LIBRE-ÉCHANGE (accès libre)
« Un coup de bluff ridicule et un coup d'épée dans l'eau »
Le 06 / 07 / 2013 à 16:18 Par Le sniper de Business Montres - 1347 mots
La Suisse et la Chine ont signé un accord de libre-échange, qui concerne notamment les montres suisses vendues en Chine. Les droits de douane imposés par les Chinois devraient baisser. Est-ce important et faut-il vraiment s'en réjouir ? Commentaires à chaud de Business Montres à la Radio suisse...
▶▶▶ CHINE-SUISSELa Chine tient plus que jamais le couteau par le manche...
La Suisse et la Chine ont signé un accord de libre-échange, qui concerne notamment les montres suisses vendues en Chine. Les droits de douane imposés par les Chinois devraient baisser. Est-ce important et faut-il vraiment s'en réjouir ? Commentaires à chaud de Business Montres à la Radio suisse...
▶▶▶ CHINE-SUISSELa Chine tient plus que jamais le couteau par le manche... ◉◉◉◉ On en déduira que les Suisses tiennent le couteau par la lame, ce qui n'est pas la situation la plus agréable pour négocier ! La Suisse et la Chine – dont la balance commerciale avec la Suisse est déjà largement bénéficiaire : 7,8 milliards de CHF importés de Suisse, contre 10,2 milliards exportés en Suisse– ont signé ce matin un accord de libre-échange, dont une des conséquences sur l'industrie des montres sera d'abaisser les droit de douane appliqués aux montres suisses vendues en Chine. Sur le papier, la « concession » chinoise n'est déjà pas terrible : 60 % de baisse étalés sur dix ans, dont 18 % de baisse dès la première année. Dans la réalité, ce n'est pas une « concession », mais un enfumage chinois de première grandeur : les droits de douane ne pèsent que pour 3 % dans le total des taxes de distribution appliquées en Chine (infographies ci-dessous). Les accords de libre-échange ne concernent pas les vrais facteurs d'élévation du prix des montres en Chine, pays où les taxes de distribution sont parmi les plus élevées du monde (en moyenne le double de ce qui se pratique en Europe : détails ci-dessous). Et on fera grâce aux lecteurs des autres taxes de distribution : les coûts d'accès au marché chinois sont d'autant plus élevés que les obstacles bureaucratiques se conjuguent aux délires spéculatifs qui ont le consentement au moins passif des marques horlogères suisses : pourquoi acceptent-elles de se soumettre aussi docilement l'extorsion de fonds en bande organisée que constituent les pratiques des malls commerciaux en Chine intérieure comme à Hong Kong ? ◉◉◉◉ De qui se moque-t-on ? À qui veut-on faire croire que cet accord, qui ne concerne pas que l'horlogerie, va permettre d'abaisser le prix des montres suisses vendues en Chine, et donc de favoriser les exportations horlogères suisses vers la Chine – lesquelles ont plongé d'au moins 30 % depuis un an ? Et qui peut accorder le moindre crédit à une aussi ridicule proposition de baisse des droits de douane qui entraînerait une baisse des prix de vente. Une fois de plus, la Fédération horlogère, qui avait fait de cette baisse des droits de douane son cheval de bataille, s'est tout simplement trompé de combat... ◉◉◉◉ En réalité, tout conduit à penser que les Chinois ont manipulé les Suisses pour leur faire signer, en priorité, leur premier accord de libre-échange (ALE) avec un pays de l'Europe continentale : cet ALE avec la Suisse va leur permettre d'entamer dans une position plus confortable les négociations plus musclées qui s'annoncent avec l'Union européenne. Le pétard suisse était mouillé ! On aura noté que Xi Jinping ne s'est pas déplacé pour l'occasion et qu'il a délégué un vague technocrate pour cette signature : la Suisse n'a plus guère bonne presse dans les instances suprêmes du Parti communiste chinois. La Chine tient plus que jamais le couteau par le manche : elle peut faire danser l'industrie horlogère comme elle l'entend. Si on ajoute aux effets nuls de cet ALE sur l'horlogerie les effets ravageurs de la nouvelle « ligne de masse » néo-maoïste de Xi Jinping et les effets déstabilisateurs des prochaines réglementations chinoises sur le tourisme à l'étranger, il est évident que les exportations horlogères vers la Chine ne vont pas se réveiller de sitôt... ◉◉◉◉ Pire encore : cet ALE organise l'arrivée encore plus facile et encore moins chère de nombreux composants horlogers commandés en Chine par les grands donneurs d'ordres suisses. C'est une réelle menace pour la fiabilité et la légitimité du Swiss Made – ce qui s'appelle se tirer une balle dans le pied. On ne parlera pas ici des conditions plus aisées pour les investisseurs chinois qui voudraient intervenir dans l'horlogerie suisse... ◉◉◉◉ C'est de tout ceci dont il était question, ce midi, dans le Journal de 12 h 30 de la Radio suisse : une émission à réécouter en podcast (commentaires en direct de Grégory Pons pour Business Montres : cliquez sur le lien ou sur l'image ci-dessous). Lectures annexes conseillées, nos précédents articles à ce sujet : « Coup de bluff : que la première marque qui baissera ses prix en Chine nous jette la première pierre » (Business Montres du 28 mai), « Sale temps pour les montres suisses : Xi Jinping persiste, signe et même aggrave sa campagne anti-luxe » (Business Montres du 21 juin) et « Globe shopping : la bulle du "shopping touristique" peut-elle se dégonfler ? » (Business Montres du 25 juin)... D'AUTRES SÉQUENCES RÉCENTESDE L'ACTUALITÉ DES MONTRES ET DES MARQUES...