LE SNIPER DU MERCREDI (bloc-notes en accès provisoirement libre)
Mais qu’est-ce qu’ils ont tous, chez Richemont, à quitter leur radeau de la Méduse commercial ?
Retour du Sniper pour une nouvelle intervention en toute liberté : on va donc vous parler, entre autres, d’une inquiétante absence de nouvelles, d’un exfiltration qui risque de faire du bruit, d’un candidat isolé dans sa défense de l’horlogerie, de chaises musicales en mode comemrcial et d’une bonne nouvelle pour nos abonnés – on en oublie, mais vous retrouverez tout ce petit monde dans les notes ci-dessous. En vous rappelant ce que l’excellent Sylvain Tesson nous dit d’un bloc-notes de ce genre : « Les blocs-notes sont des coups de sonde, des carottages donnés dans le chatoyant foutoir du monde ». Nous n’avons donc plus qu’à bloc-noter dans le chatoyant foutoir de l’horlogerie…
▶︎▶︎▶︎▶︎ PRÉCISION (TRÈS) UTILE POUR NOS LECTEURS…
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▶︎▶︎▶︎▶︎ TOUJOURS RIEN À L’HORIZON…
On nous l’avait promis-juré pour Noël, puis pour janvier, ensuite pour février et, enfin, pour l’ouverture de Watches & Wonders fin mars. C’est l’Arlésienne de l’horlogerie : on ne voit toujours pas la moindre annonce officielle pour désigner le futur successeur de François-Henry Bennahmias à la direction d’Audemars Piguet. Selon certaines informations, ce successeur serait déjà nommé et agréé par le conseil d’administration. L’annoncer pendant Watches & Wonders aurait été une faute de communication. On raconte qu’il ne s’agirait pasd’une personnalité issue de la communauté horlogère. On dit aussi que cette nomination pourrait être officialisée avant l’été (au mieux), mais plus sûrement à la rentrée de septembre – François-Henry Bennahmias devant raccrocher les gants en fin d’année [pour faire quoi : autre mystère sabbatique ?]. Que d’incertitudes…
▶︎▶︎▶︎▶︎ EXFILTRATION, EXODE, MIGRATION, TRANSFERT, ÉVACUATION (rayez les mentions inutiles)…
Ce n’est pas encore une info, mais ce n’est sans doute plus une infox et probablement pas une intox ! On est au-delà du stade de la rumeur et presque devant un état de fait, non encore officiel, ni surtout autorisé. Il semble fort probable que le périmètre de Watches & Wonders 2024 sera substantiellement très différent de celui de l’édition 2023. Ceci pour de multiples raisons…
• Raison annexe : l’arrivée prévue d’une petite dizaine de nouvelles marques de tailles variables – on parle par exemple d’Eberhard & Co. ou de Reservoir. Beaucoup d’impétrants, officieusement acceptés, se prennent cependant à réfléchir sur le différentiel de coût entre les propositions de Watches & Wonders (six chiffres minimul pour une représentation digne de ce nom) et les offres disponibles dans les palaces du centre ville ou dans les expositions annexes un peu partout dans Genève…
• Raison mineure : le départ de certains membres « fondateurs » de Watches & Wonders, sérieusement dépités de n’avoir plus droit au chapitre dans la nouvelle Fondation qui porte un salon où le pouvoir se partage exclusivement et jalousement entre le tandem Rolex-Patek Philippe d’un côté et le « bloc » Richemont de l’autre (Cartier et la Fondation de la haute horlogerie). On parle ainsi, entre autres, de la possible exfiltration de Chopard, mais d’autres noms sont annoncés…
• Raison majeure : la possible migration des marques LVMH (toutes ou une partie d’entre elles) vers les palaces du centre ville, à la fois pour des raisons budgétaires [les coûts d’une présence genevoise hors de Watches & Wonders se trouvent divisés par quatre ou cinq] et pour des raisons de préséances diplomatiques et territoriales, puisque les représentants de l’horlogerie LVMH se trouvent de facto exclus de la direction de la Fondation Watches & Wonders (voir ci-dessus) et donc dénués de toute capacité d’initiatives sur place. Alors qu’il était question, dans un premier temps, de voir Bvlgari rejoindre Palexpo, peut-être avec le renfort de Tiffany & Co, de Chaumet ou de Fred, voire même [soyons fous !] de l’horlogerie Louis Vuitton, l’heure serait plutôt à l’exode de TAG Heuer, de Zenith et d’Hublot vers les bords du lac, où quelques pré-réservations de principe auraient déjà été faites. L’arrogance caporaliste de l’actuelle direction opérationnelle de Watches & Wonders n’aurait pas été pour rien dans cette possible prise de décision [tout est encore négociable et rien n’est acté], qui sanctionne également l’inflation galopante des coûts d’exposition – surtout pour des marques qui semblent décidées à intégrer au maximum leur distribution et qui ont de moins en moins besoin de rencontrer des partenaires détaillants dont elles rêvent de se passer. Rappelons, enfin, que Bernard Arnault n’a aucune raison d’imposer à ses marques une présence dans ce salon qui l’a humilié en 2022 en le blacklistant (« Comment Bernard Arnault s’est fait blacklister par le groupe Richemont » : Business Montres du premier avril 2022 – ce n’était pas un poisson d’avril !)…
