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C x P #02 (accès libre)
Le comment du pourquoi : les petits secrets, les curiosités et les iniquités de l’univers des montres (deuxième épisode)

Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur l’horlogerie, sans jamais oser le demander : c’est 101 questions, pas une de plus ou de moins, et donc 101 réponses en une grosse quinzaine d’épisodes, histoire de ne pas bronzer idiot et de terminer les vacances avec des neurones plus musclés qu’en partant.


À propos de montres, si vous vous demandez pourquoi et si vous cherchez à savoir comment, vous avez frappé à la bonne porte et vous avez de bonnes chances de trouver les bonnes réponses dans notre série estivale « Le comment du pourquoi ». Le « pourquoi » de ce « comment du pourquoi », c’est le plaisir d’apporter 101 réponses aux questions élémentaires que peuvent se poser tous les amateurs de montres, débutants ou même confirmés.

CÉLÉBRITÉS #02

Pourquoi l’honorable Phileas Fogg réussit-t-il à gagner son pari dans Le Tour du monde en quatre-vingt jours

Riche, oisif et célibataire à quarante ans, l’Honorable Phileas Fogg esq. s’ennuyait ferme quand, sur un coup de tête, il décide de boucler un tour du monde en 80 jours. Aventure dans laquelle il s’embarque avec un sac de voyage et le seul Bradshaw Continental Railway, Steam Transit and General Guide. Dans sa poche, une énorme montre en argent – qui, contrairement à la légende, n’est pas désignée par Jules Verne comme une montre de Breguet [alors que l’écrivain cite d’autres horlogers dans ce livre, notamment Leroy et Earnshaw], Phileas Fogg a parié 20 000 livres, la moitié de sa fortune, avec ses amis du Reform Club londonien qu’il arriverait 80 jours plus tard, soit le 21 décembre 1872, à 20 h 45. En chemin, il décompte le temps sur sa montre et il accumule les décalages horaires si bien qu’il est persuadé d’avoir perdu son pari quand il pense devoir se présenter au Reform Club quatre-vingt-un jours plus tard, le 22 décembre à sa montre. Sauf qu’il n’a pas tenu compte du fait qu’en voyageant vers l’Est, il a gagné vingt-quatre heures, soit un jour d’avance : le pari est gagné ! Happy End… Dans ce cas-là, comment la légende de la montre Breguet de Phileas Fogg a-t-elle pu s’imposer ? La responsabilité en revient au maître-horloger britannique George Daniels, qui a écrit cette sottise dans son Art of Breguet (1974), en se trompant d’ailleurs sur le prénom de l’Honorable Mr Fogg, qu’il écrit « Phineas ». Ensuite, tous les ânes ont recopié l’erreur de George Daniels…

EXPRESSIONS #02

Comment faut-il décompter le temps évoqué dans l’expression « Il y a belle lurette » ?

Cette expression un peu désuète signifie « Il y a bien longtemps ». Les dictionnaires divergent pour situer son origine dans le temps, certains parlant du XIIe siècle, d’autres du XIXe siècle ! Dans son Bouquet des expressions imagées (Seuil, 1990), l’historien du langage Claude Duneton nous révèle que la lurette serait une altération des formes régionales « hure » et « hurette » pour « heure » et « heurette » : en Bourgogne, on parle de bellurette pour une « belle petite heure ». On en déduira que la « belle lurette » ne dure que quelques heures. Belle-Lurette est aussi le nom de celle dont est perpétuellement amoureux Gai-Luron, le héros du dessinateur Gotlib (ci-dessous)…

ICÔNES #02

Pourquoi un simple trait d’union peut-il faire passer de la vitrine au poignet des mécaniques très appréciées des anciens empereurs chinois ?

