflexe de payer et qui préfèrent acheter plutôt que comprendre. Contre cette extension marchande et forcenée du territoire de la lutte éditoriale, Business Montres a choisi de demeurer un média personnel, qui vend ses contenus à ses lecteurs et non à ses annonceurs : nous lit qui veut [60 centimes par jour, c’est accessible, avec plein d'articles en accès libre pendant le week-end], mais seuls nos abonnés – et non les puissants du jour – peuvent acheter notre voix…

En marge du coût, ce sont les « coucous » de l’information qui nous préoccupent, parce qu’ils s’installent dans le nid des vrais médias et qu’ils finissent par en expulser les vrais contenus en se faisant passer pour ce qu’ils ne sont pas : c’est comme la fausse monnaie qui chasse la bonne, les faux médias horlogers chassent les bons. Tout le monde a sa belle histoire de blogueur à raconter. Chacun a en mémoire ses fabuleuses aventures éditoriales avec telle ou telle blogueuse – « éditorial » étant ici un bien grand mot pour désigner quelques mots-dièse semés sur Instagram, à des tarifs délirants qui hissent le prix du hashtag au-delà du cours des diamants de couleur (prix du billet d’avion en first pour le photographe et la maquilleuse non compris). Tant que les manufactures confondront l’affluence [vision quantitative de l’audience] et l’influence [vision qualitative de l’importance], tant que les directions horlogères vivront dans l’illusion entretenue par ces marionnettes numériques [ceux qui aiment l’argent des montres plutôt que les montres] et tant que les patrons des marques auront un complexe d’infériorité générationnelle vis-à-vis de ces nouveaux canaux de communication, les margoulins des réseaux sociaux prospèreront et les « fake médias » impressionneront l’établissement horloger. C’est d’autant plus fâcheux que le balancier est déjà reparti dans l’autre sens et que la planète, en voie de déglobalisation, tend désormais à se dé-connecter : en phase d’insoumission grandissante à la Matrice, elle brûlera bientôt ces réseaux dé-sociaux et ces outils de connexion qu’elle adorait, parce qu’elle en percevra enfin les périls abêtissants et les menaces pour les libertés personnelles. Enfin, presque, à quelques détails près…

Dans ce dispositif et avec ces nouveaux horizons sociétaux, les « coucous » médiatiques se révèlent pour ce qu’ils sont : une mauvaise herbe parasite, une ivraie qui envahit tout et qui remplace le bon grain. On regrettera que les professionnels de l’information horlogère n’aient pas réagi à temps contre ce détournement de fond (sans « s ») et de fonds : les pique-assiettes dont on se moquait sont devenus de vrais écornifleurs, sinon des pillards et des écumeurs qui ont emporté le beurre, l’argent du beurre et la vertu de la crémière, en même temps que la nappe et les couverts. On regrettera aussi que les amateurs – les lecteurs, les followers, les « likeurs » – persistent encore aujourd’hui à ne pas vraiment voir de différence entre les coucous piailleurs et les pure players de l’information sur les montres, qu’ils soient marchands ou militants de la cause horlogère. On a les élites qu’on peut. On n’a pas les lecteurs qu’on veut. On vous laisse réfléchir là-dessus…


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❑❑❑❑  SANS FILTRE #01 : « Au lieu de gaspiller des milliards, investissez-les là où ils sont utiles ! » (Business Montres du 16 février)…


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