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CULTURE MONTRES : La précision et la splendeur de l'horlogerie classique s'exposent à New York

Précision et splendeur : les trésors de la collection Frick sont exposés à New York jusqu'au 2 février prochain. La sélection des onze horloges et des quatorze montres présentées est d'un immense intérêt pour la culture horlogère. Responsable de cette exposition parrainée par Breguet, Charlotte Vignon répond à nos questions...  ◀▶ FRICK COLLECTION« Précision et splendeur »◉◉◉ Alors que nous sommes environnés d'objets numériques, fixes ou nomades, qui affichent l'heure, les montres et les horloges …


Précision et splendeur : les trésors de la collection Frick sont exposés à New York jusqu'au 2 février prochain. La sélection des onze horloges et des quatorze montres présentées est d'un immense intérêt pour la culture horlogère. Responsable de cette exposition parrainée par Breguet, Charlotte Vignon répond à nos questions...

 
◀▶ FRICK COLLECTION
« Précision et splendeur »
◉◉◉ Alors que nous sommes environnés d'objets numériques, fixes ou nomades, qui affichent l'heure, les montres et les horloges mécaniques sont devenues  fonctionnellement inutiles et techniquement obsolètes. Elles n'en conservent pas moins un stupéfiant pouvoir de fascination, qui ne peut que s'expliquer par le respect qu'inspire le patrimoine qu'elles représentent. En cinq siècles, nous somme passés de l'horloge de beffroi à l'horloge atomique : cinq siècles de tâtonnements mécaniques et esthétiques que tentent de résumer – du moins jusqu'au XIXe siècle – les onze horloges et les quatorze montres de la Frick Collection, présentées toute cette année à New York, avec le soutien de Breguet. Responsable de la mise en place de « Précision et splendeur : montres et horloges de la collection Frick », Charlotte Vignon, Associate Curator of Decorative Arts, The Frick Collection (image ci-dessus : Michael Bodycomb) s'explique sur ses choix.
 
◉◉◉ Est-ce que le public américain est toujours aussi passionné par l'horlogerie ancienne qu'il a pu l'être du temps des grands collectionneurs du passé ?
▶▶▶ Charlotte Vignon :  Je ne pense pas que les « grands collectionneurs américains » (j’imagine que vous faites références aux collectionneurs du début du XXe siècle, comme Henry Clay Frick, J. Pierpont Morgan, John Rockefeller, les Widener, Huntington, etc.) étaient passionnés par l’hodologie ancienne. Seul J.P. Morgan a constitué une collection importante de montres anciennes, mais celle-ci s’intégrait dans un projet plus large de constituer une collection encyclopédique comme un musée tel que le Metropolitan Museum of Art. Winthrop Kellogg Edey (1937-1999), qui légua sa collection d’horloges et de montres anciennes à la Frick Collection, et qu’on célèbre aujourd’hui avec cette exposition, était en cela unique. Sa collection comporte uniquement des horloges et montres anciennes. Lui-même était un grand connaisseur dans ce domaine. Je ne connais pas d’autres collectionneurs américains comme lui...
 
 
◉◉◉ Est-ce qu'on peut en savoir plus sur l'extraordinaire pièce de Lepaute, qui allie la splendeur esthétique à la splendeur mécanique ?
▶▶▶ Charlotte Vignon : La Ronde du Temps est l’une des rare pendules du XVIIIe siècle qui comporte une terre cuite (image en haut de la page). Fruit de la collaboration de Clodion et de l’horloger Jean-Baptiste Lepaute, elle figure trois nymphes à demi dévêtues en train de danser autour d’une colonne supportant une pendule de laiton doré à cadran annuel rotatif. Les figures de Clodion pourraient représenter les trois Heures, personnification du temps qui passe dans la mythologie grecque. Avec cette œuvre, Lepaute inaugure le globe de verre transparent, qui révèle le mouvement d’horlogerie. À sa révolution mécanique fait écho la ronde des nymphes, figures néoclassiques ici unies au symbole du cosmos soumis à des règles mathématiques. Créé à la veille de la Révolution, ce brillant mariage de l’art et de la science est un chef-d’œuvre du sculpteur et de l’horloger. Clodion et Lepaute l’on spécialement créé pour son premier propriétaire, le célèbre architecte Alexandre-Theodore Brongniart.
 
 
◉◉◉ On comprend bien la splendeur dans votre sélection de magnifiques pendules, mais un peu moins la précision, qui était l'apanage à l'époque des horlogers anglais, non représentés : pourquoi ?
▶▶▶ Charlotte Vignon : L’histoire de l’horlogerie est une quête continuelle pour davantage de précision, et n’était pas seulement l’apanage des horlogers anglais. L’exposition cherche justement a raconter cette quête et à retracrt l’évolution des techniques dans le domaine de l’horlogerie, depuis le début du XVIe siècle jusqu’au début du XIXe siècle, avec des exemples français, suisses, allemands, flamands et aussi anglais. Les horlogers anglais sont représentés dans l’exposition grâce à plusieurs montres de Robert Grinkin, Thomas Mudge et George Smith. Toutes les horloges antérieures à 1653 (l’invention du pendule-balancier par l’hollandais Christiaan Huygens) et toutes les montres antérieures à 1675 (introduction du ressort spiral) étaient plus ou moins inexactes. Le but des horlogers du XVIe siècle et du début du XVIIe siècle étaient, cependant, d’essayer de fabriquer des instruments de mesure du temps qui soient exactes. Et même les horlogers du XVIIIe siècle cherchaient à raffiner les mouvements antérieurs et à créer des montres et des horloges qui soient plus précises, qui durent plus longtemps. Une recherche pour davantage de « précision » gouverne toute cette époque, et en conséquence, l’exposition.
 
