SANS FILTRE #61 (accès libre)
« Le subconscient raciste des grands benêts de l’horlogerie »
Que de mannequins à la peau foncée dans les nouvelles images que l’horlogerie se donne d’elle-même ! C’est apparemment généreux et sympathique, mais c'est profondément et intrinsèquement raciste…
À la remorque des marques de mode, et notamment sous l’influence des groupes de luxe multi-marques qui ont pris en main les destinées de l’horlogerie, la communication des montres a évolué vers le life style, en ajoutant aux simples images de ses montres (en « soldat » ou en « cobra ») des visuels de montres mises en scène avec des mannequins – ceci même pour les maisons uniquement horlogères les plus rassies dans leurs traditions.
À la remorque des réseaux sociaux, qui ont lancé la mode des wristshots et qui les ont popularisé auprès des amateurs, les maisons d’horlogerie pratiquent désormais les photos « au porter » dans leur communication officielle – ce qui nous offre un joli concours de poignets plus ou moins poilus, avec d’impressionnants effets de manche sur les chemises [avec ou sans rayures ?], les vestes et les petites laines, avec ou sans accessoirisation d’arrière-plan…
À la remorque des médias mainstream et de l’idéologie wokiste venue d’outre-Atlantique que propagent allègrement ces médias, les marques horlogères ont commencé à pratiquer la « diversité » dans leurs visuels en intégrant des représentations croissantes de mannequins de couleur, en pied ou en poignet, du moins pour la communication qui cible les Occidentaux – les marchés orientaux bénéficiant de représentations plus locales et s’avérant rebelles, sinon hostiles, à l’idéologie diversitaire telle qu’on la prône en Europe ou aux États-Unis. À tel point qu’un bon tiers, sinon parfois la moitié des images de montres portées qui sont diffusées par les manufactures horlogères intègrent ainsi des porteurs de montres mélanodermes (« à la peau noire »). Ce qui n’a rien de choquant en soi, et ce qui peut même se révéler plaisant : les montres contrastent mieux avec les peaux noires qu’avec les pâleurs languissantes des Occidentaux leucodermes (« à peau blanche »)…
Le problème est ailleurs, et il est infiniment plus subtil dans le décodage du non-dit de ces visuels diversitaires. On admettra que les images publicitaires sont généralement destinées à mettre les montres en situation, en les présentant dans la vraie vie, avec des personnes qui ressemblent aux publics ciblés. Par définition, Flik Flak utilise des visuels d’enfants, pas des visuels de seniors, de même que Rolex présente des sportifs ou des célébrités, pas des clochards ou des Pygmées ! Il est donc assez logique de voir de jolies dames blondes porter les montres ainsi promues et d’élégants bobos – mâles blancs hétérosexuels de moins de cinquante ans – les accompagner. Le jour où ls horlogers auront conquis la planète Mars, nous verrons des Martiens à peau rouge porter des montres : quoi de plus normal ?
On admettra aussi que les personnes mélanodermes, qu’elles soient africaines, afro-européennes ou afro-américaines, sont loin de représenter une cible commerciale substantielle : l’Afrique ne représente guère que 2 % des exportations de montres suisses et les personnes d’origine africaine n’atteignent pas 10 % des populations leucodermes ciblées. Avec la surabondance des mannequins de couleur, nous ne sommes donc plus face à une volonté de représentation réaliste, mais face à un impératif de moralisation diversitaire, sinon de normalisation visuelle qui peut rappeler le 1984 de George Orwell. Impossible de ne pas en déduire que les représentations de personnes à la peau noire ne relèvent clairement pas d’un quelconque ciblage commercial, mais bien d’une volonté idéologique de promouvoir un fantasme de sociologie alternative, marquée en son temps par le « United Colors » de Benetton…
C’est là que les grands benêts de l’horlogerie laissent parlerl’incroyable racisme de leur subconscient. Involontairement, bien entendu – c’est presque plus grave – mais néanmoins très clairement ! Ce n’est donc pas pour leurs qualités de cibles commerciales que les personnes de couleur sont arraisonnées par la promotion horlogère [jusqu’à occuper une place disproportionnée dans les mises en scène de montres], mais uniquement pour la couleur de leur peau : or, qu’est-ce que le racisme, sinon la priorité donnée à la couleur de la peau pour déterminer la valeur d’une personne ? « Pour les horlogers qui peuvent l’estimer commercialement négligeable si on s’en tient aux chiffres, le “Noir” n’a plus d’intérêt que par et pour la pigmentation de son épiderme », comme nous l’avons récemment noté (Baromontres du 3 avril). C’est littéralement pour lui « faire la peau » qu’on choisit un « Noir » – on ne faisait pas mieux dans l’Alabama des années 1960.
Pire encore que cette focalisation mélanodermique : la repentance masochiste qui sous-tend et qui surinterprète l’ensemble des représentations doloristes attachées à la seule couleur de cette peau – la mémoire de l’esclavage, le souvenir de la colonisation, le blues de l’éternel opprimé, etc. Le racisme visuel du pur et simple code chromatique [celui qui fait préférer le mélanoderme au leucoderme] se double ainsi d’un racisme culturel qui essentialise la peau noire en la victimisant par principe pour créer un réflexe d’empathie autour de la montre. C’est terrifiant…
Rien d’étonnant dans cette dérive wokiste qui débouche immanquablement sur un racialisme délirant, structuré autour d’un argument anti-raciste qui s’appuie en réalité sur un racisme inconscient : on instrumentalise les « Noirs » dans une perspective diversitaire, comme on les instrumentalisait hier en niant leur singularité dans une visée progressiste ou dans une optique missionnaire. Les horlogers perpétuent ainsi des clichés infantilisants ou déshumanisants qui vont très exactement à l’encontre des grands principes affichés : on propage le mal en souhaitant faire le bien – c’est tragique ! Pensez-y la prochaine fois que vous admirez une jolie montre sur un poignet de couleur. Comme on en reparlera, on vous laisse réfléchir là-dessus…
NOS CHRONIQUES PRÉCÉDENTES
Des pages en accès libre pour parler encore plus cash et pour se dire les vérités qui fâchent, entre quatre z’yeux – parce que ça ne sortira pas d’ici et parce qu’il faut bien se dire les choses comme elles sont (les liens pour les cinquante premières séquences sont à retrouver dans l’épisode #60 ci-dessous)…
❑❑❑❑ SANS FILTRE #60 : « Un petit orage pour les marchés financiers, mais un vrai grand choc pour le marché horloger » (Business Montres du 15 mars)
Coordination éditoriale : Eyquem Pons