▶︎▶︎▶︎▶︎ EXFILTRATION, EXODE, MIGRATION, ETC. (2)…
On peut donc se poser des questions sur la pérennité même du projet Watches & Wonders, rassemblement communautaire de moins en moins commercial dans son principe [ce qui disqualifie les dérives pharaonesques en termes d’architecture comme d’équipements coûteux et de services élargis souvent inutiles] et de plus en plus ouvertement B2C – comme le succès des journées et des invitations grand public peut en témoigner. On aura noté que les marques qui portent aujourd’hui ce projet en le pilotant – le groupe Rolex, Patek Philippe et Cartier – sont sans doute celles qui en ont le moins besoin pour leur stratégie commerciale et qui feraient un bien meilleur usage promotionnel des budgets consacrés à une Wonder Week genevoise dont l’utilité n’est plus que communicationnelle. La plupart des marques Richemont pourraient également se passer de Watches & Wonders, soit parce qu’elles tendent à une distribution exclusive totalement intégrée (A. Lange & Söhne, Panerai, Roger Dubuis, par exemple), soit parce qu’elles n’en ont plus vraiment les moyens (Baume & Mercier, entre autres). La plupart des grandes marques associées au salon (Hermès, le groupe Chanel, etc.) tireraient sans doute profit de manifestations horlogères qui leur soient propres, à d’autres dates et en d’autres lieux. Les seules maisons qui ont intérêt à l’actuel statu quo qui les protège à l’ombre de Rolex et de Patek Philippe restent les marques de taille moyenne et quelques indépendants, qui pourraient cependant tous trouver leur pitance dans les palaces du centre ville, comme leurs copains qui campaient cette année dans les suites du Beau-Rivage. S’il est indispensable [c’est une option que nous défendons depuis des années !] de maintenir à Genève un rendez-vous communautaire, annuel ou biennal, pour assurer la cohésion de la communauté horlogère élargie (professionnels, amateurs, collectionneurs et partenaires), cette obligation ne réclame plus les formes désuètes et les rituels surannés des salons traditionnels du type Baselworld, SIHH et de leurs succédanés…
▶︎▶︎▶︎▶︎ UNE « GENEVOISERIE » DE PLUS CONTRE LES INTÉRÊTS DE L’HORLOGERIE…
Les Suisses alémaniques parlent de « genferei » (genevoiserie)pour désigner certaines absurdités aberrantes de la vie politique du canton de Genève, où certaines situations dépassent les bornes du ridicule. On sait à quel point les élus genevois adorent parler – mais seulement parler – de Genève comme « grande métropole horlogère ». Pour le premier tour des élections cantonales de ce printemps, nous avions noté qu’un seul parti avait décidé de se doter d’un « programme horloger » – celui de Pierre Maudet, Libertés et justice sociale (Business Montres du 4 janvier 2023 ; voir également Business Montres du 21 janvier). On ne pouvait évidemment que s’en réjouir, tout comme nous avons salué la performance du « justicialiste » Pierre Maudet, l’outsider de cette élection qui a réussi à faire élire quelques députés au premier tour de l’élection législative du 2 avril, mais également à bien se placer personnellement pour le second tour du 30 avril. Le plus cocasse, mais c’est plutôt affligeant, c’est de voir que tous les partis s’unissent et s’allient dans cette élection contre lui et contre sa liste LJS – la seule à défendre ouvertement les intérêts de l’horlogerie genevoise ! « Haro sur le Maudet », comme dirait l’autre ! S’ils ont l’horlogerie à cœur, les électeurs de Genève qui nous lisent savent ce qu’il leur reste à faire le 30 avril au moment de voter ! En attendant, ils peuvent toujours aller poser des questions à Pierre Maudet, qui adore qu’on l’interroge sur les sujets horlogers (musée, salon, encouragements aux jeunes entrepreneurs horlogers, etc.) et qui défend une ligne assez voisine de la nôtre dans ce domaine : le candidat « justicialiste » tient une réunion publique demain soir au Palladium de Genève, rue du Stand (à partir de 18:30 : renseignements sur le site de LJS).
▶︎▶︎▶︎▶︎ UNE SÉRIE DE CHAISES MUSICALES CHEZ RICHEMONT (1)…
Comme l’écrivait l’excellent M. de La Fontaine dans « Les animaux malades de la peste » de ses Fables (livre septième, I), « ils ne mouraient pas tous, mais tous étaient frappés ». Il se produit actuellement chez Richemont une curieuse épidémie : c’est la grande valse des hauts responsables commerciaux (généralement au niveau CCO : Chief Commercial Officer) chez les principales marques horlogères du groupe.
