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RÉTROVISEUR 2020 #05
Les quatorze bons souvenirs horlogers que nous pouvons garder de cet ahurissant millésime 2020 (seconde partie)

Ouf, ça y est, on a enfin tourné la page de 2020 ! Sans trop bien savoir si ce qui nous attend sera pire, meilleur ou du même jus… Demandons-nous quels enseignements positifs on va bien pouvoir retenir d’une année qui s’est révélée particulièrement féconde en absurdités aussi bien qu’en révélations de tout genre (seconde partie)…


❑❑❑❑ À RELIRE

Rétroviseur 2020 #04  : Les quatorze bons souvenirs horlogers que nous pouvons garder de cet ahurissant millésime 2020 (première partie : Business Montres du 1er janvier)

Même si cette année 2020 n’a clairement pas tenu les promesses d’excellence que notre « édredon exterminateur » préféré [le président de la FH] nous trompétait en janvier dernier et même si ce millésime 2020 s’est révélée fertile en débandades, en ratages et des déceptions [ne citons pour mémoire que le palmarès ultra-décevant d’un GPHG trop Swiss Mind pour être représentatif], elle n’en a pas moins permis un certain nombre de clarifications. La crise sanitaire et les confinements ont servi de révélateurs à des tendances plus anciennes – le dessin ci-dessous a été publié le 1er janvier 2020 ! Au final, quels bons souvenirs allons-nous conserver de ce millésime chahuté ? Nous vous proposons quatorze pistes de réflexion – mais il y en aurait bien davantage à retenir (seconde partie)…

❑❑ L’EFFICACITÉ DE LA MOBILISATION SOCIALE : « Ils ont osé, c’est même à ça qu’on les reconnaît », lançait Business Montres à propos de la DRH du groupe Richemont qui augmentait sa rémunération annuelle de 75 % tout en supprimant le bonus de tous les employés du groupe. On a frôlé la grève générale dans les ateliers et la direction a reculé à temps, en faisant sauter le fusible DRH pour calmer le jeu. Ailleurs, le management a reculé à propos des pauses qu’on voulait supprimer ou des parkings à la manufacture qu’on voulait faire payer à ceux qu’on faisait télétravailler. Partout ou presque, le personnel a pu réagir à temps et faire entendre la voix de la raison – celle de la plus élémentaire common decency – à des directions déboussolées par la crise. La mobilisation paye, surtout avec l’appui des médias indépendants qui ne sont pas financés par la publicité des marques. Contrairement aux médias perroquets, bizarrement absents du débat dans tous ces dossiers sociaux gênants pour leurs annonceurs…

❑❑ LA PLACE IRREMPLAÇABLE DES GRANDS SALONS HORLOGERS : en janvier dernier, on était partis pour une douzaine de salons horlogers dans tous les coins et à toutes les dates. La pandémie a dispersé tout le monde et il n’y a eu, au final, ni rendez-vous de Genève [Watches & Wonders n’a pas pu naître], ni rendez-vous de Bâle, les conjurés du « groupe Rolex » ayant torpillé Baselworld aussi sûrement que le coronavirus. Seul Jean-Christophe Babin (Bvlgari) et le groupe LVMH ont pu sauver l’honneur avec leurs Dubaï Watch Days de janvier, le patron de Bvlgari parvenant ensuite à entraîner une trentaine de marques dans ses Geneva Watch Days de septembre. « Alerte à Bâlibu », écrivait Business Montres. Trop tard ! Alors que le concept de Watches & Wonders (Richemont et Rolex si mal mariés) semble désormais condamné par l’histoire, ce sera maintenant Hour Universe sur les bords du Rhin : « Honni soit qui Bâle y pense » ! De quoi démontrer que les salons horlogers capables de rassembler toute la communauté de la montre restent une nécessité mammifère pour l’industrie horlogère, qui se ridiculise à laisser chaque groupe organiser sa petite cuisine dans son petit événement…

❑❑ ❑❑ LA NULLITÉ PERSISTANTE DE L’OFFICIALITÉ HORLOGÈRE : 2020 était un festival de grande bêtise pour les représentants officiels de l’horlogerie. Du mémorable « excellent début d’année » pronostiqué par le président de la FH, l’ineffable Daniel Pasche [dont les silences tout au long de cette année difficile interpellent], au déni de réalité affiché par différents patrons [Nick Hayek en tête] qui refusaient d’admettre la moindre crise, les « élites » horlogères ont démontré qu’elles n’étaient plus à la hauteur et que les marques étaient trop souvent pilotées par des barreurs de beau temps désemparés dès que des vents contraires se lèvent. On a pu le vérifier dans les cafouillages désastreux qui ont entouré l’annulation des salons horlogers. Cette officialité a préféré se taire quand toutes les boutiques de montres du monde entier ont dû baisser le rideau de fer sur leurs vitrines et quand des centaines d’emplois ont été supprimés dans l’amont industriel. Cet establishment horloger a désinformé tout le monde en voyant venir une reprise en « V » dès le printemps 2020, alors que le retour à la croissance se fait toujours attendre pour 2021, à l’exception près d’une Chine dont les achats confinés sont loin de compenser la dépression internationale des marchés de la montre. Décidément, il manque à cette horlogerie suisse un « Monsieur Montre » ou une « Madame Montre » capable d’exprimer d’une seule voix l’opinion de la branche et, surtout, capable de porter ses intérêts au plus haut niveau, en Suisse comme dans le monde… 

