BUSINESS MONTRES ARCHIVES (accès libre)
Il y a exactement dix ans, qui étaient les « managers horlogers de l’année » ?
Début 2006, « Business Montres » jouait une fois de plus les pionniers : nous étions le premier média horloger à oser désigner – avec un jury de journalistes – les « meilleurs managers de l’année ». Une formule toujours très imitée depuis, mais jamais égalée. L’année suivante, début 2007, rebelote, avec un classement plus étoffé : nous avons retrouvé l’article de l’époque…
BEST OF 2006
Les meilleurs managers de l’année
Le premier sondage médiatique grandeur nature de toute l'histoire de l'industrie horlogère. Un classement d'autant plus sincère que les votes étaient secrets…
Ce choix est le libre choix de soixante-quinze journalistes spécialisés, dans vingt-deux pays, sur quatre continents. C'est la première fois qu'un tel « jury » international est rassemblé. C'est aussi la première fois qu'un sondage de cette ampleur est réalisé : Business Montres l'a mis en place pour donner à ses abonnés un « instantané » fiable de l'opinion des médias. Ces hommes et ces femmes – experts de toutes les formes de presse – ont été choisis sur les principales places horlogères selon un seul critère : leur bonne connaissance du marché horloger, de ses principaux acteurs et de ses perspectives.
Pour des raisons géo-linguistiques évidentes, l'horlogerie ayant toujours parlé français, on trouve dans cet « électorat » une surpondération des marchés francophones (un tiers des votants) et européens (un second tiers). Le dernier tiers des journalistes vient des trois autres continents (Asie, Amérique, Océanie). Pour libérer les consciences de tout souci diplomatique ou publicitaire, le vote de chacun était libre (pas de liste des candidats) et secret. C'est un souci qui m'avait été exprimé l'année dernière par des journalistes francophones. Je l'avais trouvé estimable et légitime : j'ai trop souvent déploré la « perfusion publicitaire » de la presse écrite pour m'en formaliser. Je préfère voir dans cette pudeur des journalistes une forme de courtoisie vis-à-vis de dirigeants que nous avons la chance de côtoyer quotidiennement : ils ont parfois l'épiderme sensible, et l'égo très chatouilleux…
Pour affiner le jugement des journalistes, Business Montres a choisi de désigner cette année trois dirigeants horlogers, et non plus un seul comme l'année dernière : rappelons que le lauréat 2005 était Jean-Claude Biver (Hublot). Rappel de ces catégories :
• Le meilleur manager horloger de l'année est le patron (président, CEO, administrateur ou délégué général : peu importe son statut) qui aura le mieux défendu sa marque au cours de l'année écoulée, sur tous les terrains (collection, marketing, communication, ventes, etc.).
• Le meilleur communicateur horloger de l'année est le patron qui aura le mieux communiqué au service de sa marque, dans tous les domaines.
• Le meilleur pionnier/innovateur horloger de l'année est le patron qui aura le plus contribué, avec son équipe, au renouvellement de l'art horloger (innovations produits, innovations techniques, innovations industrielles et commerciales, etc.).
Quels enseignements tirer de ces votes ? Chaque journaliste disposant de trois bulletins de vote, 225 suffrages ont été exprimés (on pouvait voter plusieurs fois pour le même nom). Autant on note une dispersion des noms pour le meilleur manager de l'année (29 noms pour 75 votes exprimés), autant le tir était concentré pour le communicateur (21 noms cités) et l'innovateur (22 noms).
• Le plus cité dans les trois catégories : Jean-Claude Biver (30 citations). Viennent ensuite Jérôme Lambert (20) et Georges Kern (19). Tous les managers présents sur les différents podiums ont été cités dans les trois catégories…
• Managers cités dans les trois catégories : Jean-Christophe Babin (16 citations), Georges-Henri Meylan (6), Richard Mille (7), Thierry Nataf (15), Karl-Friedrich Scheufele (7) et Philippe Stern (7).
• Marques citées dans deux catégories : Breguet (7 voix), Breitling (2), Cartier (2), Nomos (2), Panerai (4), Roger Dubuis (3), Seiko (3), Vacheron Constantin (3).
• 80 % de ces votes se sont portés sur des dirigeants de marques suisses ou « franco-suisses » (Cartier, Richard Mille, etc.). On voit cependant apparaître dans ce classement des références européennes (A. Lange & Söhne, Bulgari, Nomos, Panerai, Wempe) et même une star asiatique inattendue (Seiko). La majorité des managers les plus spontanément cités ne sont pas suisses, mais… français ! Entre autres, Richard Mille, Jérôme Lambert, François-Paul Journe, Jean-Christophe Babin, Thierry Nataf ou Georges Kern. Les autres champions du classement viennent du Luxembourg (Jean-Claude Biver), d'Italie ou d'Allemagne. Les Suisses restent minoritaires (26 % des voix)…
• En regroupant les votes par grands continents (Europe, Asie, Amériques), on ne distingue pas clairement de préférences régionales. Les citations asiatiques ne viennent pas d'Asie. L'intégrisme helvétique se repère surtout chez les Asiatiques. Côté Europe, à peine un peu de patriotisme linguistique chez les germanophones, un brin de chauvinisme chez les Français et un soupçon de favoritisme péninsulaire chez les italophones…
• Malgré le charme personnel de certains des managers cités, le vote des filles (près d'un quart des voix : le journalisme horloger n'est plus une affaire de machos) ne diffère pas notablement de celui des garçons.