Selon qu’on parle de « Jaquet Droz » ou de « Jaquet-Droz », tout change en matière d’horlogerie. Avec un trait d’union, il s’agit généralement de la famille de Pierre Jaquet-Droz (1721-1790), célèbre horloger neuchâtelois de la fin du XVIIIe siècle, génial créateur d’automates musicaux ou horlogers qui étaient vendus à plusieurs cours européennes et exotiques de l’époque [ses pendules et ses automates se vendaient jusqu’en Chine]. Sans trait d’union, on évoque la marque Jaquet Droz, marque née à la fin du XXe siècle, d’abord comme « marque générique » utilisée pour promouvoir le Swiss Made, puis comme marque de haute horlogerie rachetée par le Swatch Group en 2000 et immédiatement dotée d’une « légende » qui faisait remonter sa création à 1738 (date de l’établissement de Pierre Jaquet-Droz dans son premier atelier de La Chaux-de-Fonds). C’est en 2002 que Manuel Emch lancera le modèle Grande Seconde, devenu emblématique de la nouvelle marque. Cette montre-bracelet Grande Seconde, dont le style est inspiré par une montre de poche anonyme du XVIIIe siècle, présente un cadran qui enlace le compteur des heures et des minutes, décentré vers douze heures, et un compteur hypertrophié des secondes, repoussé vers six heures.

LÉGENDES #02

Comment les légionnaires romains pouvaient-ils, deux millénaires avant nous, porter des « montres » qui affichaient différents « fuseaux horaires » ?

Eh oui, si on définit par « montre » un objet du temps portatif [qu’on le porte en « montre-bracelet », en montre de poche » en « montre de col » ou avec une « châtelaine »], il faut bien admettre cette vérité dérangeante : les légionnaires de l’Antiquité romaine portaient des « montres » – des solaria – capables de donner l’heure dans de multiples fuseaux horaires (révélation Business Montres du 21 juin 2014). Ces mini-cadrans solaires portatifs, dont on n’a encore retrouvé qu’environ 25 exemplaires, pouvaient donner l’heure locale d’une grosse vingtaine de régions de l’Empire, avec une précision horaire de l’ordre de quelques minutes par rapport à nos montres contemporaines, dans des tailles qui pouvaient varier du simple ou double par rapport à nos montres (dessin ci-dessous). Ces objets du temps nomades semblent avoir surtout servi aux officiers et aux marchands. Cette tradition de ces solaria portatives s’est transmise jusqu’à nos jours grâce aux fameux « calendriers de bergers », de forme cylindrique…

MARQUES #02

Pourquoi peut-on dire que la manufacture Omega est née d’une consommation sans modération de… Suze ?

Tout simplement parce que cette Suze n’est pas le célèbre apéritif français à base de gentiane, mais le nom de la rivière du Jura bernois (Suisse) qui serpente en terre horlogère avant de se jeter dans le lac de Bienne, après 47 kilomètres de bons et loyaux services. C’est sur les bords de la Suze que se sont installés bon nombre d’horlogers, dès la fin du XVIIIe siècle, pour profiter de cette source d’énergie. Les frères Louis-Paul et César Brandt, fondateurs de la marque Omega [nom de leur premier calibre commercial à succès : ci-dessous], avaient installé leur manufacture à Bienne, le long du canal de la Suze, qu’ils utilisaient comme force motrice pour les machines de leur usine...

MÉCANIQUES #02

Comment se fait-il que les horlogers se mettent en « ligne » pour mesurer leurs mouvements ?

La « ligne », parfois signalée comme « ligne parisienne » ou comme « ligne du roi de France »), est une ancienne mesure de l’horlogerie mécanique, utilisée depuis le Moyen-Âge. C’est une sous-division du pied, qui équivalait à douze pouces valant chacun douze lignes. Le « pouce » dont il est question ici est le « pouce du roi de France » (2,707 cm). Ces mesures seront abolies lors de l’adoption définitive du système métrique, sous la Révolution française (loi du 19 frimaire An VIII ou 10 décembre 1799). Les horlogers étant d’une nature très conservatrice, voire peut-être même contre-révolutionnaire, ils utilisent encore cette « ligne » (2,256 mm) née sous l’Ancien régime pour donner les dimensions d’un calibre (mouvement) et de son diamètre d’encageage.

ALORS, COMBIEN DE BONNES RÉPONSES, plus ou moins précises et bien argumentées, pour ces six premières questions ? Notez le score de vos bonnes [ou moins bonnes] explications à ces « comment du pourquoi ». Rien n’est ici figé dans le marbre : faites-nous part de vos propres réponses à ces questions et de nos erreurs éventuelles…

LE COMMENT 

DU POURQUOI

Résumé des précédents épisodes, avec les liens pour les retrouver…

❑❑❑❑ C x P #01  : Breguet, Einstein, Breitling, Swatch, Tudor, Knibb (Business Montres du 23 juillet)


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