❑❑ LA PRISE DE CONSCIENCE ENVIRONNEMENTALE : si quelques « petites » marques (Awake, Ice-Watch, etc.) avaient déjà pris en charge une préoccupation éco-responsable trop souvent oubliée dans les industries du luxe, il faut féliciter Patrick Pruniaux, le CEO d’Ulysse Nardin, et Georges Kern (plus timidement) d’avoir publiquement porté cette parole dans la haute horlogerie, sans tomber dans ce greenwashing qui sert généralement d’alibi aux manufactures de montres. Le vent de démondialisation a mis fin à de nombreux gaspillages, tant dans les voyages que dans les chaînes logistiques : les marques ont découvert qu’on pouvait en faire beaucoup plus pour la planète avec un minimum d’éthique environnementale. Il aura donc fallu attendre 2020 pour qu’on passe des pétitions de principe aux actes, même si c’est encore trop timide. C’est mieux que rien, mais, surtout, c’est désormais irréversible…

❑❑ LA FIDÉLITÉ DES AMATEURS : ce sont clairement les amateurs de montres qui ont « sauvé » l’année horlogère ! Ce sont eux qui ont tenu le coup et qui ont acheté en ligne – dans tous les styles et à tous les niveaux de prix – assez de montres pour ne pas désespérer les états-majors. Ce sont les vrais amateurs de montres [et non les spéculateurs] qui ont ranimé la flamme de la passion horlogère alors que les ventes chutaient au printemps de 70 %, 80 %, voire 100 % pour certaines marques. C’est tout le « petit peuple » de la montre qui s’est mobilisé pour ne pas désespérer, alors que les boutiques étaient fermées et les manufactures aux abonnés absents. Dommage que cette « opinion publique » horlogère, celle qui porte la « culture » de la montre et qui est généralement occidentalo-centrée, soit de nouveau méprisée par les directions des marques, qui sont une fois de plus obsédées par leurs seuls clients chinois et par leurs ventes dans les boutiques insulaires de Hainan…

❑❑ LA « FORCE CONSTANTE » DE LA DEMANDE : quand Philippe Dufour annonce une série de vingt montres, sans nous en préciser le prix, il reçoit vingt mille demandes, soit 100 000 % de sursouscription ! En pleine pandémie, on a vu des nouvelles marques rafler des centaines de milliers d’euros pour des montres que personne n’avait jamais vues. La maison française Yema a reçu 1,7 million d’euros de précommandes pour une nouvelle plongeuse vintage. Les enchères ont flambé pendant toute la saison 2020, avec une impressionnante pluie de records, mais le plus spectaculaire reste l’envolée du marché de la seconde main, où les montres sont disponibles [ce qui n’est plus le cas en boutique pour les best-sellers des marques] et où les prix restent raisonnables pour la qualité dès qu’on s’écarte des icônes surévaluées. La vraie vedette de l’année, c’est la place déterminante prise par le pre-owned (seconde main) dans le cœur des amateurs et – même si c’est timide – dans la stratégie des marques, dont les catalogues se vintagisent à vue d’œil. Ce qui n’est pas forcément une preuve de créativité…

❑❑ LA MAGIE DES CHIFFRES : puisqu’il vaut mieux être quatorze que treize à table, voici quelques chiffres intéressants pour les activités 2020 de notre médiafacture d’informations horlogères. À quelques unités près, on a décompté 670 articles publiés en 2020. Business Montres a présenté un total approximatif de 720 nouvelles montres – quasiment deux par jour. Dans nos pages d’actualités horlogères en mode graphique, nous avons mis en ligne un gros millier de dessins d’humour et d’images détournées. Nous avons posé 225 questions de culture horlogère à travers 45 tests Horlomania pour les nuls. 140 noms se sont inscrits dans les tableaux d’honneur et les tableaux d’horreur de nos douze Baromontres mensuels. Cinquante chroniques Atlantic-tac ont permis de toucher quelques millions de lecteurs sur Atlantico. Nos lecteurs ont pu profiter de 69 séquences « À découvrir » et de 40 séances de rattrapage pour ne rien oublier d’une actualité horlogère traitée à bout touchant. On aimerait connaître le tableau de chasse des médias perroquets qui bénéficient de la complaisance des marques…

 LES PRÉCÉDENTES SÉQUENCES 

 RÉTROVISEUR 2020

❑❑ #04  : Les quatorze bons souvenirs horlogers que nous pouvons garder de cet ahurissant millésime 2020 (première partie : Business Montres du 1er janvier)

❑❑ #03  : Les vingt personnalités horlogères de l’année 2020 – troisième partie (Business Montres du 23 décembre) 

❑❑ #02  : Les vingt personnalités horlogères de l’année 2020 – deuxième partie (Business Montres du 22 décembre 

❑❑ #01  : Les vingt personnalités horlogères de l’année 2020 – première partie (Business Montres du 21 décembre )

(dessin publié fin décembre 2019) 


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