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C x P #01 (accès libre)
Le comment du pourquoi : les petits secrets, les curiosités et les iniquités de l’univers des montres (premier épisode)

Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur l’horlogerie, sans jamais oser le demander : c’est 101 questions, pas une de plus ou de moins, et donc 101 réponses en une grosse quinzaine d’épisodes, histoire de ne pas bronzer idiot et de terminer les vacances avec des neurones plus musclés qu’en partant.


À propos de montres, si vous vous demandez pourquoi et si vous cherchez à savoir comment, vous avez frappé à la bonne porte et vous avez de bonnes chances de trouver les bonnes réponses dans notre série estivale « Le comment du pourquoi ». Le « pourquoi » de ce « comment du pourquoi », c’est le plaisir d’apporter 101 réponses aux questions élémentaires que peuvent se poser tous les amateurs de montres, débutants ou même confirmés. Le « comment » de ce « comment du pourquoi, c’est une répartition de ces questions et de ces réponses en six grands domaines d’inégale importance, sans la moindre prétention à l’exhaustivité et, surtout, sans le moindre dogmatisme académique. Certaines réponses sont loin d’être définitivement tranchées : quelques polémiques sont loin d’être éteintes – et c’est tant mieux. À chacun de se faire sa propre idée sur ces sujets qui fâchent. On ne ramassera pas les copies à la fin de cette série, mais chacun pourra autoévaluer son propre niveau de culture générale appliqué à l’horlogerie…

CÉLÉBRITÉS #01

Comment le descendant d’un roi des Canaries a lexicalisé le nom d’un horloger franco-suisse pour en faire le synonyme russe de « montre de poche » ?

Le grand horloger franco-suisse Abraham Louis Breguet (1747-1823) avait un grand ami espagnol, l’ingénieur, savant et chercheur Augustin de Betancourt (1758-1824), descendant du premier « roi des îles Canaries », l’aventurier et explorateur français Jean de Béthencourt. Né à Tenerife, Augustin de Betancourt a inventé diverses « machines » avant de rencontrer Abraham Louis Breguet pour réaliser avec lui, en 1796 et en pleine tourmente révolutionnaire, un projet de télégraphe optique qui avortera. Fondateur en Espagne de la première école d’ingénieurs, Augustin de Betancourt (ci-dessous) s’installe définitivement en Russie en 1808, où il est nommé général de division, ce qui ne l’empêchera pas de construire des ponts, des usines, des prisons, un navire à vapeur et une cathédrale. Il est aussi l’ardent propagandiste de la qualité des montres de poche de son ami Breguet, qu’il vend lui-même à toutes les élites russes, jusqu’à faire d’Abraham Louis Breguet l’horloger officiel de la Sa Majesté le Tsar de toutes les Russies et de la Marine impériale. À tel point que, pour les Russes, le mot « bréguette » a fini par passer dans l’usage courant pour qualifier toute montre de poche – une « lexicalisation » qui est un peu l’équivalent de ce qu’est devenu la marque « Frigidaire » pour désigner tout réfrigérateur ou « Mobylette » pour tout vélomoteur.

EXPRESSIONS #01

Pourquoi Einstein, le théoricien de la relativité, préférait-il que ça dure une heure plutôt qu’une minute ?

Pour être un des plus grands génies scientifiques de son siècle, le mathématicien et physicien Albert Einstein (1879-1955) n’en était pas moins homme et il avait une façon très personnelle d’expliquer sa théorie de la relativité générale : « Placez votre main sur un poêle [brûlant] pendant une minute, et ça vous semblera durer une heure. Asseyez-vous auprès d’une jolie fille pendant une heure, et ça vous semblera durer une minute. C’est ça, la relativité »...

ICÔNES #01

Comment la maison Breitling a-t-elle mis vingt-quatre heures pour confondre la montre d’un cosmonaute et celle d’un astronaute ?

Quand il s’envole de Cap Canaveral à bord de sa capsule Aurora 7, qui sera son seul vol dans l’espace (trois tours de la Terre en un peu moins de cinq heures, le 24 mai 1962), l’astronaute américain Scott Carpenter porte à son poignet une montre Navitimer de Breitling doté d’un affichage du temps sur vingt-quatre heures (et non plus douze heures, comme les Navitimer classiques). En effet, dans l’espace, on ne peut plus différencier le jour de la nuit. Problème : ce chronographe – qui est la première montre-bracelet suisse à voyager dans l’espace – est baptisé… Cosmonaute, terme utilisé par les Russes (« Kosmonavt », dérivé de mots grecs kosmos (« univers ») et nautes (« navigateur »). La guerre froide pour la conquête de l’espace ne fait que commencer : la soft power américain finira par faire préférer astronaute (Etats-Unis) à cosmonaute (Russie), spationaute (France) ou taïkonaute (Chine). Est-ce parce que Breitling a choisi le mot russe que la marque a été écartée par la suite pour le choix d’une montre réglementaire pour les équipages de la NASA américaine ?