 
◉◉◉ De même, pour l'horlogerie française, on a sacrifié la précision à la splendeur : une explication ?
▶▶▶ Charlotte Vignon : Les Français ont toujours contribués à l’évolution de l’horlogerie, même si, en effet, beaucoup d’inventions dans ce domaine viennent d’Angleterre, de Hollande ou d’ailleurs. Les horloges de Robert Robin et de Lepaute, représentées dans l’exposition, sont aussi précises que splendides. Au XVIIIe siècle, en France, les horlogers considéraient leur travail comme étant autant intellectuel (scientifique) que manuel.  Le fils de l'horloger Jacques Gudin défini la profession comme appartenant « en même temps aux sciences par les connaissances qu'elle exige, et aux arts par les connaissances qu'elle emploie ».
 
 
◉◉◉ Si Breguet n'avait pas été le parrain de l'exposition, auriez-vous sélectionné ces montres de poche-là ? D'autres ne seraient-elles pas plus représentatives des révolutions horlogères du XVIIIe et du XIXe siècle ?
▶▶▶ Charlotte Vignon : L’exposition est organisée autour de la collection d’horloges et de montres anciennes, léguée en 1999 par Winthrop Kellogg Edey. Les deux montres et la petite horloge de Breguet sont des pièces très importantes de notre collection permanente. Pour moi, il n’y avait aucun doute qu’elles feraient partie de l’exposition. De toute manière, le projet d’exposition était très avancé, quand Breguet est devenu notre sponsor. Par ailleurs, je trouve qu’elles représentent merveilleusement bien les diverses révolutions horlogères de la fin du XVIIIe et du début du XIXe siècle. Leurs mécanismes extrêmement précis ont été améliorés par le génie de Breguet, inventeur de nombreux dispositifs horlogers, dont le tourbillon, et ces mouvements sont logés dans des boitiers d’une sobriété très moderne pour l’époque.
 
 
◉◉◉ LÉGENDES (du haut vers le bas de la page) :
◉ Cartouche en haut de page : Abraham-Louis Breguet (1747–1823) and Antoine-Louis Breguet (1776–1858), Gold and Silver Double-Dial Desk Watch Showing Decimal and Traditional Time, c. 1795– after 1807, The Frick Collection, Bequest of Winthrop Kellogg Edey; photo: Michael Bodycomb (côté cadran).
Charlotte Vignon, Associate Curator of Decorative Arts, The Frick Collection (image Michael Bodycomb)
◉ Pierre de Fobis (1506–1575), Gilt-Brass Table Clock, c. 1530, The Frick Collection, New York, Bequest of Winthrop Kellogg Edey ; photo : Michael Bodycomb.
 The Dance of Time, Three Nymphs Supporting a Clock, movement by Jean-Baptiste Lepaute (1727–1802), sculpture by Claude Michel Clodion (1738–1814), 1788, terracotta, gilt brass, and glass, The Frick Collection, New York, bequest of Winthrop Kellogg Edey ; photo : Michael Bodycomb.
 David Weber (active 1623/24–1704), Gilt-Brass and Silver Table Clock with Astronomical and Calendrical Dials, probably 1653, The Frick Collection, New York, Bequest of Winthrop Kellogg Edey ; photo : Michael Bodycomb.
 Abraham-Louis Breguet (1747–1823) and Antoine-Louis Breguet (1776–1858), Gold and Silver Double-Dial Desk Watch Showing Decimal and Traditional Time, c. 1795– after 1807, The Frick Collection, Bequest of Winthrop Kellogg Edey ; photo : Michael Bodycomb (dos de la montre).
 Abraham-Louis Breguet (1747–1823) and Antoine-Louis Breguet (1776–1858), Gold and Silver Double-Dial Desk Watch Showing Decimal and Traditional Time, c. 1795– after 1807, The Frick Collection, Bequest of Winthrop Kellogg Edey ; photo : Michael Bodycomb (montre ouverte).
 Abraham-Louis Breguet (1747–1823) and Antoine-Louis Breguet (1776–1858), Gilt-Bronze Carriage Clock with Calendar, 1811, The Frick Collection, Bequest of Winthrop Kellogg Edey ; photo : Michael Bodycomb.
 Henry Arlaud (1631–1689), enameling by Pierre Huaud II (1647–c. 1698), Gold and Enamel Pendant Watch, c. 1685, The Frick Collection, New York, Bequest of Winthrop Kellogg Edey ; photo : Michael Bodycomb.
 
◉◉◉ PRATIQUE : renseignements sur le site de la Frick Collection (East 70th Street, near Fifth Avenue. Tél : 212.288.0700). Ne pas manquer la visite virtuelle sur le site. Différentes conférences sont organisées (voir le site)...
 
 
 
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