• On vient ainsi d’assister au départ de Laurent Gaborit, qui quitte la direction internationale de Piaget pour rejoindre le pôle SWM (Specialist Watchmakers) qui coiffe les marques horlogères : cet ex-Cartier devrait épauler Emmanuel Perrin, qui gère cette division, et Michael Guenoun (directeur commercial de SWM et CEo du réseau TimeVallée) à reprendre en main toute la distribution et à formuler de nouveaux projets stratégiques pour l’horlogerie Richemont [pour mémoire, c’est cette fine équipe qui a planté les négociations avec DFS et qui poussé Bucherer à se fâcher très fort, au point d’évacuer les marques SWM de la boutique historique de Lucerne]…
• Autre départ annoncé : celui de Paulo Colino, qui était directeur commercial international chez Jaeger-LeCoultre depuis un peu moins de quatre ans, après une grosse douzaine d’années passées chez LVMH…
• Départ plus « furtif », celui de Marc Michel-Amadry, qui a préféré se mettre en « mobilité » tellement il se sentait mal dans sa direction commerciale internationale de la manufacture IWC à Schaffhouse, alors qu’il était en place depuis plus de sept ans (après huit ans passés chez Ebel, dont il était président, et quelques années chez LVMH).
• Dernier départ en date, celui de Benoît de Clerck, CCO de la manufacture Panerai, où il venait de passer huit ans, après une dizaine d’années chez IWC et quelques années chez LVMH. On le considérait jusque-là comme un des « gros potentiels » de Richemont et on le disait promis à un bel avenir – lequel n’a pas dû lui sembler aussi clairement écrit que ce qu’on lui en disait…
• À qui le tour, à présent ? Il ne reste plus que quelques directions commerciales à décapiter au sein du groupe [nous n’aborderons pas ici volontairement le cas plus personnellement dramatique du suicide d’un des directeurs financiers des marques SWM-Richemont]…
▶︎▶︎▶︎▶︎ UNE SÉRIE DE CHAISES MUSICALES CHEZ RICHEMONT (2)…
Dans n’importe quel univers autre que l’horlogerie, on s’alarmeraitdu départ quasi simultané de quatre patrons commerciaux au sein de grandes marques d’un pôle horloger qui ne tourne déjà pas sur ses quatre cylindres – et qui va encore moins bien depuis que la camarilla SWM se mêle de tout et de rien, en dépouillant les CEO qui n’ont plus la maîtrise ni de leur stratégie commerciale, ni de la conduite générale des opérations pour leur marque (prix, allocation des pièces, politique wholesale, nouveau retail, etc.). Les grandes décisions ne se prennent plus dans les états-majors des manufactures, mais dans les réunions avec les responsables de SWM, structure de plus en plus lourde et autoritaire [moins les résultats sont au rendez-vous, plus les cheffaillons cheffaillonnent] – une certitude : la transparence sur les gros salaires chez SWM est d’une totale opacité ! Refaites vos jeux, rien ne va plus : ce n’est cependant pas de la faute de SWM si Catherine Renier, la CEO de Jaeger-LeCoultre, était cette année à une centaine de millions au-dessous de ses objectifs ! Ce n’est pas non plus de la faute des petits caporaux de SWM si Piaget et Roger Dubuis subissent la même érosion ou si Panerai et IWC ont du mal à résister aux prises de parts de marché préemptées par Tudor ou par Breitling ! Mais ce n’est pas de la faute des marques si l’équipe dirigeante de SWM en vient à se tromper en permanence sur les recrutements, sur les choix marketing ou sur les relations avec la distribution – relations qui se tendent entre Richemont et son réseau, les détaillants indépendants et surtout les groupes de distribution (Bucherer, Wempe, The Hour Glass, Cortina, etc.) préférant désormais des marques plus « rentables » que les canards boiteux de la basse-cour Richemont. On devine l’ambiance détestable dans tous les couloirs, les CEO martyrisés n’ayant même plus, entre eux, le moindre réflexe de solidarité face aux petits caporaux hystériques qui passent leur temps à détruire de la valeur au lieu d’œuvrer à la splendeur des marques de leur actionnaire…
▶︎▶︎▶︎▶︎ CLOCKS EN STOCK (le dessin du jour)…
Nous avons repris dans ce bloc-notes la bonne vieille habitude du Sniper, celle du « dessin du jour », qu’on pourra retrouver dans notre page Instagram, qui compte déjà plus de 1 300 illustrations à base de comics détournés et de photos piratées – un bon conseil, likez et faites circuler ! « Il existait tellement de bonnes raisons de virer ce CEO horloger totalement nul que son actionnaire, de guerre lasse, a préféré le laisser en place : ça ne pouvait pas être pire ! » Nous ne visons personne en particulier, mais chacun aura reconnu tel ou tel autre manager horloger dans ce conciliabule de vieilles dames en colère…
Coordination éditoriale : Eyquem Pons