• Aucun journaliste n'a donné les vainqueurs dans l'ordre, ni dans le désordre, mais une bonne vingtaine ont donné les deux noms.
G.P.
Meilleur manager de l’année 2006 : JEAN-CLAUDE BIVER (Hublot)
• 2e) Jérôme Lambert (Jaeger-LeCoultre, 10 voix).
• 3e) Troisième : Georges Kern (IWC, 5 voix).
• Manquent de peu le podium : Jean-Christophe Babin (TAG Heuer, 4 voix) ; trois voix pour Angelo Bonati (Panerai), Nicolas Hayek (Breguet), Philippe Stern (Patek Philippe), Karl-Friedrich Scheufele (Chopard), Thierry Nataf (Zenith)…
Meilleur communicateur de l’année 2006 : JEAN-CLAUDE BIVER (Hublot)
• 2e) Thierry Nataf (Zenith, 11 voix).
• 3e ex-aequo) Georges Kern (IWC, 5 voix) et Jean-Christophe Babin (TAG Heuer, 5 voix).
• Manquent de peu le podium : Nicolas Hayek (Breguet, 4 voix), Fawaz Gruosi (De Grisogono, 3 voix), Karl-Friedrich Scheufele (Chopard, 3 voix)…
Meilleur innovateur de l’année 2006 : FRANÇOIS-PAUL JOURNE (FP Journe)
• 2e ex-aequo) Jérôme Lambert (Jaeger-LeCoultre, 7 voix) et Jean-Christophe Babin (TAG Heuer, 7 voix).
• 3e ex-aequo) Max Büsser (MB & F, 6 voix) et Richard Mille (Richard Mille, 6 voix).
• Manque de peu le podium : David Zanetta (De Bethune, 5 voix).
LE COMMENTAIRE
DE BUSINESS MONTRES (2007)
Sur le double vainqueur, je ne suis guère étonné. Il a tant donné qu'il est moral qu'il reçoive un peu. Quel autre patron peut se vanter d'avoir quasiment quadruplé son chiffre d'affaires en moins de trois ans (même en faisant la part de l'exagération) ? Il mériterait une Big Bang à son nom en hommage à son incroyable travail : à quand la Biver Bang ?
A propos de l'innovateur : s'il est vrai qu'il est plus pionnier que manager, on ne peut qu'acclamer les avancées décisives qu'il offre à l'art horloger ! Pour ce qui est des dauphins, on remarquera la présence massive des indépendants, des « bébés Cologni » (Richemont) et des stars de LVMH. L'effacement des managers du Swatch Group (leur président excepté) n'en est que plus visible…
Sa spontanéité libérée de toute considération marchande fait la valeur de ce vote. La plupart des journalistes ayant assorti leur vote de commentaires (confidentiels) très intéressants, je dispose des ingrédients d'une étude de marché absolument inédite… Ce vote s'est effectué en liberté – une valeur essentielle pour Business Montres. Les journalistes n'ayant guère eu le temps de se concerter, un consensus clair s'est vite dégagé, qu'il s'agisse des hommes ou des femmes, des juniors ou des seniors, des nouveaux médias ou de la presse écrite, des Européens, des Asiatiques ou des Américains.
Mon grand étonnement : la quasi-absence des « poids lourds » dans ce classement. La « fracture médiatique » est patente, puisqu'il y avait trois noms choisis par 75 journalistes, soit 225 occasions d'être cité. En ne prenant que les trois premières marques européennes (« Top 180 » de Business Montres, publié le 20 décembre 2006) : une seule citation sur 225 pour Patrick Heiniger (Rolex), deux pour Bernard Fornas (Cartier), aucune pour Stephen Urquhart (Omega). Seiko récolte trois votes, mais rien pour Citizen, Fossil, Timex ou Casio. Gênant… Côté stars du Swiss Made : rien pour Swatch, Rado ou Piaget. Un seul vote pour Tissot, Breitling, Franck Muller, Longines, et Bulgari. Troublant… Dans le Top 20 de ce classement exclusif proposé par Business Montres, le grand champion de la popularité est Jean-Christophe Babin (16 votes), loin devant Karl-Friedrich Scheufele (Chopard) et Philippe Stern (Patek Pilippe), qui affichent chacun 7 citations. Ceux que la presse reconnaît comme les meilleurs managers de 2007 ne pointent qu'aux 45ème (Biver) et 99ème (Journe) places de ce Top 180 Marques ! Les « grands » présidents auraient-ils un problème de charisme personnel ? D'image ? De positionnement ? Ces seules interrogations justifieraient une étude d'image. On peut bien entendu incriminer la faiblesse congénitale des journalistes pour ces « grandes gueules de la montre, qui passent leur temps à se mettre en avant » [commentaire off d'un ami manager, vexé d'avoir été négligé par mes chers confrères]…
• Mes regrets personnels : ne pas avoir trouvé dans cette sélection finale quelques personnalités sans doute trop discrètes (Thierry Oulevay, Jérôme DeWitt, Bernard Lederer, Manuel Emch, Frank Müller, Luigi Macaluso, entre autres)…
G.P.