LÉGENDES #01

Pourquoi Nicolas Hayek, le père du Swatch Group, n’est-il pas le vrai père de la Swatch ?

Ingénieur et consultant spécialisé dans l’analyse des grandes entreprises industrielles, Nicolas Hayek (1928-2010) est monté en route dans le train de la Swatch, projet de montre en plastique qui était lancé depuis la fin des années 1970 par les ingénieurs horlogers Elmar Mock et Jacques Müller, qui travaillaient sous la direction d’Ernst Thomke, alors directeur de ETA Manufacture Horlogère. L’idée était d’en faire une marque de montre, jeune, amusante et économique. Nicolas Hayek, qui était en train de sauver l’horlogerie suisse en rationalisant son outil de production, a très vite compris l’intérêt stratégique de la Swatch (« Swiss Watch » ou « Second Watch » selon les uns ou les autres) pour aider à la renaissance de la montre suisse : c’est son génie du marketing qui va permettre de vendre un million de Swatch dès 1983, pour des ventes qui dépasseront les cent millions de pièces dix ans plus tard…

MARQUES #01

Comment la marque Tudor est-elle devenue la « petite sœur » de Rolex ?

Après avoir lancé avec succès la marque Rolex (nom imaginé, déposé et utilisé dès 1908), le génial Hans Wilsdorf (1881-1960) a fait du concept de son Oyster (une montre de qualité suisse, étanche, précise et endurante, qui deviendra automatique en 1931) le parangon de la montre contemporaine. En 1926, autant pour protéger Rolex de nouveaux concurrents aux prix plus abordables que pour pénétrer de nouveaux marchés où des prix plus accessibles étaient nécessaires, il fonde la marque Tudor, avec l’image de la qualité Rolex (les boîtiers et les bracelets Tudor seront longtemps identiques à ceux de Rolex), mais avec des mouvements plus génériques. On dit aussi que la création de Tudor aurait permis à Hans Wilsdorf – qui était associé à la maison suisse Aegler pour les mouvements Rolex – de lancer sur le continent américain des montres « quasi-Rolex » sans devoir en partager les profits avec Aegler. La marque Tudor vivra ainsi longtemps dans l’ombre de sa « grande sœur », avant de prendre un nouvel élan dans les années 2010 et trouver sa place sur le marché avec des créations originales, comme la récente Black Bay P01, dérivée d’un prototype Rolex proposé dans les années 1960 à l’US Navy américaine (ci-dessous)…

MÉCANIQUES #01

Pourquoi a-t-on réalisé, dans certaines pendules mécaniques, des sonneries « romaines » au lieu des sonneries classiques ?

Sur un mécanisme horloger classique, quand on fait sonner les heures, les quarts ou les minutes, les marteaux sonnent ce temps qui passe selon les chiffres arabes : un coup pour une heure ou une minute, deux coups pour deux heures ou deux minutes, etc. Soit 78 frappes par tour du cadran (douze heures). En ne sonnant que les chiffres romains (I, V ou X : un, cinq ou dix), on ne mobilisera les marteaux que trente fois par tour de cadran – soit une sacrée économie de forces pour le train de rouages affecté à la sonnerie, forcément plus simple et moins gourmand en énergie. 60 frappes par journée de vingt-quatre heures au lieu de 156 : l’économie n’est pas négligeable. On parle alors de « sonnerie à la romaine », en se contentant de deux cloches dans une pendule : un son aigu pour sonner les « I », un son grave, simple ou double, pour sonner les « V » et les « X » (le « IV » devenant un son aigu et un son grave, au lieu des quatre sons aigus du « IIII » romain de nombreuses horloges. On imagine que ce type de notation sonore par coups aurait pu plaire aux ecclésiastiques romains du XVIIe siècle. Cette « sonnerie à la romaine » était une spécialité de l’horloger anglais Joseph Knibb (Business Montres du 3 janvier 2013), qui vivait au XVIIe siècle (1640-1711) et dont les rares pendules valent aujourd’hui une fortune (ci-dessous : une pendule adjugée pour 1,9 million de livres), mais elle n’a encore jamais été tentée sur une montre-bracelet. On se demande bien pourquoi…

ALORS, COMBIEN DE BONNES RÉPONSES , plus ou moins précises et bien argumentées, pour ces six premières questions ? Notez le score de vos bonnes [ou moins bonnes] explications à ces « comment du pourquoi ». Rien n’est ici figé dans le marbre : faites-nous part de vos propres réponses à ces questions et de nos erreurs éventuelles…


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